Maryse Delente
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Maryse Delente quitte en 1985 le Ballet de Lyon où elle était soliste.
Crânement, elle se lance dans l’aventure.
Elle ne possède rien, sinon du talent, une volonté farouche et un tout récent
passé de chorégraphe : en 1982, sa première pièce, Automne, lui a valu le
grand prix du concours chorégraphique de Cologne ; la deuxième a vu le
jour à l’Opéra de Nord : la troisième, Symphonia da Requiem, trio de
femmes déchirant et sartrien, commandée par Françoise Adret, a été écrite
pour le Ballet de Lyon.
C’est sans doute ce palmarès déjà éloquent et l’ouverture d’esprit de la
jeune artiste en faveur d’un travail sur le terrain avec le public, qui incitent
le Maire de Vaulx-en-Velin à lui offrir un superbe studio dès 1986, une
subvention de cent mille francs et le statut de chorégraphe résidente auprès
du centre culturel de la ville. C’est beaucoup et terriblement maigre quand
on veut faire vivre une compagnie aussi réduite soit-elle.
Alors, si Maryse Delente, en une décennie, crée une douzaine d’ouvrages,
elle déploiera tout autant d’énergie à assurer un statut décent à ses
interprètes.
Cette chorégraphe est atypique. Par sa politique qui l’a vu bâtir une
compagnie d’excellentes danseuses et tisser un solide réseau régional plutôt
que de rechercher à tout prix une reconnaissance parisienne.
Dans son style surtout, longtemps à contre courant de la tendance générale,
car elle œuvre dans une veine lyrique et expressionniste où, sainte ou
démoniaque, la figure féminine aura longtemps été souveraine, où de
longues chevelures ondulées s’affolent sous l’effet d’une sensualité
exacerbée.
Dans ces corps qui ploient sous les effets de la passion, dans ces robes
vertueuses qui tournoient en tempête, dans ces mouvements tout de
passion violente, dans ce goût d’un certain hiératisme, on retrouve de
lointaines affinités avec la dramaturgie grahamienne.
Maryse Delente s’enivre de danse pure. Elle revisite aussi, selon la formule
consacrée, quelques-uns des hauts-faits du répertoire. Bien après
Don Quichotte, ce sera le cas de Giselle ou le mensonge romantique,
dont le titre dit bien l’approche désenchantée, et qui sera un grand succès,
ou encore du Sacre du Printemps.
Prolixité du geste, générosité de l’écriture, le tout coloré par une vision
acide des rapports qui régissent les hommes et les femmes entre eux, voilà
l’essentiel du style de Delente.