
Dossier contributions sur la politique nutritionnelle - janvier 2016 5
INTRODUCTION
Alimentation : les enjeux de politiques publiques
Daniel Nairaud, Directeur général du FFAS
Dans sa déclaration du 14 décembre 2000, le Conseil de l’Union européenne « souligne que de nombreuses poli-
tiques communautaires, et notamment dans les domaines de la santé publique, de l’agriculture, de la pêche, de la
recherche, des transports, de la protection des consommateurs et du marché intérieur, ont un tel impact que les
politiques nutritionnelles nationales ne peuvent être pleinement efcaces que si les aspects relatifs à la santé nutrition-
nelle sont pris en compte dans la dénition et la mise en œuvre des politiques communautaires concernées ». Cette
déclaration montre tout d’abord que des politiques qui n’ont pas les mêmes objets ou nalités peuvent concourir
à un même objectif dès que des articulations utiles sont prévues. Elle montre aussi que la nutrition est devenue un
enjeu de société.
La France a donné suite à cette déclaration le 31 janvier 2001 lorsque le ministère de la santé a lancé ofciellement
le Programme national nutrition santé (PNNS). Les actions mises en œuvre par le PNNS ont comme nalité de pro-
mouvoir, par l’alimentation, les facteurs de protection et de réduire l’exposition aux facteurs de risque vis-à-vis des
maladies chroniques et de diminuer l’exposition à des problèmes spéciques au niveau des groupes à risque.
Des objectifs qui ne pourront être atteints que si les politiques convergent. Ainsi, par exemple, la politique agricole
pourrait contribuer à améliorer l’accessibilité et la disponibilité des fruits et légumes ; les politiques éducatives par-
viendraient à inculquer dès le plus jeune âge les repères de consommation pertinents ; les politiques de la ville, des
loisirs et d’aménagement du territoire augmenteraient les équipements et les services permettant de lutter efcace-
ment contre la sédentarité.
Dans les pays où l’autosufsance alimentaire paraît installée durablement, deux courants de pensée distincts se
sont développés en ce qui concerne les politiques publiques et plus largement le rôle que doit jouer la puissance
publique dans la gouvernance du secteur alimentaire :
- celui qui prône la responsabilité de l’individu et milite pour la liberté du marché ;
- celui qui réclame la protection des individus compte tenu des risques de toute nature qui les menacent, incluant
la publicité, une présentation sans cesse plus attractive des aliments dans les linéaires de la grande distribution à
laquelle il serait impossible de résister.
Le deuxième courant en appelle à la force contraignante de la loi et de la réglementation. Il serait plus développé
en France que dans d’autres pays en raison d’une culture étatique qui conduit à légiférer quand d’autres sociétés
résolvent leurs difcultés par la voie contractuelle. Ainsi, certaines personnalités demandent donc, pour lutter contre
la prévalence croissante de l’obésité, d’encadrer strictement la publicité ; d’interdire toute publicité par l’image pour
les produits alimentaires transformés ; d’instaurer pour les produits riches en sucres, en sel ou en matières grasses,
un taux de TVA plus élevé ; de mettre en place des programmes de dépistage précoce et systématique ; etc.