Les données d’incidence proviennent de 9 registres de cancer
recensant systématiquement les tumeurs urologiques. Les périodes
couvertes varient avec l’ancienneté des registres. Elles figurent
pour chaque registre sur la carte de la Figure 1.
Tous les cas de cancers invasifs de la vessie (tumeurs infiltrantes )
quel que soit leur type anatomopathologique ont été utilisés (code
188 de la CIM 9 et C67 de la CIM-10) en revanche les tumeurs non
invasives, en particulier les in-situ et les tumeurs urothéliales super-
ficielles classées pTa. n’ont pas été prises en compte dans cette
modélisation. (les problèmes posés par la difficulté à juger de l’in-
filtration et de la malignité dans le cas des tumeurs urothéliales sont
abordés dans la discussion).
La méthode utilisée est basée sur la modélisation du rapport morta-
lité / incidence qui est observé dans les départements où existe un
registre des cancers. L’application de ce modèle aux zones où seule
la mortalité est connue permet de calculer le nombre de cas incident
dans les régions où il n’existe pas de registre. Cette modélisation est
exposée de façon détaillée dans un article paru récemment [7]. Par
rapport aux méthodes précédemment employées, celle utilisée ici
présente la particularité de tenir compte du sexe, de l’âge et de l’an-
née de naissance des sujets. Ceci permet d’obtenir un calcul de l’in-
cidence par âge pour chaque cohorte de naissance donnant ainsi une
représentation plus exacte de l’évolution du risque pour un même
individu au cours de sa vie.
Les données de mortalité ont été fournies par le service commun de
l’Inserm traitant les certificats de décès (CepiDC). Tous les décès
dont la cause principale était un cancer de la vessie survenus entre
1978 et 1997 ont été pris en compte.
RESULTATS
Incidence et mortalité observées entre départements ayant un
registre
Les figures 2 et 3 présentent les taux comparatifs d’incidence et de
mortalité (standardisés sur la population mondiale) dans les diffé-
rents départements disposant d’un registre. Chez l’homme, le can-
cer de la vessie était marqué par d’assez fortes disparités d’inciden-
ce entre les départements français. L’incidence la plus élevée a tou-
jours été observée dans le département du Bas-Rhin. Cette inciden-
ce élevée dans le Nord-Est de la France a été confirmée par les chif-
fres fournis depuis la fin des années 80 par le registre du Haut-Rhin.
Jusqu’au début des années 1990, une autre zone d’incidence élevée
pouvait s’observer aussi dans le Sud (Tarn et Hérault). Sur l’en-
semble de la période, on a observé une diminution des différences
initiales liée à une augmentation de l’incidence dans les zones où
les taux étaient les plus bas mais aussi à une diminution dans le Tarn
pour la période récente.
Chez la femme, les observations que l’on peut faire en termes
de disparité régionale sont assez proches de ce que l’on vient de
décrire chez l’homme, mais l’incidence est beaucoup plus faible
et l’on n’observe pas de regroupement vers une valeur moyen-
n e .
L’hétérogénéité de la mortalité est moins grande que celle de l’inci-
dence (Figure 3) et les zones de forte incidence ne sont pas les
zones où la mortalité est la plus élevée. On assiste aussi à un regrou-
pement dans la période récente.
Tendances évolutives entre 1978 et 2000 - Tendances par cohor-
te de naissance (Tableau I)
La probabilité pour un homme né en 1913 d’avoir un cancer de la
vessie, entre 15 et 75 ans, était de 1,83% (taux cumulé), elle serait
de 3,31% pour un homme né en 1953. Pour une femme née en 1913
la probabilité n’était que de 0,32% et elle ne serait plus que de
0,21% pour une femme née 40 ans plus tard.
L’évolution du risque de développer un cancer vésical en fonction
de la période où l’on est né semble évoluer de façon différente dans
les deux sexes. Pour un homme, le risque est d’autant plus élevé
qu’il est né à une période récente. Toutefois cette augmentation
nette pour les sujets nés des années 1913 à 1928 s’infléchit légère-
ment pour les cohortes postérieures à 1928.
L’évolution de l’incidence chez les femmes est différente. Elle bais-
se régulièrement lorsque l’on va des cohortes les plus anciennes
vers les plus récentes. Une diminution du risque par cohorte s’ob-
serve aussi pour la mortalité dans les deux sexes. Chez la femme, la
réduction du risque de décès est régulière, elle est un peu plus rapi-
de que celle observée pour l’incidence. Chez l’homme, la diminu-
tion du risque de décès s’est accélérée pour les sujets nés après
1928.
Tendances chronologiques de l’incidence et de la mortalité
(Tableaux II et III)
L’incidence du cancer de la vessie a très légèrement augmenté chez
les hommes au cours des deux dernières décennies comme le mon-
tre l’évolution des taux standardisés (st mondial). Entre 1975 et
2000, l’augmentation annuelle moyenne est de 1,14%, mais elle
était en fait plus importante au début et s’est infléchie après 1990.
Le nombre de nouveaux cas estimé pour la France est passé de 5591
en 1980 à 8986 en 2000. On observe aussi une augmentation du
nombre de cas chez les femmes, il est passé de 1593 en 1980 à 1785
en 2000. Mais cette augmentation ne tient qu’à l’évolution de la
population (augmentation et vieillissement) car l’incidence a globa-
lement diminué durant toute cette période. Cette baisse est en
moyenne de 0,5% par an.
Dans le même temps, le risque de décès a régulièrement diminué,
tant chez les femmes que chez les hommes. Cette baisse correspond
à une diminution annuelle moyenne de 0,18% chez l’homme et de
0,12% chez la femme. Malgré cette baisse, et toujours du fait de l’é-
volution de la population, le nombre de décès a augmenté, il est
passé pour les hommes de 2701 en 1980 à 3451 en 2000 et pour les
femmes de 895 à 1107.
T. Matsuda et coll., Progrès en Urologie (2003), 13, 602-607
603
Figure 1. Registres de cancers ayant fourni des données d’incidence.