Du libre échange à l`union économique et monétaire

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Du libre échange à l’union économique et monétaire
Introduction : L’Union Européenne : nécessité économique ou
construction politique ?
I) De la construction économique…..
1 La zone de libre échange
2 L’union douanière
3 Le marché commun
II) A la construction politique ?
1 L’union économique
2 L’union économique et monétaire
3 L’union politique
Conclusion : Les étapes de construction et la démocratie
Introduction : L’Union Européenne : nécessité économique ou
construction politique ?
La construction européenne est souvent présentée comme une évidence
économique qui ne se discute pas.
Chaque étape a l’air de suivre logiquement et nécessairement l’étape
précédente.
Or, ce n’est pas si évident, et certaines zones économiques ont déjà fait le
choix de ne pas aller plus loin dans le processus d’intégration. On citera ici
l’exemple de l’ALENA, l’Association de Libre Echange Nord Américaine
qui réunit les Etats-Unis, le Canada et le Mexique.
La construction européenne est donc à la fois le fruit de nécessités
économiques, mais aussi d’intérêts économiques et de volonté politique.
Comme toute construction politique elle n’est donc pas absolument
évidente et nécessaire, elle aurait pu s’arrêter à l’une de ces étapes, sans que
cela ne paraisse un scandale économique.
I) De la construction économique…
1 La zone de libre échange
La zone de libre échange se définit comme un espace géographique à
l’intérieur de laquelle on instaure une libre circulation des produits
(uniquement), sans limitations (quotas) ni droits de douane.
Bien entendu cette construction se fait elle-même par étapes : tous les
produits ne sont pas concernés en même temps.
L’objectif de cette zone est donc de faciliter des échanges intra-zone, et
d’éviter que des pays voisins se livrent à des guerres commerciales.
Cette zone va également faciliter les implantations d’entreprises dans les
autres pays, puisqu’elles pourront exporter leurs produits du pays
d’accueil vers le pays d’origine, à l’exemple des « Maquilladoras », les
entreprises américaines installées à la frontière du Mexique.
La Zone de libre échange est actuellement la forme la plus répandue de
construction d’un espace économique.
Outre l’ALENA, on peut citer le MERCOSUR qui réunit une partie des
pays d’Amérique du Sud, l’ASEAN pour les pays d’Asie du Sud-est…
Il faut remarquer que le Traité de Rome (25 Mars 1957) prévoyait bien
une création initiale d’une zone de libre échange, même si l’objectif final
était de parvenir au marché commun.
La zone de libre échange présente néanmoins l’inconvénient de ne pas
empêcher des pays membres de préférer commercer avec des pays non
membres.
2 L’Union douanière
Il s’agit d’inciter les pays à échanger principalement entre eux.
On ajoute au principe de libre échange un tarif douanier extérieur commun
applicable aux pays non membres.
A priori, les produits de la zone sont donc avantagés par rapport aux
produits des pays non membres. On ajoute souvent à cet avantage la règle
de la préférence communautaire : quand un pays à le choix, il doit préférer
les produits de la zone, sous peine de sanctions.
Pour l’Allemagne, cette Union douanière a constitué dans la 2° moitié du
XIX° la 1° étape de sa construction politique, ce qui sert souvent de
référence pour l’Europe.
Dans le cadre européen, la construction de union douanière a été achevée
en 1968.
Elle fait apparaître de nouveaux problèmes :
- que faire pour les pays membres qui ont depuis longtemps
l’habitude d’échanger avec des pays non membres ? Ce sera le problème à
partir de 1973 du Royaume-Uni et de ses échanges avec le Commonwealth :
exemple du mouton Néo-Zélandais.
- quelles relations la zone doit-elle entretenir avec le reste du monde, et en
particulier quel doit-être le niveau des droits de douane applicables à
l’extérieur ? Ce sera le problème de la politique agricole commune dans ses
relations avec les Etats-Unis par exemple.
- cette construction peut-être en contradiction avec des règles
commerciales internationales : exemple des accords du GATT (accord
général sur les tarifs douaniers et le commerce) qui vont réglementer le
commerce international de 1947 à 1994 (En 1995 l’Organisation Mondiale
du Commerce succède au GATT).
Pour les entreprises, cette construction peut poser problème : elles sont
incitées à privilégier le marché interne, mais elles se heurtent encore à de
nombreux obstacles pour s’installer où elles le désirent.
3 Le Marché commun
Il s’agit d’ajouter une étape perçue comme décisive à la construction
économique : la libre circulation des facteurs de production, c’est à dire des
hommes, du capital productif et des capitaux financiers.
On va donc cette fois créer un marché commun, dont les avantages
semblent être les suivants :
- le marché commun c’est désormais 492 millions de
consommateurs, ce qui permet aux entreprises de bénéficier d’économies
d’échelle importantes et donc de pouvoir à la fois baisser les prix et réaliser
des profits.
Ce phénomène est d’autant plus vrai que l’absence de frontières limite les
temps de transport, les droits de douane, et les frais de change en matière
monétaire (pour la zone €). Il faut alors se rappeler que pratiquement 60%
des échanges des pays de l’UE se font à l’intérieur de l’UEM.
- pour le consommateur, le marché commun assure une plus grande
diversité de choix, des prix généralement plus bas et surtout ils peuvent
comparer pour acquérir les biens les plus avantageux, des caractéristiques
de sécurité et d’hygiène communes (les normes européennes).
- pour les travailleurs, et avec quelques restrictions, le marché
commun permet de travailler dans le pays de son choix, de faire des études
(Erasmus), de voyager et de s’installer où il souhaite. On pourra noter par
exemple l’équivalence des diplômes entre pays européens avec le système
LMD.
- le marché unique repose également sur l’idée de la supériorité de la
concurrence sur les monopoles : ouverture des marchés publics à la
concurrence (ex des télécommunications), amendes aux monopoles
excessifs (Microsoft).
- Enfin, le marché commun (qui dés lors va devenir unique) doit
permettre l’harmonisation des règles d’hygiène et de sécurité, des produits,
des lois sur la concurrence. Il s’agit de ce que l’on appelle la « concurrence
libre et non faussée)
Le marché commun représente donc l’étape considérée à l’époque
comme ultime de l’intégration économique. La réalisation de cette étape
sera décidée en 1985 et mise en place par l’Acte Unique Européen en
1986. Elle s’achèvera en 1990.
La question s’est alors posée : fallait-il aller plus loin ?
Cette question se posait dans un contexte politique particulier : celui de la
chute du Mur de Berlin et de la réunification de l’Allemagne.
Il faut aussi indiquer qu’il a semblé difficile d’avoir un marché commun, et
des politiques économiques différentes. Mais ce n’est pas impossible.
Le choix de passer à l’étape suivante fut donc beaucoup plus un choix
politique qu’économique, même si nous rappelons que les deux ne sont pas
à priori contradictoires.
II) A la construction politique
C’est donc à partir du début des années 1990 que les dirigeants européens
décident de faire franchir à la construction européenne une étape décisive.
Progressivement la construction européenne va passer de « nécessités »
économiques (discutables) à des objectifs d’unité politique.
On va donc substituer au terme de marché le terme d’union.
1 L’Union économique
Il s’agit de rajouter au marché commun l’harmonisation des politiques
économiques et l’adoption de politiques communes. Il y a désormais un
projet de bâtir un ensemble commun.
- l’harmonisation des politiques économiques sera matérialisée par
les critères de convergence du Traité de Maastricht (1992) qui seront
complétés par le Traité d’Amsterdam (1997). Les pays européens sont
donc tenus d’adopter la même politique économique, ce qui est
historiquement nouveau et pose la question du choix de la politique.
- l’adoption de politiques communes peut-être symbolisée par
« l’agenda 2000 » adopté en Mars 2000 au Sommet de Lisbonne qui
souhaite par exemple fixer le niveau des dépenses de Recherche et
Développement à 3% du PIB de chaque Etat (la France en est à 2,2%....).
Cette Union économique pose beaucoup de questions (liste non
exhaustive):
- quelle politique choisit-on et qui la choisit ?
- ces politiques économiques peuvent-elles être adaptées à tous les
pays et à toutes les situations ?
- comment peut-on modifier ces politiques en cas de difficultés d’un
pays ou de plusieurs pays ?
- les politiques communes sont-elles nécessaires au fonctionnement
d’un marché commun ?
- est ce vraiment à l’économie de définir un espace politique ? ….
Il faut reconnaître que toutes ces questions n’ont pas été clairement posées
au moment du Référendum sur le Traité de Maastricht.
Au moment de ce référendum l’impression était plutôt que la question était
: êtes vous pour ou contre l’Europe et êtes vous pour ou contre l’Euro ?
2 L’Union Economique et Monétaire
Il s’agit d’aller encore plus loin, et d’ajouter à l’Union économique le
principe de fixité absolue des monnaies de l’Union entre elles. Cet objectif
est atteint en 1999.
Il peut sembler logique que des pays qui ont les mêmes politiques aient des
monnaies stables entre elles. Mais ils s‘interdisent alors toute marge de
manœuvre.
A la suite de cette fixité, on peut décider trois choses :
- en rester là : chaque pays conserve sa monnaie et aucune monnaie
supplémentaire ne voit le jour. C’était techniquement faisable, même si ce
n’est pas le plus pratique pour les échanges.
- décider du passage à une monnaie commune : chaque pays
conserve sa monnaie, mais on ajoute pour les échanges intra-zone une unité
de compte commune (que l’on peut appeler une monnaie commune).
Il faut remarquer qu’actuellement les pays membres de l’Union Européenne
qui n’ont pas adopté l’euro ont l’euro comme monnaie commune aux
autres pays mais pas comme monnaie unique.
- décider du passage à une monnaie unique : les pays qui le peuvent
(respect des critères) doivent (sauf exception) abandonner leur monnaie
pour n’en garder qu’une. C’est ce choix qui a été fait.
Ce choix semble résulter plus d’une volonté politique (sentiment
d’appartenance à un ensemble, contrepoids aux Etats-Unis…) que d’un
intérêt économique très supérieur à la monnaie commune.
Nous aurons également l’occasion de montrer que ce choix est un « choix
de puissance à l’envers » (l’expression est de Jacques Attali). Pour résumer,
les pays à monnaie faible (dont la France) ont réussi à imposer ce choix aux
pays à monnaie forte, qui n’avaient guère besoin d’une monnaie unique.
3 L’Union politique
C’est la dernière étape du processus d’intégration. Elle peut se faire ellemême en plusieurs phases :
- définition d’une citoyenneté européenne, avec passeport,
reconnaissance juridique internationale et aide de l’Union en cas de
problème, symboles d’Union : hymne, drapeau, devise….
- abandon par les Etats de part de plus en plus importantes de
décisions politiques au profit des institutions européennes.
- définition juridique d’un « nouvel Etat », dont l’existence serait
décidée par référendum. Ce nouvel Etat pourrait être :
* Soit une Fédération : les Etats membres abandonnent toutes leurs
souverainetés en matière de défense, de représentation diplomatique, de
désignation des gouvernants…et ne conservent que des prérogatives
d’ordre sociales et éducatives, ainsi que certaines prérogatives fiscales et
législatives. Aucune de ces prérogatives ne peut-être contraire à celles de
l’Union.
*Soit une confédération : les Etats membres conservent la plus grande
partie de leurs prérogatives, et ne concèdent à la Confédération que des
pouvoirs de représentation diplomatique et de défense nationale.
On remarquera que la distinction Fédération/Confédération n’est pas des
plus nette; disons que la Fédération est un espace politique qui semble plus
intégré que la Confédération.
Remarquons enfin que le terme de « Constitution européenne » était
inadapté au texte qui devait être adopté, et ce pour au moins deux raisons :
- une constitution doit être adoptée par l’ensemble d’une
population, ce qui suppose que la notion de population européenne puisse
exister et qu’elle puisse voter de façon indépendante de l’appartenance
étatique.
- une constitution est un ensemble de textes qui organisent la vie
politique d’un Etat. Une constitution n’a pas pour vocation de définir des
politiques économiques et sociales, à l’exception de quelques grands
principes.
A l’occasion de l’Union Politique une même question se pose : est ce une
étape totalement indispensable, ou s’agit-il d’un « plus », certes important,
mais qui n’ a pas de caractère de nécessité absolue, et qui doit donc pouvoir
être décidé en toute liberté.
Conclusion : construction européenne et démocratie
La construction européenne nous pose deux problèmes en matière de
démocratie :
- en admettant même que les étapes de la construction économique
aient été parfaitement indispensables (ce qui reste à discuter), n’était-il pas
opportun d’en discuter avec la population et de lui demander son avis ?
- la construction européenne et ses enjeux est-elle si difficile à
comprendre qu’elle opposerait d’un coté les « intelligents » toujours
naturellement pro-européens, et les « incompétents » (ou démagogues ou
ignares…au choix), ne comprenant rien (au mieux) ou étant anti-européens
(au pire) ?
Dates d’adhésion et donc liste des pays membres de l’Union
Européenne
Europe des six : Traité de Rome 25 Mars 1957 : France,
Allemagne (de l’ouest), Italie, Belgique, Pays-Bas,
Luxembourg
Europe des 9 : 1973 : Irlande, Danemark, Royaume-Uni
Europe des 10 : 1981 : Grèce
Europe des 12 : 1986 : Portugal, Espagne
Europe des 15 : 1995 : Suède, Autriche, Finlande
Europe des 25 : 2004 : Pologne, Lituanie, Lettonie, Estonie,
Slovénie, Slovaquie, République Tchèque, Hongrie, Malte,
Chypre
Europe des 27 : 2007 : Roumanie, Bulgarie
En italique souligné : les 13 pays ayant l’euro comme monnaie
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