ECOLE DES HAUTES ETUDES EN SCIENCES SOCIALES
N° attribué par la bibliothèque
2002
THÈSE
Pour obtenir le grade de
DOCTEUR DE L'EHESS
DISCIPLINE
SOCIO-ECONOMIE DU DEVELOPPEMENT
Par
Cédric DURAND
Le 20 décembre 2002
TITRE
UNE ANALYSE INSTITUTIONNALISTE DE LA COORDINATION
INDUSTRIELLE ETUDE DES TRANSFORMATIONS DE LA
MÉTALLURGIE RUSSE (1992-2001)
Directeur de thèse :
Jacques SAPIR
JURY
M. Bernard CHAVANCE, Professeur à l'Université Paris VII Denis Diderot
M. Yves COHEN, Directeur d'études à l'EHESS
M. Pascal PETIT, Directeur de recherche au CNRS, CEPREMAP (Rapporteur)
M. Jacques-Laurent RAVIX, Professeur à l'Université de Nice - Sophia Antipolis
(Rapporteur)
Mme Catherine SAMARY, Maître de conférences à l'Université Paris IX Dauphine
M. Jacques SAPIR, Directeur d'études à l'EHESS, (Directeur de Thèse)
1
A Valcivières,
A tous ceux et toutes celles qui n'achèvent pas leur thèse.
Cette thèse est née d'une histoire personnelle. Si je me suis attaché au milieu des années
1990 à la Russie et à la ville de Lipeck, où est établi un des plus importants combinats
métallurgiques du pays, c'est grâce à Natacha. Sans elle et sans la bienveillance de Boris
Nicolaevitch, Ludmilla Grigorevna, Claude, Vladimir et Boris Solodki, le projet de ce
travail n'aurait même pas été formulé. Sans l'aide, le soutien et l'affection qu'ils m'ont
portée pendant toutes ces années, il ne se serait pas réalisé.
Je tiens à remercier chaleureusement Jacques Sapir pour l'attention qu'il a porté à mon
travail. L'enthousiasme avec lequel il m'a aidé à construire mes problématiques et ses
critiques toujours constructives ont rythmé la progression de ma recherche.
Magali, Yogi, Charles et Jeanne me furent d'un secours décisif dans la dernière ligne
droite, tout comme le délicat « Oh Yoko » de John L.. Solidaires jusque dans les affres
matinales du bouclage, Jeanne et Charles m'offrirent de conclure dans la joie.
Ce travail doit beaucoup aux discussions que j'ai pu avoir avec les enseignant-e-s et les
chercheur-se-s de Paris VII et à l'équipe du CEMI. Un merci particulier à Bernard
Chavance, Laila Porras, Emmanuelle Paquet, Gaëlle Courtaux, Petia Koleva,
Abder Doulazmi, Mathilde Mesnard, Julien Vercueil, Anouk Jourdan et Yves Zlotowski.
Merci également aux collègues russes qui m'accueillirent à l'INP-RAN à Moscou et à
Karine Clément.
Cette thèse ne se serait pas achevée sans ces multiples coups de pouce amicaux de Thibaut,
Marion, Loïc, Jean-Robin, Mélanie, Martin, Olivier-s, Sébastien, Fabien, Cécilia, Faïz.
Relectures, remarques, mais aussi discussions, oreilles attentives ou encouragements, il y a
un peu de chacun d'eux dans ce volume. Comme il y a un peu de chacun de ces ami-e-s
laissé-e-s en Russie : Macha, Slavic, Jenia, Galia et Vadim, dont le vif souvenir m'habite
toujours.
La curiosité qui m'a conduit à entreprendre cette recherche et m'a tenu en haleine doit
beaucoup aux militants que je n'ai cessé de côtoyer depuis 1995. Sans qu'il soit possible de
tous et toutes les citer, camarades et ami-e-s, qu'ils reçoivent ici collectivement l'expression
de ma profonde gratitude. Leur refus de toute forme de résignation est une formidable
invitation à tenter de comprendre le monde qui nous entoure.
2
Sommaire
INTRODUCTION GÉNÉRALE........................................................................................6
PROBLÉMATIQUE.................................................................................................................................................7
MÉTHODOLOGIE..................................................................................................................................................9
ENQUÊTE DE TERRAIN........................................................................................................................................11
PREMIÈRE PARTIE........................................................................................................16
CHAPITRE I - UN PARADIGME INSTITUTIONNALISTE......................................17
I. QUELLE ANALYSE DU COMPORTEMENT ÉCONOMIQUE HUMAIN ?..............................................................................23
A. Les limites de l'individualisme méthodologique......................................................24
B. La possibilité de la décision dans un univers décentralisé.....................................31
C. Interaction stratégique et comportement d'observation des règles........................40
II. LES INSTITUTIONS.........................................................................................................................................46
A. Pourquoi les institutions ?.......................................................................................48
B. Une taxonomie des institutions...............................................................................61
III. LA DYNAMIQUE INSTITUTIONNELLE................................................................................................................74
A. Comment émergent les institutions ?......................................................................75
B. Evolutionnisme et histoire......................................................................................98
CHAPITRE II - LA COORDINATION INDUSTRIELLE..........................................119
I. LE PROBLÈME DE LA COORDINATION DANS L'ANALYSE ÉCONOMIQUE.....................................................................120
A. Problématique de l'échange et problématique de la production...........................121
B. Analyse comparative des principaux modes de coordination de l'économie........139
II. ENJEUX ET DÉTERMINATIONS DE LA COORDINATION INDUSTRIELLE.......................................................................156
A. Une interprétation institutionnaliste des rapports d'exploitation.........................159
B. La place de la technologie dans les forces productives industrielles...................173
III. INTERDÉPENDANCE DES NIVEAUX DE LA COORDINATION INDUSTRIELLE ..............................................................199
A. Les deux pôles de l'espace industriel : la firme et le système productif ...............200
B. Quelles catégories pour appréhender l'espace industriel méso-économique ?....208
C. La régulation de branche .....................................................................................214
CHAPITRE III - CRITIQUE DE L'ÉCONOMIE POLITIQUE DE LA
TRANSITION .................................................................................................................228
I. LA NATURE ÉCONOMIQUE DU SYSTÈME SOVIÉTIQUE ...........................................................................................235
A. Le système économique soviétique : une firme géante ?.......................................239
B. L'entreprise soviétique existe-t-elle ? ...................................................................258
C. Rapports de propriété et rapports monétaires......................................................273
II. LES FONDEMENTS DE LA MARCHANDISATION BRUTALE .....................................................................................293
A. La libéralisation des prix, l'ouverture extérieure et la stabilisation
macroéconomique étaient-elles des mesures récessionnistes ?.................................298
B. Les privatisations sont-elles un gage de bon gouvernement d'entreprise ?..........315
CONCLUSION DE LA PREMIÈRE PARTIE.............................................................347
DEUXIEME PARTIE......................................................................................................356
INTRODUCTION DE LA DEUXIÈME PARTIE........................................................357
CHAPITRE IV - LE CHOC DE LA DÉPLANIFICATION .......................................360
(1992-1998) .......................................................................................................................360
3
I. ORGANISATION DE LA BRANCHE ET ÉVOLUTION DE LA PRODUCTION......................................................................362
A. La production du métal.........................................................................................362
B. Le poids des intrants et du transport dans les coûts de production .....................381
C. La demande intérieure de métal : l'industrie métallurgique légère et les autres
consommateurs de métaux.........................................................................................388
II. UNE CRISE DE COHÉRENCE...........................................................................................................................396
A. Réorganisation des relations industrielles et des finalités de la production.........398
B. La détérioration de la position des salariés..........................................................412
III. UNE TRANSFORMATION PRÉDATRICE..............................................................................................................424
A. Les rapports de propriété issus des privatisations................................................426
B. Des formes prédatrices d'appropriation du surplus..............................................437
C. Mode de régulation transformationnel de la branche..........................................444
CHAPITRE V - L'AFFIRMATION D'UN MODÈLE PRODUCTIF RENTIER
(1999-2001)........................................................................................................................463
I. APRÈS LA CRISE FINANCIÈRE DE 1998, UNE NOUVELLE DONNE POUR LA MÉTALLURGIE RUSSE ?................................465
A. L'impact favorable de la dévaluation pour les firmes métallurgiques..................466
B. Un vaste mouvement de concentration sous l'égide des grands combinats et du
secteur énergétique....................................................................................................474
II. L'AFFIRMATION D'UNE LOGIQUE RENTIÈRE.......................................................................................................480
A. Des traits communs aux entreprises de la branche ..............................................482
B. L'appareil de production soviétique, une source de rente.....................................488
III. LES FONDEMENTS CORPORATISTES DE LA CONSERVATION DE LA RENTE................................................................494
A. L'hypothèse corporatiste.......................................................................................495
B. D'un corporatisme local à un corporatisme national ..........................................502
IV. L'INSERTION DU MODÈLE PRODUCTIF RENTIER DANS LE RÉGIME D'ACCUMULATION ÉMERGENT.................................517
A. L'impact de l'orientation de l'investissement vers les secteurs exportateurs .......518
B. L'exigence d'un Etat de droit pour les affaires économiques ...............................523
CONCLUSION GÉNÉRALE.........................................................................................539
ANNEXES.........................................................................................................................547
ANNEXE I : CARTE DES PRINCIPAUX SITES DE PRODUCTION CITÉS............................................................................548
ANNEXE II : EVOLUTION DE LA PRODUCTION MONDIALE D'ACIER ET D'ALUMINIUM (1990-2000)...............................550
ANNEXE III. PORTRAIT D'OLEG DERIPASKA PARU DANS BUSINESS WATCH..............................................................551
SOURCES.........................................................................................................................553
I. BIBLIOGRAPHIE............................................................................................................................................554
II. TITRES DE LA PRESSE ET SITES INTERNET UTILISÉS...........................................................................................594
III. LISTE DES ENTRETIENS...............................................................................................................................596
IV. CONVENTIONS DE TRANSLITTÉRATION ET DE TRADUCTION.................................................................................598
TABLE DES ILLUSTRATIONS....................................................................................599
TABLE DES MATIÈRES................................................................................................601
4
Introduction Générale
Les interrogations actuelles sur l'impasse des politiques de développement menées sous la
direction des institutions financières internationales, les difficultés des transformations
dans les pays d'Europe Centrale et Orientale (PECO) et les fragilités nées de la
financiarisation des économies, interviennent après une décennie paradoxale pour la
discipline. Elle voit parallèlement s'affirmer des convergences extrêmement fortes au
niveau mondial en matière de politique économique et un étiolement de la cohérence du
paradigme dominant qui se traduit par la multiplication des espaces d'investigation
légitimes en son sein : néoinstitutionnalisme, économie expérimentale et économie de
l'information, pour n'en citer que quelques-uns.
L'effondrement de l'Union Soviétique joue un rôle primordial dans cette évolution. Au
niveau politique d'abord. La disparition de l'un des protagonistes de l'affrontement
géopolitique de la seconde moitié du siècle dernier, qui représentait également une
alternative systémique au capitalisme occidental, n'est pas sans répercussions sur la teneur
des débats entre les économistes. Ensuite, parce que la crise qu'a connue la Russie pendant
les années 1990, apparaît comme un phénomène majeur et original dans l'histoire des faits
économiques. Par son ampleur notamment, puisque le recul de l'activité qui se prolonge de
1990 à 1998 représente une dépression comparable à celle de 1929. La question du
changement systémique donne lieu à un renouveau de la controverse théorique sur la
nature de l'économie soviétique, les vertus de la propriété privée et des marchés ainsi que
sur les formes d'évolution et de transformation des économies. Analyser l'impact des
décisions délibérées qui ont contribué à produire la trajectoire russe peut ainsi apporter des
éléments de compréhension des soubresauts que connaît le capitalisme mondial suite à un
mouvement global de libéralisation et de privatisation des économies depuis le début des
années 1980.
Problématique
Cette thèse explore deux types de questionnements problématiques. Un premier, théorique,
concerne l'analyse des formes d'interdépendance des agents qui sont à l'origine des
dynamiques industrielles. Il nous a conduit à construire la coordination industrielle comme
objet d'étude dans une perspective institutionnaliste. Un second, propose une lecture de la
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