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BP 80 320 • 67008 Strasbourg
Photo Nis & For
EN DEUX MOTS
À la cour du roi Arthus, la reine Genièvre s’éprend du
chevalier Lancelot. Démasqués par Mordred, le neveu
d’Arthus, ils vont devoir fuir.
www.operanationaldurhin.eu
LE ROI ARTHUS
ERNEST CHAUSSON
NOUVELLE PRODUCTION
Langue : français surtitré en français et en allemand
Durée approximative : 3 h 20
Conseillé à partir de 12 ans : collège et lycée
DIRECTION MUSICALE Jacques Lacombe
MISE EN SCÈNE Keith Warner
DÉCORS ET COSTUMES David Fielding
GENIÈVRE Elisabete Matos
ARTHUS Andrew Schroeder
LANCELOT Andrew Richards
MORDRED Bernard Imbert
LYONNEL Christophe Mortagne
ALLAN Arnaud Richard
MERLIN Nicolas Cavallier
LE LABOUREUR Jérémy Duffau
Chœurs de l’Opéra national du Rhin
Orchestre symphonique de Mulhouse
Salabert (Universal Music Publishing Classical)
STRASBOURG
OPÉRA
ve 14 mars 20 h
di 16 mars 15 h
ma 18 mars 20 h
ve 21 mars 20 h
ma 25 mars 20 h
RENCONTRE
avec Jacques Lacombe
et Philippe Olivier
animée par Marc Clémeur
Strasbourg, Opéra
je 13 mars 18 h 30
entrée libre
MULHOUSE
LA FILATURE
ve 11 avril 20 h
di 13 avril 15 h
Ernest Chausson a assisté à la création du Parsifal de Wagner à Bayreuth en 1882. Ce fut pour lui un choc.
Sa production se nourrira par la suite de cette découverte du langage wagnérien, qu’il fera sien en l’adaptant
à sa propre sensibilité et au public français. L’œuvre est d’ailleurs souvent surnommée « le plus grand opéra
wagnérien français ». Il écrit et peaune la partition de cet unique opéra durant une dizaine d’années,
de 1886 à 1895. Une mort prématurée (un accident de bicyclette !) l’empêchera cependant de le voir jamais joué.
Chausson, s’il suit la voie tracée par Wagner, arrive à s’en démarquer par une orchestration légère et transparente,
et ouvre la voie à des compositeurs tels Debussy et Dukas... Peu d’action donc, dans ce Roi Arthus, exceptée
intérieure. Car c’est ici le doute et les questionnements qui mènent la danse.
Acte I
Tableau 1 : la cour du roi Arthus
À la cour, le roi Arthus loue les prouesses au combat des chevaliers de la Table Ronde, et particulièrement celles
de Lancelot. Sous le regard jaloux de Mordred, le neveu d’Arthur, le chevalier du Lac convient d’un rendez-vous
avec Genièvre, la femme du roi.
Tableau 2 : la nuit
Lyonnel, l’écuyer de Lancelot, déplore l’aveuglement de son maître et la trahison des amants auprès du roi.
Lancelot justement retrouve Genièvre pour leur rendez-vous. Mordred survient et découvre leur adultère.
Lancelot le blesse de son épée et le laisse pour mort.
Acte II
Tableau 1
Lancelot est tourmenté par sa mauvaise conscience, tandis que
Genièvre apprend que Mordred a survécu et les a dénoncés au roi.
Arthus cependant ne prête pas foi à ces racontars. Lancelot n’arrive à se
résigner à démentir l’accusation lancée contre eux, ne voulant pas opter
pour une vie d’hypocrisie à la cour. Genièvre et le chevalier décident
donc de fuir ensemble.
Tableau 2 : la cour du roi Arthus
Arthus, tourmenté, invoque Merlin, qui prophétise le déclin et la n
de la Table Ronde. Il disparaît alors que le roi lui demande si le couple
adultérin en est coupable. La disparition de la reine est annoncée par
les chevaliers et Arthus les mène à la poursuite du couple.
Acte III - le champ de bataille
Tableau 1
Arthus poursuit Lancelot et lance l’assaut. Genièvre croit en la victoire de Lancelot, mais ce dernier, écartelé
entre son amour et sa loyauté, laisse ses armes et renonce à combattre son roi. Demeurée seule et sentant la mort
imminente de son amant, la reine s’étrangle avec ses propres cheveux.
Tableau 2
Sur le champ de bataille, Lancelot est blessé à mort en voulant séparer les guerriers. Arthus arrive et lui offre
son pardon. Le roi est emporté par des chœurs mystiques qui l’entourent et lui promettent d’accéder à l’idéal
et à la gloire éternelle. Il monte dans une nacelle et entame son ascension spirituelle.
L’ARGUMENT
Genièvre embrasse Lancelot,
enluminure du XVe siècle
L’INFLUENCE WAGNÉRIENNE
UNE ÉCRITURE EN DOUTE
Lorsque Chausson commence son opéra en 1886, l’inuence de Wagner est déjà immense sur la scène française.
Celui qu’on appelle avec respect « le Maître de Bayreuth » a posé les bases d’un nouvel opéra, et ses principes
de composition sont largement repris. Ils portent notamment l’accent sur le dramatique, de la rédaction du livret
à la composition de la musique.
Chausson n’est pas exempt de cette inuence, au contraire. Impressionné par la première représentation
de Tristan et Isolde à laquelle il assiste, il fait part de ses sentiments à son amie Madame de Rayssac dès 1880 :
« Je ne connais aucune œuvre ayant cette intensité de sentiments. Comme musique pure, c’est splendide
et de l’ordre le plus élevé ; comme manière de comprendre le drame musical, c’est une révolution. »
L’inuence de Tristan et Isolde se fait d’ailleurs ressentir dans l’opéra de Chausson : couple illégitime, trahison
d’un roi, morts tragiques et rédemption… Des thématiques chères à Wagner. Dès le début de l’écriture, Chausson
le remarque et tente de s’en détacher, comme il l’explique à son ami Paul Poujaud en 1886 :
« Le plus gros défaut de mon drame est sans doute l’analogie du sujet avec celui de Tristan. Cela ne serait rien
encore, si je pouvais arriver à me déwagnériser. Wagnérien par le sujet et wagnérien par la musique, n’est-ce pas
trop à la fois ? »
Ces doutes d’une écriture trop wagnérienne ne vont plus le quitter de toute la rédaction, comme l’atteste son
abondante correspondance. Il est encore en pleine réexion en 1888, essayant de se détacher du maître allemand.
« Il y a surtout cet affreux Wagner qui me bouche toutes les voies. Je me fais l’effet d’une fourmi qui rencontre
une grosse pierre glissante sur son chemin. Il faut faire mille détours avant de trouver un passage. J’en suis là.
Je cherche. J’ai même de la patience et quelque peu d’espérance. »
Les mêmes questionnements se retrouvent d’années en années, le faisant repenser sans cesse son livret
et ses principes, ici en juin 1889 et juin 1891 :
« Mon cher ami,
Je suis d’une humeur de chien. Je vous écris parce que cela me fait plaisir de penser à vous. Je serais content
de vous voir. Mais, pour vous, il vaut mieux que vous ne me voyez pas en ce moment. Je suis détestable. Je suis
exclusivement soumis à l’inuence Arthusienne ou Arthusielle. Ces jours-ci, le niveau est très bas. J’ai beaucoup
changé à mon livret ; je n’ai pas ni encore. Il me semble qu’il faudrait changer tout. Et pourtant non. Faut-il ?
Ne faut-il pas ? Ce que je viens de changer est-il bien ? Ne pourrais-je pas trouver mieux ? De là des tiraillements
incessants, des hésitations qui m’enragent. Je vois déjà que mon prochain drame sera fait d’une manière toute
différente. Je change d’avis sur l’emploi de la prose et des rimes. J’ai trop négligé le rythme. Je sens ce que je
chercherai à faire. Mais pour le moment c’est d’Arthus qu’il s’agit. Après, je verrai. La visite de Bouchor, très
agréable, a été mauvaise pour lui. Bouchor m’a troublé avec son classicisme, son goût pour les airs, son éternel
refrain que ce que nous cherchons est mauvais et impossible. Je ne suis nullement converti, mais il m’a troublé.
(Naturellement, gardez cela pour vous.) Je m’en tiens à ce que j’ai voulu faire. Je cherche seulement à rendre mes
personnages plus vivants, à les faire mieux parler et plus clairement, tout en les maintenant dans cette région
spéciale de la vérité artistique, qui n’a aucun rapport avec la vérité dite naturaliste. Je patauge, je grinche, je crois
trouver, j’efface, je travaille comme un malheureux, et je n’avance guère, je me couche avec désespoir et je me lève
avec terreur ; je voudrais causer avec des amis et j’ai peur après de ce qu’ils pourraient me dire ; le temps passe,
l’affreux temps ; voilà comment je vis. »
« J’ai relu Le Roi Arthus et me voilà réemballé. C’est le pauvre Lancelot qui écope dans le remaniement du
troisième acte. Il meurt dans la coulisse pendant que Genièvre a une conversation bigrement difcile à faire
avec le roi son époux. C’est égal. Je crois cela beaucoup mieux. Et puis après, on me laissera tranquille, j’espère,
avec Tristan et Yseult. »
« INTERMINABLE ARTHUS »
Ainsi, l’écriture du Roi Arthus passe par différents stades, ce qui explique certainement une composition étalée sur
presque dix ans. Wagner ne semble d’ailleurs pas vouloir se détacher de l’esprit de Chausson, comme il l’explique
à Raymond Bonheur en novembre 1892 :
« Me voici replongé dans Le Roi Arthus. J’en suis avec lui, depuis quinze jours, à une troisième phase. D’abord,
pendant que je terminais Le Poème de l’Amour et de la Mer (car il est ni aussi celui-là ; il reste l’orchestre, mais
cela ne m’inquiète pas), une indifférence inquiétante. Puis, quand j’ai commencé à m’y mettre, l’emballement
est revenu. Il me semblait que ça ne me donnerait aucune difculté. Enn, depuis aujourd’hui, les idées noires
reparaissent ; pas de grincherie ni de désespoir parce que je n’ai pas écrit un acte dans ma semaine. C’est quelque
chose de plus sérieux. Wagner, que je ne sens plus peser sur moi, quand j’écris de la musique symphonique, me
hante maintenant terriblement. Je le fuis tant que je peux, mais j’ai beau fuir, il est toujours là, près de moi,
me guettant très méchamment et me faisant écrire des tas de choses que j’efface. J’en suis sérieusement ennuyé.
Il faut pourtant y échapper, à ce diable d’homme. C’est une question de vie ou de mort. Mais dans un drame lyrique
comme Le Roi Arthus, vraiment, trop de choses tentent à le rappeler. Et, d’un autre côté, il y a trop longtemps que
j’y pense ; il faut absolument m’en débarrasser la cervelle. »
De fait, il continue de remanier la partition et le livret même huit ans après le début du travail, changeant scènes
et histoire. C’est ainsi qu’il décide en 1894 de modier le premier tableau de l’Acte III, pour presser l’action autour
des amants adultérins et de la bataille qui se déroule en toile de fond.
« Cher ami,
Encore un changement ! Qu’en dis-tu de celui-là ? Voici longtemps que je tire la celle pour terminer cette
malheureuse scène de Lancelot et de Genièvre. Impossible de trouver le joint. Ça s’allongeait et c’est tout ce que
j’y gagnais, ou plutôt, perdais. Le diable, toujours, c’est de faire partir Lancelot, sans quelqu’événement extérieur
qui le force à prendre une résolution. Alors on risque de tomber dans des adieux, et l’on est chu. Enn, hier,
j’espère avoir trouvé une solution que je ne crois pas mauvaise. Ça consiste, vers la n de la scène, à déplacer
l’intérêt. La bataille se rapproche et c’est elle qui devient le personnage principal. Lancelot est bien forcé de se
décider, car cette bataille ne peut toujours durer, et sa sortie devient plus facile et plus rapide.
Je ne sais si tu as connu la version où Genièvre, au moment où il va sortir, se jette dans ses bras, en faisant un
suprême effort pour le retenir. J’avais toujours eu l’intention de réserver pour ce moment-là une reprise ff *
de la phrase d’amour, assaisonnée de tout ce que Arcachon peut inspirer de plus évreux et de plus passionné.
Maintenant, la phrase d’amour va bien reparaître, mais comme étouffée et assourdie dans les bruits de bataille.
Et cela durera encore pendant une partie de la scène de Genièvre seule. Je crois que cela aidera à faire comprendre
la défaite dénitive de l’amour égoïste de Lancelot et de Genièvre. Il n’y a plus de lutte possible. Peut-être
à un moment ne parlera-t-elle pas, parce qu’il lui serait matériellement impossible de se faire entendre.
Au lieu de donner beaucoup d’importance aux gestes de Genièvre, abandonnée, c’est toujours la bataille dans
la coulisse qui tiendra le premier plan, jusqu’au moment où elle s’éteindra assez subitement, ce qui donne à penser
à Genièvre que quelque chose d’imprévu vient de se produire, et la hâte à la mort.
Musicalement, je crois que cette nouvelle version va me donner quelque chose de bien meilleur. Je serai forcé, par
exemple, de remanier un peu le commencement de l’acte, et d’atténuer tous les bruits de bataille qui y gurent déjà.
Il faudra n’y laisser que le juste nécessaire pour faire pressentir ce qui n’éclatera que plus tard. Après tout ce tapage,
les deux dernières scènes, calmes, feront une impression reposante et c’est là-dessus que je veux terminer.
Cet écrasement de l’individu par un fait matériel est d’une compréhension un peu genre Maeterlinck.
Mais Genièvre a si peu de rapport avec la Princesse Maleine ou la pauvre petite Mélisande... »
Ce n’est donc qu’en 1895 que Chausson achève son œuvre, comme il le cone à son ami Paul Poujaud :
« Cet interminable Arthus avec le temps avait muri et m’avait comme empoisonné. Après quelques explications
violentes, j’ai ni par avoir le dessus et maintenant je l’enterre fort gaiement sous un monceau de pages
d’orchestre (le second acte seul a 235 pages de brouillon !). Aussi, étant si bien en train, il me coûterait beaucoup
de m’interrompre, et voici la raison de mon séjour prolongé. Je voudrais revenir à Paris avec l’orchestre terminé.
Il me resterait les retouches de la dernière heure et la copie. C’est un travail qui peut se faire aisément à Paris.
Maintenant que la composition est terminée et que je suis bien décidé à n’y faire que quelques modications de
détails, je commence à pouvoir regarder mon drame avec plus de calme et, sinon encore à le juger, du moins à me
rendre un peu compte de ce qu’il est. Vous savez que je ne pèche pas par excès de conance en moi-même ;
je vous surprendrai peut-être en vous disant cette fois que je ne suis pas mécontent. J’espère que ce drame sera
un peu humain et pas trop selon la mode. »
* fostissimo
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