Tomographie d'émission monophotonique du myocarde synchronisée à l'E.C.G.
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Revue de l'ACOMEN, 2000, vol.6, n°2
Sur une série de 24 patients, Anagnostopolous et Coll. (32)
valident létude segmentaire de cinétique et dépaississe-
ment du myocarde en T.E.M.P.S. par rapport à la cinéIRM.
Mais les corrélations sont moins bonnes pour les segments
myocardiques ayant une atteinte perfusionnelle sévère en
raison dune densité de coups parfois insuffisante.
En raison dun effet de volume partiel, lépaississement seg-
mentaire du myocarde se traduit par une augmentation de la
brillance au cours du cycle cardiaque.
Shen et Coll. (33) développent et valident un algorithme de
quantification de lépaississement segmentaire. Cette mé-
thode, reproductible, suit les changements de densité de
coups sur chaque segment myocardique au cours du cycle
cardiaque. Lindex dépaississement est exprimé comme un
pourcentage daugmentation de la densité de coups durant
la systole par rapport à limage télédiastolique initial. Cette
algorithme est validé sur fantome, puis sur une série de 20
patients normaux et 20 patients avec antécédent dinfarc-
tus.
Chez le sujet normal, il y a des variations non pathologiques
de 20 à 30 % de lépaississement sur les différents segments,
en particulier lépaississement de la paroi apicale est plus
marqué que lépaississement des segments basaux.
2.4. Volumes ventriculaires
Les algorithmes développés en T.E.M.P.S. permettent, sem-
ble-t-il, de calculer les volumes du ventricule gauche.
Par comparaison avec léchographie, Cwajg et Coll. (34) re-
trouvent sur une série de 109 patients, une très bonne corré-
lation pour le volume télésystolique mais une moins bonne
corrélation pour le volume télédiastolique. Chez 24 patients
indemnes de shunts intracardiaques ou de valvulopathie,
Iskandrian et Coll.(35) comparent FEVG et volumes ventri-
culaires (VTS, VTD, volume déjection systolique (VES),
mesuré par T.E.M.P.S. (Algorithme QGS) et par une techni-
que de référence qui associe cathétérisme avec thermo-dilu-
tion et scintigraphie au premier passage.
En T.E.M.P.S., les valeurs normales sont: FEVG = 50 % + 14,
VES = 54 ml + 16; VTD = 122 ml + 71; VTS = 68 ml + 61. Pour
la technique de référence (thermodilution / premier passage)
les valeurs normales sont: FEVG = 54 % + 13; VES: 67 ml +
17; VTD = 130 ml + 44; VTS = 63 ml + 38.
La reproductibilité des mesures des volumes ventriculaires
par T.E.M.P.S. est excellente, r = 0,99.
Cependant, les constatations pratiques montrent que lap-
préciation exacte des volumes ventriculaires est délicate en
T.E.M.P.S. mais aussi avec toutes les autres techniques non
invasives. Ceci est particulièrement sensible dans les cas
difficiles de cardiopathie valvulaire ou congénitale, de car-
diomyopathie, et il est raisonnable de penser que lon ob-
tiendra une évaluation plus fiable et plus complète des volu-
mes ventriculaires droits et gauches, du débit cardiaque, en
développant dautres techniques de cardiologie nucléaire
comme la tomographie des cavités cardiaques à léquilibre.
A part, il faut souligner lintérêt de lévaluation visuelle ou
quantifiée des volumes ventriculaires lors dun examen en
T.E.M.P.S. pour détecter, sur les images "post-stress", un
aspect de dilatation myocardique ischémique transitoire
(DIT). Le terme DIT regroupe probablement deux entités
physiopathologiques associant une véritable dilatation
cavitaire ischémique et surtout une ischémie diffuse sous
endocardique intéressant la totalité du ventricule gauche.
Mazzanti et Coll. (36) montrent que la mise en évidence dune
DIT est très spécifique pour identifier les patients ayant une
coronaropathie sévère.
3. Intérêts cliniques
3.1. Apport diagnostic
Dune façon générale, un intérêt majeur de la T.E.M.P.S. est
daccroître la valeur diagnostique de la scintigraphie
myocardique de perfusion, en améliorant la spécificité, en
diminuant le nombre dexamens "douteux" et peut-être, en
améliorant légèrement la sensibilité dans certaines indica-
tions.
3.1.1. Amélioration de la spécificité de la scintigraphie
myocardique
La synchronisation ECG des images perfusionnelles permet
une meilleure détection des artéfacts datténuation qui inté-
ressent soit la paroi antérieure (atténuation mammaire) soit
la paroi inférieure (atténuation diaphragmatique en acquisi-
tion en décubitus dorsal). En scintigraphie myocardique, un
artéfact datténuation est responsable dun défaut de fixa-
tion permanent du traceur aux deux temps de lexamen, re-
pos et effort. Cet aspect "dhypo fixation permanente" est
aussi retrouvé chez le coronarien, en cas dinfarctus du
myocarde ou de myocarde hibernant.
De Puey et Coll. (37) étudient 180 patients ayant une
hypofixation permanente à la scintigraphie. 102 patients ont
des antécédents dinfarctus du myocarde et 96 % dentre
eux une altération de la fonction ventriculaire gauche sur
létude T.E.M.P.S.. Sur 78 patients sans antécédent dinfarc-
tus, 60 patients (77 %) ont une fonction ventriculaire gau-
che normale ce qui correspond à un artéfact datténuation et
18 patients (23 %) ont une altération de la fonction ventricu-
laire gauche ce qui correspond à un infarctus du myocarde
non Q ou à un myocarde hibernant.
Ainsi, dans cette étude, le taux "dhypofixation permanente"
non expliqué (pas dinfarctus dans les antécédents) passe
de 14 % à 3 % grâce à létude fonctionnelle synchronisée.
Les artéfacts datténuation sont fréquemment observés chez
les patients de sexe féminin et sont alors dorigine mammaire
avec hypofixation permanente antérieure.
Taillefer et Coll. (38) présentent une étude prospective réali-
sée chez 115 femmes, la spécificité de la scintigraphie
myocardique passe de 84,4 % pour la T.E.M.P. au SESTAMibi
à 92,2 % pour la T.E.M.P.S. au SESTAMibi synchronisée à
lECG (p = 0,0004)