ÉCOLE NATIONALE VÉTÉRINAIRE D’ALFORT Année 2015 CARACTÉRISATION FONCTIONNELLE DU GÈNE Hacd1 DANS LA RÉTINE CHEZ LA SOURIS THÈSE Pour le DOCTORAT VÉTÉRINAIRE Présentée et soutenue publiquement devant LA FACULTÉ DE MÉDECINE DE CRÉTEIL Le 28 octobre 2015 par Marion Cécile Fanny DAVIDSON Née le 08 juillet 1990 à Paris 14ème JURY Président : Pr. Eric SOUIED Professeur à la Faculté de Médecine de CRÉTEIL Membres Directeur : Dr Fanny PILOT-STORCK Maître de conférences à l’ENVA Assesseur : Dr Sabine CHAHORY Maître de conférences à l’ENVA REMERCIEMENTS Au Pr. Éric SOUIED, Président de thèse Professeur à l’Université de Créteil et chef du service d'Ophtalmologie à l'Hôpital Intercommunal de Créteil, qui nous a fait le très grand honneur d’accepter la présidence de notre jury de thèse. Hommage respectueux. À Madame Fanny PILOT-STORCK, Directrice de thèse Maître de conférences à l’École Nationale Vétérinaire d’Alfort, qui m’a proposé ce sujet de thèse, et qui m’a fait l’honneur de superviser l’étude expérimentale et la thèse dans son ensemble. Merci pour votre gentillesse, votre enthousiasme, votre disponibilité et votre soutien. A Madame Sabine CHAHORY, Assesseur de thèse Maître de conférences à l’École Nationale Vétérinaire d’Alfort et chef du service d’Ophtalmologie du CHUVA, qui a accepté de faire partie de mon jury de thèse et de m’aider pour la correction du manuscrit. Sincères remerciements À toute l’équipe du laboratoire de Génétique Fonctionnelle et Médicale de l’ENVA pour votre accueil chaleureux. Un grand merci à M. Laurent TIRET et Mme Marie ABITBOL qui m’ont régulièrement conseillée dans mon travail et à Mme Stéphanie GADIN et M. Laurent GUILLAUD qui ont pris part à certaines expérimentations. Merci également aux étudiants stagiaires dans le laboratoire, en particulier à Michaël MARTINEAU qui a participé à l’analyse des clichés de rétine. À toute l’équipe de l’unité d’Anatomie Pathologique de l’ENVA et, en particulier, à Mme Sophie CHATEAU-JOUBERT et M. Jean-Luc SERVELY, qui ont joué un rôle essentiel dans la préparation des coupes de rétine et la réalisation des clichés nécessaires à l’analyse morphométrique fine. Hommage respectueux. Au Pr. Isabelle RANCHON-COLE et à Mme Claire SZCZEPANIAK, employées de l’Université d’Auvergne, ainsi qu’à l’équipe du Pr. ANDERSON qui nous ont respectivement épaulés dans la réalisation des électrorétinogrammes, des observations en microscopie électronique à transmission et pour les analyses lipidiques. À mes parents, qui m’ont appris à vivre mes rêves, à prendre confiance en moi et qui ont toujours fait preuve d’un soutien inconditionnel. Je vous aime fort ! À ma petite sœur Camille’Ours, pour nos grands fous rires et nos petites querelles. Je suis extrêmement fière de toi et je serai toujours là pour toi. J’espère qu’on restera toujours aussi proches malgré les kilomètres et les océans qui nous séparent parfois! À François D’OLIVEIRA, merci d’avoir été à mes côtés ces 10 dernières années et d’avoir toujours su me redonner le sourire dans les moments difficiles. Désolée de ne pas pouvoir te consacrer beaucoup de temps cette année mais promis on se rattrapera au plus vite. À mes grands parents, qui m’ont appris des valeurs essentielles comme le courage, la détermination, la rigueur et le travail. Vous nous avez quittés trop tôt mais nous pensons encore à vous très fort ! Je ferai toujours de mon mieux pour que vous soyez fiers de moi. À mon groupe de clinique : Marie, Alexane, Fiona, Marjolaine, pour toutes nos rigolades et ces moments inoubliables passés ensemble au Chuva. Vivement les prochaines soirées entre filles ! À ma coloc Sarah et à David, merci de m’avoir supportée pendant une année et de nous avoir préparé des topos malgré vos emplois du temps déjà bien chargés. Les soirées Sushi, reines du shopping et mousse au chocolat me manquent déjà ! À Alex, parce que les mamans ont toujours raison et que je tiens énormément à notre amitié. Grâce à toi ces deux années de prépa sont passées très vite et les bons souvenirs se bousculent (Patatoïde, Bourriquet, Satan, les schémas de bio…). Dommage que tu sois remonté dans le Nord, je te jure qu’il y en a aussi des vaches à soigner sur Paris ! À mes amis : Juliette, Solène, Bertille, et aux amateurs de Licorne (Sandrine, Olivier, Alexandre, Claire, Sadim, Alexis et Geoffrey) pour tous les bons moments passés ensemble et ceux à venir. À ma poulotte Émilie et Adrien, merci de vous être toujours aussi bien occupé de JiJi. Émilie sache que je serai toujours là pour te guider et te conseiller. À Inès BARTHELEMY, à Marie PONS ainsi qu’à Alix BARBARINO, merci pour votre bonne humeur contagieuse. Ce fut un réel plaisir de travailler avec vous et je vous suis très reconnaissante de m’avoir soutenue et encouragée au cours de ma formation vétérinaire. TABLE DES MATIÈRES LISTE DES FIGURES ---------------------------------------------------------------- 9 LISTE DES TABLEAUX ----------------------------------------------------------- 11 LISTE DES ANNEXES ------------------------------------------------------------- 12 LISTE DES ABRÉVIATIONS ----------------------------------------------------- 13 INTRODUCTION ------------------------------------------------------------------ 19 PARTIE 1 : ÉTUDE BIBLIOGRAPHIQUE ------------------------------------- 21 I. Structure, fonction et évaluation de la rétine -------------------------------23 1. Introduction sur l’œil et la rétine------------------------------------------------------------------ 23 2. Histologie de la rétine -------------------------------------------------------------------------------- 26 a. La rétine, une extension du système nerveux central ------------------------------------- 26 b. La rétine, un tissu stratifié ----------------------------------------------------------------------- 27 c. Les caractéristiques histologiques des photorécepteurs, cellules sensorielles de la rétine ------------------------------------------------------------------------------------------------- 29 3. Fonctionnement de la rétine ----------------------------------------------------------------------- 32 a. La réception du signal lumineux et la transmission de l’information au cortex visuel --------------------------------------------------------------------------------------------------------- 32 b. La rétine, un système complexe d’intégration de l’information ------------------------ 34 4. Évaluation clinique de la rétine chez la Souris ------------------------------------------------- 36 a. Observation de l’animal à distance - évaluation fonctionnelle de la vision ---------- 37 i. Test du labyrinthe, maze based test et ses dérivés ------------------------------------------------ 37 ii. L’Actimétrie -------------------------------------------------------------------------------------------------- 38 iii. Réflexion sur la sensibilité et la spécificité des tests du labyrinthe et d’actimétrie et facteurs de confusion -------------------------------------------------------------------------------------- 38 iv. Placer visuel -------------------------------------------------------------------------------------------------- 39 v. Test de la boule de coton ou du mouvement conjugué des yeux ------------------------------ 40 [1] b. Réflexes photomoteurs -------------------------------------------------------------------------- 41 c. Évaluation des structures oculaires ----------------------------------------------------------- 42 i. Évaluation de la transparence du segment antérieur, reflet du fond d’œil ----------------- 42 ii. Examen du fond d’œil ------------------------------------------------------------------------------------- 42 d. Électrorétinogramme ----------------------------------------------------------------------------- 46 i. Description d’un protocole chez la Souris ------------------------------------------------------------ 47 ii. Spécificités des électrorétinogrammes chez la Souris --------------------------------------------- 53 iii. Grille de lecture d’un électrorétinogramme chez la Souris -------------------------------------- 53 iv. Paramètres mesurables sur les tracés d’électrorétinogramme chez la Souris-------------- 56 v. Origine des variations observables dans les tracés d’électrorétinogramme ---------------- 58 5. La Souris, modèle d’étude des dégénérescences rétiniennes------------------------------ 60 a. Les différents types de dégénérescence rétinienne --------------------------------------- 60 b. Caractéristiques cliniques et histologiques des dégénérescences rétiniennes ------ 62 II. Les Acides Gras À Très Longue Chaîne dans la rétine ----------------------65 1. Nomenclature des acides gras --------------------------------------------------------------------- 65 2. Synthèse des Very Long Chain Fatty Acids et des Ultra Long Chain PolyUnsaturated Fatty Acids----------------------------------------------------------------------------------------------- 67 3. Rôles des Very Long Chain Fatty Acids et des Ultra Long Chain-PolyUnsaturated Fatty Acids à l’échelle cellulaire ------------------------------------------------------------------- 70 a. Le rôle des sphingolipides comportant des Very Long Chain Fatty Acids ------------- 70 b. Le rôle des Ultra Long Chain Fatty Acids dans la plasticité des membranes cellulaires -------------------------------------------------------------------------------------------- 72 c. Les Ultra Long Chain Fatty Acids dans les sécrétions des glandes de Méibomius -- 73 d. Rôles spécifiques des Very Long Chain Fatty Acids polyinsaturés ---------------------- 75 4. Rôle des Very Long Chaîn Fatty Acids et Ultra Long Chaîn Fatty Acids à l’échelle de l’organisme---------------------------------------------------------------------------------------------- 76 a. Effet de l’inactivation du gène Kar chez la Souris ------------------------------------------ 76 b. Effet de l’inactivation des gènes Elovl chez la Souris -------------------------------------- 77 c. Effet d’une mutation du gène Ter-------------------------------------------------------------- 79 d. Effet d’une mutation du gène Hacd1 --------------------------------------------------------- 79 5. Composition et rôles des Ultra Long Chain Poly-Unsaturated Fatty Acids dans la rétine ----------------------------------------------------------------------------------------------------- 80 a. Distribution des Ultra Long Chain PolyUnsaturated Fatty Acids dans la rétine ----- 80 b. Le rôle des Ultra Long Chain PolyUnsaturated Fatty Acids dans la rétine ------------ 80 [2] i. La maladie de Stargardt 3 chez l’Homme ------------------------------------------------------------ 80 ii. Étude d’Elovl4 chez la Souris ----------------------------------------------------------------------------- 81 iii. Conclusion sur le rôle des ULC-PUFA dans la rétine ----------------------------------------------- 85 c. Évolution des concentrations en Ultra Long Chain Poly-Unsaturated Fatty Acids dans la rétine avec l’âge -------------------------------------------------------------------------- 86 III. HACD1 et la synthèse des Acides Gras À Très longue chaîne -----------87 1. Une mutation dans le gène HACD1 à l’origine d’une myopathie chez des Labradors -------------------------------------------------------------------------------------------------------------- 87 a. Historique de la découverte du gène --------------------------------------------------------- 87 i. Étude phénotypique d’une colonie expérimentale de Labradors myopathes --------------- 87 ii. Étude génétique, la découverte d’une mutation dans le gène PTPLA/HACD1 -------------- 88 b. Conséquences de la mutation sur le profil de transcription du gène ------------------ 89 c. La fonction enzymatique de HACD1 ----------------------------------------------------------- 91 2. Une mutation du gène HACD1 à l’origine d’une myopathie chez l’Homme------------ 92 3. La Souris, modèle fonctionnel dans l’étude du gène Hacd1-------------------------------- 93 a. La Souris, un bon modèle d’étude expérimental ------------------------------------------- 93 b. Obtention de souris mutantes pour le gène Hacd1---------------------------------------- 94 4. Expression tissulaire des gènes Hacd------------------------------------------------------------- 97 IV. Étude préliminaire de l’expression et du rôle du gène Hacd1 dans la rétine-------------------------------------------------------------------------------------99 1. Évaluation de l’expression du gène Hacd1------------------------------------------------------ 99 a. Techniques utilisées ------------------------------------------------------------------------------- 99 b. Résultats obtenus avec la coloration X-Gal ------------------------------------------------ 101 c. Résultats obtenus grâce à la technique de RT-PCR -------------------------------------- 103 2. Examen histologique des yeux ------------------------------------------------------------------- 103 a. Techniques utilisées ----------------------------------------------------------------------------- 103 b. Comparaison des structures histologiques entre Souris contrôle et mutantes --- 104 3. Évaluation électrophysiologique du fonctionnement de la rétine---------------------- 105 a. Techniques utilisées ----------------------------------------------------------------------------- 105 b. Résultats des électrorétinogrammes -------------------------------------------------------- 106 4. Discussion à partir de ces résultats préliminaires ------------------------------------------- 108 [3] PARTIE 2 : POURSUITE DE LA CARACTÉRISATION DU RÔLE DU GÈNE HACD1 DANS LA RÉTINE ----------------------------------------------------- 109 I. Introduction-------------------------------------------------------------------------- 109 a. Hypothèses d’étude ----------------------------------------------------------------------------- 109 b. Description des quatre axes d’étude -------------------------------------------------------- 110 c. Implication personnelle :----------------------------------------------------------------------- 112 II. Matériel et méthodes ------------------------------------------------------------- 113 1. Description des lots d’animaux utilisés -------------------------------------------------------- 113 2. Étude clinique et fonctionnelle de la rétine des Souris ------------------------------------ 116 a. Examen ophtalmologique des souris - examen du fond d’œil ------------------------ 116 b. Étude fonctionnelle de la rétine par électrorétinographie ----------------------------- 117 i. Souris incluses dans l’étude et critère d’exclusion ----------------------------------------------- 117 ii. Préparation des souris----------------------------------------------------------------------------------- 117 iii. Mise en place des souris -------------------------------------------------------------------------------- 118 iv. Protocole de stimulation lumineuse pour les électrorétinogrammes-flash --------------- 118 v. Traitement des données -------------------------------------------------------------------------------- 119 3. Prélèvement et fixation des yeux --------------------------------------------------------------- 119 a. Technique de prélèvement des yeux -------------------------------------------------------- 119 b. Fixations des yeux ------------------------------------------------------------------------------- 120 i. Fixation par formadhéhyde ---------------------------------------------------------------------------- 120 ii. Fixation par milieu de Davidson ou Excalibur ----------------------------------------------------- 121 iii. Congélation en isopentane ----------------------------------------------------------------------------- 121 4. Préparation des coupes ---------------------------------------------------------------------------- 122 a. Réalisation des coupes au microtome ------------------------------------------------------ 122 i. Paraffinage ------------------------------------------------------------------------------------------------- 122 ii. Coloration à l’Hémalun-Éosine-Safran -------------------------------------------------------------- 122 iii. Préparation de coupes fixées au formaldéhyde pour immunofluorescence ou hybridation in situ --------------------------------------------------------------------------------------------------------- 123 iv. Coupes au cryostat en vu des hybridations in situ ----------------------------------------------- 123 5. Analyse morphométrique de la structure des rétines de souris ------------------------ 124 a. Photographies des coupes colorées à l’Hémalun-Éosine-Safran --------------------- 124 b. Mesures morphométriques réalisées à partir des clichés de rétine ----------------- 126 i. Observation des clichés d’œil entier – repérage des artéfacts et des lésions ------------- 126 [4] ii. Mesures réalisées à partir des clichés au grossissement 20 ----------------------------------- 129 iii. Mesures réalisées à partir des clichés au grossissement 40 ----------------------------------- 130 c. Étude statistique --------------------------------------------------------------------------------- 131 6. Marquages par immunofluorescence ---------------------------------------------------------- 131 a. Protocole général -------------------------------------------------------------------------------- 132 b. Les anticorps utilisés ---------------------------------------------------------------------------- 132 i. Étude de la structure histologique des synapses à ruban de la rétine avec un anticorps anti-CtBP2 --------------------------------------------------------------------------------------------------- 132 ii. Étude de la structure histologique des segments externes des photorécepteurs avec un anticorps anti-rhodopsine ------------------------------------------------------------------------------ 133 iii. Marquage indirect de l’expression du gène Hacd1 à l’aide d’un anticorps anti-β-Gal - 133 iv. Double immunofluorescence afin d’identifier les cellules exprimant le gène Hacd1 --- 134 c. Observation des coupes et prise de clichés------------------------------------------------ 134 7. Hybridation in situ : marquage direct de l’expression du gène Hacd1 ---------------- 136 a. Préparation de l’hybridation in situ – Synthèse des sondes acides ribonucléiques marquées par la digoxigénine ---------------------------------------------------------------- 137 i. Choix des sondes ------------------------------------------------------------------------------------------ 137 ii. Synthèse des précurseurs acides désoxyribonucléiques des sondes par réaction de polymérisation en chaîne) ------------------------------------------------------------------------------ 137 iii. Synthèse des sondes acides ribonucléiques marquées par digoxigénine ------------------ 139 b. Protocole d’hybridation in situ --------------------------------------------------------------- 140 8. Observation des rétines par microscopie électronique ----------------------------------- 141 9. Analyse de la composition lipidique des rétines et des sécrétions des glandes de Méibomius -------------------------------------------------------------------------------------------- 142 III. Résultats et Discussion ----------------------------------------------------------- 145 1. Étude clinique et fonctionnelle de la rétine des souris mutées pour le gène Hacd1-------------------------------------------------------------------------------------------------------------- 145 a. Résultats de l’examen ophtalmologique --------------------------------------------------- 145 i. Observation de la cornée et des structures intraoculaires autres que la rétine ---------- 145 ii. Observation du fond d’œil------------------------------------------------------------------------------ 147 b. Discussion concernant l’examen ophtalmologique -------------------------------------- 148 i. Aspects techniques --------------------------------------------------------------------------------------- 148 ii. Bilan des observations de la cornée et du fond d’œil ------------------------------------------- 149 c. Résultats de l’étude fonctionnelle de la rétine par électrorétinographie ---------- 150 i. Résultats de l’étude des électrorétinogrammes Flash ------------------------------------------ 150 [5] ii. Résultats de l’étude des potentiels oscillatoires -------------------------------------------------- 151 d. Discussion concernant l’évaluation fonctionnelle de la rétine : comparaison du protocole et des résultats entre notre étude et l’étude préliminaire --------------- 152 i. Comparaison de l’aspect des tracés des électrorétinogrammes ----------------------------- 152 ii. Comparaison des protocoles employés ------------------------------------------------------------- 156 2. Analyse structurale des rétines de souris ----------------------------------------------------- 160 a. Analyse morphométrique : observation des clichés d’œil entier de coupes colorées à l’Hémalun-Éosine-Safran -------------------------------------------------------------------- 160 i. Résultats de l’analyse morphométrique globale ------------------------------------------------- 160 ii. Discussion sur la pertinence des critères de distinction entre artéfacts et lésions réelles ------------------------------------------------------------------------------------------------------------------ 162 b. Analyse morphométrique fine des coupes colorées à l’Hémalun-Éosine-Safran - 163 i. Résultats de l’analyse morphométrique fine ------------------------------------------------------ 163 ii. Aspect technique------------------------------------------------------------------------------------------ 165 c. Bilan concernant les analyses morphométriques :--------------------------------------- 165 d. Observation des rétines au microscope électronique à transmission --------------- 167 i. Atlas de cliché de microscopie électronique à transmission----------------------------------- 167 ii. Discussion – aspects techniques ---------------------------------------------------------------------- 170 e. Analyse structurale par immunofluorescence -------------------------------------------- 173 i. Résultats des différents marquages par immunofluorescence ------------------------------- 173 ii. Discussion - Comparaison des rétines suite aux marquages par immunofluorescence 174 3. Étude de l’expression du gène Hacd1 dans la rétine de Souris -------------------------- 176 a. Marquage indirect de l’expression du gène Hacd1 par immunofluorescence --- 176 b. Marquage direct de l’expression de Hacd1 par hybridation in situ ------------------ 179 i. Hybridation in situ sur coupes congelées en isopentane --------------------------------------- 179 ii. Hybridations in situ sur coupe fixées par formaldéhyde --------------------------------------- 179 4. Analyse de la composition lipidique des rétines -------------------------------------------- 183 iii. Discussion concernant les aspects techniques de l’analyse lipidique ----------------------- 185 CONCLUSION ET PERSPECTIVES ------------------------------------------- 187 1. Bilan de nos quatre études ----------------------------------------------------------------------- 187 a. Bilan des analyses cliniques et fonctionnelles -------------------------------------------- 187 b. Bilan de l’analyse structurale des rétines -------------------------------------------------- 189 c. Bilan de l’analyse de l’expression du gène Hacd1 ---------------------------------------- 189 d. Bilan des analyses lipidiques ------------------------------------------------------------------ 189 2. Perspectives ------------------------------------------------------------------------------------------ 190 [6] a. Observation de la vascularisation rétinienne --------------------------------------------- 190 b. Dosage de la rhodopsine ----------------------------------------------------------------------- 191 c. Dark adaptometry ------------------------------------------------------------------------------- 192 BIBLIOGRAPHIE ---------------------------------------------------------------- 193 [7] [8] LISTE DES FIGURES Figure 1 : Organisation de l'œil en 3 tuniques. Représentation schématique et coupe histologique correspondante ........................................................................................................................25 Figure 2 : Représentation schématique des différentes couches de la rétine et comparaison avec une coupe histologique de la rétine colorée à l'Hémalun-Éosine-Safran. ......................................28 Figure 3 : Représentation schématique (A) et illustration histologique (B) des photorécepteurs. ...30 Figure 4 : Illustration de la notion de rétine inversée ...................................................................32 Figure 5 : Représentation schématique de la cascade de signalisation intervenant lors de la phototransduction au niveau d'un bâtonnet. ..............................................................................34 Figure 6 : Illustration de l'ophtalmoscopie directe (A) et indirecte (B). ..........................................44 Figure 7 : Photographie d'un fond d'œil normal de souris C56Bl/6J observé à l'ophtalmoscope indirect. ....................................................................................................................................45 Figure 8 : Matériel utilisé pour la réalisation d'un électrorétinogramme. ......................................50 Figure 9 : Origine des 3 ondes visibles sur l'électrorétinogramme de Souris. .................................54 Figure 10 : Les 3 composantes de l'électrorétinogramme de Ganzfeld d’une souris C57Bl/6J et leurs mesures ...................................................................................................................................56 Figure 11 : Illustration des paramètres mesurables à partir d'un électrorétinogramme obtenu en condition scotopiques . .............................................................................................................57 Figure 12 : Caractérisation des dégénérescences rétiniennes chez la Souris . ................................64 Figure 13 : Exemples de deux acides gras à très longue chaîne polyinsaturés de la famille des ω6, l’acide arachidonique, et des ω3, l’acide docosahexanoïque. .......................................................66 Figure 14 : Cycle d'élongation des acides gras à très longue chaîne chez les mammifères . ............67 Figure 15 : Voies d'élongation des acides gras à très longue chaîne chez l'Homme. .......................69 Figure 16 : Structure des sphingolipides. ....................................................................................70 Figure 17 : Métabolisme des sphingolipides ...............................................................................71 Figure 18 : Modèles de fortes courbures membranaires favorisées par la présence d’acides gras à ultra longue chaîne asymétriques ..............................................................................................72 Figure 19 : Anatomie de la paupière supérieure. .........................................................................74 Figure 20 : Le gène PTPLA/HACD1 (A), ses transcripts (B) et l'allèle muté (C) dans la myopathie centronucléaire du Labrador. ....................................................................................................89 Figure 21 : Représentations schématiques des transcrits du gène HACD1 dans le muscle squelettique avec et sans mutation. ..........................................................................................90 [9] Figure 22 : Configuration du locus Hacd1 après événement de recombinaison homologue ...........96 Figure 23 : Expression du gène Hacd1 dans l'œil chez la Souris .................................................. 102 Figure 24 : Analyse structurale en l'absence de Hacd1 dans l'œil des souris Hacd1-KO . .............. 104 Figure 25 : Diminution de la fonction rétinienne en l'absence de Hacd1 .................................... 107 Figure 26 : Illustration du protocole appliqué lors de la réalisation des clichés des coupes d’œil colorées en vu de l’analyse morphométrique............................................................................ 125 Figure 27 : L’observation des clichés d’œil entier et distinction des artéfacts et des lésions histologiques. ......................................................................................................................... 127 Figure 28 : Illustration de la technique employée pour calculer le nombre de noyaux des couches nucléaires interne et externe par unité de surface à l'aide d'Image J. ......................................... 130 Figure 29 : Aspect des sécrétions des glandes de méibomius chez la souris à température ambiante (20°C environ) (A) et à température corporelle (B). .................................................................. 143 Figure 30: Comparaison des 3 tracés électrorétinogrammes types obtenus à l'ENVA en 2012 et à la faculté de Clermont-Ferrand en 2014. ...................................................................................... 153 Figure 31 : Comparaison de l'amplitude des ondes b chez les Hacd1-KO et sauvages en fonction de l'intensité du flash lumineux. ................................................................................................... 155 Figure 32 : Aspect de l'épithélium pigmentaire en microscopie électronique à transmission........ 167 Figure 33 : Aspect de la limite entre la couche nucléaire externe et le segment interne des photorécepteurs en microscopie électronique à transmission. .................................................. 168 Figure 34 : Aspect des segments externes des photorécepteurs en microscopie électronique à transmission. .......................................................................................................................... 169 Figure 35 : Possibles anomalies observées en microscopie électronique à transmission sur les rétines des souris Hacd1-KO .................................................................................................... 171 Figure 36 : Marquages par immunofluorescence des rétines de souris Hacd1-KO ....................... 175 Figure 37 : Marquages par immunofluorescence de coupes de rétines par un anticorps ............. 177 Figure 38 : marquages par immunofluorescence de coupes de rétines, anticorps ....................... 178 Figure 39 : Illustration de la grille de notation des différents niveaux de marquage observés par hybridations in situ.................................................................................................................. 181 Figure 40: Différents niveaux de marquage observés sur une même coupe suite à une hybridation in situ pour le gène Hacd1 ....................................................................................................... 182 Figure 41 : Composition relative en phosphatidylcholines des rétines des souris du lot E. ........... 184 Figure 42 : Marquage et témoin négatif lors d'immunofluorescence .......................................... 204 [10] LISTE DES TABLEAUX Tableau 1: Présentation des souris utilisées pour l'étude de la fonction et de l'expression de Hacd1 dans la rétine. ......................................................................................................................... 114 Tableau 2 : Résumé des caractéristiques des différentes expériences réalisées dans le cadre de cette thèse ...................................................................................................................................... 115 Tableau 3 : Caractéristiques et séquences des amorces utilisées pour synthétiser les précurseurs ADN des sondes d'hybridation in situ ....................................................................................... 138 Tableau 4 : Réactions de polymérisation en chaîne réalisées afin de synthétiser les précurseurs ADN des sondes d'hybridation in situ. ...................................................................................... 138 Tableau 5 : Résultats des observations de la cornée et des structures intraoculaires à la lampe à fente. Effectif de 39 souris provenant des lots C, D et E. ............................................................ 146 Tableau 6 : Résultats de l'observation des fonds d'œil pour un effectif de 36 souris. ................... 147 Tableau 7 : Comparaison des tracés d'électrorétinogrammes flash obtenus chez les souris sauvages (+/+) et les souris mutantes (-/-) à l'ENVA en 2012 et à la faculté de Clermont-Ferrand en 2014....................................................................................................................................... 153 Tableau 8 : Comparaison des lots étudiés par électrorétinographie. .......................................... 156 Tableau 9 : Comparaison des principales caractéristiques des deux protocoles d'acquisition des électrorétinogrammes. ............................................................................................................ 158 Tableau 10 : Observation des clichés d’œil entier et recherche d'anomalie majeure ................... 161 Tableau 11 : Synthèse des différents niveaux de marquages observés sur les rétines de souris testées par hybridation in situ. ................................................................................................. 180 Tableau 12 : Protocole de déparaffinage .................................................................................. 201 Tableau 13 : Caractéristiques des différents anticorps utilisés. .................................................. 205 Tableau 14 : Protocole d'hybridation in situ adapté aux rétines et mis au point pendant la thèse.207 Tableau 15: Suivi et caractéristiques des souris utilisées dans le cadre de cette thèse ................. 213 [11] LISTE DES ANNEXES ANNEXE 1 : Protocole d’immunofluorescence sur rétine ......................................................... 201 ANNEXE 2 : Résumé des caractéristiques des anticorps utilisés pour les marquages par immunofluorescences ........................................................................................................... 205 ANNEXE 3 : Synthèse des sondes d’hybridation in situ par réaction de polymérisation en chaîne206 ANNEXE 4 : Protocole d’hybridation in situ ............................................................................ 207 ANNEXE 5 : Formulation des différents tampons utilisés pour l’hybridation in situ ................... 209 ANNEXE 6 : Protocole d’inclusion des rétines en vue d’une observation au microscope électronique à transmission .................................................................................................. 212 ANNEXE 7 : Tableau de suivi des souris .................................................................................. 213 [12] LISTE DES ABRÉVIATIONS β-Gal (Béta-Galactosidase) : enzyme codée par le gène Lac-Z capable d'hydrolyser des β-galactosides en monosaccharides. Elle est souvent utilisée comme marqueur indirect de l’expression d’un gène d’intérêt. ω3 et ω6 (oméga 3 et 6) : familles d’acides gras polyinsaturés, comportant plusieurs doubles liaisons et caractérisés par la localisation de leur première double liaison à partir de l’extrémité méthyle. Ainsi, les ω3 ont leur première double liaison à partir du 3ème carbone. ADN (Acide DésoxyriboNucléique) : support de l’information génétique. ARN (Acide RiboNucléique) : molécule très proche de l’ADN servant d’intermédiaire pour synthétiser les protéines. ARNm (Acide RiboNucléique messager) : ARN produit suite à l’épissage, soit ne comportant que des séquences codantes. ADNc (Acide DésoxyriboNucléique complémentaire) : séquence simple brin produite artificiellement à partir de l’ARNm et ne comportant donc que les régions codantes du gène d’intérêt. BSA (Bovine Serum Albumin ou albumine de sérum bovin) : protéine fréquemment utilisée dans les expérimentations de biochimie (immunofluorescence, ELISA…) Cd.s/m² (Candela seconde par mètre carré) : unité de mesure de la luminance (dérivée de l’intensité lumineuse) au cours du temps, employée pour qualifier l’intensité des flashs lumineux lors de la réalisation d’électrorétinogramme. cKO (conditionnal Knock Out) : inactivation sélective d’un gène dans un ou plusieurs type(s) cellulaire(s) chez une souris mutante. Cx (ou x est un chiffre) : nomenclature biochimique pour une chaîne carbonée comportant x atomes de carbone. C57Bl/6N : nomenclature officielle d’une lignée de Souris de laboratoire Black 6 fréquemment utilisée lors de la genèse de modèles fonctionnels de maladies humaines. [13] CNM (Myopathie CentroNucléaire) : maladie neuromusculaire congénitale se traduisant par des anomalies structurales et fonctionnelles des muscles squelettiques et caractérisée par une centralisation des noyaux de leurs fibres. DAPI (4’,6’-DiAmidino-2-PhénylIndole) : molécule fluorescente capable de se lier fortement aux bases adénines et thymines de l'ADN, souvent utilisée pour colorer les noyaux lors de la réalisation de marquages d’immunofluorescence. DHA (Acide DocosaHexaénoïque, C22:6) : Acide gras de la famille des omégas 3 (ω3). DMLA (Dégénérescence Maculaire Liée à l’Age) : maladie dégénérative d’évolution chronique touchant spécifiquement la région maculaire de la rétine responsable de la vision centrale. C’est une maladie multifactorielle favorisée par des prédispositions génétiques et/ou des facteurs environnementaux. ELOVL (ELongation Of Very Long fatty acid) : enzyme catalysant la première étape, étape de condensation, du cycle d’élongation des Very Long Chain Fatty Acids ou Acides Gras À Très Longue Chaîne. ENVA (École Nationale Vétérinaire d’Alfort) : une des quatre écoles vétérinaires de France. ERG (ÉlectroRétinoGramme) : examen électrophysiologique permettant d’analyser la réponse électrique de la rétine à une stimulation lumineuse et donc d’évaluer son fonctionnement. FA (FormAldéhyde) : solution de fixation des tissus souvent utilisée en histologie à une concentration de 4% en général. GCL (Ganglion Cell Layer) : couche des cellules ganglionnaires, l’une des trois couches nucléaires de la rétine. Hacd1 (3-HydroxyAcyl-CoA Deshydratase 1) : gène codant pour une enzyme à activité 3-hydroxyacyl-CoA déshydratase (HACD) qui participe à la 3ème étape du cycle d’élongation des acides gras à très longue chaîne. (HACD1, écriture du gène chez le Chien et l’Homme, Hacd1 écriture du gène chez la souris). HACD1-d5 : transcrit de HACD1 dépourvu de l’exon 5. HACD1-fl (full length) : transcrit complet de HACD1. [14] HES (Hémalun-Éosine-Safran) : coloration des tissus utilisée en routine sur coupe histologique. HIS (Hybridation In Situ) : technique de laboratoire permettant de localiser une séquence d’ARN messager connue sur une coupe histologique de tissu. Cela permet d’étudier le profil d’expression d’un gène. IF (ImmunoFluorescence) : technique d’immunomarquage permettant de visualiser les molécules d’intérêt sur coupe histologique à l’aide d’anticorps dirigés contre ces molécules et couplés à des fluorochromes. ILM (Inner Limiting Membrane) : membrane basale délimitant la face interne de la rétine et la séparant du vitré. INL (Inner Nuclear Layer) : couche nucléaire interne de la rétine constituée des corps cellulaires des cellules bipolaires, horizontales et amacrines. IPL (Inner Plexiform Layer) : couche plexiforme interne de la rétine, c'est-à-dire la couche synaptique entre les cellules bipolaires et les cellules ganglionnaires. KAR (3-KétoAcylcoA Reductase) : enzyme catalysant la deuxième étape, étape de réduction, du cycle d’élongation des Very Long Chain Fatty Acids ou Acides Gras À Très Longue chaîne. KO (Knock Out) : inactivation totale d’un gène chez une souris mutante. MET (Microscopie Électronique à Transmission) : technique de microscopie basée sur les informations fournies par un faisceau d’électrons « transmis » à travers un échantillon très mince. Les effets de l’interaction entre les électrons et l’échantillon donnent naissance à une image dont la résolution peut atteindre 0,08 nanomètre et un grossissement supérieur à 200 000 (« Microscopie électronique en transmission », 2015). NADPH (Nicotinamide Adenine Dinucléotide Phosphate) : source principale d’électron utilisée dans les réactions de biosynthèse cellulaire. NFL (Nerve Fiber Layer) : couche de la rétine constituée des axones des cellules ganglionnaires cheminant vers l’émergence du nerf optique. OCT (Optimal Cutting Temperature media) : milieu de montage utilisé pour réaliser des cryo-sections de tissus. [15] OLM (Outer Limiting Membrane) : zone d’adhérence entre les segments internes des photorécepteurs et les cellules de Müller. ONL (Outer Nuclear Layer) : couche nucléaire externe de la rétine constituée des corps cellulaires des photorécepteurs. OPL (Outer Plexiform Layer) : couche plexiforme externe de la rétine, c'est-à-dire la couche synaptique entre les photorécepteurs et les cellules bipolaires. Pb (Paire de bases) : unité de mesure utilisée en génétique pour définir la taille d’une séquence d’ADN. PC (PhosphatidylCholine) : ce terme désigne les phospholipides composés d'une choline, d'un phosphate, d'un glycérol et de deux acides gras. PBS (Phosphate Buffer Saline) : tampon phosphate couramment utilisé en biochimie pour ses propriétés d’isotonicité et d’innocuité. PCR (Polymerase Chain Reaction) : méthode de biologie moléculaire permettant d’amplifier in vitro une séquence d’ADN connue grâce à une réaction de polymérisation en chaîne. PTP (Protein Tyrosine Phosphatase) : enzyme déphosphorylant des résidus tyrosine des protéines et jouant ainsi un rôle important dans des voies de transduction de signal. Ptpla (Protein Tyrosine Phosphatase-Like A) : autre nom du gène Hacd1. RPM (Réflexe PhotoMoteur) : contraction pupillaire survenant de façon physiologique suite à une exposition de l’œil à la lumière. SINE (Short Interspersed Nuclear Element) : courtes séquences d’ADN, d’environ une centaine de paires de bases, répétées et dispersées au sein du génome. TCO (Tomographie par Cohérence Optique) : technique d’imagerie médicale mise au point au début des années 90 permettant de révéler de manière non invasive les structures internes de l’œil avec une définition micrométrique. TER (Trans-2-Enoylcoa Reductase) : enzyme catalysant la quatrième et dernière étape, étape de réduction, du cycle d’élongation des Acides Gras À Très Longue Chaîne. [16] ULCFA (Ultra Long Chain Fatty Acid) : acides gras comportant une chaîne carbonée de 26 carbones ou plus (sous-groupe appartenant aux Acides Gras À Très Longue Chaîne). ULC-PUFA (Ultra Long Chain PolyUnsaturated Fatty Acid) : acides gras comportant une chaîne carbonée de 26 carbones ou plus avec plusieurs insaturations (sous-groupe appartenant aux ULCFA). VLCFA (Very Long Chain Fatty Acid aussi nommés AGTLC, Acide Gras à Très Longue Chaîne) : acides gras ayant une chaîne carbonée composée de 18 carbones ou plus. [17] INTRODUCTION L’objectif de la partie expérimentale de cette thèse était d’analyser l’expression du gène Hacd1 au niveau de la rétine de Souris ainsi que de caractériser les conséquences phénotypiques de la mutation de ce gène dans cet organe. La Souris servait ici de modèle d’étude pour la mutation de Hacd1 qui est à l’origine d’une myopathie centronucléaire chez le Chien (Blot et al., 2002; Pelé et al., 2005) et chez l’Homme (Muhammad et al., 2013). Cette mutation a été initialement découverte suite à l’observation de cas spontanés de myopathie congénitale chez des Labradors retrievers présentés en consultation de neurologie à l’école nationale vétérinaire d’Alfort dans les années 1990 (Blot et al., 2002). Par la suite, de nombreuses études réalisées chez le Chien puis chez la Souris ont permis de caractériser l’atteinte musculaire et d’étudier l’expression du gène Hacd1 à l’échelle de l’organisme (Blondelle et al., 2015; Blot et al., 2002; Fouchère et Taleb, 2012). Il a ainsi été démontré que Hacd1 code pour une enzyme participant au cycle d’élongation des Very Long Chain Fatty Acids (VLCFA) (Ikeda et al., 2008). Il a aussi été établi que l’expression de ce gène était très forte dans certains tissus : les muscles striés squelettiques et le cœur, ainsi que la rétine dans une moindre mesure (Blondelle, 2013). Plus récemment, une seconde série d’études portant sur Hacd1 et la rétine a mis en évidence que les souris mutées présentaient un électrorétinogramme (ERG) modifié compatible avec un phénomène de dégénérescence rétinienne (Blondelle, 2013; Fouchère et Taleb, 2012). Cela s’apparentait aux observations réalisées dans la maladie héréditaire de Stargardt 3 liée à la mutation d’une enzyme ELOV4 participant, elle aussi, au cycle d’élongation des VLCFA (Harkewicz et al., 2012; McMahon et al., 2007). Cependant, de façon surprenante, aucune expression de Hacd1 n’a été mise en évidence dans les photorécepteurs (Fouchère et Taleb, 2012), contrairement à ELOVL4 (Lagali et al., 2003). Hacd1 s’exprimait dans la couche des cellules bipolaires et ganglionnaires, sans que l’identité exacte des cellules l’exprimant ne fût déterminée (Fouchère et Taleb, 2012). [19] Notre étude a été réalisée sur la base de ces résultats préliminaires et présentaient des objectifs dans la continuité. En effet, dans un premier temps, nous avons cherché à caractériser de façon plus précise les cellules rétiniennes dans lesquelles s’exprime Hacd1 à l’aide de techniques de double immunofluorescence. Nous avons aussi voulu confirmer que Hacd1 ne s’exprimait pas dans les photorécepteurs en mettant au point une technique d’hybridation in situ. Par ailleurs, nous avons réalisé des analyses histologiques sur les rétines des souris mutées dans le but de confirmer l’hypothèse de dégénérescence rétinienne. Finalement, nous avons réalisé des évaluations cliniques (reflet du fond d’œil et ÉlectroRétinoGramme, ERG) sur un nouveau lot de souris, là encore pour confirmer l’hypothèse de dégénérescence rétinienne. Cette évaluation clinique a été couplée à des analyses de composition lipidique des rétines afin de pouvoir faire le lien entre l’atteinte fonctionnelle de la rétine et un éventuel déficit en VLCFA dû à la mutation de Hacd1. [20] PARTIE 1 : ÉTUDE BIBLIOGRAPHIQUE Cette première partie a été conçue afin d’introduire les différentes notions qui seront nécessaires à la compréhension de la partie expérimentale. Le premier point évoqué concerne la rétine, son anatomie, son fonctionnement et son évaluation clinique. Finalement, un paragraphe décrit les dégénérescences rétiniennes, affections provoquant une perte visuelle irréversible et pouvant être à l’origine de la modification de l’électrorétinogramme observé précédemment chez les Hacd1-KO pour Hacd1. Le deuxième point abordé concerne les VLCFA : leur métabolisme, leurs rôles à l’échelle cellulaire, à l’échelle de l’organisme et au niveau de la rétine. Étant donné que Hacd1 code une enzyme intervenant dans le cycle d’élongation des VLCFA (Ikeda et al., 2008), nous avons émis l’hypothèse que les souris mutées présenteraient des taux plus faibles en VLCFA. Il est donc intéressant de connaître leur rôle en temps normal, en particulier dans la rétine. Le troisième point évoqué dans la bibliographie porte sur le gène Hacd1 en lui-même : sa découverte, son rôle, son expression tissulaire. Finalement, une dernière partie est consacrée aux résultats préliminaires obtenus dans le laboratoire de Génétique Fonctionnelle et Médicale de l’ENVA par Myriam Taleb, Renaud Fouchère et Jordan Blondelle concernant l’expression de Hacd1 dans la rétine ainsi que les analyses morphologiques précédemment réalisées sur les rétines de Hacd1-KO pour ce gène. [21] I. STRUCTURE, FONCTION ET ÉVALUATION DE LA RÉTINE 1. Introduction sur l’œil et la rétine Chez les mammifères, l’œil, ou plus précisément le globe oculaire, est divisé en 3 tuniques : la tunique fibreuse, la tunique vasculaire et la tunique nerveuse (Figure 1) (Chahory, 2014; Ross et Pawlina, 2011). La tunique fibreuse est la couche la plus externe. Elle comporte la sclère, blanche, et la cornée, transparente. Elle est essentiellement composée de tissu conjonctif riche en collagène ce qui lui confère une solidité importante. Cette couche forme l’armature du globe et permet de protéger les couches plus internes. La tunique vasculaire, ou uvée, est la couche intermédiaire. Elle est constituée du corps ciliaire, de l’iris et de la choroïde. Cette tunique assure l’irrigation des différentes structures de l’œil et participe au renouvellement des substances impliquées dans le fonctionnement de cet organe. La choroïde, qui tapisse la partie postérieure de l’œil, assure plus particulièrement l’irrigation de la rétine. Elle est très foncée, ce qui permet de limiter les réflexions de lumière à l’intérieur du globe oculaire. La tunique nerveuse, ou rétine, est la tunique la plus interne. Elle est constituée de l’épithélium pigmentaire et de la neurorétine. Chez les animaux pigmentés, l’épithélium pigmentaire contient une grande quantité de mélanine permettant d’absorber les rayons lumineux. Il contribue aussi au renouvellement des pigments photosensibles servant au codage visuel (partie du cycle visuel) et forme une barrière protectrice entre la choroïde et les photorécepteurs (barrière hématorétinienne) (Veleri et al., 2015). La neurorétine, quant à elle, capte le signal lumineux grâce aux photorécepteurs, cônes et bâtonnets, puis transmet l’information [23] reçue au cortex visuel via le nerf optique. Chez les vertébrés, la rétine provient d’une évagination du diencéphale ; en ce sens, elle fait partie du système nerveux central. Au centre de la rétine se trouve une zone circulaire correspondant à l’émergence du nerf optique appelée papille. Le nerf optique est constitué des axones des cellules ganglionnaires qui se dirigent vers l’encéphale. La papille optique est traversée par les vaisseaux qui irriguent la rétine. Le rôle essentiel de l’œil est d’assurer la convergence des rayons lumineux sur la rétine (Richard et Orsal, 2001). Une des caractéristiques principale des régions antérieures et internes de l’œil est donc la transparence. L’œil comporte aussi deux dioptres oculaires : la cornée et le cristallin qui permettent normalement de faire converger les rayons lumineux provenant d’un objet sur la rétine, quelle que soit sa position (Richard et Orsal, 2001). Remarque : l’œil de l’Homme et de la Souris sont relativement similaires. Une différence notable porte sur la forme et la taille du cristallin. Celui-ci est rond et proportionnellement plus volumineux chez la Souris où il occupe environ 75% de l’espace intraoculaire (Smith et al., 2001; Treuting et al., 2012; Veleri et al., 2015). Aussi, la Souris ne possède pas de fovéa (Müller, 2002), dépression située à proximité du centre optique de la rétine et constituée essentiellement de cônes (Ross et Pawlina, 2011). Cette région permet chez l’Homme d’améliorer la netteté et les couleurs de l’image perçue. Finalement, la vascularisation rétinienne est beaucoup plus développée chez la Souris que chez l’Homme. Dans la suite de l’exposé, nous nous focaliserons sur l’étude de la rétine, sur laquelle porte notre étude expérimentale. [24] Figure 1 : Organisation de l'œil en 3 tuniques. Représentation schématique et coupe histologique correspondante A : Représentation schématique d’une coupe sagittale d’œil humain (d’après Mojo, 2013). B : Représentation schématique d’une coupe sagittale d’œil de Souris (d’après Veleri et al, 2015). C : Coloration Hémalun-Eosine-Safran d’une coupe histologique de 4 μm d’épaisseur d’œil de Souris. (Cliché d’une de nos coupes de rétine réalisée par le laboratoire d’anatomie pathologique de l’ENVA). [25] 2. Histologie de la rétine a. La rétine, une extension du système nerveux central La neurorétine, comme la majorité des autres structures du système nerveux central, comporte de nombreux types de neurones différents (Masland, 2001). Les cinq principaux types de cellules neuronales observées dans la rétine sont les photorécepteurs (cônes et bâtonnets), les cellules bipolaires, horizontales, ganglionnaires et amacrines (Ross et Pawlina, 2011). Chacune de ces grandes classes de cellules neuronales est subdivisée en sous-populations. Ainsi, chez la plupart des vertébrés, il existe par exemple trois types de cônes et dix types de cellules bipolaires (Müller, 2002). En tout, chez les mammifères, la rétine est constituée d’environ 55 types de neurones présentant tous une fonction différente (Masland, 2001). En plus des cellules neuronales, la rétine comporte des cellules gliales : cellules de Müller, cellules microgliales et astrocytes (Chen et al., 2002). Ces cellules jouent un rôle dans l’homéostasie cellulaire ainsi qu’un rôle de protection de la rétine. Par exemple, les cellules de Müller forment les deux membranes limitantes. La membrane limitante interne délimite la rétine neurale du vitré et la membrane limitante externe sert de support aux photorécepteurs (Lahunta et al., 2014; Ross et Pawlina, 2011). D’autre part, les cellules de Müller entourent les corps des cellules neuronales, en particulier des cellules ganglionnaires, et sont indispensables à leur survie. Finalement, les cellules gliales participent aussi à la défense immunitaire innée de la rétine : elles la protègent contre l’invasion par des microorganismes et participent à l’élimination des cellules lésées. Ainsi, lors d’atteinte neurodégénérative à l’origine de lésions des photorécepteurs, les cellules gliales sont capables de s’activer en se dédifférenciant. Elles peuvent alors se déplacer vers le segment externe des photorécepteurs afin de faciliter l’élimination des cellules abîmées en phagocytant les débris cellulaires (Chen et al., 2002). [26] b. La rétine, un tissu stratifié La rétine est un tissu stratifié d’épaisseur comparable, environ 150 à 200 µm, quelle que soit l’espèce et ce indépendamment de la taille de l’œil lui-même (Glickstein et Millodot, 1970; Wisden et Morris, 2002). L’observation d’une coupe obtenue suite à une section perpendiculaire à la surface de la rétine permet de visualiser 10 couches bien délimitées comme l’illustre la Figure 2. Les couches les plus proches de la source lumineuse sont qualifiées d’«internes » (ou « inner » en anglais) ; les segments plus en arrière sont qualifiés d’« externes » (ou « outer » en anglais). Par ailleurs, toutes les rétines de vertébrés comportent trois couches nucléaires constituées de corps cellulaires de neurones et deux couches de synapses intercalées. Les différentes structures rencontrées dans la rétine en partant de l’extérieur vers l’intérieur sont (Gartner et Hiatt, 2007; Ross et Pawlina, 2011) : 1. l’épithélium pigmentaire ; 2. les segments externes et internes des photorécepteurs ; 3. la membrane limitante externe (OLM), il ne s’agit pas réellement d’une membrane mais d’une zone d’adhérence entre les segments internes des photorécepteurs et les cellules de Müller ; 4. la couche nucléaire externe (ONL), constituée des corps cellulaires des photorécepteurs (cônes et bâtonnets) ; 5. la couche plexiforme externe (OPL), couche synaptique reliant les cellules bipolaires, les cellules horizontales et les photorécepteurs ; 6. la couche nucléaire interne (INL) constituée des corps cellulaires des cellules bipolaires, horizontales et amacrines ; 7. la couche plexiforme interne (IPL), couche synaptique reliant les cellules ganglionnaires, les cellules bipolaires et les cellules amacrines ; 8. la couche des cellules ganglionnaires (GCL), constituée majoritairement de cellules ganglionnaires ; 9. la couche des fibres optiques (NFL) constituées des axones des cellules ganglionnaires rejoignant la papille, région d’émergence du nerf optique ; 10. la membrane limitante interne (ILM), membrane basale délimitant la face interne de la rétine et la séparant du vitré. [27] Figure 2 : Représentation schématique des différentes couches de la rétine et comparaison avec une coupe histologique de la rétine colorée à l'Hémalun-Éosine-Safran. D’après Herbert, 2008. (schéma inspiré de http://www.bio.miami.edu/tom/courses/protected/bil265/retina.jpg) [28] c. Les caractéristiques histologiques des photorécepteurs, cellules sensorielles de la rétine Les photorécepteurs sont les cellules responsables de la transduction du signal lumineux en signal électrique, ce sont donc les cellules sensorielles de la rétine (Gartner et Hiatt, 2007; Ross et Pawlina, 2011; Sjaastad et al., 2003). Il en existe deux types : les cônes et les bâtonnets. Leur structure histologique est très spécifique et adaptée à leur fonction. Chaque photorécepteur est subdivisé en 3 parties : un segment externe, un segment interne et l’extrémité synaptique (Sjaastad et al., 2003). Le segment externe est le lieu de réception et de transduction du signal lumineux (Sjaastad et al., 2003). Il est situé au contact de l’épithélium pigmentaire. Celui-ci absorbe les rayons lumineux après qu’ils aient stimulé les photorécepteurs afin de limiter le phénomène de réflexion qui aurait un impact négatif sur la netteté de l’image perçue (Ross et Pawlina, 2011). Le segment externe est reconnaissable à ses très nombreux disques membranaires empilés permettant d’augmenter sa surface membranaire. En effet, sa membrane joue un rôle très important car elle contient les pigments photosensibles qui permettent de transformer le signal lumineux en signal chimique. La forme du segment externe varie en fonction du type de photorécepteurs : les bâtonnets ont un segment externe très long et de forme cylindrique alors que les segments externes des cônes sont plus courts et de forme conique (Figure 3). Par ailleurs, les segments externes des bâtonnets sont constitués d’un plus grand nombre de disques membranaires, ce qui leur confère une plus grande sensibilité à la lumière (Sjaastad et al., 2003). Le segment interne contient les organites nécessaires au métabolisme cellulaire ainsi que le noyau de la cellule (Risse, 1999; Sjaastad et al., 2003). La partie du segment interne comportant le noyau forme la couche nucléaire externe, 6ème couche de la rétine. Les segments interne et externe sont rattachés par un cil connecteur. [29] La terminaison synaptique est plus ou moins complexe en fonction du type de photorécepteur. Un bouton synaptique met en contact le photorécepteur avec une cellule bipolaire et deux cellules horizontales, on parle de triade (Richard et Orsal, 2001). Le pied des bâtonnets ne contient qu’une seule triade, par contre les pieds de cônes comportent plusieurs dizaines de triades. Chaque cône est donc relié à un très grand nombre de cellules neuronales. Par ailleurs, ces synapses sont des synapses à ruban caractérisées par la présence de corps ou rubans synaptiques arrimant les vésicules synaptiques (Risse, 1999). Cette configuration particulière permet une neurotransmission plus rapide, précise et efficace. Ce type de synapse n’a été actuellement observé que dans les organes sensoriels (photorécepteurs, cellules bipolaires, cellules cochléaires entre autres) (Petit, 2010; Sterling et Matthews, 2005). Figure 3 : Représentation schématique (A) et illustration histologique (B) des photorécepteurs. D’après Dubuc, 2013. [30] Les segments externes des photorécepteurs sont en relation très étroite avec l’épithélium pigmentaire (Ross et Pawlina, 2011; Veleri et al., 2015). Ce dernier leur apporte les nutriments et prend en charge leurs déchets puisque les photorécepteurs ne sont pas en contact avec des vaisseaux sanguins. Il participe aussi au cycle visuel en assurant la régénération des pigments photosensibles. Environ 10% du segment externe est phagocyté par l’épithélium pigmentaire chaque jour dans le cadre du renouvellement membranaire. Le segment externe est donc entièrement renouvelé tous les 10 à 15 jours (Veleri et al., 2015). L’épithélium pigmentaire est aussi nécessaire au bon fonctionnement et à la survie des photorécepteurs. [31] 3. Fonctionnement de la rétine a. La réception du signal lumineux et la transmission de l’information au cortex visuel La réception du signal lumineux se fait au niveau des segments externes des photorécepteurs (Ross et Pawlina, 2011). Cependant, comme indiqué précédemment, les cellules ganglionnaires constituent les couches les plus internes de la rétine alors que les photorécepteurs sont situés vers l’extérieur. La lumière doit donc traverser l’ensemble de la rétine avant d’activer les cônes et les bâtonnets ; on parle de rétine inversée (Richard et Orsal, 2001) (Figure 4). Figure 4 : Illustration de la notion de rétine inversée Schéma réalisé à partir d’un cliché de rétine de souris C57Bl6 pris par le laboratoire d’anatomie pathologique de l’ENVA. La stimulation des photorécepteurs dépend de l’intensité lumineuse. La vision nocturne est assurée par les bâtonnets qui sont plus sensibles à la lumière que les cônes. Cependant, ceux-ci ne permettent pas de différencier les couleurs. À la lumière du jour, les bâtonnets sont saturés et les cônes prennent le relais (Sjaastad et al., 2003). Il existe différents types de cônes qui sont sensibles à des longueurs d’onde différentes, cela permet une vision en couleur. Chez l’Homme, il existe 3 types de cônes : L (564nm), M (533nm) et S (437nm) (Ross et Pawlina, 2011; Veleri et al., 2015). Chez la Souris, il n’en existe que deux (les M et les S) (Veleri et al., 2015). La [32] proportion de cônes par rapport aux bâtonnets dans la rétine varie en fonction des espèces et des conditions de luminosité dans laquelle vit l’animal (Sjaastad et al., 2003). Ainsi, la région périphérique de la rétine des espèces nocturnes est essentiellement constituée de bâtonnets. Chez la Souris, les cônes ne représentent que 3% des photorécepteurs de la rétine (Pinto et Enroth-Cugell, 2000). La transduction du signal (ou phototransduction dans ce contexte) est permise par des pigments sensibles à la lumière localisés dans la membrane des segments externes des photorécepteurs (Ross et Pawlina, 2011; Sjaastad et al., 2003). Il existe un seul type de pigments pour les bâtonnets : la rhodopsine. Il en existe plusieurs, sensibles à des longueurs d’onde différentes, en fonction du type de cône. Ces pigments sont tous formés d’une même molécule de rétinène, ou rétinal, attaché sous sa forme cis à une opsine. Suite à une stimulation lumineuse, le rétinène change de conformation et est libéré dans le cytoplasme où il active une cascade de signalisation faisant intervenir une protéine G (Figure 5) (Sjaastad et al., 2003; Veleri et al., 2015). Cette cascade aboutit à la fermeture des canaux sodiques, ce qui entraîne une hyperpolarisation de la cellule et une diminution de la libération de glutamate, le neurotransmetteur de la synapse à ruban (Gartner et Hiatt, 2007; Richard et Orsal, 2001; Sjaastad et al., 2003). Cela signifie donc que, de façon surprenante, il y a une plus grande libération de neurotransmetteur dans l’obscurité qu’à la lumière. Le trans-rétinal, molécule inactive formée suite à la stimulation lumineuse du segment externe des photorecepteurs, est transporté jusqu’à l’épithélium pigmentaire où il est recyclé en cis-rétinal (Veleri et al., 2015). Il retourne ensuite dans les photorécepteurs où il pourra de nouveau participer à la cascade de transduction du signal lumineux. L’épithélium pigmentaire joue donc un rôle essentiel dans le renouvellement des photopigments. [33] Figure 5 : Représentation schématique de la cascade de signalisation intervenant lors de la phototransduction au niveau d'un bâtonnet (d'après Veleri 2015). b. La rétine, un système complexe d’intégration de l’information Le signal électrique généré par les photorécepteurs est ensuite transmis successivement aux différentes couches de neurones de la rétine, nommés neurones d’intégration, jusqu’à atteindre les cellules ganglionnaires qui transmettent le signal au système nerveux central (Richard et Orsal, 2001). Les cellules bipolaires servent d’intermédiaires entre les photorécepteurs et les cellules ganglionnaires. Les cellules horizontales, quant à elles, relient latéralement plusieurs synapses de la couche plexiforme externe. Elles permettent donc de transmettre des informations en provenance des photorécepteurs situés en périphérie. De plus, plusieurs cellules horizontales communiquent par jonctions gaps, ce qui augmente l’étendue des connexions latérales. Le fonctionnement est équivalent pour les cellules amacrines qui forment des triades avec les cellules bipolaires et ganglionnaires dans la couche plexiforme interne (Richard et Orsal, 2001). Au bilan, la multiplication des neurones [34] d’intégration et des synapses permet un premier traitement de l’information dans la rétine. Finalement, une fois l’information reçue par les cellules ganglionnaires, celles-ci transmettent le signal codé en potentiels d’action jusqu’au cortex visuel (Richard et Orsal, 2001). Les potentiels d’action suivent leurs axones qui forment le nerf II, nerf optique, seul nerf afférent de l’œil. Les voies visuelles impliquées par la suite, ainsi que le traitement central de l’information ne seront pas détaillés dans ce manuscrit. [35] 4. Évaluation clinique de la rétine chez la Souris Les animaux de laboratoire sont très régulièrement utilisés dans le cadre d’études de médecine comparative afin d’étudier des maladies humaines touchant les structures oculaires. Le modèle murin est, par exemple, un modèle de choix dans l’étude des dégénérescences rétiniennes, ensemble de maladies neurodégénératives touchant la rétine et se caractérisant par un déficit visuel voire une cécité d’apparition plus ou moins lente (Chang, 2013; Veleri et al., 2015). Ces études peuvent avoir différents objectifs tels que déterminer les mutations causales ou la pathogénie des maladies encore mal caractérisées ou bien tester l’efficacité de nouveaux traitements. Dans tous les cas, il est nécessaire de pouvoir qualifier, voire quantifier de la manière la plus objective et reproductible possible, le niveau de vision de l’animal. Contrairement à l’Homme, il est difficile de déterminer si un animal présente un déficit visuel ou non. Chez les animaux de compagnie, l’anamnèse et les propriétaires peuvent orienter le diagnostic (Martin, 2001) mais cela est moins vrai avec les animaux de laboratoire. L’évaluation de la vision chez l’animal nécessite donc un examen ophtalmologique souvent complété par une évaluation fonctionnelle de la rétine. Afin de ne rien oublier, l’examen clinique se déroule toujours dans le même ordre. Le plan utilisé ci-dessous suit justement la chronologie d’un examen ophtalmologique normalisé fréquemment rencontré dans la littérature (Martin, 2001). Cependant, seuls les tests permettant d’évaluer la fonction ou les voies visuelles chez la Souris, notre animal d’étude, sont décrits ici. [36] a. Observation de l’animal à distance - évaluation fonctionnelle de la vision Comme tout examen clinique, l’évaluation d’un éventuel déficit visuel commence avec l’observation de l’animal à distance. Cela permet une évaluation fonctionnelle de la vision. Chez la Souris, cet examen consiste généralement en des mises en situation de l’animal. La Souris est un modèle de choix dans l’étude de nombreuses maladies oculaires, dont les maladies héréditaires. La mise au point de techniques d’évaluation fonctionnelle de la vision adaptées aux Souris représente donc un enjeu important ces dernières années. Il existe différentes variantes de tests de la vision fonctionnelle adaptées au modèle murin (Pinto et Enroth-Cugell, 2000). Ces tests se basent sur l’utilisation de cages spécialement aménagées avec des obstacles et un système de récompenses. Il est alors possible d'étudier les déplacements de l'animal en direct ou de les filmer. L'examinateur pourra aussi mesurer à l'aide de logiciels l’activité de l'animal (mesure de la distance parcourue et de la vitesse de locomotion…). Les prochains paragraphes comportent quelques exemples de protocoles adaptés au modèle murin décrits dans la littérature (Pinto et Enroth-Cugell, 2000; Prusky et al., 2004, 2000; Thompson et al., 2008a). i. Test du labyrinthe, maze based test et ses dérivés Une première série de tests mise au point à la fin des années 1990 consiste à entraîner des souris à se déplacer en direction d’un stimulus visuel donné (Prusky et al., 2000). L’image est ensuite modifiée et l’examinateur observe si la souris se trompe. Une récompense est remise seulement si la souris se dirige du bon côté. Le principal inconvénient de cette technique est lié au temps et à la main d’œuvre nécessaires à entraîner puis tester chaque souris. Ce test n’est donc pas facilement réalisable à grande échelle. [37] Une autre version du test consiste à mettre une souris sur une vitre transparente légèrement en hauteur (Pinto et Enroth-Cugell, 2000). D’un côté, la plateforme est reliée à une cachette normalement visible par la souris. De l’autre côté, la cachette est elle aussi visible pour l’animal mais elle n’est pas directement reliée à la vitre. L’examinateur relève ici la tendance de l’animal à se déplacer vers la bonne ou la mauvaise cachette. Notons toutefois que des souris saines se trompent dans environ 10% des cas. ii. L’Actimétrie Les deux tests du labyrinthe sont intéressants mais compliqués à mettre en œuvre. L’équipe de recherche de S. Thompson a donc récemment (2008) fait valider un protocole d’évaluation de la vision fonctionnelle chez la Souris s’appuyant sur une mesure de l’activité des rongeurs dans leur cage. Plus précisément, ils mesuraient l’utilisation d’une roue par des souris C57Bl/6 dans différentes conditions de luminosité et réalisaient une comparaison avec des conditions d’obscurité complète simulant une cécité. Ces expériences ont permis de démontrer que l’activité des souris était diminuée dans l’obscurité complète, les auteurs en ont conclu qu’une perte de vision est corrélée à une diminution de l’activité chez cette espèce (Thompson et al., 2008b). iii. Réflexion sur la sensibilité et la spécificité des tests du labyrinthe et d’actimétrie et facteurs de confusion Les résultats de ces deux tests dépendent aussi du tempérament, des conditions d’expérimentation et de l’état clinique de l'animal. Ainsi, un animal très peureux ou présentant une douleur risque de ne pas vouloir bouger ou de sembler hésitant. De plus, la majorité de ces tests ne sont pas très sensibles. Les animaux ne présentant qu'une perte de vision partielle ou unilatérale peuvent réussir le test sans trop de difficulté (Martin, 2001). De même, une vieille souris aura une activité réduite par rapport aux jeunes souris. Finalement, la familiarisation de l’animal avec le [38] matériel d’étude (roue…) doit aussi être pris en compte (Thompson et al., 2008a). Dans le cadre de cette thèse, la mutation d’intérêt, mutation du gène Hacd1, provoque une myopathie chez les individus homozygotes mutés. Cette maladie musculaire s’exprime cliniquement par une faiblesse musculaire et une fatigabilité à l’effort importante. En conséquence, les Hacd1-KO présentent un niveau de locomotion diminué par rapport aux souris contrôles et la myopathie représente donc un facteur de confusion important rendant ce test inexploitable. Influence des conditions de luminosité dans l’évaluation fonctionnelle de la vision chez la Souris : chez les animaux domestiques, les tests de types « parcours d’obstacle » sont réalisés dans un premier temps en lumière vive puis en lumière atténuée (Chahory, 2014). En effet, lors d’atrophies progressives de la rétine, les bâtonnets responsables de la vision dans l’obscurité sont les premières cellules touchées, ce qui se traduit par un déficit visuel observable d’abord en lumière atténuée. Toutefois, chez la Souris, les conditions lumineuses dans lesquelles sont réalisées les mesures d’activité locomotrice doivent être réfléchies afin d’éviter qu’elles n’entraînent un biais de confusion (Thompson et al., 2008b). En effet, la luminosité peut fortement influencer le comportement des souris. Ces animaux étant des proies, leur niveau d’activité est augmenté dans des conditions de lumière tamisée, on parle de masquage positif, et diminué en lumière vive afin de ne pas être repéré par d’éventuels prédateurs, on parle de masquage négatif (Thompson et al., 2008a). De fait, il s’agit d’animaux nocturnes. Cet élément peut aussi être pris en compte dans l’évaluation de la vision chez la Souris. Les animaux ayant des déficits visuels pourraient présenter un niveau d’activité indépendant des conditions de luminosité (absence de diminution de l’activité en lumière vive et vice versa) (Thompson et al., 2008b). iv. Placer visuel Il s’agit ici d’attraper la souris par la queue et de la soulever à environ 15 cm au-dessus d’une grille placée horizontalement. La souris est ensuite abaissée [39] progressivement afin de mesurer la distance entre le museau de l’animal et la surface à partir de laquelle l’animal étend ses membres antérieurs en direction de la grille (Pinto et Enroth-Cugell, 2000). En cas de déficit visuel la souris réagira plus tard, à une distance plus faible de la grille. Ce test est utilisé comme test de référence dans le cadre du protocole SHIRPA consistant en un dépistage des troubles de la vision sur les souris de laboratoire de Harwell. L’avantage de ce test est qu’il est facile et rapide à mettre en œuvre. Il est donc facilement réalisable sur un grand nombre d’individus. v. Test de la boule de coton ou du mouvement conjugué des yeux Ce test est souvent utilisé pour évaluer la vision chez les animaux domestiques, en particulier chez le Chat. Il s’agit de laisser tomber une boule de coton ou de déplacer un objet dans le champ visuel de l’animal, à environ 50 cm de sa tête, afin de capter son attention (Martin, 2001). Le mouvement des yeux doit normalement suivre le déplacement de l’objet et les deux yeux doivent présenter un mouvement conjugué (Chahory, 2014). Ce test est praticable chez la Souris mais sa répétabilité et donc son interprétation semble difficile étant donnée la grande nervosité de l’espèce. Par ailleurs, les Souris ont des iris très larges qui occupent quasiment toute la surface visible de l’œil (Pinto et Enroth-Cugell, 2000). Il est donc difficile de suivre leur mouvement et il faut alors se concentrer sur le mouvement de la pupille. Ce test a été utilisé sur différentes lignées de Souris dans les années 1980 et a permis d’identifier plusieurs mutants présentant des résultats anormaux. Il n’est toutefois pas assez précis pour pouvoir être considéré comme un test de référence pour l’évaluation de la vision fonctionnelle chez les rongeurs. Réflexion sur la sensibilité et spécificité de ce test : les animaux se lassent assez rapidement de ce test, la première impression est donc meilleure (Martin, 2001). [40] b. Réflexes photomoteurs En raison de la sensibilité et de la spécificité moyennes des tests précédents, les réflexes photomoteurs doivent être systématiquement contrôlés. De plus, en cas de déficit visuel avéré, ces réflexes orientent dans la localisation de l’atteinte des voies visuelles (Gelatt, 2013). En effet, ce réflexe fait intervenir la rétine pour la perception du stimulus lumineux. Le nerf optique transmet le signal au tronc cérébral (région prétectale puis noyaux parasympathiques du nerf III). Finalement, les nerfs oculomoteurs transmettent le signal moteur entraînant la constriction pupillaire réflexe des deux yeux. Les réflexes photomoteurs s’évaluent en lumière atténuée afin que les pupilles de l’animal soient dilatées au départ (Wilhelm, 1998). L’examinateur dirige pendant 3 à 4 secondes un faisceau lumineux (transilluminateur, par exemple) sur l’un des yeux et observe le diamètre des deux pupilles. La manœuvre est ensuite répétée en éclairant l’autre œil après que les pupilles ont repris leur diamètre normal. En temps normal, l’illumination d’un œil entraîne la constriction de la pupille éclairée (réflexe photomoteur direct) et la constriction de la pupille controlatérale (réflexe photomoteur indirect ou consensuel) (Chahory, 2014; Gelatt, 2013). Ainsi, par exemple, en cas d’atteinte sévère rétinienne bilatérale (dégénérescence rétinienne par exemple, notre objet d’étude par la suite), les réflexes photomoteurs direct et consensuel sont tous deux absents et ce quel que soit l’œil stimulé. Au contraire, une atteinte rétinienne unilatérale entraînera une perte des réflexes photomoteurs direct et consensuel lorsqu’on éclaire l’œil lésé et une persistance des deux réflexes lorsqu’on éclaire l’œil non lésé. Le réflexe photomoteur varie suivant les espèces. Chez la Souris, le réflexe photomoteur normal est rapide, complet (myosis serré) et constant pendant toute la durée d’éclairage (Hussain et al., 2009). Le diamètre de la pupille est plus ou moins resserré en fonction de l’intensité du faisceau lumineux (Pennesi et al., 1998). [41] Réflexion sur la sensibilité et spécificité de ce test : bien qu’il s’agisse d’un test facile à réaliser, la sensibilité de ce test n’est pas très bonne. En effet, il a été démontré chez le rat que ce réflexe fait intervenir une voie qui comprend un petit nombre de cellules ganglionnaires spécialisées situées spécifiquement dans le cadran ventral et nasal de la rétine (Young et Lund, 1998). Or ces cellules ne feraient pas partie des voies visuelles principales (Pinto et Enroth-Cugell, 2000). Il se pourrait donc qu’une atteinte localisée de la rétine dans une autre région n’entraîne pas de défaut des réflexes photomoteurs. c. Évaluation des structures oculaires i. Évaluation de la transparence du segment antérieur, reflet du fond d’œil Lorsqu’un animal présente un déficit visuel, l’examen des structures oculaires peut commencer par rechercher le reflet du fond d’œil : reflet de la lumière émise par le transilluminateur de Finoff sur le fond d’œil (Chahory, 2014; Martin, 2001). L’observation de ce reflet indique que les milieux antérieurs sont suffisamment transparents pour permettre la diffusion des rayons lumineux jusqu’à la rétine, ce qui signifie que, le cas échéant, la cécité est d’origine rétinienne ou post-rétinienne. A l’inverse, l’absence de visualisation de ce reflet doit entraîner un examen plus poussé des structures antérieures à la rétine : cornée, chambre antérieure, cristallin, vitré. ii. Examen du fond d’œil Dilatation de la pupille Afin de réaliser un examen du cristallin, du segment postérieur ou de la rétine, tel que l’examen du fond d’œil, il est nécessaire d’obtenir une mydriase des pupilles de l’animal. Pour cela on peut utiliser un collyre mydriatique tel que le tropicamide [42] (Mydriaticum® collyre 0,5 %, antagoniste muscarinique) ou la phényléphrine (Néosynéphrine® collyre 2,5 %, agoniste adrénergique) qui ont une durée d’action de 5 à 6h chez les carnivores domestiques et d’environ 5 à 10 minutes chez la souris (Peachey et Ball, 2003; Tanimoto et al., 2009; Weymouth et Vingrys, 2008). Il est aussi possible d’appliquer de l’atropine 1% (parasympatholytique) mais en pratique cette molécule est rarement utilisée car sa durée d’action est plus longue. Méthodes d’observation du fond d’œil chez la Souris Une fois la pupille dilatée, l’observation du fond d’œil peut se faire à l’aide d’un ophtalmoscope direct (dioptrie 0 ou -1) ou indirect (Figure 6). L’ophtalmoscope direct est un appareil grossissant qui produit un faisceau lumineux qui est réfléchi par le fond d’œil et retourne ainsi à l’œil de l’examinateur en passant par une lentille contenue dans l’appareil (Chahory, 2014; Gelatt, 2013). Elle ne nécessite pas toujours de dilater la pupille au préalable mais cela facilite l’observation. Cette technique permet également d’observer les autres structures intraoculaires en réglant la lentille sur différentes dioptries. Globalement, il s’agit une technique simple à mettre en œuvre mais elle ne permet d’obtenir qu’une image partielle de la rétine et elle ne permet pas une vision en relief (Gelatt, 2013). L’ophtalmoscopie indirecte consiste quant à elle à interposer une lentille convergente entre la source lumineuse, généralement un ophtalmoscope binoculaire fixé sur le front de l’examinateur, et l’œil de la souris. L’image obtenue est alors une image inversée de la rétine. Cette technique permet de visualiser un champ d’observation étendu et en relief mais elle nécessite une plus grande maîtrise de la part du manipulateur. L’ophtalmoscopie indirecte est la technique de référence employée en recherche clinique afin de visualiser le fond d’œil chez la Souris. Les articles de référence recommandent d’utiliser une lentille Volk 90D mais précisent que les lentilles Volk 60D ou 78D fonctionnent aussi chez la Souris (Chang, 2013; Hawes et al., 1999). [43] L’un des inconvénients de l’ophtalmoscopie, directe ou indirecte, consiste en le fait qu’il faille que l’ophtalmoscope produisant la source lumineuse soit parfaitement aligné avec l’œil de l’animal. Chez les rongeurs, cela peut s’avérer particulièrement compliqué étant donné la taille de l’œil et la gêne occasionnée par la lumière vive. Une technique basée sur l’utilisation d’une loupe binoculaire a donc aussi été mise au point chez la Souris (Pinto et Enroth-Cugell, 2000). Cette technique permet d’observer le fond à plus gros grossissement, d’obtenir une image en relief et de prendre des photos plus facilement. Cependant, elle nécessite d’anesthésier les souris, cela prend donc plus de temps à réaliser et il faut prendre en compte le risque anesthésique qui n’est pas négligeable chez ces espèces. Figure 6 : Illustration de l'ophtalmoscopie directe (A) et indirecte (B). D’après les sites : www.medicalexpo.fr et www.animaleyedoctor.fr ainsi que Gelatt, 2013. Aspect normal du fond d’œil chez la Souris L’examen du fond d’œil permet d’évaluer l’aspect de la rétine de l’animal. Cependant, celle-ci est transparente, ce sont donc les structures sous-jacentes qu’on observe en temps normal. Le fond d’œil se compose de la papille, émergence du nerf optique et de [44] la vascularisation. L’examinateur observe aussi la couleur du fond d’œil. L’aspect d’un fond d’œil normal est illustré Figure 7 (Ramalho et al., 2002). Notons que chez la Souris, contrairement aux carnivores domestiques, il n’y a pas de tapis. La couleur du fond d’œil varie donc entre le noir pour les souris pigmentées et le rouge pour les souris albinos (Chang, 2013). Figure 7 : Photographie d'un fond d'œil normal de souris C56Bl/6J observé à l'ophtalmoscope indirect. La flèche indique la papille optique. La couleur globale du fond d’œil est marron et il n’y a pas de tapis réfléchissant. Les veines (v) sont plus larges que les artères (a). (illustration d’après Ramalho, 2002) L’examen du fond d’œil permet de diagnostiquer différentes affections rétiniennes. Les lésions du fond d’œil évocatrices d’une dégénérescence rétinienne seront décrites un peu plus loin, paragraphe 5b, dans la partie consacrée à ces maladies. Remarque sur la spécificité et la sensibilité du fond d’œil : l’aspect physiologique du fond d’œil est très variable en fonction des espèces et des individus. Il faut faire attention à ne pas confondre les variations physiologiques avec des variations pathologiques. [45] d. Électrorétinogramme L’électrorétinographie (ERG) est un examen qui consiste à enregistrer l’activité électrique de la rétine après une stimulation lumineuse (Gelatt, 2013; Risse, 1999). C’est une technique diagnostique non invasive utilisée à la fois en clinique et en recherche (DeMarco et al., 2007; Tanimoto et al., 2009). Elle permet d’obtenir des informations sur le fonctionnement de la rétine. Chez les animaux de laboratoire, l’électrorétinographie est utilisée afin de dépister des maladies touchant la rétine, de caractériser les atteintes fonctionnelles associées aux différents types de dégénérescence rétinienne, d’évaluer l’efficacité d’un traitement, etc (Peachey et Ball, 2003; Tanimoto et al., 2009). Dans le cadre des études expérimentales de médecine comparative, l’électrorétinographie a été très largement développée ces dernières années chez la Souris. En effet, cette espèce est actuellement devenue le modèle de choix pour les nombreuses maladies oculaires d‘origine génétique (Chang, 2013; Peachey et Ball, 2003). De plus, les tracés d’ERG sont comparables chez la Souris et chez l’Homme (Geller, 2005; Tanimoto et al., 2013) et la manipulation génétique des Souris permet d’obtenir régulièrement de nouveaux modèles à étudier. Cependant, bien qu’il s’agisse d’une technique peu invasive, qui nécessite néanmoins une anesthésie, elle reste relativement complexe à mettre en œuvre, surtout dans le cadre d’études expérimentales. Par exemple, le protocole employé doit être normalisé afin que les résultats soient comparables avec les données de la littérature et reproductibles (Bayer et al., 2001). Par ailleurs, le matériel nécessaire aux mesures coûte relativement cher et n’est donc pas disponible en dehors de grands centres hospitaliers ou d’unités de recherche spécialisées. De plus, la réalisation et l’interprétation des tracés d’ERG nécessitent une réelle expertise. [46] i. Description d’un protocole chez la Souris Étapes 1 – choix des souris témoins : Dans le cadre d’une étude expérimentale, il est important de bien choisir les souris témoins afin que les deux lots (muté/témoin) soit comparables. Par exemple, il a été démontré que les tracés ERG variaient avec l’âge (C. Li et al., 2001) ; il faut donc étudier des souris d’âges similaires. Globalement, lors de la réalisation d’ERG, de très nombreux facteurs entrent en jeu et peuvent être à l’origine d’une variabilité non négligeable (Peachey et Ball, 2003; Tanimoto et al., 2009). Afin de limiter l’introduction de biais de sélection, il est donc fortement recommandé d’utiliser comme témoins des souris sauvages ou hétérozygotes saines provenant des mêmes portées que les souris malades afin que leurs génotypes et les conditions d’élevage soient le plus similaires possible. Étapes 2 - Phase d’adaptation : dans un premier temps, il est nécessaire de préparer les animaux en les plaçant à l’obscurité (adaptation scotopique). Cela permet d’adapter les bâtonnets avant de réaliser les mesures. La durée de cette phase d’adaptation est variable en fonction de l’espèce (Ropstad et Narfström, 2007). En général, les animaux sont accoutumés à l’obscurité au cours de la nuit précédant l’expérience, soit 12h au moins (Weymouth et Vingrys, 2008) mais selon certaines études, 2h d’adaptation à l’obscurité peuvent suffire chez la Souris (Pinto et al., 2004). L’opérateur peut aussi choisir de laisser les animaux en lumière vive (adaptation photopique) pour évaluer le fonctionnement des cônes mais cette technique est moins fréquemment employée chez la Souris dont la rétine est très majoritairement composée de bâtonnets. En fonction du type d’adaptation, les tracés ne sont pas interprétables de la même façon. Une adaptation dans des conditions scotopiques permet d’étudier à la fois la réponse des bâtonnets et des cônes en fonction de l’intensité du stimulus lumineux, alors qu’une adaptation dans des conditions photopiques ne permet d’étudier que les cônes (DeMarco et al., 2007; Ropstad et Narfström, 2007). [47] Étape 3 - Préparation des souris : lors de la réalisation de l’examen, il faut que les pupilles de la souris soient en mydriase. Un collyre mydriatique doit donc être appliqué environ 10 min avant le début des mesures. Par ailleurs, lors de l’enregistrement, l’animal doit être immobile ; les souris sont donc anesthésiées. Les molécules généralement utilisées pour anesthésier les souris sont un mélange de kétamine, dissociatif (à des concentration comprises entre 67 et 80 mg/kg en fonction des données de la littérature) et xylazine, α2-agoniste (de 12 à 16 mg/kg) (Peachey et Ball, 2003; Tanimoto et al., 2009). L’injection du mélange anesthésique se fait par voie intra-péritonéale. Ce protocole est adapté pour réaliser des mesures pendant 30 à 40 min ; si l’enregistrement dure plus longtemps, il faut augmenter les doses d’environ 20%. D’autres protocoles peuvent être utilisés mais il faut veiller à ne pas utiliser de barbituriques qui peuvent avoir un effet sur le fonctionnement de la rétine et plus particulièrement sur le fonctionnement des cellules bipolaires et des cellules de Müller (Green et al., 2012; Kapousta-Bruneau, 1999). Étape 4 - Mise en place du montage Positionnement des souris La partie de la pièce où seront installées les souris doit se trouver le plus loin possible de tout parasite électrique pouvant interférer avec les tracés. En particulier, il est préconisé que le matériel de mesure et les souris soient disposés dans une cage de Faraday (Risse, 1999; Weymouth et Vingrys, 2008). Une fois endormie, la souris est placée en position sternale sur un support généralement situé à l’intérieur d’une coupole de Ganzfeld. Ce matériel permettra par la suite une stimulation homogène de l’intégralité de la rétine (Tanimoto et al., 2009). La coupole de Ganzfeld a été mise au point et sert de référence en médecine humaine mais c’est aussi devenu l’une des sources lumineuses la plus fréquemment employée chez la Souris (Bayer et al., 2001). Finalement, étant donné que l’animal est anesthésié pendant les mesures, il faut mettre en place des mesures de réchauffement pour maintenir la température corporelle des souris (tapis chauffant, bouillottes…). Cela permet de limiter la [48] mortalité per-anesthésique mais c’est aussi important pour ne pas fausser les mesures. En effet, il a été démontré que l’amplitude de l’ERG diminue quand la température corporelle baisse (Kong et Gouras, 2003). Positionnement des électrodes Une électrode est ensuite positionnée au centre de chaque cornée. Cette électrode, dite active, permet d’enregistrer de manière non invasive les courants électriques intraoculaires reflétant l’activité de la rétine (Gelatt et al., 2013; Risse, 1999). Il existe différents types d’électrodes actives telles que les fibres Dawson Trick Litzkowou ou des fils métalliques formant une boucle au contact de la cornée (Peachey et Ball, 2003). Ces fils peuvent aussi être inclus dans un système de lentille. Quelle que soit l’électrode utilisée, il est important de bien placer l’électrode au contact de la cornée. Il faut aussi s’assurer que l’électrode ne bouge pas au cours des mesures et que la position est à peu près similaire d’une souris à l’autre. En effet, bien que l’influence de la position centrale de l’électrode n’ait pas été étudiée chez la souris, il a été démontré que l’amplitude de l’ERG variait en fonction de la position de l’électrode chez le Chien (Peachey et Ball, 2003). Il est conseillé d’humidifier la cornée avec du sérum physiologique ou gel lacrymal avant de placer l’électrode. Finalement, en plus des électrodes actives placées sur chaque cornée, deux aiguilles inoxydables sont placées en position sous-cutanée au niveau du front et en région lombaire proche de la queue de la souris. Ces aiguilles servent respectivement d’électrode de référence et d’électrode de terre. Un exemple de montage réalisé pour des mesures d’électrorétinogramme chez la souris est illustré Figure 8. Les courants électriques perçus par l’électrode au niveau de la rétine étant de très faible intensité, il est nécessaire de connecter l’électrode à un amplificateur (Gelatt et al., 2013; Risse, 1999). Cet amplificateur permet aussi d’isoler les signaux correspondant à l’activité électrique de la rétine en fonction de leur fréquence grâce à un filtre passe-bande configuré par l’opérateur. Une fois le signal traité par l’amplificat eur, les données sont récupérées par le biais d’un logiciel informatique spécialisé. De plus, l’ensemble du montage doit être placé dans une cage de Faraday [49] afin de limiter les interférences extérieures qui peuvent entraîner des trémulations de la ligne de base de l’ERG. Finalement, avant de lancer les mesures, il faut contrôler la valeur de l’impédance des électrodes et l’aspect de la ligne de base de l’ERG. L’objectif est d’avoir une impédance faible et stable pendant tout l’examen (Risse, 1999). Si l’impédance est trop importante (> 10 mégohms) cela signifie que le contact ne se fait pas correctement (Tanimoto et al., 2009). Si elle est trop faible (< 6 mégohms), il se peut que l’électrode appuie trop fortement sur la cornée. Dans les deux cas, il faut repositionner l’électrode. Le contact entre l’électrode et la cornée joue aussi sur la ligne de base de l’ERG ; si le contact est bon celle-ci reste à peu près stable (Tanimoto et al., 2009). Figure 8 : Matériel utilisé pour la réalisation d'un électrorétinogramme. (D’après Fouchère et Taleb 2012, photographies réalisées à l’ENVA, matériel du Dr Chahory) A. Vue d’ensemble. PM : plaque mobile chauffée à 37°C ; CG : coupole de Ganzfeld. B. Disposition des électrodes. EA : électrodes actives ; ER : électrodes de référence ; ET : électrode de terre. A B Remarque : l’ordre de passage des animaux est important car de nombreux facteurs extérieurs peuvent être à l’origine de variation dans les tracés ERG (humidité, interférences électriques…). Certains auteurs recommandent de ne pas réaliser les mesures à l’aveugle mais de passer les souris contrôles en alternance avec les souris [50] d’intérêt afin de limiter les biais liés aux conditions expérimentales (Tanimoto et al., 2009). Étape 5 – Stimulation lumineuse de la rétine et acquisition des données : la stimulation lumineuse de la rétine peut être réalisée de différentes manières. En général, la rétine est stimulée de façon homogène et dans son intégralité, on parle d’ERG en champ total ou d’ERG Ganzfeld (Risse, 1999; Tanimoto et al., 2013). Ces ERG nécessitent l’utilisation d’une coupole de Ganzfeld (décrite précédemment) dont les parois sont hyper réfléchissantes (Tanimoto et al., 2009). Il est aussi possible de ne stimuler qu’une partie de la rétine mais ce type de protocole n’est que très rarement utilisé chez la Souris (Bayer et al., 2001). Les stimulations lumineuses consistent en une succession de salves de flashs lumineux blancs. Lors d’ERG réalisés en condition scotopique, les salves de flashs sont d’intensité croissante au fur et à mesure de l’enregistrement afin de stimuler dans un premier temps les bâtonnets seuls avec des intensités faibles puis les cônes et les bâtonnets pour des intensités plus importantes et enfin les cônes seulement pour les plus fortes intensités. Le protocole de stimulation le plus fréquemment rencontré dans la littérature consiste en 10 séries de 10 flashs d’une même intensité (Tanimoto et al., 2009). Les 10 flashs permettent d’obtenir une réponse moyenne pour une intensité donnée et de limiter ainsi l’impact de la variabilité de la réponse en fonction de l’environnement. Deux séries de flashs sont séparées par un intervalle permettant la régénération des pigments photosensibles soit entre 5 et 30 secondes en fonction de l’intensité de la série. La première série est réalisée à environ -4 log(cd.s/m²) et l’intensité est accrue de 0.5 log(cd.s/m²) à chaque nouvelle série. La stimulation lumineuse de la rétine se fait donc en général avec des intensités comprises entre -4 et 1.5 log(cd.s/m²) (Tanimoto et al., 2009). D’après les directives publiées par l’ « International Society for Clinical Electrophysiology of Vision », il ne faut pas dépasser un stimulus de 2 à 3 cd.s/m² ou 0,2 à 0,3 log(cd.s/m²) si on veut évaluer le fonctionnement des bâtonnets (Gelatt et al., 2013; Marmor et al., 2008). Cependant, en fonction des protocoles, il peut y avoir des variations concernant l’intensité minimale et maximale testée, le nombre de séries réalisées, l’intervalle de temps ou d’intensité [51] entre deux séries de flashs ou encore le nombre de flashs par série. Ces nombreux facteurs de variations rendent difficiles les comparaisons d’une étude à l’autre (Bayer et al., 2001). Suite à la stimulation lumineuse, le signal électrique relevé par l’électrode sur la cornée est traité au niveau de l’amplificateur. Celui-ci reçoit un signal électrique de très faible intensité, il le filtre, l’amplifie puis de le transmet à l’équipement informatique (Risse, 1999). Les amplificateurs utilisés pour les ERG ont deux caractéristiques très importantes (Risse, 1999). Ils sont différentiels, ce qui signifie qu’ils n’amplifient que la différence de potentiel perçue entre l’électrode active et l’électrode de référence. Cela permet d’éliminer les signaux parasites enregistrés par les deux électrodes. Ils ont aussi un grand gain permettant de multiplier cette très faible différence de potentielle par un facteur 1000 voire plus. Par ailleurs, l’étape de filtration modifie l’aspect du tracé obtenu en fonction du filtre utilisé. Pour un ERG standard, il faut sélectionner une bande passante de 0.3 à 300 Hz, soit le même filtre que celui utilisé en médecine humaine (Tanimoto et al., 2009). En modifiant ce filtre, il est possible d’observer d’autres composantes de la réponse rétinienne tels que les potentiels oscillatoires qui sont visibles en choisissant une bande passante de 75 à 300 Hz (Tanimoto et al., 2009). Pour finir, le signal transmis par l’amplificateur à l’équipement informatique est transformé en une valeur numérique par un convertisseur analogique-numérique (Risse, 1999). Les opérateurs disposent aussi souvent de programmes permettant de faire de réaliser un filtrage numérique ou la moyenne de signaux obtenus après des stimulations successives. En particulier, en faisant la moyenne de signaux successifs, on améliore le rapport signal/bruit car le bruit de fond est aléatoire mais le signal est corrélé à la stimulation. [52] ii. Spécificités des électrorétinogrammes chez la Souris Étant donné que les yeux de la Souris sont localisés sur le côté, contrairement aux primates par exemple, il est recommandé de réaliser les mesures sur les deux yeux en même temps (Tanimoto et al., 2009). Cela permet entre autres d’utiliser un œil comme contrôle afin de détecter d’éventuels artéfacts ou anomalies oculaires indépendantes de la maladie étudiée. Ainsi, lorsque les tracés des deux yeux diffèrent, il faut contrôler le positionnement des électrodes et rechercher la présence d’une lésion acquise unilatérale. Par exemple, il se peut qu’une lésion acquise du globe oculaire telle qu’une opacification cornéenne soit à l’origine de l’aspect anormal unilatéral du tracé. La majorité des lésions acquises sont en effet unilatérales, contrairement aux atteintes congénitales (Tanimoto et al., 2009). Par précaution, il est aussi recommandé de réaliser un examen oculaire complet avant l’ERG afin de contrôler systématiquement l’absence de lésion des segments antérieur et postérieur pouvant entraîner une modification des tracés. L’enregistrement des deux yeux peut aussi s’avérer utile dans le cadre de tests thérapeutiques : seul un des yeux peut recevoir le traitement, ce qui permet d’utiliser l’autre œil comme témoin (Tanimoto et al., 2009). iii. Grille de lecture d’un électrorétinogramme chez la Souris L’ERG est un signal global et complexe. Toutes les catégories de cellules de la rétine participent à sa genèse (Pinto et al., 2007) comme l’illustre la Figure 9. L’interprétation d’un ERG dépend des conditions d’adaptation préalables, du type de stimulation, du type d’électrode et de la fréquence d’enregistrement de la réponse de la rétine (Bayer et al., 2001). La fréquence d’enregistrement de la réponse de la rétine permet d’obtenir soit un tracé de type ERG, soit des potentiels oscillatoires. Chez la Souris, lors de la réalisation d’un ERG après une phase d’adaptation à l’obscurité et avec une stimulation généralisée de la rétine, on obtient un tracé avec 3 ondes reconnaissables (Peachey et Ball, 2003). La première onde générée par la rétine, nommée onde a, correspond à une dépolarisation de la rétine. La seconde onde, onde [53] b, est une repolarisation brève et elle est suivie d’une repolarisation plus longue nommée onde c (Figure 10). Figure 9 : Origine des 3 ondes visibles sur l'électrorétinogramme de Souris. D’après Donnell 2014. L’étude de l’onde a permet d’obtenir une mesure quantitative qui traduit des modifications des courants ioniques directement corrélée à l’activité électrique des photorécepteurs (Pinto et al., 2007; Risse, 1999). A l’obscurité, les canaux ioniques situés dans les segments externes des photorécépteurs sont ouverts : il y a alors un flux entrant de Na+ (Pinto et Enroth-Cugell, 2000). Lors d’une stimulation lumineuse de la rétine ces canaux se ferment ce qui entraîne une hyperpolarisation de la cellule. L’onde a est donc le reflet direct de l’hyperpolarisation des segments externes en réponse à la lumière. Cette hyperpolarisation est dépendante de l’intensité lumineuse. Ainsi, plus l’intensité lumineuse est forte, plus les photorécepteurs sont hyperpolarisés. De plus, chez la Souris, les cônes ne représentent que 3% des photorécepteurs (Pinto et Enroth-Cugell, 2000). La réponse liée aux cônes est donc généralement considérée comme négligeable lors de la réalisation d’un ERG scotopique. L’onde a est donc parfois considérée comme représentative de l’activité des bâtonnets seuls. [54] L’origine de l’onde b n’est pas aussi bien comprise que celle des ondes a et c. Les hypothèses selon lesquelles cette onde serait liée à une accumulation de K + dans les cellules de Müller ont été réfutées dans les années 1990. Des études réalisées plus récemment chez diverses espèces (humains, amphibiens, chats…) aboutissent à la conclusion que cette onde serait plutôt le reflet de l’activité des cellules bipolaires (Pinto et Enroth-Cugell, 2000). Par ailleurs, l’onde b apparaît pour des intensités lumineuses plus faibles que l’onde a (Peachey et Ball, 2003; Risse, 1999). Cela serait en partie dû au fait qu’il y a une amplification du signal lors de la transmission de l’information des photorécepteurs aux cellules bipolaires (Pinto et al., 2007). Ainsi, l’onde b masque en grande partie l’onde a. L’onde c est une grande onde lente qui intervient après l’onde a et l’onde b. Elle serait le résultat de deux phénomènes opposés : d’une part, l’hyperpolarisation de l’épithélium pigmentaire, de l’autre la dépolarisation des cellules gliales (Pinto et al., 2007; Pinto et Enroth-Cugell, 2000). L’hyperpolarisation de l’épithélium pigmentaire est liée à une diminution de la concentration en K + dans l’espace intercellulaire à proximité du segment externe des photorécepteurs. En effet, ces derniers s’étant hyperpolarisés à la réception du signal lumineux, la sortie de K + dans le milieu extracellulaire a été diminuée. En conséquence, le gradient de K + entre le milieu extracellulaire et la membrane de l’épithélium pigmentaire est modifié et conduit à une hyperpolarisation des cellules épithéliales. L’onde c étant la somme de deux courants opposés, elle peut présenter une polarité positive ou négative toutefois, la plupart du temps, c’est l’épithélium pigmentaire qui prend le dessus et l’onde apparait positive. [55] Figure 10 : Les 3 composantes de l'électrorétinogramme de Ganzfeld d’une souris C57Bl/6J et leurs mesures d'après Pinto et al, 2007. A : caractéristiques et mesures des ondes a, b et c à partir d’un tracé électrorétinogramme obtenu suite à un stimulus de forte intensité lumineuse. B : variation de l’aspect du tracé électrorétinogramme en fonction de l’intensité lumineuse du stimulus. L’onde b est la première onde détectable (tracé rouge). C : extrapolation - aspect que les ondes a, b et c pourraient avoir s’il était possible de les mesurer séparément. iv. Paramètres mesurables sur les tracés d’électrorétinogramme chez la Souris A partir d’un tracé d’ERG, il est possible de quantifier plusieurs paramètres. Ces paramètres permettent de décrire plus précisément les trois ondes et apportent donc des informations sur l’activité des photorécepteurs, des cellules bipolaires ou le fonctionnement de l’épithélium pigmentaire. L’amplitude ainsi que le temps de culmination (aussi nommé temps de latence ou « implicite time » en msec) de chaque onde sont les paramètres de référence très fréquemment utilisés dans la littérature (Risse, 1999). Ils sont directement quantifiables à partir des tracés d’ERG comme [56] l’illustre la Figure 11. L’amplitude de l’onde b est souvent nommée Vmax et elle est donnée en μV. Certains autres paramètres, tels que le scotopic threshold response, ont été définis pour les besoins de nouvelles études, ils nécessitent des protocoles d’enregistrement d’ERG particuliers et ils ne seront pas détaillés ici (Ropstad et Narfström, 2007; Saszik et al., 2002). L’extrapolation de ces différentes données à partir des courbes permet d’obtenir des données quantifiables et objectives qui facilitent la comparaison des lots témoins et d’étude ou encore de deux études différentes. Figure 11 : Illustration des paramètres mesurables à partir d'un électrorétinogramme obtenu en condition scotopiques (d’après l’institut clinique de la souris). [57] v. Origine des variations observables dans les tracés d’électrorétinogramme Variations liées à l’expérimentation : les tracés ERG varient en fonction de l’intensité du flash émis pour stimuler la rétine. En effet l’amplitude des ondes augmente et les temps de latence diminuent quand l’intensité du flash augmente (Geller, 2005). Variations physiologiques : Il existe de nombreuses causes de variations physiologiques d’un ERG (Peachey et Ball, 2003; Tanimoto et al., 2013). Il est important d’en tenir compte pour éviter toute surinterprétation. Une des premières sources de variation physiologique des ERG est l’âge de l’animal. En effet, il a été démontré que l’amplitude des tracés ERG diminuait avec l’âge (C. Li et al., 2001; Peachey et Ball, 2003). Le sexe de l’animal pourrait aussi être une cause de variation des tracés (Rigaudière, 2009). Par ailleurs, s’il semble évident que les ERG soient variables en fonction des espèces, il a aussi été démontré qu’il existait des variations physiologiques en fonction des lignées de Souris. Ainsi, la Souris C57Bl/6J présente une onde c plus marquée et plus positive que d’autres lignées. La différence d’amplitude entre l’onde a et l’onde b est aussi plus importante dans cette lignée (Pinto et al., 2007). Un dernier facteur de variation dans le tracé ERG serait la température corporelle de l’animal (Kong et Gouras, 2003). En effet, il a été démontré que l’amplitude des ondes serait diminuée sur un animal en hypothermie. Il faut donc bien contrôler la température des animaux au cours des enregistrements. Cette liste de facteurs de variations physiologiques des ERG n’est pas exhaustive mais elle illustre les point devant être pris en compte lors de la mise au point d’un protocole expérimental afin de ne pas introduire de biais de confusion potentiel. Variations liées à des artéfacts : l’application de sérum physiologique en excès sur la cornée peut entraîner une distorsion de l’aspect des ondes et une instabilité marquée de la ligne de base (Pinto et al., 2007). Un mauvais positionnement de l’électrode peut avoir un effet similaire sur le tracé d’ERG. Dans les deux cas, il est possible de corriger le problème en séchant l’œil et en replaçant l’électrode. [58] Variations pathologiques : Les maladies héréditaires affectant la rétine sont aussi à l’origine de nombreuses variations dans les tracés ERG chez la Souris qui représente un modèle de choix pour ces affections. Ces variations ne sont pas détaillées ici mais ont été décrites dans un article de revue paru en 2003 : (Peachey et Ball, 2003). Les tracés y sont aussi présentés et peuvent s’avérer utiles à titre de comparaison. [59] 5. La Souris, modèle d’étude des dégénérescences rétiniennes Les dégénérescences rétiniennes sont un ensemble de maladies d’origine et de forme clinique variées qui ont pour caractéristique commune une perte plus ou moins progressive de la vision due à un phénomène neurodégénératif touchant principalement les photorécepteurs (Veleri et al., 2015). Ceux-ci peuvent notamment être lésés directement, ou secondairement à une atteinte de l’épithélium pigmentaire. En effet, l’épithélium pigmentaire ayant pour rôle d’assurer les apports en nutriment et la détoxification des photorécepteurs, tout dysfonctionnement de cet épithélium a un impact négatif sur ces derniers. Actuellement, les dégénérescences rétiniennes font partie des causes les plus fréquentes de cécité incurable chez l’Homme (Athanasiou et al., 2013; Veleri et al., 2015). Le modèle murin est donc très largement utilisé afin d’identifier les gènes impliqués et de caractériser les différentes formes de maladies dégénératives rétiniennes d’origine génétique. Ce modèle n’est toutefois pas idéal car, contrairement à l’Homme, la Souris ne présente pas de fovéa et la proportion de cônes est très faible. a. Les différents types de dégénérescence rétinienne Il existe de nombreuses causes de dégénérescence rétinienne mais, dans la majorité des cas, il est possible de les classer en deux sous-groupes : les maladies d’origine génétique monogénique (maladies mendéliennes) ou les maladies multifactorielles (complexes) (Veleri et al., 2015). Les maladies mendéliennes les plus fréquentes sont les formes de rétinite pigmentaire ; la maladie multifactorielle la plus fréquente est la dégénérescence maculaire liée à l’âge. Il est aussi possible de qualifier les maladies dégénératives de la rétine en fonction du type de cellules touchées en premier (cônes ou bâtonnets). Cette information sert au diagnostic différentiel puisque, lors d’atteinte primaire des bâtonnets, la vision nocturne est perdue en premier. Finalement, certaines dégénérescences rétiniennes mendéliennes sont systémiques, c'est-à-dire que la rétine n’est pas le seul organe touché. Le tableau [60] clinique est alors bien plus complexe comme, par exemple, dans le cas du syndrome d’Usher caractérisé par une perte d’audition en plus de la déficience visuelle (Veleri et al., 2015). En ce qui concerne les dégénérescences rétiniennes mendéliennes, de très nombreux gènes ont été mis en cause au cours de la dernière décennie. On en dénombre actuellement plus de 200 avec près de 1500 mutations causales différentes (Veleri et al., 2015). Le mode de transmission de ces maladies ainsi que leur forme clinique sont très variables. Ainsi, différentes mutations d’un même gène peuvent entraîner des formes cliniques différentes alors que des mutations de gènes différents donnent parfois des formes cliniques similaires. La forme la plus fréquente de maladie dégénérative rétinienne chez l’Homme est la rétinite pigmentaire. Cette maladie touche environ 1 personne sur 3000-7000 et se caractérise par l’atteinte des bâtonnets dans un premier temps (Veleri et al., 2015). La première mutation identifiée comme étant responsable de rétinite pigmentaire touchait le gène codant pour la rhodopsine ; actuellement 25% des mutations à l’origine de rétinite pigmentaire touchent ce gène (Athanasiou et al., 2013). En plus de prédispositions génétiques, la rétine est soumise à de nombreux stress et facteurs environnementaux (tels qu’une lumière trop intense ou le stress oxydatif) qui peuvent être à l’origine de son altération (Athanasiou et al., 2013). Ces facteurs interviennent généralement dans le cadre des maladies multifactorielles telle que la dégénérescence maculaire liée à l’âge. Notons que les photorécepteurs sont les cellules rétiniennes les plus sensibles à ce type de stress. Il a ainsi été démontré que l’exposition à une lumière trop vive pouvait léser les photorécepteurs et l’épithélium pigmentaire et donc induire une dégénérescence rétinienne à plus ou moins long terme. [61] b. Caractéristiques cliniques et histologiques des dégénérescences rétiniennes Les dégénérescences rétiniennes se caractérisent cliniquement par une cécité généralement bilatérale, d’apparition le plus souvent progressive. Chez les animaux, il est toutefois rare de détecter la maladie en cours d’évolution car il est difficile pour les propriétaires ou les animaliers d’observer cette perte progressive de la vision. Elle est donc diagnostiquée à des stades relativement tardifs. En plus des signes de cécité observables lors de l’examen ophtalmologique, les dégénérescences rétiniennes sont à l’origine de lésions caractéristiques visibles à l’examen du fond d’œil Figure 12 (Chang, 2013; Pinto et al., 2004; Veleri et al., 2015). Il y a généralement un amincissement, voire une disparition dans les stades les plus avancés, des vaisseaux rétiniens et le fond d’œil présente une couleur hétérogène. Si, à la suite de l’examen ophtalmologique, une forme de dégénérescence rétinienne est suspectée, il est recommandé de réaliser un ERG (Chang, 2013; Pinto et al., 2004). En effet, l’ERG permet tout d’abord de confirmer que l’atteinte se situe bien au niveau de la rétine. Cela permet aussi de déterminer le type de photorécepteur atteint. Par exemple, étant donné que les bâtonnets sont les premières cellules touchées lors de rétinite pigmentaire à un stade débutant, l’ERG est plat pour des flashs de faibles intensités lumineuses alors qu’il est quasiment normal pour des flashs de fortes intensités lumineuses qui ne font normalement intervenir que les cônes. Lors de rétinite pigmentaire très évoluée les cônes sont aussi touchés. L’ERG a alors un tracé plat quelle que soit l’intensité des flashs lumineux comme l’illustre la Figure 12 Finalement, lors de suspicion de dégénérescence rétinienne, l’obtention de données histologiques sur la rétine permet d’obtenir un diagnostic de certitude. En effet, les dégénérescences rétiniennes se traduisent histologiquement par un amincissement, voire une disparition de la couche des photorécepteurs de la rétine [62] (Veleri et al., 2015). Cela est dû à une mortalité de ces cellules par apoptose (Remé et al., 2000). Cependant, la rétine étant une structure située en profondeur de l’œil, obtenir des informations sur son épaisseur n’est pas facile. Ce type d’information peut être obtenu à partir de coupes histologiques des yeux ex vivo. Toutefois, cela nécessite que la souris soit décédée ou ait été euthanasiée pour les besoins de l’étude. Au début des années 90, une technique d’imagerie médicale nommée TCO (Tomographie par Cohérence Optique) a été mise au point. Ce dispositif permet de révéler de manière non invasive les structures internes de l’œil, entre autres, avec une définition micrométrique (Figure 12) (Sacchet, 2010). Le TCO est donc rapidement devenu un outil indispensable au diagnostic de dégénérescences rétiniennes chez l’Homme. Cette technique d’imagerie présente aussi l’avantage de permettre un suivi des lésions au cours du temps chez un même individu ce qui est particulièrement intéressant lors d’essai thérapeutique par exemple (Q. Li et al., 2001). Malgré tout le TCO reste une technique difficilement accessible dans le cadre d’études expérimentales sur animaux de laboratoire (matériel encore peu disponible, nécessitant un certain niveau d’expertise). [63] Figure 12 : Caractérisation des dégénérescences rétiniennes chez la Souris (d'après Veleri et al. 2015). i : Photographie du fond d’œil et coupe de la rétine par tomographie par cohérence optique (TCO) d’une souris saine (phénotype sauvage). ii : Photographie du fond d’œil et coupe de la rétine par TCO d’une souris mutante rd1 présentant une dégénérescence rétinienne. Sur le fond d’œil, on observe une disparition de la vascularisation rétinienne et des plages de couleur hétérogène. L’image en TCO révèle une rétine nettement amincie et une quasi-disparition de la couche des photorécepteurs. iii : Électrorétinogramme sur une souris sauvage (tracé noir) et d’une souris mutée rd1 (tracé rouge) dans différentes conditions de luminosité afin de tester la réponse des bâtonnets et celle des cônes. Les deux types de photorécepteurs sont lésés chez la souris présentant la dégénérescence rétinienne (aucune activité n’est enregistrée quelles que soient les conditions de mesure [64] II. LES ACIDES GRAS À TRÈS LONGUE CHAÎNE DANS LA RÉTINE 1. Nomenclature des acides gras Par définition, un acide gras est un acide carboxylique à chaîne aliphatique. La chaîne carbonée comporte le plus souvent un nombre pair de carbones compris entre 4 et 36 (Cuvelier et al., 2004). En effet, les acides gras sont synthétisés par addition itérative de deux carbones à l’acyl-Coa. Chez les mammifères, une partie des acides gras sont produits par les cellules, le reste provient des apports alimentaires. Il existe une très grande variété d’acides gras dans le monde du vivant. Ils sont classés suivant le nombre de carbones de leur chaîne aliphatique et suivant leur nombre d’insaturations. Toutefois, ces classifications évoluent encore de nos jours au fil des découvertes scientifiques. La classification que j’ai choisie d’utiliser par la suite a été définie à partir du mode de synthèse des acides gras. En effet, les acides gras jusqu’à 16 carbones sont synthétisés par la fatty acid synthase dans le cytosol. Au delà, l’élongation des acides gras nécessite de recourir à d’autres enzymes localisées dans le réticulum endoplasmique. Les acides gras comportant au moins 18 carbones sont donc nommés Very Long Chain Fatty Acids (VLCFA), ce qui se traduit en français par acides gras à très longue chaîne (Jakobsson et al., 2006). Bien que présents chez la majorité des êtres vivants, des mammifères aux bactéries et champignons, les VLCFA ne représentent qu’une faible fraction des acides gras dans un organisme, à savoir moins de 10% (Tvrdik et al., 2000). Le groupe des VLCFA est ensuite subdivisé en deux sous-groupes : d’un côté les C22 et les C24 qui sont ubiquitaires, de l’autre les VLCFA comportant au moins 26 carbones, nommés Ultra Long Chain Fatty Acids (ULCFA). Ces derniers se retrouvent spécifiquement dans certains tissus tels que la peau, l’encéphale, les glandes oculaires de Méibomius, les testicules et la rétine. [65] Les acides gras sont aussi classés suivant leur nombre d’insaturations. Ils sont qualifiés de : - saturés (Saturated Fatty Acid, SFAs) : si la chaîne carbonée ne comporte aucune double liaison carbone-carbone, tous les carbones sont alors saturés en hydrogène, - monoinsaturés (MonoUnsaturated Fatty Acids, MUFAs) : s’il n’y a qu’une seule double liaison, - polyinsaturés (PolyUnsaturated Fatty Acids, PUFAs) : s’il y a plusieurs doubles liaisons. Les VLC-PUFA sont subdivisés en sous-catégories en fonction de la position de leur première insaturation, la plus proche du groupe méthyle terminal (Cuvelier et al., 2004). Les séries ω6 et ω3 sont respectivement constituée des acides gras dont la première double liaison est située entre le 6 e et le 7e carbone ou entre le 3e et le 4e carbone (Figure 13). Figure 13 : Exemples de deux acides gras à très longue chaîne polyinsaturés de la famille des ω6, l’acide arachidonique, et des ω3, l’acide docosahexanoïque. (D’après Shaikh and Edidin, 2006). Écriture : (n : mx,y) où n correspond au nombre de carbones de l’acide gras, m au nombre d’insaturation et les exposants (x, y) décrivent la position de ces insaturations. Les notations (n-6) et (n-3) indiquent la position de la première insaturation à partir de l’extrémité aliphatique, il s’agit donc respectivement d’acides gras de la série des ω6 et ω3. [66] 2. Synthèse des Very Long Chain Fatty Acids et des Ultra Long Chain PolyUnsaturated Fatty Acids Contrairement aux acides gras plus courts synthétisés dans le cytosol, la synthèse des VLCFA a lieu dans le réticulum endoplasmique à partir d’acides gras à longue chaîne. Ces derniers peuvent avoir été formés par la cellule elle-même, provenir d’autres cellules ou de l’alimentation. Afin d’obtenir des VLCFA, les acides gras à longue chaîne subissent plusieurs cycles d’élongation identiques. La chaîne carbonée initiale est ainsi rallongée de deux carbones par cycle. Ce cycle d’élongation est composé de 4 étapes : condensation, réduction, déshydratation et une seconde réduction, comme l’illustre la Figure 14. Les étapes de condensation et de déshydratation catalysées respectivement par les isoenzymes ELOV 1 à 7 et les isoenzymes HACD 1 à 4 sont les deux étapes limitantes du cycle (Sassa et Kihara, 2014). Les deux étapes de réduction nécessitent l’oxydation parallèle de NADPH. Figure 14 : Cycle d'élongation des acides gras à très longue chaîne chez les mammifères d’après Sassa et Kihara, 2014. N [67] Notons qu’il existe sept isoenzymes d’ELOVL. Ces isoenzymes présentent des spécificités de substrat, comme l’illustre la Figure 15 (Sassa et Kihara, 2014), ou ne s’expriment pas dans les mêmes tissus. Ainsi, par exemple, ELOVL4 est la seule ELOVL capable de réaliser une condensation sur un substrat comportant une chaîne carbonée polyinsaturée de 24 carbones ou plus. Cette enzyme est donc nécessaire à la formation des Ultra Long Chain PolyUnsaturated Fatty Acid, ULC-PUFA. Cette enzyme est aussi exprimée dans certains tissus comme la peau, l’encéphale, les testicules et la rétine qui contient des ULCFA. Une étude d’Elovl4 a d’ailleurs mis en évidence que son expression au niveau de la rétine était conservée chez de nombreux mammifères et qu’elle était principalement localisée au niveau des photorécepteurs chez l’adulte (Lagali et al., 2003). [68] Figure 15 : Voies d'élongation des acides gras à très longue chaîne chez l'Homme d’après Sassa et Kihara, 2014. Les isoenzymes ELOV capables de catalyser chaque étape sont indiqués : E1 à E7. Les ∆ représentent des désaturases. Légende Cn:m où n correspond au nombre de carbone et m au nombre d’insaturation ULCFA : Ultra Long Chain Fatty Acid (au moins 26 carbones) Séries ω6 et ω3 : acides gras polyinsaturés dont la première insaturation se trouve au niveau du 6e et 3e carbone respectivement. [69] 3. Rôles des Very Long Chain Fatty Acids et des Ultra Long Chain-PolyUnsaturated Fatty Acids à l’échelle cellulaire a. Le rôle des sphingolipides comportant des Very Long Chain Fatty Acids La principale particularité fonctionnelle des VLCFA tient au fait qu’ils participent à la formation des sphingolipides (Hannun et Obeid, 2008; Posse de Chaves et Sipione, 2010). En effet, très peu de VLCFA restent sous forme non estérifiée après avoir été synthétisés. La majorité des VLCFA intracellulaires sont estérifiés pour former différents dérivés lipidiques, en particulier des sphingolipides et dans une moindre mesure des glycérophospholipides (Agbaga et al., 2010; Tvrdiket al., 2000). Les sphingolipides résultent de la condensation d’une base sphingoïde (base aminée à chaîne longue) avec un VLCFA et un radical plus ou moins complexe. La sphingosine est la base sphingoïde la plus fréquemment rencontrée chez les vertébrés. La structure des sphingolipides est illustrée Figure 16 (Malagarie-Cazenave et al., 2002). Les céramides sont les sphingolipides les plus simples puisque leur radical est un atome d’hydrogène. La production des sphingolipides plus complexes se fait à partir des céramides (Denic et Weissman, 2007) (Figure 17). Figure 16 : Structure des sphingolipides, d’après Malagarie-Cazenave et al., 2002. AGTLC : Acides Gras À Très Longue Chaîne, aussi nommé Very Long Chain Fatty Acids (au moins 18 carbones) [70] Figure 17 : Métabolisme des sphingolipides (D’après Denic et Weissman, 2007) Légende : AG : Acides Gras AGLC : Acides Gras à Longue Chaîne (14 à 20 carbones) AGTLC : Acides Gras à Très Longue Chaîne aussi nommé Very Long Chain Fatty Acids (au moins 18 carbones) Les sphingolipides sont des acteurs essentiels à de nombreuses fonctions cellulaires. Ainsi, il a été démontré qu’un défaut de synthèse des sphingolipides entraîne un arrêt de la croissance cellulaire chez les levures et des cellules de mammifère (Tvrdik et al., 2000). La grande majorité des sphingolipides sont localisés dans les membranes cellulaires où ils présentent la propriété de former des radeaux lipidiques : nanodomaines membranaires plus rigides que le reste de la membrane et enrichis en cholestérol (Posse de Chaves et Sipione, 2010). Ces domaines modulent l’activité de nombreuses voies de signalisation et de trafic membranaire. Une seconde étude réalisée sur des levures déficitaires en sphingolipides a démontré que des glycérophospholipides contenant des VLCFA pouvaient reproduire des structures similaires à celles des sphingolipides et ainsi rétablir la croissance cellulaire (Tvrdik et al., 2000). Ce résultat suggère que la très longue chaîne des VLCFA joue un rôle structural majeur, qu’elle soit présente dans des sphingolipides ou des phospholipides. [71] b. Le rôle des Ultra Long Chain Fatty Acids dans la plasticité des membranes cellulaires Une dernière étude a démontré que les ULCFA précurseurs de phosphatidylinositols jouent à rôle essentiel dans la stabilisation de l’enveloppe nucléaire chez la levure. Une des hypothèses émises afin d’expliquer le rôle des ULCFA dans la stabilisation membranaire repose sur le fait qu’à partir de 24 carbones, les acides gras ont la capacité de s’interdigiter dans les deux couches lipidiques d’une membrane. Cela peut avoir deux conséquences : d’une part une réduction de l’épaisseur de la membrane et d’autre part un encombrement asymétrique d’une des deux bicouches. Dans ce dernier cas, cela favorise une forte courbure membranaire que les VLCFA soient localisés dans une des couches ou l’autre comme le montre la Figure 18. Les fortes courbures membranaires telles que celles des photorécepteurs pourraient être favorisées par la présence d’ULCFA (Schneiter et al., 2004). Figure 18 : Modèles de fortes courbures membranaires favorisées par la présence d’acides gras à ultra longue chaîne asymétriques (d’après Schneiter et al., 2004). A. Aspect d’une membrane fortement courbée en l’absence d’ULCFA. Les flèches en A indiquent des espaces libres qui déstabilisent cette configuration. B. Aspect d’une membrane fortement courbée grâce à la présence d’ULCFA saturés interdigités dans la couche externe de la membrane. Les phospholipides ne contenant qu’un VLCFA sont en effet assymétriques, avec un encombrement stérique externe plus important. C. Aspect d’une membrane fortement courbée grâce à la présence d’ULCFA dans la couche interne. Les VLCFA fortement insaturés présentent en effet un grand encombrement stérique de par les coudes conférés par les doubles liaisons. A B C [72] c. Les Ultra Long Chain Fatty Acids dans les sécrétions des glandes de Méibomius En temps normal, la cornée est recouverte d’un film lacrymal qui l’hydrate, la protège et forme une surface lisse et régulière permettant une meilleure réfraction de la lumière (Sassa et Kihara, 2014). Ce film est composé de 3 phases : la phase mucinique, interne, qui permet l’adhérence du film sur la cornée, la phase aqueuse, phase majoritaire, et la phase lipidique, externe qui limite l’évaporation de la phase aqueuse. Chaque phase est sécrétée par des glandes différentes et, en particulier, ce sont les glandes de Méibomius (Figure 19), aussi nommées glandes tarsales, qui produisent la majorité de la phase lipidique, aussi nommé méibum. Chez l’Homme, il existe une soixantaine de glandes de Méibomius qui s’abouchent au niveau du bord libre des paupières supérieures et inférieures. Les principaux composants de méibum sont des esters de cholestérol et des cires (McMahon et al., 2014; Sassa et Kihara, 2014). Chacune de ces deux composantes représente environ 30% de cette phase. Les principaux acides gras retrouvés dans cette phase lipidiques sont des ULCFA saturé ou monoinsaturés. En comparaison et contrairement à ce qui a été observé dans la rétine, le méibum contient très peu de ULC-PUFA. Selon (Agbaga et al., 2010), cela pourrait être due à la fragilité des acides gras polyinsaturés dont les doubles liaisons sont très sensibles aux stress oxydatif. Or, les sécrétions lacrymales sont particulièrement exposées aux ultraviolets et autres facteurs environnementaux. Il en est de même pour la peau qui contient aussi très peu de ULC-PUFA. D’autre part, une étude portant sur la composition lipidique du méibum chez l’Homme, la Souris, le Chien et le Lapin a révélé que le méibum le plus proche de celui de l’Homme est celui de la Souris (Butovich et al., 2012). Le rôle exact des ULCFA dans le mébium n’est pas encore parfaitement compris mais il semblerait qu’une atteinte des glandes de Méibomius ou qu’une modification quantitative ou qualitative de la composition lipidique du méibum puisse contribuer au déclenchement d’un syndrome de l’œil sec, ou dry eye dysfunction, maladie de [73] forme chronique qui affecte des millions de personnes chaque année (McMahon et al., 2014). D’autre part, selon une étude récente de McMahon et son équipe, il apparait que le gène Elovl4, qui code la première enzyme du cycle d’élongation des VLCFA, est fortement exprimé au niveau des glandes de Méibomius. Une mutation de ce gène avait des conséquences directes sur la composition lipidique du film et entraînait un syndrome de l’œil sec chez les souris mutées, en plus de la maladie de Stargardt 3 décrite un peu plus bas. Ce syndrome se traduisait chez les souris, comme chez l’Homme, par une augmentation de la fréquence de clignement des paupières ainsi que du taux de recouvrement de l’œil par les paupières et par des modifications histologiques des glandes de Méibomius. Figure 19 : Anatomie de la paupière supérieure. À gauche : représentation schématique d’une coupe de paupière supérieure (d’après Yaw-Jong, 2012). A droite : cliché histologique, l’annotation M indique l’emplacement des glandes de Méibomius et l’annotation Orb indique l’emplacement du muscle orbiculaire (« Eye Anatomy of eyelid », 2007). [74] d. Rôles spécifiques des Very Long Chain Fatty Acids polyinsaturés Certains VLCFA exercent des fonctions spécifiques grâce à leurs nombreuses insaturations. Par exemple, les VLCFA polyinsaturés de la série des ω3 (tel que l’acide docosahexaénoïque ou DHA C22:6, illustré Figure 13) sont des substrats participant à la synthèse de facteurs anti-inflammatoires (Shaikh et Edidin, 2006). Les VLCFA polyinsaturés de la série des ω6 participent quant à eux à la formation de facteurs pro-inflammatoires. Le rôle des VLCFA polyinsaturés dépend aussi de leur nombre de carbones. Ainsi, les VLCFA polyinsaturés comportant au moins 26 carbones (ULC-PUFA) ne sont observés que dans certains tissus et exercent là encore des fonctions qui leurs sont spécifiques. Contrairement aux autres acides gras qui sont pour la plupart ubiquitaires, les ULC-PUFA se retrouvent essentiellement dans trois tissus : l’encéphale, les testicules et la rétine (Sassa et Kihara, 2014). Ces ULC-PUFA participent à la formation de la myéline et à l’établissement de domaines membranaires particuliers que sont les segments externes des photorécepteurs, les jonctions entre cellules de Sertoli et la membrane plasmique et externe de l’acrosome de la tête des spermatozoïdes (Kihara, 2012). Dans le cadre de notre étude portant sur la rétine, nous nous intéresserons plus particulièrement aux ULC-PUFA et à leur rôle dans les segments externes des photorécepteurs. Cela sera détaillé un peu plus loin dans le paragraphe 5, dédié à la composition et au rôle des ULC-PUFA dans la rétine. [75] 4. Rôle des Very Long Chaîn Fatty Acids et Ultra Long Chaîn Fatty Acids à l’échelle de l’organisme La détermination du rôle des VLCFA à l’échelle de l’organisme a débuté avec des études nutritionnelles : expériences d’enrichissement ou, à l’inverse, de carences réalisées à la fois chez l’Homme et chez l’Animal (Agbaga et al., 2010; Shaikh et Edidin, 2006). Ces premières études ont permis en particulier d’établir le rôle essentiel des VLC-PUFA dans l’encéphale, la rétine et les testicules. Ces premières informations ont, par la suite, été complétées par des études portant sur des inactivations et mutations de gènes codant pour les enzymes de synthèse de ces VLCFA. Pour rappel, quatre enzymes participent au cycle d’élongation des VLCFA (Figure 14) : la condensation est catalysée par les isoenzymes ELOVL1 à 7, la première réduction par l’enzyme KAR, la déshydratation par les isoenzymes HACD1 à 4, et la seconde réduction par l’enzyme TER (Sassa et Kihara, 2014). Les étapes de condensation et de déshydration sont les deux étapes limitantes du cycle. Une mutation touchant l’un des gènes codant pour ces enzymes aura pour conséquence une diminution, voire une absence, de VLCFA à l’échelle de l’organisme ou d’un tissu. En étudiant les conséquences de ces mutations, il est donc possible de déduire les principaux rôles des VLCFA ou ceux des produits de leur métabolisme. a. Effet de l’inactivation du gène Kar chez la Souris Il existe un seul gène codant pour l’enzyme 3-Ketoacyl-CoA Reductase, KAR aussi nommée Hydroxysteroid (17β) Dehydrogenase 12, catalysant la première réduction du cycle d’élongation des VLCFA. Chez la Souris, l’inactivation de ce gène a pour conséquence une létalité embryonnaire à cause de défaut d’organogenèse (Rantakari et al., 2010). Cela signifie que les VLCFA sont indispensables au développement embryonnaire. [76] b. Effet de l’inactivation des gènes Elovl chez la Souris Il existe sept isoenzymes ELOVL qui catalysent la condensation, première étape du cycle d’élongation des VLCFA (Sassa et Kihara, 2014). On pourrait donc s’attendre à ce que la mutation d’un des gènes Elovl n’entraîne pas de conséquence phénotypique majeure. En effet, il est possible de supposer que les autres isoenzymes puissent compenser ce déficit. Cependant, les différentes études réalisées sur des souris mutantes pour les Elovl ont démontré que cette compensation n’était que partielle (Jakobsson et al., 2006; Shimano, 2012; Zadravec et al., 2011, 2010). En effet, ces isoenzymes présentent des spécificités de substrat, comme l’illustre la Figure 15, ou ne s’expriment pas dans les mêmes tissus. L’inactivation de l’un des gènes Elovl est donc à l’origine de phénotypes partiels et variables en fonction de l’isoenzyme inactivée. Ces phénotypes partiels sont particulièrement informatifs car ils permettent de déduire certains rôles des VLCFA qui seraient masqués par une létalité embryonnaire observée en cas d’absence complète de synthèse des VLCFA (cas de la mutation Kar par exemple, cf. paragraphe précédent). L’inactivation des gènes Elovl1 ou Elovl4 entraîne la mort des souris dans les heures suivant la naissance (Sassa et al., 2013; Vasireddy et al., 2007). Ces animaux souffrent de déshydratation sévère due à un défaut de fonctionnement de la barrière cutanée, par déficit en céramides comprenant des ULCFA. Ces derniers sont en effet indispensables au bon fonctionnement de la barrière cutanée. L’inactivation du gène Elovl2 entraîne, quant-à elle, une infertilité chez les individus mâles en raison d’un arrêt de la spermatogenèse après le stade de formation des spermatides secondaires (Zadravec et al., 2011). L’étude de la composition lipidique des testicules des souris mutées a montré que cette infertilité est corrélée à un déficit en VLCFA polyinsaturés. Or, à l’échelle cellulaire, il a été évoqué que les testicules comportent des ULC-PUFA qui leur sont spécifiques et qui participeraient à l’établissement de domaines membranaires particuliers au niveau des cellules de [77] Sertoli et sur les spermatozoïdes. Un déficit dans ces ULC-PUFA serait donc à l’origine de cette infertilité. Finalement, les mutations touchant les gènes Elovl 3 et 6 ont des conséquences phénotypiques modérées. Les souris mutées pour les gènes Elovl3 et Elovl6 présentent une meilleure tolérance au glucose en cas d’alimentation hypercalorique (Shimano, 2012; Zadravec et al., 2010). D’autre part, les souris mutantes pour le gène Elovl5 présentent une stéatose hépatique secondaire à une stimulation de la lipogenèse. L’impact de ces trois mutations témoigne du rôle des VLCFA dans le métabolisme lipidique et glucidique. Finalement, il n’existe actuellement pas d’étude concernant les effets de l’inactivation du gène Elovl7. Remarque : En parallèle, chez l’Homme, une mutation du gène ELOVL5 a récemment été identifiée comme étant la mutation causale d’une ataxie spinocérébelleuse, une maladie neurodégénérative (Di Gregorio et al., 2014). De même, des mutations du gène ELOVL4 sont responsables de la maladie de Stargardt 3, dégénérescence maculaire juvénile, chez l’Homme. Nous reviendrons en détail sur cette maladie et son modèle murin dans le paragraphe 5 consacré au rôle des ULCFA dans la rétine. [78] c. Effet d’une mutation du gène Ter Le gène Ter est le seul gène qui code pour l’enzyme responsable de la 4ème étape du cycle d’élongation des VLCFA. L’inactivation de ce gène n’a a priori pas été étudiée chez la Souris mais une mutation de ce gène serait à l’origine d’un retard mental non syndromique chez l’Homme. Étant donné qu’un seul gène code pour cette enzyme et sachant que l’absence totale de synthèse des VLCFA est létale précocement, il est vraisemblable qu’il s’agisse d’une mutation hypomorphe, c’est-à-dire que l’allèle muté est moins exprimé ou qu’il donne lieu à une enzyme moins active. Cette mutation permet de confirmer que les VLCFA sont essentiels au fonctionnement de l’encéphale. d. Effet d’une mutation du gène Hacd1 Les gènes Hacd codent pour des enzymes catalysant l’étape de déshydratation du cycle d’élongation des VLCFA. Une mutation dans le gène HACD1, à l’origine d’une myopathie centronucléaire, a été découverte chez le labrador dans les années 1990(Blot et al., 2002; Pelé et al., 2005). L’étude de cette mutation chez le Chien et la Souris a permis de montrer que HACD1 joue un rôle essentiel dans le développement, la physiologie musculaire et en particulier dans la fusion des myoblastes(Blondelle et al., 2015). Une partie entière de la bibliographie (paragraphe III) est consacrée à l’étude des gènes Hacd et de la mutation de Hacd1, étant donné qu’il s’agit du gène étudié dans la partie expérimentale. Aucune étude fonctionnelle des autres gènes Hacd n’est disponible à ce jour. [79] 5. Composition et rôles des Ultra Long Chain PolyUnsaturated Fatty Acids dans la rétine a. Distribution des Ultra Long Chain PolyUnsaturated Fatty Acids dans la rétine Dans la majorité des tissus chez les mammifères, les acides gras à moins de 18 carbones représentent plus de 90% des acides gras totaux (Tvrdik et al., 2000). Dans la rétine et en particulier au niveau des photorécepteurs, les ULC-FA sont sur-représentés. Ces ULC-FA se trouvent majoritairement sous forme polyinsaturée (ULC-PUFA) et ils sont incorporés dans des phosphatidylcholines en position sn-1 (Harkewicz et al., 2012). Dans la plus part des cas, la position sn-2 est occupée par une molécule de DHA, 22:6n-3. Les glycérophospholipides ainsi formés sont concentrés au niveau de la membrane des segments externes des photorécepteurs. Ainsi, il a été montré que 13% des phosphatidylcholines situées dans la membrane du segment externe des photorécepteurs comportaient un ULC-PUFA alors que les ULC-PUFA ne représentent qu’environ 2% des acides gras totaux de la rétine (Agbaga et al., 2010). b. Le rôle des Ultra Long Chain PolyUnsaturated Fatty Acids dans la rétine i. La maladie de Stargardt 3 chez l’Homme L’importance fonctionnelle des ULC-PUFA dans la rétine a été démontrée grâce à des études nutritionnelles et à la découverte de la mutation à l’origine de la maladie de Stargardt 3 chez l’Homme. Le gène mis en cause dans cette maladie code ELOV4, enzyme responsable de l’étape de condensation dans le cycle d’élongation des ULCFA. Les individus porteurs d’un allèle muté présentent une dégénérescence maculaire juvénile, caractérisée par une perte de vision centrale irréversible à un jeune âge. [80] La mutation du gène ELOVL4 est à l’origine de l’apparition d’un codon stop prématuré : l’allèle muté code donc une protéine tronquée ne possédant plus le signal de rétention dans le réticulum endoplasmique où a lieu la synthèse des VLCFA (Agbaga et al., 2014; Bennett et al., 2014b). L’enzyme tronquée s’accumule alors dans les disques des segments externes des photorécepteurs. Le mécanisme par lequel l’enzyme ELOVL4 tronquée est à l’origine d’une dégénérescence rétinienne n’est pas encore bien compris, en particulier car il s’agit d’une mutation dominante. Différentes hypothèses ont été émises à ce sujet. Ainsi, il se pourrait que l’intégrité de la membrane des segments externes des photorécepteurs soit compromise par la présence et l’accumulation anormale de cette enzyme ELOVL4 mutée. Une autre hypothèse serait que la protéine ELOVL4 mutée empêche l’enzyme ELOVL4 sauvage de rester dans le réticulum endoplasmique (Harkewicz et al., 2012; McMahon et al., 2007). En conséquence, la production de VLC-PUFA serait fortement réduite et ce déficit serait directement à l’origine de la dégénérescence rétinienne observée. Les lésions histologiques caractéristiques de la maladie de Stargardt 3 chez l’Homme sont une accumulation de lipofuscine dans l’épithélium pigmentaire associée à une dégénérescence des photorécepteurs et une atrophie de l’épithélium pigmentaire (Harkewicz et al., 2012; Karan et al., 2005) . ii. Étude d’Elovl4 chez la Souris Afin de mieux comprendre le rôle de l’enzyme ELOVL4 et, plus particulièrement, des VLC-PUFA dans la rétine, de nombreux modèles de souris génétiquement modifiées ont été produits et étudiés au cours des dix dernières années. Quelques uns des ces modèles sont présentés ci-dessous. Notons que la Souris présente une expression clinique de la maladie de Stargardt 3 réduite par rapport à [81] l’Homme. En effet, cette espèce ne possède pas de macula et les cônes représentent moins de 3% des photorécepteurs de la rétine. Un des premiers modèle étudié correspond à des souris transgéniques exprimant la protéine ELOVL4 humaine tronquée (Karan et al., 2005). Dans ce modèle, les souris porteuses du transgène présentaient des signes de dégénérescence rétinienne caractérisées par : - une diminution du nombre de photorécepteurs et une atrophie de l’épithélium pigmentaire observables en histologie, - une détérioration de la réponse fonctionnelle des cônes et des bâtonnets détectable en électrorétinographie, - une accumulation de phagosomes non digérés visualisable en microscopie électronique à transmission - une accumulation de lipofuscine dans l’épithélium pigmentaire visualisable en microscopie électronique à transmission par autofluorescence en microscopie optique. Une seconde étude a été réalisée par Anne McMahon et son équipe en 2007 sur un modèle de souris knockin afin de remplacer un allèle de la souris par la forme mutée chez l’Homme (McMahon et al., 2007). Ainsi, ils ont pu faire exprimer à ces souris une enzyme ELOVL4 ayant la même configuration C-terminal que l’enzyme tronquée humaine à l’origine de la maladie de Stargardt 3. Les individus homozygotes mutants n’étant pas viable en raison de défaut de barrière cutané, seuls les individus hétérozygotes ont pu être étudiés à l’échelle de la rétine. Ces souris hétérozygotes présentaient de nouveau une accumulation de lipofuscine dans l’épithélium pigmentaire ainsi qu’une atteinte fonctionnelle des cônes et des bâtonnets. Toutefois, les auteurs n’ont observé d’altération de la structure rétinienne à l’échelle histologique contrairement à ce qui avait été décrit précédemment chez les souris transgénique, probablement en raison d’un niveau d’expression plus faible de l’allèle muté par rapport au transgène. [82] Finalement, les trois études les plus récentes ont été réalisées sur des souris knockout conditionnelles (cKO), pour lesquels le gène était spécifiquement inactivé dans les photorécepteurs (Bennett et al., 2014a, 2014b; Harkewicz et al., 2012). Voici une synthèse des résultats de ces trois études. Dégradation de la réponse des bâtonnets et des cellules bipolaires à l’ERG Dans ces trois études, les mesures d’électrorétinographie chez les souris Elovl4-cKO ont révélé une atteinte fonctionnelle nette des bâtonnets et des cellules bipolaires (diminution significative de l’amplitude des ondes a et b associée à une augmentation des temps de latence). D’autre part, la diminution de l’onde b était plus marquée et plus précoce que celle de l’onde a (Bennett et al., 2014a). Le défaut de réponse des cellules bipolaires ne serait donc pas une simple conséquence de l’atteinte des photorécepteurs. Finalement, les potentiels oscillatoires, reflets de l’activité des cellules amacrines, horizontales et bipolaires, ainsi que le scotopic threshold response, reflet de l’activité des cellules ganglionnaires et de Müller, étaient également diminuées (Bennett et al., 2014b). Absence d’atteinte fonctionnelle significative des cônes L’activité des cônes a elle aussi été évaluée dans ces études. Cependant, les résultats obtenus sont contradictoires. Globalement, il ne semble pas évident que leur fonctionnement ait été affecté (Bennett et al., 2014a). Altération fine de l’épithélium pigmentaire Comme dans le modèle knockin, la structure rétinienne des souris mutées était globalement conservée. En particulier, la structure des disques des segments externes des bâtonnets était préservée bien que les ULC-PUFA y soient très concentrés et qu’ils y joueraient a priori un rôle de stabilisation membranaire (Bennett et al., 2014b; Harkewicz et al., 2012). Seule une légère diminution du nombre de bâtonnets a été observée. Par contre, une accumulation de lipofuscine et de gouttelettes lipidiques dans l’épithélium pigmentaire a de nouveau été notée (Harkewicz et al., 2012). [83] Notons qu’une autre étude sur des souris Elovl4-cKO n’aurait pas mis en évidence de conséquence de la mutation sur la structure ni la fonction des photorécepteurs (Barabas et al., 2013). Cette étude a été réalisée sur des souris plus jeunes comparées aux souris des trois études décrites précédemment, souris âgées de moins de 6,5 mois. Or d’après Bennett et al. 2014, les conséquences de la mutation augmenteraient avec l’âge des souris, avec des premiers signes détectables qu’à partir de 6 mois. Une architecture synaptique modifiée En l’absence d’anomalie majeure de la structure rétinienne et des segments externes des photorécepteurs en particulier, Lea Bennett et son équipe se sont intéressées à la capacité des photorécepteurs à transmettre le signal lumineux perçu aux cellules bipolaires (Bennett et al., 2014b). L’analyse des courants calciques au niveau des bâtonnets ainsi que des courants dépendants des récepteurs au glutamate des cellules bipolaires n’a révélé aucune anomalie. Cela suggérait donc que le problème serait plutôt lié aux synapses sous-jacentes. L’analyse lipidique des synapses rétiniennes a confirmé que les ULC-PUFA y étaient aussi présents en très grande quantité. Ces éléments ont donc motivé une analyse structurale fine des terminaisons synaptiques des photorécepteurs. L’analyse structurale fine a été réalisée en immunofluorescence et microscopie électronique à transmission (Bennett et al., 2014b). Cette dernière technique a révélé que les vésicules retrouvées au niveau des terminaisons synaptiques des bâtonnets étaient de plus petites tailles, anguleuses et en quantité moindre chez les souris Elovl4-cKO. Ces anomalies pourraient affecter le déplacement des vésicules au sein de la synapse, entre autres. De plus, une augmentation du nombre de noyaux de bâtonnets en apoptose, une diminution du nombre de terminaison synaptiques et de synapses à ruban ainsi que la présence de synapses de contraste anormal ont été notées chez les souris Elovl4-cKO. Finalement, les dendrites et synapses des cellules bipolaires présentaient une localisation ectopique dans la couche plexiforme externe. Ce type de lésion est fréquemment rencontré chez les souris mutantes pour des gènes pré-synaptiques contrôlant la libération de glutamate (Bennett et al., 2014b). Cela témoignerait de la recherche d’une synapse fonctionnelle par les dendrites des cellules bipolaires. L’ensemble de ces éléments semble prouver qu’un déficit en ULC[84] PUFA a pour conséquence une forte réorganisation synaptique de la couche plexiforme externe. D’autres éléments sembleraient en faveur d’une possible réorganisation synaptique de la couche plexiforme interne associée. Modifications dans la composition lipidique des rétines des souris Elovl4-cKO. Des analyses de la composition lipidique ont montré qu’il y avait significativement moins d’ULC-PUFA et inversement plus d’acides gras de moins de 22 carbones, leurs précurseurs, dans les rétines des souris Elovl4-cKO comparé aux souris contrôles. Par ailleurs, les concentrations des autres acides gras, et en particulier en DHA, n’étaient pas affectées par la mutation (Bennett et al., 2014a). Le taux d’ULC-PUFA restait faible tout au long de la vie de l’animal et la différence entre les souris Elovl4-cKO et les souris sauvages était exacerbée avec l’âge (Bennett et al., 2014a). Les photorécepteurs ne sont donc pas capables de compenser ce défaut de synthèse par des apports en ULC-PUFA produits par d’autres cellules dans lesquelles l’enzyme est fonctionnelle. Cela signifie aussi qu’un éventuel phénotype lié à un déficit en ULC-PUFA de la rétine devrait être plus marqué avec l’âge. iii. Conclusion sur le rôle des ULC-PUFA dans la rétine Les différentes études décrites dans les paragraphes précédents montrent que la perte de fonction de l’enzyme ELOVL4 dans la rétine est associée à diminution de la concentration des ULC-PUFA et a pour conséquence une diminution de la réponse fonctionnelle des bâtonnets et des cellules bipolaires. Les publications divergent quant à une possible atteinte des cônes associée. L’ensemble des études s’accorde aussi pour dire que des accumulations de lipofuscine ont été observées en microscopie électronique à transmission ou par autofluorescence au niveau de l’épithélium pigmentaire. La fonction des ULC-PUFA n’est toutefois pas encore bien identifiée. Il semblerait qu’ils soient essentiels au niveau de la terminaison synaptique des photorécepteurs et des bâtonnets, en particulier. Ils pourraient y jouer un rôle dans la stabilisation des membranes des vésicules pré-synaptiques et intervenir dans les phénomènes d’endo- ou exo-cytose de ces vésicules. Par contre, le niveau de déficit [85] obtenu pourrait ne pas altérer la stabilisation des membranes des segments externes contrairement à ce qui avait été suggéré précédemment dans la littérature. Finalement, le phénotype lié au déficit en ULC-PUFA serait plus marqué avec l’âge. c. Évolution des concentrations en Ultra Long Chain Poly-Unsaturated Fatty Acids dans la rétine avec l’âge Deux études réalisées chez le Rat et chez l’Homme ont révélé que la quantité d’ULC-PUFA diminue avec l’âge. Ce phénomène est associé à une diminution globale du nombre d’insaturations (Agbaga et al., 2010). Des hypothèses ont été émises quant à un possible lien entre cette diminution des ULC-PUFA dans la rétine et la diminution de l’amplitude des ERG observée avec l’âge. La diminution des ULC-PUFA dans la rétine avec l’âge pourrait être un facteur prédisposant à une dégénérescence maculaire liée à l’âge (maladie multifactorielle). Cette hypothèse n’a toutefois pas été validée pour l’instant. Par ailleurs, selon l’étude de Bennet décrite dans le paragraphe précédent, une éventuelle diminution des ULC-PUFA avec l’âge ne masquerait pas la diminution du taux d’ULC-PUFA chez les souris Elovl4-KO (Bennett et al., 2014a). Au contraire, l’atteinte fonctionnelle des photorécepteurs ne serait détectable qu’à partir de 6 mois et serait bien plus nette à un an. [86] III. HACD1 ET LA SYNTHÈSE DES ACIDES GRAS À TRÈS LONGUE CHAÎNE 1. Une mutation dans le gène HACD1 à l’origine d’une myopathie chez des Labradors a. Historique de la découverte du gène Dans les années 1990, le Dr Blot, directeur de l’unité de neurobiologie à l’ENVA, a observé en consultation des cas spontanés de myopathie congénitale chez des Labradors retrievers. Il a alors fondé une colonie expérimentale à partir de ces animaux afin d’étudier leur profil phénotypique et génétique. i. Les Étude phénotypique d’une colonie expérimentale de Labradors myopathes Labradors myopathes, dits « CNM », présentent un défaut de développement des masses musculaires qui se traduit par une faiblesse musculaire à la fois posturale et locomotrice associée à une intolérance à l’effort d’apparition rapide dès 3 à 6 mois. L’expression clinique de la myopathie évolue jusqu’à l’âge d’un an environ puis se stabilise. L’intensité des symptômes est variable suivant les individus. Avec une surveillance médicale appropriée, l’espérance de vie de ces animaux est similaire à celle des chiens sains (Blot et al., 2002). Les analyses histologiques de biopsies musculaires prélevées chez ces chiens ont révélé une centralisation ou une internalisation élevée des noyaux des fibres musculaires squelettiques d’apparition tardive, après quelques années. Elles ont aussi dévoilé une prédominance des fibres de type I, c’est-à-dire lentes, une hétérogénéité précoce du calibre des fibres musculaires et l’évolution vers une fibrose et une infiltration adipeuse des muscles après plusieurs années d’évolution. L’ensemble de [87] ces éléments ont permis de classifier cette affection au sein des Myopathies CentroNucléaires (CNM) (Blot et al., 2002; Maurer et al., 2012). ii. Étude génétique, la découverte d’une mutation dans le gène PTPLA/HACD1 L’étude génétique de la colonie de chiens CNM a été réalisée par l’équipe de Laurent Tiret, dans l’unité de Génétique Fonctionnelle et Médicale de l’ENVA. L’analyse du pédigrée de la colonie a permis de montrer, dans un premier temps, que la myopathie se transmettait en suivant un modèle autosomique récessif (Tiret et al., 2003). L’analyse des génomes des individus atteints a ensuite permis de localiser la mutation causale dans un gène alors nommé PTPLA pour Protein Tyrosine Phosphatase-like A (Pelé et al., 2005). En 2008, ce gène fut renommé HACD1 pour 3-HydroxyAcyl-CoA Deshydratase 1, après la découverte de la fonction de l’enzyme qu’il code dans le cycle d’élongation des VLCFA (Ikeda et al., 2008). HACD1 est un gène de plus de 20 kilobases, constitué de 7 exons (Figure 20 A) et situé en région centromérique du chromosome 2 canin. La mutation à l’origine de la myopathie dans la colonie d’Alfort correspond à l’insertion d’un élément SINE de 236 paire de bases (pb) dans l’exon 2 du gène (Figure 20 B). Par la suite, une étude réalisée sur des Labradors sains et mutés provenant de 9 pays situés sur les continents américain et européen, dont la France, a prouvé que tous les Labradors atteints de cette forme de myopathie centronucélaire présentaient la même mutation du gène HACD1. Cela signifie donc que ces animaux présentaient tous un ancêtre commun fondateur né, d’après les estimations, entre 1950 et 1960 soit il y a environ 17,5 générations (Maurer et al., 2012). Un test diagnostique a depuis été mis au point pour permettre aux éleveurs d’éviter les croisements entre chiens porteurs susceptibles de faire naître des individus malades (« Centronuclear Myopathy Disease Test | Labrador DNA Testing »). [88] Figure 20 : Le gène PTPLA/HACD1 (A), ses transcripts (B) et l'allèle muté (C) dans la myopathie centronucléaire du Labrador. D’après Pelé et al. 2005. A. Les tailles des exons et des introns sont indiquées respectivement au-dessus et au-dessous de la barre horizontale (en paires de bases). B. Chaque rectangle correspond à un exon, l’élément SINE est inséré au niveau de l’exon 2. b. Conséquences de la mutation sur le profil de transcription du gène En temps normal, HACD1 est exprimé dans les muscles striés, cœur compris, sous deux isoformes : HACD1-fl (full-length) possédant les sept exons du gène et HACD1-d5 dépourvue de l’exon 5 (Figure 20). La forme complète prédomine dans les muscles squelettiques matures et le cœur, la seconde forme prédomine dans les muscles squelettiques immatures et les muscles lisses (Blondelle et al., 2015). L’insertion de l’élément SINE dans l’exon 2 du gène (Figure 20 B) perturbe fortement le profil d’épissage. Cette mutation engendre la synthèse de cinq nouveaux transcrits contenant tous les exons 6 et 7 tandis que les transcrits normaux sont quasiment absents des muscles des chiens homozygotes mutés. De plus, sur les cinq nouveaux transcrits, quatre possèdent un codon stop prématurés et seul le dernier, constitué des exons 1, 6 et 7 et nommé Hacd1-167, peut donner lieu à la synthèse d’une protéine tronquée. [89] Figure 21 : Représentations schématiques des transcrits du gène HACD1 dans le muscle squelettique avec et sans mutation. D’après Pelé 2005. A. Représentation des deux transcrits obtenus en temps normal dans le muscle squelettique. B. Représentation des cinq nouveaux transcrits retrouvés dans les muscles des Labradors homozygotes et hétérozygotes pour l’allèle muté. Les flèches indiquent le positionnement de codons stop prématurés. [90] c. La fonction enzymatique de HACD1 Le nom initial de PTPLA, Protein Tyrosine Phosphatase-like A, a été attribué à ce gène en raison de la présence dans sa séquence codante d’un site caractéristique des protéine tyrosine phosphatases (PTP) (Uwanogho et al., 1999). Cependant, ce site est très vraisemblablement inactif en raison d’une mutation ayant entraîné le remplacement d’un résidu arginine par un résidu proline, d’où le terme de PTP-like. PTPLA possède 3 paralogues chez les mammifères : PTPLB, PTPLAD1 et PTPLAD2 (HACD1-3) qui présentent tous ce site catalytique muté. Des hypothèses quant à un possible rôle de pseudo-phosphatase, c’est-à-dire un rôle régulateur des phosphatases actives par compétition de substrat par exemple, a été évoqué mais n’a jamais été démontré. La réelle avancée concernant la fonction de PTPLA fut la découverte d’une forte similarité de séquence avec le gène Phs1, son orthologue chez la levure Saccharomyces cerevisiae. Ce dernier code une enzyme à activité 3-hydroxyacyl-CoA déshydratase (HACD) qui réalise la 3ème étape du cycle d’élongation des VLCFA détaillé précédemment et illustré Figure 14. La perte de fonction de ce gène est létale pour la levure et conduit à une accumulation des acides gras à longue chaîne et à une diminution des lipides complexes comprenant des VLCFA tels que les sphingolipides (Denic et Weissman, 2007; Kihara et al., 2008). Suite à la découverte de cette homologie de séquence, il a été démontré que les protéines codées par les gènes orthologues de Phs1 chez les mammifères possédaient tous une activité HACD in vitro mais que seuls PTPLA et PTPLB étaient capables de restaurer la croissance des levures déficientes en Phs1. Les quatre gènes furent donc renommés HACD1 à 4 (Ikeda et al., 2008). [91] 2. Une mutation du gène HACD1 à l’origine d’une myopathie chez l’Homme En 2013, une myopathie congénitale a été diagnostiquée chez une famille bédouine présentant de nombreux mariages consanguins (Muhammad et al., 2013). La maladie touchait 13 individus de la famille et l’étude de cette maladie a portée sur 8 individus présentant des signes cliniques et âgés de six mois à 35 ans. Les individus atteints souffraient tous d’une forme de myopathie sévère à la naissance. Une amélioration progressive des symptômes avec l’âge a été observée par l’équipe médicale chez plusieurs enfants et chez un adulte. Ainsi, le patient âgé de 35 ans était chauffeur de camion et était capable de livrer des colis lourds sans aucune difficulté. Ce résultat doit toutefois être relativisé car un seul patient adulte a été étudié. L’étude de l’arbre généalogique de la famille a révélé que la maladie se transmettait de façon autosomique récessive. L’étude des prélèvements histologiques réalisés sur deux patients de 2 ans a montré que les fibres de type 1 étaient présentes en plus grand nombre et que leur taille était diminuée. Cependant, aucune centralisation des noyaux n’était visible. L’anomalie la plus marquée était une très forte hétérogénéité dans le calibre des fibres, d’où la classification de cette affection dans le groupe des myopathies à disproportion de taille de fibres. Afin de déterminer le gène responsable de cette myopathie, une étude génétique des patients par l’étude des régions d’homozygotie a été réalisée et a permis de localiser trois gènes candidats dont HACD1. Il a ensuite été démontré que les patients atteints de myopathie étaient tous homozygotes pour une mutation non-sens dans la séquence du gène HACD1. A l’inverse, leurs parents sains étaient hétérozygotes pour cette mutation et aucun des 134 bédouins sains testés ne présentaient la mutation. De plus, une étude de la protéine codée par ce gène muté, a révélé que l’enzyme n’était pas fonctionnelle chez les individus malades. L’ensemble de ces éléments a donc permis de démontrer que la mutation de HACD1 était à l’origine d’une myopathie chez l’Homme (Muhammad et al., 2013). [92] Notons que la mutation découverte dans cette famille diffère sur certains points de la mutation à l’origine de la myopathie centronucléaire du Labrador retriever. Si l’absence de centralisation des noyaux est possiblement due au jeune âge des patients sur lesquels ont été réalisées les biopsies, une autre différence avec le modèle canin consiste en une possible amélioration du phénotype avec l’âge chez l’Homme. L’étude de cette maladie chez l’Homme n’ayant pour l’instant porté que sur un individu adulte, cette observation restera à confirmer. Les auteurs de l’étude ont émis des hypothèses afin d’expliquer cette possible amélioration du phénotype avec l’âge chez l’Homme. On retiendra, en particulier, la possible influence d’autres gènes chez l’Homme et la probable importance des apports en acides gras dans l’alimentation. Les nombreux éléments cliniques et histologiques communs avec les CNM humaines ainsi que la découverte du rôle du gène HACD1 dans une myopathie humaine font de la CNM du Labrador un très bon modèle de médecine comparée. De plus, de nouveaux modèles de mutations de Hacd1 ont été générés par manipulation génétique chez la Souris afin de pouvoir compléter l’étude de ce gène. 3. La Souris, modèle fonctionnel dans l’étude du gène Hacd1 a. La Souris, un bon modèle d’étude expérimental En parallèle de l’observation de cas spontanés de myopathies centronucléaires chez l’Homme et l’animal, de nombreux modèles de CNM ont été générés par manipulation génétique, que ce soit en lignées cellulaires, chez des levures, le poisson-zèbre ou la Souris (Cowling et al., 2012). Ces modèles ont été créés dans le but de caractériser la fonction normale des gènes mis en cause et les conséquences de leur mutation. [93] L’utilisation de la Souris comme modèle fonctionnel des maladies humaines présente plusieurs intérêts. Tout d’abord, la Souris est une espèce dont le génome est entièrement séquencé et qui est facilement manipulable génétiquement. Ensuite, il s’agit d’un animal génétiquement assez proche de l’Homme, en comparaison avec la levure ou le poisson-zèbre. Son élevage en captivité est facile, bon marché et prend peu de place. De plus, son cycle de reproduction est sans saison creuse et rapide : la mise à la reproduction peut commencer à 8-10 semaines, la durée de gestation est d’une vingtaine de jours et les chaleurs sont fréquentes. Cela permet d’obtenir beaucoup d’individus en peu de temps et de former de nouvelles lignées d’individus consanguins facilement. b. Obtention de souris mutantes pour le gène Hacd1 L’obtention de souris mutantes s’est faite par recombinaison homologue entre un vecteur choisi et le chromosome de la Souris comportant le gène d’intérêt, ici Hacd1. Dans le cadre de l’étude du gène Hacd1, la recombinaison homologue a été réalisée par le laboratoire de Génétique Fonctionnelle et Médicale de l’ENVA, en collaboration avec le Centre d’Ingénierie de Génétique Murine de l’Institut Pasteur, sur des Souris C57Bl/6N, Souris Black 6. Le vecteur employé, présenté Figure 22, comprenait le gène LacZ, une cassette de résistance à la néomycine et des sites FRT et LoxP. Le gène LacZ sert de gène rapporteur afin de visualiser l’expression précise du gène Hacd1. En effet, grâce à la recombinaison homologue, son expression est sous contrôle du promoteur d’Hacd1, ce qui veut dire que LacZ s’exprime dans les mêmes cellules et avec la même intensité que le gène d’intérêt. Le gène LacZ code une β-Galactosidase, une enzyme dont l’activité est facilement visualisable sur coupe histologique. En effet, cette enzyme donne lieu à un précipité coloré en présence d’X-gal (5-bromo-4-chloro-3-indolyl-béta-D-galactopyranoside). Des anticorps anti-β-gal ont également été développés afin de pouvoir marquer la protéine par [94] immunofluorescence. Ce gène rapporteur permet de déterminer quelle population cellulaire exprime Hacd1 au sein d’un organe. C’est une technique de mesure indirecte de l’expression de Hacd1 chez les individus porteurs d’un allèle muté par opposition à l’hybridation in situ qui permet une visualisation directe chez les individus sauvages des ARNm du gène. La cassette de résistance à la néomycine a permis la sélection positive in vitro des clones de cellules embryonnaires souches ayant recombiné. Après vérification par PCR (Polymerase Chain Reaction) de la recombinaison homologue, deux clones indépendants de cellules embryonnaires souches ont été injectés dans des blastocystes et les descendants issus de ces cellules ont permis de fonder les colonies de Hacd1-KO. Les sites FRT et LoxP sont des sites de recombinaison pour des enzymes recombinases microbiennes, respectivement la flippase et la cre recombinase. Après croisement avec des souris porteuse de la cre recombinase de manière ubiquitaire, les exons 2 à 4 sont éliminés générant un allèle dit knockout, comme l’illustre la Figure 22. Dans un premier temps, la recombinaison homologue a permis d’obtenir des individus hétérozygotes pour l’allèle Hacd1-flox illustré Figure 22. Le croisement de ces souris avec des souris exprimant la Cre recombinase a ensuite permis d’obtenir l’allèle Hacd1-KO. [95] Figure 22 : Configuration du locus Hacd1 après événement de recombinaison homologue A. Allèle flox, issu de la recombinaison homologue. B. Allèle Hacd1-KO, généré par recombinaison de l’allèle flox par une Cre recombinase. Les exons 2, 3 et 4 sont éliminés. β-gal : séquence du gène Lac-Z codant pour la β-galactosidase. FRT, LoxP : sites de recombinaison pour des enzymes recombinases microbiennes, respectivement la flipase et la cre recombinase. βact::neo : gène codant une résistance à la néomycine sous cont rôle du promoteur de la β-actine. Des croisements entre souris porteuses de l’allèle Hacd1-KO ont ensuite permis d’obtenir des lots de souris homozygotes mutées, dites Hacd1-KO, ou hétérozygotes ou homozygotes sauvages, dites sauvages. Ces deux derniers types d’individus ont servi de témoins alors que les individus homozygotes Hacd1-KO permettaient d’étudier les conséquences d’une perte totale de fonction de Hacd1. Des souris porteuses de l’allèle flox ou Hacd1-KO ont permis de préciser l’expression d’Hacd1 grâce au gène rapporteur LacZ. [96] 4. Expression tissulaire des gènes Hacd Les différents modèles d’étude de Hacd1 ont permis entre autres de déterminer dans quel tissu s’exprime Hacd1 et ses 3 paralogues au cours de l’embryogénèse puis chez l’adulte. Il a ainsi été démontré que ces quatre gènes ne s’expriment pas dans les mêmes tissus ou en quantité variable (Blondelle, 2013; Ikeda et al., 2008; Wang et al., 2004). Chez l’adulte, HACD2 et HACD3 ont une expression large. HACD4 est principalement exprimé par les leucocytes mais il s’exprime aussi faiblement au niveau du placenta, du cœur, de la rate, des reins et des poumons (Ikeda et al., 2008; Wang et al., 2004). L’expression de Hacd1 est quant à elle un peu plus complexe car l’intensité de l’expression et le type de transcrit varient en fonction de l’âge de l’animal et du type de tissu. Ainsi, le transcrit Hacd1-d5 (isoforme sans exon 5) a été retrouvé dans toutes les lignées cellulaires ce qui signifie que Hacd1 a une expression très large (Blondelle, 2013). Cependant, Hacd1-fl (transcrit complet, seule isoforme codant une protéine catalytiquement active) n’a été détectée qu’au niveau des muscles striés squelettiques et cardiaque et dans l’œil. Une expression très faible est aussi retrouvée dans les poumons. Au cours du développement embryonnaire et plus précisément lors de la maturation des fibres musculaires, l’expression d’Hacd1-fl augmente fortement. Récemment, l’équipe a démontré un rôle de l’isoforme Hacd1-fl dans la fusion des myoblastes au cours du développement musculaire via des modifications dans la composition et la fluidité de la membrane (Blondelle et al., 2015). Par ailleurs, HACD1-D5 jouerait un rôle antagoniste par rapport à l’isoforme active. En conclusion de l’étude, Hacd1 s’exprime de façon ubiquitaire dans l’organisme mais présente un épissage variable en fonction de la période du développement et du type cellulaire, avec une expression restreinte aux muscles striés et à l’œil pour l’isoforme active. L’étude de l’expression d’Hacd1 dans la rétine a été débutée par Renaud Fouchère et Myriam Taleb dans le cadre de leur thèse de doctorat vétérinaire. Les résultats de leur étude sont détaillés ci-après, dans le paragraphe IV. [97] IV. ÉTUDE PRÉLIMINAIRE DE L’EXPRESSION ET DU RÔLE DU GÈNE Hacd1 DANS LA RÉTINE Dans le cadre de leur thèse expérimentale vétérinaire, réalisée sous la direction de Fanny Storck et présentée le 4 octobre 2012, Renaud Fouchère et Myriam Taleb ont commencé à étudier l’expression et le rôle du gène Hacd1 dans le testicule et la rétine (Fouchère et Taleb, 2012). Leur étude a ensuite été complétée par les travaux de Jordan Blondelle doctorant au sein du laboratoire de Génétique Fonctionnelle et Médicale de 2010 à 2013 (Blondelle, 2013). Cette étude préliminaire comportait 3 expériences, décrites ci-dessous. 1. Évaluation de l’expression du gène Hacd1 a. Techniques utilisées L’étude de l’expression du gène Hacd1 dans l’œil a été faite à la fois au stade embryonnaire (à 10,5 et 12,5 jours) et sur des yeux de souris adultes. Elle reposait sur un marquage X-Gal (Blondelle, 2013; Fouchère et Taleb, 2012). Il s’agissait d’un marquage indirect de l’expression de Hacd1 grâce au gène rapporteur LacZ inséré sous contrôle du promoteur du gène Hacd1 chez les souris porteuses de l’allèle Hacd1-flox ou KO. Le marquage X-Gal a été réalisé sur embryon entier et sur des coupes au cryostat d’embryon ou d’œil. L’épaisseur des coupes utilisées variait entre 10 et 50 µm. [99] Un immunomarquage de la protéine β-Gal avait été tenté, sans succès, en raison d’un manque de spécificité et de sensibilité des deux anticorps testés. Les animaux inclus dans cette étude étaient : - 3 embryons +/+ et 4 embryons +/- - 8 souris mâles adultes +/+ et 8 souris mâles adultes +/- - 1 souris femelle adulte +/- et 1 souris femelle adulte +/+ Les Souris +/+, appelées sauvages, servaient de contrôle puisqu’elles ne possédaient pas le gène rapporteur Lac-Z. Les souris +/-, appelées hétérozygotes, présentaient quant à elles, un allèle comportant le gène LacZ sous contrôle du promoteur du gène Hacd1. Remarque : aucune Souris -/- n’a été utilisée pour cette étude car la mutation pourrait s’avérer délétère pour les cellules dans lesquelles s’exprime le gène en temps normal. La mort de ces cellules pourrait alors entraîner des modifications histologiques plus ou moins importantes. De plus, les cellules qui auraient dû exprimer le gène Hacd1 pourraient avoir changé de destin cellulaire, ce qui fausserait également toute interprétation. La myopathie causée par la mutation du gène Hacd1 étant à transmission autosomique récessive, on considère que l’allèle sain chez les souris hétérozygotes suffisait à éviter ce facteur de confusion. Pour finir, des RT-PCR ont été réalisées à partir d’yeux de souris afin de déterminer quels étaient les transcrits de Hacd1 exprimés dans cet organe et dans quelles proportions (Blondelle, 2013). Cette technique a aussi été employée afin d’étudier l’expression des 3 paralogues de Hacd1 : Hacd2, Hacd3, Hacd4. [100] b. Résultats obtenus avec la coloration X-Gal La coloration des embryons(de 10,5 et 12,5 jours) hétérozygotes entiers a révélé une forte expression du gène rapporteur dans le cœur et une expression un peu plus modérée dans les ébauches musculaires, la chaîne ganglionnaire paravertébrale, l’encéphale et l’œil. La coloration des coupes histologiques d’yeux prélevés sur des souris hétérozygotes adultes a révélé un marquage net de deux couches cellulaires situées dans la rétine (Figure 23). Une double coloration X-Gal – DAPI a permis d’identifier avec précision les couches cellulaires dans lesquelles s’exprimait Hacd1. Il s’agissait de la couche des cellules bipolaires et la couche des cellules ganglionnaires. Les photorécepteurs n’étaient pas marqués. [101] Figure 23 : Expression du gène Hacd1 dans l'œil chez la Souris (d’après Blondelle, 2013) (A) Coupe histologique rétinienne vue au microscope et représentation schématique de sa structure (www.bioon.com). L’épithélium pigmentaire est aussi appelé rétine pigmentaire. L’ensemble des autres couches forme la rétine neurale (B, C) Coloration d’un embryon âgé de 10,5 jours au X-Gal (B) et grossissement sur l’œil (C). (D) Expression de Hacd1 dans la rétine adulte révélée par coloration X-Gal. (D’) Section sagittale d’une rétine. 1 : couche des cellules photoréceptrices, 2 : couche des cellules bipolaires, 3 : couche des cellules ganglionnaires. L’actine est marquée en rouge, l’ADN en bleu (DAPI) et le marquage X-Gal en noir. (D’’) Marquage de l’ADN. (D’’’) Marquage X-Gal. [102] c. Résultats obtenus grâce à la technique de RT-PCR La RT-PCR a permis de montrer que les 3 isoformes de Hacd1 étaient exprimées dans l’œil de souris, avec une prédominance de Hacd1-d5 (Figure 24 A). Cette technique a aussi permis de contrôler l’absence d’expression du gène chez les souris Hacd1-KO (Figure 24 A). En effet, aucun des deux transcrits sauvages n’a été retrouvé chez les souris Hacd1-KO. Finalement, les trois paralogues de Hacd1, Hacd2, Hacd3, Hacd4 étaient exprimés dans des proportions similaires dans les yeux des souris Hacd1-KO et des souris contrôles (Figure 24 A). La perte de Hacd1 chez les souris Ko n’influait donc pas sur l’expression de ces 3 paralogues. 2. Examen histologique des yeux a. Techniques utilisées L’examen histologique des yeux a été réalisé par le Dr Reyes-Gomez, service d’anatomie pathologique de l’ENVA, sur les souris adultes. Pour cela, les yeux prélevés ont été fixés 1h dans du PFA 4% puis ont été conservés dans de l’éthanol 70% en attendant le paraffinage. Une fois les blocs de paraffine obtenus, les yeux ont été coupés au microtome à une épaisseur de 3 µm puis ont été colorés à l’HES (HémalunÉosine-Safran) (Fouchère et Taleb, 2012). Le lot utilisé pour cette partie de l’étude était constitué de quatre souris mâles +/+, de deux souris mâles +/- et de six souris mâles -/-. Étant donné que cette myopathie présente une transmission autosomique récessive, les Souris sauvages et hétérozygotes servaient de contrôle. [103] b. Comparaison des structures histologiques entre Souris contrôle et mutantes Bien qu’il ait été démontré qu’Hacd1 s’exprimait dans la couche des cellules ganglionnaires et dans la couche des cellules bipolaires de la rétine, aucune différence structurale n’a été mise en évidence lors de la comparaison des yeux entre les différents groupes (Figure 24). Figure 24 : Analyse structurale en l'absence de Hacd1 dans l'œil des souris Hacd1-KO (d’après Blondelle, 2013). (A) Étude par RT-PCR de l’expression des isoformes de Hacd1 et des autres gènes Hacd (Hacd2, 3 et 4) dans l’œil des souris contrôles et Hacd1-KO. CycloB était utilisé comme normalisateur. (B, C) Coupes histologiques de rétines de souris contrôles (B) et Hacd1-KO (C) colorées à l’Hémalun‐Éosine-Safran. Barre d’échelle : 50μm. [104] 3. Évaluation électrophysiologique du fonctionnement de la rétine Afin de tester le phénotype lié à la mutation d’un point de vue fonctionnel cette fois-ci, une dernière expérience a été menée. Elle consistait en l’évaluation de la fonction électrophysiologique de la rétine chez des souris Hacd1-KO grâce à l’obtention d’un électrorétinogramme (ERG). a. Techniques utilisées Les ERG ont été réalisés par le Dr Chahory, responsable du service d’ophtalmologie de l’ENVA. La nuit précédant l’examen, les souris femelles, âgées de un an, étaient placées dans l’obscurité et la suite des manipulations a été réalisée sous lampe inactinique. Environ 15 min avant l’examen, les pupilles des souris étaient dilatées par installation d’une goutte de Tropicamide (anti-muscarinique) sur la cornée de chacun des deux yeux. Une fois les pupilles dilatées, les souris était anesthésiées à l’aide d’un mélange à 2% xylazine et 10% kétamine dilués dans du NaCl 0,9%. Elles étaient ensuite placées sur une plaque chauffante à 37°C. Une électrode de terre était placée en position sous-cutanée au niveau du dos de l’animal et deux électrodes de référence étaient placées en position sous-cutanées à la base des deux oreilles. Les deux électrodes actives étaient quant à elles posées sur la cornée des deux yeux et stabilisées par un bras articulé. Par ailleurs, les cornées étaient hydratées avec du VISKYAL® Collyre (hyaluronate de sodium) avant les mesures afin d’éviter leur dessiccation tout en améliorant le contact électrode/cornée. L’animal était finalement avancé dans une coupole de Ganzfeld disposée dans une cage de Faraday afin de limiter les interférences avec des ondes électriques parasites. Les cinq électrodes étaient reliées à un appareil RetiPort32 (Roland Consult Gmbh), lui-même relié à un ordinateur. Le logiciel RetiPort 32 a été utilisé pour la récupération et le traitement [105] des données. L’impédance des électrodes était vérifiée (<10kOhms) avant de lancer les mesures afin de limiter les artéfacts. Les rétines de souris ont ensuite été stimulées par 10 séries de 10 flashs de lumière blanche. Les stimulations étaient d’intensité croissante entre deux séries allant de 0,0003 cd.s/m² lors de la première série à 10cd.s/m² pour la dernière série. Les stimulations étaient binoculaires mais la réponse de chaque rétine était enregistrée individuellement. La courbe obtenue reflétait l’activité rétinienne en fonction du temps. b. Résultats des électrorétinogrammes Les résultats semblaient homogènes au sein de chaque groupe de souris, groupe contrôle et groupe homozygote muté et la comparaison des tracés entre les deux groupes révélait une diminution globale de l’amplitude du tracé ERG (Figure 25) chez les souris Hacd1-KO (Blondelle, 2013). En particulier, l’amplitude de l’onde a présentait une diminution de 41% et celle de l’onde b de 31%. D’autre part, une augmentation du temps de culmination de l’onde a de 36% a été constatée pour une stimulation lumineuse maximale de 10 cd.s/m² (Figure 25). Ces résultats reflètaient une altération du fonctionnement de la rétine en l’absence de Hacd1 chez la Souris. Plus précisément, ils semblaient témoigner d’une altération fonctionnelle des cellules bipolaires (onde b) ainsi que des photorécepteurs (onde a). [106] Figure 25 : Diminution de la fonction rétinienne en l'absence de Hacd1 (d'après Blondelle, 2013). (A) Tracé représentatif d’un électrorétinogramme-flash (ERG-Flash) de l’œil d’une souris contrôle et d’une souris Hacd1-KO. (B, C) Amplitude des ondes a (B) et des ondes b (C) enregistrées chez les souris contrôles (WT) et chez les souris Hacd1-KO en fonction de l’intensité lumineuse. (D) Temps de culmination de l’onde a en fonction de l’intensité lumineuse * p<0,05 ; ** p<0,01 ; *** p<0,001. [107] 4. Discussion à partir de ces résultats préliminaires Tout d’abord, l’évaluation de l’expression du gène Hacd1 chez la souris a permis de démontrer que ce gène s’exprimait dans les couches des cellules bipolaires et ganglionnaires de la rétine mais pas dans les photorécepteurs. Pourtant, les résultats de l’ERG ont montré que les souris mutées présentaient une altération fonctionnelle des cellules bipolaires mais aussi des photorécepteurs. L’atteinte fonctionnelle des photorécepteurs est donc ici surprenante. Différentes hypothèses peuvent être émises afin de chercher à comprendre ce résultat. Tout d’abord, il se peut que l’évaluation de l’expression du gène Hacd1 dans l’œil de souris n’ait pas été assez sensible. Un faible niveau d’expression du gène dans les photorécepteurs aurait alors pu passer inaperçu d’autant plus que cette évaluation reposait sur un marquage indirect. Une seconde hypothèse serait qu’une perte de fonction de l’enzyme HACD1 exprimée au niveau des cellules bipolaires et des cellules ganglionnaires ait des conséquences sur le fonctionnement des photorécepteurs. Cela serait possible si, par exemple, les VLCFA étaient formés au niveau des cellules ganglionnaires ou bipolaires avant d’être acheminés jusqu’aux photorécepteurs. Ce résultat étant surprenant, notre étude avait, entre autres, pour objectif de vérifier l’absence d’expression du gène Hacd1 dans les photorécepteurs. Pour cela nous avons employé une technique de marquage directe de l’expression, l’hybridation in situ, de l’expression de ce gène. Finalement, l’analyse histologique globale des rétines des souris mutées n’a pas permis de mettre en évidence d’anomalie structurale flagrante. Toutefois, étant données les anomalies fonctionnelles révélées lors des ERG et étant donné le rôle essentiel des VLCFA dans la stabilisation des courbures membranaires, il ne semblait pas prudent de conclure à l’absence d’anomalie histologique à ce stade. Il semblait en effet nécessaire de compléter cette étude par une analyse fine de l’organisation des cellules à l’intérieur des couches et de l’aspect des membranes, en particulier au niveau du segment externe des photorécepteurs qui présentent de nombreux replis. [108] PARTIE 2 : POURSUITE DE LA CARACTÉRISATION DU RÔLE DU GÈNE Hacd1 DANS LA RÉTINE I. INTRODUCTION Cette thèse expérimentale avait pour but de poursuivre la caractérisation du rôle du gène Hacd1 dans la rétine à partir du modèle murin décrit paragraphe III. Cette étude s’inscrivait dans le prolongement des études réalisées par Renaud Fouchère et Myriam Taleb en 2012 et par Jordan Blondelle en 2013 dont les résultats ont été décrits précédemment (paragraphe IV). La caractérisation du rôle du gène Hacd1 dans la rétine des souris a été décomposée en quatre grands axes : une évaluation clinique et fonctionnelle ainsi qu’une analyse histologique et une caractérisation de la composition lipidique de la rétine des souris Hacd1-KO et une étude fine de l’expression de Hacd1 dans ce tissu. a. Hypothèses d’étude Au vu des résultats préliminaires obtenus au laboratoire ainsi que de la littérature portant en particulier sur la maladie de Stargardt 3, qui nous a servi de référence étant donné les rôles complémentaires des enzymes ELOVL4 et HACD1, nous avons émis différentes hypothèses que nous avons cherché à valider au cours de nos travaux. Tout d’abord, nous avons supposé que les anomalies fonctionnelles révélées à l’ERG (Blondelle, 2013) témoigneraient d’un défaut de fonctionnement de la rétine éventuellement révélateur d’une dégénérescence rétinienne. Cela pourrait être secondaire à un déficit en VLCFA dans la rétine, comme cela a été démontré pour la maladie de Stargardt 3 (Harkewicz et al., 2012). [109] D’autre part, bien que les études préliminaires n’aient pas permis de déceler de lésions histologiques globales de la rétine, nous avons voulu rechercher des lésions histologiques fines en particulier au niveau des photorécepteurs ou au niveau de l’épithélium pigmentaire. En effet, d’après des études histologiques de souris modèles de la maladie de Stargardt 3, bien que la structure de la rétine soit globalement conservée, une légère diminution du nombre de photorécepteurs ainsi qu’une accumulation de gouttelettes lipidiques et de granules de lipofuscine dans l’épithélium pigmentaire étaient notées (Bennett et al., 2014a; Harkewicz et al., 2012). Une désorganisation des terminaisons synaptiques des bâtonnets a aussi été mise en évidence dernièrement (Bennett et al., 2014b). Nos analyses structurales ont donc portés plus particulièrement sur ces couches rétiniennes. De plus, les VLCFA semblant jouer un rôle essentiel dans la stabilisation des replis membranaires, nous avons plus particulièrement recherché des anomalies dans les régions présentant de fortes courbures membranaires telles que les synapses et les segments externes. Finalement, au vu des résultats d’études de souris modèles de la maladie de Stargardt 3, nous avons supposé que l’expression clinique et les lésions histologiques seraient accentuées avec l’âge (Bennett et al., 2014a). Cela nous a donc poussé à réaliser cette nouvelle étude sur des souris plus âgées. b. Description des quatre axes d’étude Le premier axe de notre étude portait sur une évaluation clinique et fonctionnelle de la rétine de nos souris. Cette évaluation était réalisée, à la demande du Pr Anderson, en prévision de l’analyse lipidique afin de s’assurer du phénotype de nos souris. Cette étude a comporté une observation de la cornée, une analyse de fond d’œil et la réalisation d’ERG. L’observation de la cornée et des fonds d’oeil avait pour objectif de déceler toute anomalie ou défaut de transparence pouvant altérer le tracé ERG par la suite. Les ERG étaient effectués afin de s’assurer de la présence d’un phénotype fonctionnel avant de réaliser l’analyse lipidique. Cette partie de l’étude [110] était aussi l’occasion de rechercher des éléments en faveur d’une dégénérescence rétinienne chez les souris Hacd1-KO (fond d’œil d’aspect hétérogène avec des vaisseaux amincis voire absents, amplitudes des ondes a et b diminuées à l’ERG). Pour une question de disponibilité du matériel entres autres, les tracés ERG ont été réalisés en partenariat avec l’équipe de biophysique neurosensorielle de l’Université d’Auvergne. La seconde partie de l’étude consistait en une analyse structurale approfondie de la rétine des souris Hacd1-KO. Cette étude histologique reposait sur 3 types d’observations. Dans un premier temps, nous avons effectué une étude morphométrique de coupes histologiques de rétines de souris colorées à l’HémalunÉosine-Safran. Nous avons ensuite comparé l’aspect des rétines après avoir procédé à des marquages de cellules ou structures rétiniennes par immunofluorescence. Finalement, nous avons observé des rétines en microscopie électronique afin de visualiser avec plus de précision l’ultrastructure de la rétine. La troisième partie de cette étude consistait en une analyse de l’expression du gène Hacd1. Cette analyse a été réalisée dans l’objectif de déterminer avec précision dans quelles cellules s’exprime le gène et, en particulier de vérifier l’absence d’expression dans les photorécepteurs. En effet, les marquages X-Gal réalisés sur les coupes de rétine aux cours des études préliminaires ont montré que Hacd1 ne s’exprimait a priori pas au niveau des photorécepteurs mais qu’il s’exprimait dans d’autres cellules de la rétine n’ayant pas pu être identifiées avec précision. L’absence d’expression de Hacd1 dans les photorécepteurs étant très surprenante nous avons ici cherché à vérifier cette observation à l’aide d’une technique de marquage direct de l’expression du gène Hacd1 par hybridation in situ. L’identification plus précise des cellules exprimant le gène Hacd1 devait quant à elle reposer sur la réalisation d’un double marquage à l’aide d’un anticorps anti-β-Gal, révélant l’expression du gène rapporteur LacZ, et d’anticorps spécifiques de certaines lignées cellulaires. Faute de temps et suite à quelques difficultés techniques, cette partie de la thèse n’a pas pu aboutir mais des résultats préliminaires seront présentés. [111] Finalement, le quatrième et dernier axe de l’étude consistait en une analyse de la composition lipidique des rétines de Souris. Pour cela des dosages du contenu lipidique des rétines des souris ont été réalisés par l’équipe du Professeur R. Anderson, au Dean McGee Eye Institute, Oklahoma. c. Implication personnelle : Dans le cadre de cette thèse, j’ai participé à l’acquisition et au traitement des données de la très grande majorité des expériences décrites. J’ai ainsi eu l’occasion de réaliser de nombreuses immunofluorescences, de participer à la mise au point d’un protocole d’hybridation in situ adapté à la rétine, d’observer la réalisation d’une partie des ERG, d’analyser les clichés de rétine en microscopie optique et en microscopie électronique à transmission. Cependant, il y a quelques étapes auxquelles je n’ai pas pu assister en raison de contraintes géographiques entre autres. Ainsi, je n’ai pas pu assister à l’acquisition de la seconde moitié des tracés des ERG à Clermont-Ferrand, à la réalisation des analyses statistiques à partir de ces tracés, ni à la préparation des rétines en vu de l’observation en MET. L’ensemble de ces étapes ont été réalisées par le laboratoire de biophysique de l’université de Clermont-Ferrand. De même, je n’étais pas présente lors de la réalisation des analyses de composition lipidique de la rétine qui ont été réalisées au Dean McGee Eye Institute, Oklahoma. À terme, ma participation à la rédaction d’un article à partir de nos résultats est envisageable. Toutefois, il nous manque actuellement certaines données essentielles pour une publication, tels que les résultats de l’hybridation in situ. [112] II. MATÉRIEL ET MÉTHODES 1. Description des lots d’animaux utilisés Plusieurs lots de souris ont été utilisés dans le cadre de cette thèse. Le Tableau 1 présente les souris utilisées et le tableau figuré en ANNEXE 7 leur répartition dans les différentes études décrites par la suite. Les souris d’un même groupe ont été euthanasiées au même moment et dans le même objectif. En général, elles étaient aussi nées à la même période mais ce n’était pas toujours le cas. Par contre, faute de moyen et/ou de temps, il arrivait parfois que certaines analyses ne soient réalisées que sur une partie des souris d’un même groupe. D’autre part, notons que la majorité des souris ont fait l’objet de plusieurs analyses afin d’avoir le plus de données possible pour une même souris et de limiter le nombre de souris euthanasiées. Par ailleurs, suite à une erreur dans la commande de l’alimentation, les souris ont reçu une alimentation très riche en lipides pendant 2 mois fin 2013. La plupart des souris utilisées dans nos études ont reçu cet aliment ; le Tableau 1 précise à quel âge. Cet élément a été indiqué car il est possible qu’une telle alimentation ait des conséquences sur le phénotype des souris en fonction de l’âge de l’apport lipidique. Ainsi, par exemple, les frères des souris du groupe F, qui ont reçu l’alimentation au cours de leur croissance, n’ont pas exprimé de phénotype musculaire. Ce point sera abordé plus précisément dans la discussion. [113] Tableau 1: Présentation des souris utilisées pour l'étude de la fonction et de l'expression de Hacd1 dans la rétine. Allèle "+" désigne l’allèle sauvage Allèle "-" désigne l’allèle Hacd1-KO Allèle "flox" désigne l’allèle Hacd1-flox [114] Tableau 2 : Résumé des caractéristiques des différentes expériences réalisées dans le cadre de cette thèse Légende : X désigne un lot en entier ; X désigne une partie du lot +/+ : souris sauvages ; +/- souris hétérozygotes ; -/- souris Hacd1-KO [115] 2. Étude clinique et fonctionnelle de la rétine des Souris a. Examen ophtalmologique des souris - examen du fond d’œil L’étude clinique de la rétine de nos souris a été effectuée par le service d’ophtalmologie de l’École Nationale Vétérinaire d’Alfort. Ces examens ont été réalisées sur les souris des lots C, E et F, souris mâles et femelles âgés de plus d’un an. L’ensemble de l’examen était réalisé sur les animaux vigiles. Dans un premier temps, le clinicien contrôlait la transparence de la cornée et du segment antérieur à l’aide d’une lampe à fente. Il notait par la même occasion la présence éventuelle de taches sur la cornée. Une goutte de mydriaticum® était ensuite instillée dans chaque œil afin d’obtenir une mydriase et de pouvoir observer le fond d’œil. Les souris étaient placées pendant environ 15 min à l’obscurité. Une fois la mydriase obtenue, le Dr Sabine Chahory visualisait le fond d’œil à l’aide d’un ophtalmoscope indirect. Elle qualifiait alors l’aspect du fond d’œil, en particulier sa couleur et la taille des vaisseaux. Au total, 39 souris, mâles et femelles, de plus d’un an ont été incluses dans cette étude clinique. De plus, une simple observation des cornées et du segment antérieur a aussi été réalisée sur 14 souris plus jeunes. [116] b. Étude fonctionnelle de la rétine par électrorétinographie Les électrorétinogrammes (ERG) ont été réalisés en collaboration avec le Professeur Isabelle Ranchon-Cole du laboratoire de biophysique de l’université d’Auvergne (Clermont-Ferrand). i. Souris incluses dans l’étude et critère d’exclusion Les ERG ont été réalisés sur deux lots de souris : le lot E comportant 18 souris et le lot F comportant 15 souris. L’ensemble des souris était des souris femelles d’âge compris entre 12 et 20 mois. Elles ont toutes subi un examen ophtalmologique dans les deux mois précédant les ERG. Suite à cet examen ophtalmologique, les souris présentant une opacification de la cornée ou une anomalie ayant gêné la visualisation du fond d’œil ont été éliminées de l’étude par ERG. En effet, ces anomalies auraient interféré avec l’obtention des tracés d’ERG. ii. Préparation des souris Les souris ont été transportées, par un transporteur agréé, jusqu’à ClermontFerrand dans le mois précédant les mesures. De la nourriture était fournie par l’animalerie d’origine afin de ne pas modifier leur régime alimentaire. Les souris ont été adaptées à l’obscurité la nuit précédant la réalisation des mesures. L’ensemble des manipulations ont ensuite été effectuées sous lumière inactinique (> 650nm). Les souris ont été anesthésiées à l’aide d’un mélange de kétamine (44mg/kg) et de xylazine (8mg/kg) injecté en intramusculaire. Les pupilles des souris étaient ensuite dilatées par instillation d’une goutte d’Atropine sulfate 1%, ALCON® dans chaque œil environ 10 min avant les mesures. Le niveau de dilatation des pupilles était contrôlé avant de mettre la souris en place sur le montage. [117] iii. Mise en place des souris Les souris anesthésiées étaient placées en décubitus sternal sur une plaque mobile chauffée à 37°C. L’œil droit était légèrement exorbité à l’aide d’un film plastique troué réutilisé pour toutes les souris. Les trois électrodes nécessaires aux enregistrements étaient ensuite positionnées sur l’animal. L’électrode de mesure était constituée d’un fil d’argent (AgCl) en forme d’anneau et était fixée à la sphère intégrante. Elle était posée contre la cornée, le plus centralement possible, et elle était stabilisée au moyen de bras articulés. L’électrode de référence, une pastille de 2 mm de diamètre en argent/chlorure d’argent, était placée sur la langue et maintenue en place en refermant la bouche de la souris. L’ensemble de l’équipement était disposé dans une cage de Faraday, ce qui permettait de s’affranchir des ondes électriques parasites. Une fois l’ensemble en place, la lumière rouge était éteinte et les manipulateurs passaient dans la pièce attenante contenant l’équipement informatique à partir duquel ils lançaient les mesures. iv. Protocole de stimulation lumineuse pour les électrorétinogrammes-flash Le protocole de stimulation lumineuse commençait avec un premier flash de lumière blanche et d’intensité -3,5 log (cd.s/m2), soit en dessous du seuil de réponse. Ce flash était suivi de neuf autres flashs d’intensité croissante jusqu’à atteindre une valeur maximale de -1 log (cd.s/m2) pour le dernier flash. L’intervalle entre deux flashs était de 30s. Chaque flash durait 10 μs et il n’y avait qu’un seul flash par intensité lumineuse. Le déclenchement du flash était piloté par un ordinateur situé dans une pièce attenante à celle dans laquelle se trouvaient les souris et le montage. Le stimulus lumineux était généré par un photostimulateur Type PS 33 (Grass, USA). Le flash lumineux était ensuite acheminé par une fibre optique à une sphère intégrante (Labsphère, North Sutton) qui éclairait de manière uniforme la totalité de la rétine reproduisant ainsi des conditions de Ganzfeld. [118] Les trois électrodes étaient reliées à un amplificateur différentiel (Model 1700, AM Systems, Paris). Le gain était réglé sur 1000 et la bande passante de 0,1 à 10 kHz (afin d’obtenir un tracé ERG, la gamme de fréquence sélectionnée doit comprendre 0,3 à 300 Hz). Le signal ainsi amplifié était ensuite transmis à un logiciel informatique permettant de convertir le signal analogique d’ERG en valeurs numériques. Grâce au logiciel associé du même nom, l’impédance des électrodes était contrôlée avant de lancer les mesures. Celle-ci devait être inférieure à 10 kOhms afin d’éviter les artefacts. En cas d’impédance trop importante, la position des électrodes était corrigée. Un seul œil était stimulé à chaque fois. Le deuxième œil (œil gauche) était stimulé après que l’ensemble des mesures ait été relevé pour le premier (œil droit). Les réponses électrorétinographiques étaient donc recueillies de façon indépendante pour chaque œil. v. Traitement des données Le traitement des données a été réalisé par Isabelle Ranchon-Cole, Équipe de Biophysique Neurosensorielle de l’INSERM, Université d’Auvergne, en appliquant les méthodes décrites dans la littérature (Hood et Birch, 1996; Ranchon et al., 1998) 3. Prélèvement et fixation des yeux a. Technique de prélèvement des yeux Les souris étaient euthanasiées par dislocation cervicale suivant les recommandations du guide des bonnes pratiques sur les animaux de laboratoire. Un morceau de queue a été prélevé afin de vérifier le génotype des souris. Les yeux [119] étaient extériorisés de l’orbite en disséquant le tissu conjonctif peribulbaire à l’aide d’une pince. Celle-ci était ensuite placée à l’arrière du globe oculaire et un mouvement de traction était réalisé afin de rompre le nerf optique pour finir de libérer l’œil. L’œil était alors rincé dans du PBS (Phosphate Buffer Saline) et les éventuels restes de tissu conjonctif ou adipeux étaient détachés à l’aide d’une pince et de ciseaux. Une partie du nerf optique était conservée afin de faciliter l’orientation de l’œil par la suite. Sur les souris du lot C, un fil de PROPYLЀNE 6-0 a été suturé dans la conjonctive bulbaire à la commissure temporale des paupières avant extériorisation de l’œil. Ce procédé a été testé afin de pouvoir orienter les yeux de façon reproductible lors des coupes. Cependant, cette astuce n’a pas été reproduite par la suite en raison des difficultés techniques rencontrées, avec un risque plus important de percer l’œil notamment. b. Fixations des yeux Différents techniques de fixation ont été appliquées en fonction de l’utilisation ultérieure des yeux. Pour la majorité des souris, les deux yeux étaient conservés de manière différente afin de pouvoir réaliser des analyses différentes sur un même animal. Les types de fixation utilisée pour chaque étude et pour chaque souris sont précisés dans le Tableau 2 et ANNEXE 7 respectivement. i. Fixation par formadhéhyde Une fois prélevés, les yeux étaient placés dans une cassette préalablement identifiée. Ils étaient ensuite plongés dans une solution de PBS-formaldéhyde (PFA) à 4% et conservés à température ambiante dans l’attente du paraffinage. Ce type de fixation était effectué en vu des immunofluorescences et de l’hybridation in situ. [120] ii. Fixation par milieu de Davidson ou Excalibur Une fois prélevés, les yeux étaient placés dans une cassette préalablement identifiée. Ils étaient ensuite plongés dans une solution de Davidson ou d’Excalibur puis maintenus à température ambiante pendant respectivement 48h et 72h. Les cassettes étaient ensuite transférées dans une solution de PFA 4% et conservées à température ambiante jusqu’au paraffinage. Ce type de fixation était réalisé en vu d’une analyse morphométrique. La composition du fixateur de Davidson est la suivante, pour un volume total de 900 mL : 300 mL d’eau distillée, 200 mL de formaldéhyde 37%, 100 mL d’acide acétique glacial et 300 mL d’alcool à 95%. Le fixateur Excalibur n’a été utilisé que sur les souris euthanasiées à ClermontFerrand (après l’analyse ERG). Ce fixateur est breveté, sa formulation n’est donc pas connue mais il a été développé afin de préserver la structure d’organes fragiles tels que de la rétine en vue d’analyses structurales (« Excalibur Pathology », 2013). iii. Congélation en isopentane D’autres yeux étaient directement congelés dans de l’isopentane après avoir été prélevés. Pour cela, un bécher contenant de l’isopentane était placé dans de l’azote liquide. La température de l’isopentane était contrôlée régulièrement en vérifiant la présence d’isopentane congelé au fond du bécher, la température était alors d’environ -140°C. Les yeux étaient ensuite plongés et maintenus pendant une minute dans l’isopentane liquide sous agitation. Ils étaient ensuite déposés dans des tubes eppendorfs de 2 mL préalablement étiquetés et refroidis dans des vapeurs d’azote liquide. Finalement, les tubes eppendorfs contenant les yeux étaient maintenus dans les vapeurs d’azote liquide jusqu’à leur transfert à dans un congélateur à -80°C. Ce type de fixation était réalisé en prévision des hybridations in situ, de quelques immunofluorescences, des marquages X-Gal ou de futures colorations lipidiques. [121] 4. Préparation des coupes a. Réalisation des coupes au microtome i. Paraffinage L’étape de paraffinage était réalisée sur tous les yeux fixés afin de permettre la découpe des blocs de paraffine au microtome par la suite. Cette étape était réalisée par le laboratoire d’anatomie pathologique d’Alfort. ii. Coloration à l’Hémalun-Éosine-Safran Les blocs de paraffine étaient débités à l’aide d’un microtome de sorte à obtenir des coupes sagittales de l’œil de 4 μm d’épaisseur passant le plus près possible de la papille (émergence du nerf optique dans la rétine). Pour cela, les yeux étaient dégrossis jusqu’à ce que la région du nerf optique apparaisse. L’aspect des yeux était régulièrement vérifié au microscope afin de ne pas manquer la zone d’intérêt. Une dizaine de coupes passant à proximité de la papille étaient alors placées, à l’aide d’une pince fine, dans un bain d’eau chauffée à 40°C afin de les lisser. Puis elles étaient déposées sur des lames « Superfrost + » et mises à sécher pour la nuit dans une étuve à 37°C. Les lames étaient ensuite colorées à l’HES (Hémalun-Eosine-Safran). Il s’agit d’une coloration histologique standard qui associe de l’hématoxyline et de l’éosine. L’hématoxyline est un colorant basophile qui colore l’ADN, et donc les noyaux, en violet alors que l’éosine est un colorant acidophile qui colore le cytoplasme en rose. [122] iii. Préparation de coupes fixées au formaldéhyde pour immunofluorescence ou hybridation in situ Les blocs de paraffine étaient ensuite débités à l’aide d’un microtome de sorte à obtenir une soixantaines de coupes sagittales de l’œil de 4μm d’épaisseur passant à proximité de la papille (émergence du nerf optique dans la rétine). Les coupes obtenues étaient déposées, à l’aide d’une pince fine, dans un bain d’eau chauffée à 40°C afin de les lisser. Puis, elles étaient alors récupérées sur des lames sériées « Superfrost + », à raison de deux coupes d’un même oeil par lame. Finalement, les lames étaient mises à sécher la nuit dans une étuve à 37°C. Elles étaient ensuite conservées dans un réfrigérateur à -4°C dans l’attente de la réalisation des marquages d’immunofluorescence ou d’Hybridation In situ. iv. Coupes au cryostat en vu des hybridations in situ Les yeux congelés dans l’isopentane ont été découpés à l’aide d’un cryostat Leica CM3050S. La température de la chambre ainsi que celle du porte-objet étaient fixées à -22°C. Les yeux, sortis du congélateur à -80°C, étaient directement plongés dans de l’OCT (Optimal Cutting Temperature) qui en solidifiant permettait de les rattacher à un porte-objet. Cette manipulation était réalisée dans la chambre du cryostat. L’orientation du prélèvement lors de l’inclusion permettait la réalisation de coupes sagittales de l’œil. Les prélèvements étaient ensuite coupés au cryostat à une épaisseur de 14 μm en vue des hybridations in situ. Les coupes étaient ensuite déroulées et déposées sur des lames Superfrost+ à raison de 2 à 3 coupes par lame. Une quarantaine de lames étaient réalisées pour chaque œil. L’observation régulière des lames au microscope permettaient de réorienter le prélèvement si nécessaire et de noter les coupes les plus moins abimées qui étaient utilisées en priorité par la suite. Les lames étaient ensuite séchées dans la chambre du cryostat. L’ensemble des lames était alors transféré dans le congélateur à -80°C, jusqu’à leur utilisation. [123] 5. Analyse morphométrique de la structure des rétines de souris a. Photographies des coupes colorées à l’Hémalun-Éosine-Safran Le protocole suivant était répété pour chacun des yeux : Les différentes coupes colorées à l’HES étaient observées au Microscope Zeiss, microscope entièrement motorisé à lumière transmise (LED) géré par le logiciel ZEN (Zeiss Efficiency Navigation) version 2012, et équipé d'une caméra à très haute résolution AxioCam HRc (Carl Zeiess S.A.S., Le Pecq, France). Les clichés étaient ensuite effectués à l’aide du logiciel Axio Imager Z1. Cinq clichés étaient réalisés : un cliché en mosaïque de l’œil entier au grossissement 2,5, deux clichés au grossissement 20 à une distance d’environ 600 μm de part et d’autre du nerf optique (soit 1,5 champs d’observation au grossissement 20) et 2 clichés au grossissement 40 en leur centre (Figure 26). La résolution des clichés, nombre de pixels, était prédéfinie pour chacun des grossissements : les clichés de l’œil entier et au grossissement 20 était effectués à la résolution de 2776 x 2080 pixels et les photos au grossissement 40 en 1388 x 1040 pixels. [124] Figure 26 : Illustration du protocole appliqué lors de la réalisation des clichés des coupes d’œil colorées en vu de l’analyse morphométrique (schéma réalisé à partir de clichés pris par le laboratoire d’anatomie pathologique de l’ENVA). [125] b. Mesures morphométriques réalisées à partir des clichés de rétine i. Observation des clichés d’œil entier – repérage des artéfacts et des lésions Dans un premier temps, une observation globale du cliché de l’œil entier était réalisée. Cette première observation avait pour but de relever la présence d’anomalies structurales évidentes ou d’observer d’éventuels artéfacts justifiant de ne pas utiliser l’œil dans la suite des analyses. En effet, il était possible que l’œil soit percé lors de son prélèvement ou de sa manipulation. Or, en raison de la forte pression appliquée lors du paraffinage, les rétines des yeux percés pouvaient présenter des aspects anormaux. Il est difficile de savoir si une anomalie de rétine observée est d’origine artéfactuelle ou s’il s’agit d’une vraie lésion. Après avoir demandé conseils aux spécialistes d’anatomie pathologique, nous avons considéré que la présence de plis dans la rétine était un artéfact alors que l’absence ou la réduction d’une couche cellulaire entière de la rétine était une lésion (Figure 27). [126] Figure 27 : L’observation des clichés d’œil entier et distinction des artéfacts et des lésions histologiques. A. Cliché x2,5 d’une coupe sagittale d’un œil de souris du lot C (mise en place d’une suture) en coloration Hémalun-Éosine-Safran après fixation par le milieu de Davidson. La rétine est fortement plissée et le cristallin occupe l’ensemble du globe oculaire (chambres antérieure et postérieure non visibles). Suspicion d’anomalie d’origine artéfactuelle probablement liée à la surpression générée lors du paraffinage sur un œil qui était vraisemblablement percé. B. Cliché x2,5 d’une coupe sagittale d’un œil de souris en coloration HES après fixation par le milieu de Davidson. Aspect normal, pas de lésion ou d’artéfact notable. C. Cliché x2,5 d’une coupe sagittale de l’œil d’une souris présentant une atrophie rétinienne marquée à l’observation du fond d’œil, coloration HES et fixation par le milieu de Davidson. Les chambres antérieure et postérieure sont bien délimitées mais la rétine présente un aspect anormal : amincissement global de la rétine par absence de la couche des photorécepteurs, amincissement de l’épithélium pigmentaire par endroit. Ces éléments sont caractéristiques d’une dégénérescence rétinienne avancée. Il s’agit donc de toute évidence d’une lésion histologique et non d’un artéfact. [127] ii. Mesures réalisées à partir des clichés au grossissement 20 De nombreux paramètres ont été mesurés à partir des clichés au grossissement 20 : - épaisseur globale de la rétine, - rapports entre l’épaisseur de chaque couche et l’épaisseur globale de la rétine, - épaisseurs maximale et minimale des couches nucléaires interne et externe, - nombre de noyaux sur l’épaisseur de la couche des photorécepteurs et de la couche des cellules bipolaires, - nombre de noyaux présents de manière anormale dans les couches plexiformes interne et externe, - nombre de cellules ganglionnaires visibles par champs d’observation. Les différentes mesures nécessaires pour calculer ces paramètres étaient obtenues à l’aide de la fonction « mesure » du logiciel Image J et suivant les protocoles décrits ci-dessous. D’autre part, elles étaient systématiquement réalisées à l’aveugle, sans savoir si le cliché provenait d’un œil de souris mutée ou sauvage. Dans un premier temps, les épaisseurs des différentes couches (épithélium pigmentaire, segment externe des photorécépteurs, couche nucléaire externe, couche plexiforme externe, couche nucléaire interne, couche plexiforme interne, couche des cellules ganglionnaires et épaisseur totale de la rétine) étaient mesurées le long de trois axes perpendiculaires à la rétine, répartis sur le cliché. De plus, les 3 axes étaient placés de manière comparable entre les souris, permettant des comparaisons entre mesures pour un même axe. La rétine s’amincissant lorsqu’on s’éloigne du nerf optique les valeurs brutes ne pouvaient pas être comparées directement. Un rapport était donc calculé entre l’épaisseur de chaque couche et l’épaisseur globale de la rétine pour tenter d’éliminer ce biais de confusion. D’autre part, le nombre de noyaux dans la couche des photorécepteurs et des cellules bipolaires selon ces trois axes était relevé. [129] Par la suite, le nombre de noyaux situés dans les couches plexiformes interne et externe et dans la couche des cellules ganglionnaires était calculé sur l’ensemble du champ d’observation. Étant donné que la rétine est courbe, la longueur de rétine visible sur un cliché était variable. La longueur des différentes couches était donc mesurée sur chaque cliché et le rapport du nombre de noyaux par pixel en était déduit afin d’obtenir des valeurs comparables. iii. Mesures réalisées à partir des clichés au grossissement 40 Les clichés au grossissement 40 étaient principalement réalisés afin de comptabiliser le nombre de noyaux par unité de surface dans les couches nucléaires externe et interne. La délimitation de la zone de décompte était réalisée à l’aide de la fonction « grid » (quadrillage) d’Image J, en fixant la trame du quadrillage à 20 000 pixels²/carreau pour les cellules bipolaires et 40 000 pixels²/carreau pour les photorécepteurs, comme l’illustre la Figure 28. Figure 28 : Illustration de la technique employée pour calculer le nombre de noyaux des couches nucléaires interne et externe par unité de surface à l'aide d'Image J. [130] Le nombre de cellule était ensuite comptabilisé dans trois des carreaux délimités par la grille à l’aide de l’outil « comptage cellulaire » d’Image J. c. Étude statistique Seuls quelques uns des paramètres mesurés ainsi à partir des clichés ont fait l’objet d’une étude statistique. Ces paramètres avaient été sélectionnés lors de la mise en place du protocole de mesure à la vue de la littérature portant sur le rôle des VLCFA dans la rétine. Selon des études de Bennett, 2014 et Harkewicz, 2012, un déficit en VLCFA aurait pour conséquence une légère diminution du nombre de photorécepteur (de l’ordre de 10%) et une désorganisation des couches plexiformes de la rétine. Nous avons donc choisi de comparer l’épaisseur relative de la couche nucléaire externe, des segments externes et internes des photorécepteurs ainsi que le nombre de noyaux de photorécepteur et de cellules bipolaires par unité de surface. 6. Marquages par immunofluorescence L’ImmunoFluorescence (IF) est une technique d’immunomarquage qui permet de visualiser une molécule d’intérêt sur une coupe histologique à l’aide d’un anticorps dirigé contre cette molécule couplé à un fluorochrome. Cette technique peut présenter différentes applications. Entre autres, elle peut servir dans le cadre d’études histologiques. En effet, il est possible de réaliser un marquage fluorescent de molécules spécifiquement localisées au niveau d’une structure d’intérêt pour la visualiser. L’immunofluorescence permet aussi d’étudier l’expression d’un gène pour le marquage du produit du gène d’intérêt ou du produit d’un gène rapporteur. [131] a. Protocole général Il existe plusieurs types de protocole d’IF. Les plus fréquemment utilisés sont les protocoles d’IF directe, utilisation d’un seul anticorps directement couplé à un fluorochrome, et l’IF indirecte (Harlow et Lane, 1999; Odell et Cook, 2013). Dans le cadre de cette thèse, seuls des marquages par IF indirecte ont été réalisés. Il s’agit d’utiliser successivement deux anticorps. Le premier anticorps reconnait spécifiquement la protéine d’intérêt. Le second est dirigé contre l'anticorps primaire (Coons et al., 1955). La technique d’IF indirecte est plus sensible que l’IF directe car elle permet une amplification du signal. Le protocole général de ces IF se trouve en ANNEXE 1. Ce protocole ainsi que les différentes dilutions des anticorps nous ont été recommandés par Christel Masson-Garcia de l’Unité de Recherche en Neurologie et Développement du CNRS à Orsay. b. Les anticorps utilisés i. Étude de la structure histologique des synapses à ruban de la rétine avec un anticorps anti-CtBP2 Le marquage par IF a été employé, dans un premier temps, afin d’étudier la structure histologique de la rétine des souris et plus particulièrement des synapses à ruban. Les synapses à ruban ont une conformation particulière permettant une neurotransmission plus rapide, précise et efficace (Petit, 2010; Sterling et Matthews, 2005). A ce jour, ces synapses n’ont été observées qu’au niveau des organes sensoriels et, en particulier, au niveau de la couche plexiforme externe où se situent les synapses entre des photorécepteurs et des cellules bipolaires. Nous avons supposé ici qu’en cas de modifications fines de la structure de la rétine des souris mutante, non visibles lors des évaluations morphométriques globales, les synapses à ruban pourraient présenter [132] des anomalies. Nous avons donc cherché à marquer ces synapses à l’aide d’un anticorps anti-CtBP2, une protéine au niveau de ces synapses. Il s’agissait d’un anticorps monoclonal commercialisé par le laboratoire BD Transduction (référence : 612044). Il a été utilisé à une dilution de 1/50. C’était un anticorps IgG1 de Souris, l’anticorps secondaire était donc un anticorps polyclonal anti-souris. ii. Étude de la structure histologique des segments externes des photorécepteurs avec un anticorps anti-rhodopsine La rhodopsine est un photopigment spécifiquement localisé au niveau des segments externes des photorécepteurs. L’anticorps utilisé était un anticorps monoclonal commercialisé par le laboratoire Abcam (référence : ab3267). Il a été utilisé à une dilution de 1/2000. Il s’agissait d’un anticorps IgG1 de Souris, l’anticorps secondaire était donc un anticorps polyclonal anti-souris. iii. Marquage indirect de l’expression du gène Hacd1 à l’aide d’un anticorps anti-β-Gal Le génotype de nos souris d’étude a été modifié de telle sorte à insérer le gène de la β-Galactosidase, LacZ, sous le même promoteur que celui de Hacd1. Ainsi, la β-Galactosidase s’exprime dans les mêmes cellules et en quantité équivalente à notre gène d’intérêt. La mise en évidence de cette enzyme par IF peut donc servir de marquage indirect de l’expression de Hacd1. [133] Deux anticorps anti-β-Gal ont été testés, dans un premier temps un anticorps produit par d’Abcam puis un second produit par Cappel. De plus, plusieurs concentrations différentes ont été essayées (1/50, 1/100, 1/200, 1/400). iv. Double immunofluorescence afin d’identifier les cellules exprimant le gène Hacd1 Afin de déterminer quelles cellules de la couche des cellules bipolaires et ganglionnaires exprimaient le gène rapporteur LacZ, nous avons voulu réaliser des doubles IF avec un anticorps anti-β-Gal et au anticorps marquant spécifiquement les cellules bipolaires ou ganglionaires, soit respectivement un anticorps anti-PKCα et un autre anti-Neun. Remarque : ce double marquage n’était possible que si les anticorps primaires étaient produits par des espèces différentes afin que les anticorps secondaires, spécifiques d’espèces, ne reconnaissent pas les deux anticorps primaires. Les anticorps secondaires étaient alors couplés à des fluorochromes émettant dans des longueurs d’onde différentes. S’il n’était pas possible de réaliser le double marquage sur une même coupe, il était tout de même possible de réaliser les deux marquages sur des coupes sériées permettant de comparer deux coupes successives. c. Observation des coupes et prise de clichés Une fois marquées, les coupes étaient observées au microscope inversé Apotome Axio Observer Z1 (Zeiss) dans la semaine suivant la réalisation de l’IF. L’acquisition des clichés était réalisée à partir du logiciel Zen (Zeiss). Les clichés étaient pris au grossissement 20. L’intensité lumineuse (mV) ainsi que le temps d’exposition (ms) lors d’une série de prises de clichés étaient choisis au début des [134] acquisitions et conservés pour toutes les coupes marquées avec l’anticorps donné pour éviter d’introduire un biais de mesure. L’intensité était choisie de telle sorte à ne pas saturer les images des coupes les plus fortement marquées afin de ne pas perdre d’information. Les clichés étaient réalisés dans une zone comportant le moins d’artéfacts liés à la fixation possible et de telle sorte à être dans des zones comparables. L’analyse des clichés était réalisée à l’aveugle dans les suivantes. [135] 7. Hybridation in situ : marquage direct de l’expression du gène Hacd1 L’Hybridation In Situ (HIS) permet la visualisation directe de la localisation des ARNm d’un gène (Wilkinson, 1998). Ce procédé repose sur l’utilisation de sondes anti-sens complémentaires de notre séquence d’intérêt qui se fixent sur celle-ci (Blackshaw, 2013). Nous avons choisi ici une méthode de visualisation des sondes non radioactives basée sur l’utilisation de phosphatases alcalines couplées à des anticorps anti-digoxigénine (Tautz et Pfeifle, 1989). Nous avons cherché à réaliser des HIS afin de vérifier nos premières observations quant à l’expression du gène Hacd1 dans la rétine. L’utilisation d’une technique de marquage direct de l’expression du gène Hacd1, telle que l’HIS, était recommandée étant donné le caractère surprenant de l’absence d’expression du gène dans les photorécepteurs. La technique d’HIS est une technique complexe à mettre en œuvre d’autant plus que la rétine est un tissu particulièrement fragile nécessitant la mise au point d’un protocole d’HIS adapté. Nous avons eu besoin de plusieurs essais pour mettre au point ce protocole à partir de celui qui nous a été fourni par Giorgia Egidy, chercheuse au laboratoire. [136] a. Préparation de l’hybridation in situ – Synthèse des sondes acides ribonucléiques marquées par la digoxigénine i. Choix des sondes La séquence des sondes utilisées pour l’HIS a été choisie à partir de la séquence complémentaire de l’ARNm d’intérêt (ADNc) de manière à respecter deux règles. Tout d’abord, cette sonde devait reconnaître de manière spécifique l’ARNm d’intérêt. Il ne fallait donc pas que cette séquence apparaisse ailleurs dans le génome. D’autre part, la sonde et l’ARNm devaient former un hybride très stable. La stabilité d’un hybride dépend entre autre de sa longueur et des bases formant sa séquence, soit le taux de guanines et cytosines qui forment des liaisons plus fortes. Finalement, la taille des sondes devait être comprise entre 200 et 500 pb. ii. Synthèse des précurseurs acides désoxyribonucléiques des sondes par réaction de polymérisation en chaîne) La réaction de polymérisation en chaîne, ou PCR, permet d’amplifier de l’ADN à l’aide d’une ADN polymérase et d’amorces pour commencer l’amplification. Les séquences et les caractéristiques des amorces choisies sont présentées dans le Tableau 3 ci-dessous. Les produits PCR servait à synthétiser ensuite des sondes ARN simple brin à l’aide d’une ARN polymérase, T7. Une séquence promotrice pour la T7 polymérase a été insérée dans l’une des amorces pour chaque PCR. La séquence T7 dans l’amorce sens permettait de synthétiser ensuite une sonde ARN sens, servant de témoin négatif pour l’HIS. La séquence T7 dans l’amorce antisens permettait de synthétiser une sonde antisens capables de s’hybrider aux ARNm du gène Hacd1. [137] Tableau 3 : Caractéristiques et séquences des amorces utilisées pour synthétiser les précurseurs ADN des sondes d'hybridation in situ Taille de la N° Nom et séquence Température de Taux de fusion (Tm en °C) GC (%) 20pb 61,4°C 60% 43pb 74,2°C 48,8% 24pb 57,6°C 37,5% 47pb 71,2°C 38,3% séquence (paires de bases) 1 Mouse Hacd1 Sens ATGGCGTCCAGTGAGGAGGA 2 T7 Mouse Hacd1 Sens TAATACGACTCACTATAGGGAGA ATGGCGTCCAGTGAGGAGGA 3 Mouse Hacd1 Antisens GGGTTTTATACTGTGAGTAATGAG 4 T7 Mouse Hacd1 Antisens TAATACGACTCACTATAGGGAGA GGGTTTTATACTGTGAGTAATGAG Protocole des cycles d’amplification de l’ADN par PCR : ce protocole est détaillé en ANNEXE 3 et la méthode de synthèse des précurseurs ADN est détaillés ci-dessous, Tableau 4. Tableau 4 : Réactions de polymérisation en chaîne réalisées afin de synthétiser les précurseurs ADN des sondes d'hybridation in situ. Matrice pour la Tube N° Gène Amorce 1 (SENS) Amorce 2 (ANTISENS) 1 Mouse Hacd1 Mouse Hacd1 Sens T7 Mouse Hacd1 Antisens Anti-sens 2 Mouse Hacd1 T7 Mouse Hacd1 Sens Mouse Hacd1 Antiens Sens sonde Purification des produits PCR : la purification des produits PCR a été effectuée à l’aide du kit GeneJet PCR purification #K0701 5 (Thermo Scientific). [138] Électrophorèse – vérification et quantification des produits PCR obtenus Les produits PCR obtenus ont été vérifiés en réalisant une migration sur gel d’agarose à 1,5% en TAE (Tris, Acétate, EDTA). La quantification des produits a été permises grâce au marqueur de poids moléculaire de 100pb (Fermentas). iii. Synthèse des sondes acides ribonucléiques marquées par digoxigénine La synthèse des sondes ARN à partir des produits ADN et le marquage par la digoxigénine (DIG) ont été réalisés à l’aide du kit T7 de Proméga et DIG de Roche. Pour cela, nous avons réalisé le mélange suivant (volume final de 40 µL) : • 20 μL de matrice ADN (produit PCR) soit environ 2µg, • 4 µL Transcription Buffer 5X, • 4 µL de NTP Labelling Mix, • 4 µL RNApol T7, • 2 µL RNase inhibitor, • 6 µL Eau milliQ autoclavée (RNase free). Le mélange a été incubé 2h à 37°C au bain marie, puis les sondes ARN étaient purifiées sur colonnes GE Healthcare (volume récupéré 40 μL). Un dosage des échantillons était ensuite réalisé à l’aide du Nanodrop et 1uL d’ARN, soit entre 200 et 500 ng, était mis à migrer sur gel, suivant le même protocole que décrit précédemment pour les produits PCR, afin de vérifier la qualité de nos échantillons. Les sondes ARN étaient ensuite stockées à -20°C. [139] b. Protocole d’hybridation in situ Les HIS sur rétine ont été testées dans un premier temps à partir d’yeux congelés en isopentane. Cependant, ce protocole ne permettait pas une bonne conservation des rétines qui étaient endommagées au fur et à mesure des nombreux lavages. Nous avons donc modifié le protocole afin de faire les HIS sur coupe fixées en formaldéhyde. L’étape de fixation initiale nécessaire sur les coupes congelées a été remplacée par une étape de déparaffinage. Le protocole d’HIS mis au point après ces différents essais ainsi que les formulations des différents tampons sont décrits en ANNEXE 4 et ANNEXE 5. Ce protocole était réalisé sur trois jours et nécessitait la préparation des différents tampons en avance. En effet, la majorité des tampons devait être autoclavée afin d’obtenir des solutions ARNase free. [140] 8. Observation des rétines par microscopie électronique Les yeux des souris étaient prélevés comme décrit précédemment, paragraphe II.3. La fixation et l’inclusion des rétines a ensuite été réalisée au Centre Imagerie Cellulaire Santé de la Faculté de Médecine-Pharmacie de Clermont-Ferrand, dirigé par Claire SZCZEPANIAK, en suivant le protocole décrit en ANNEXE 6. Tous les produits utilisés lors de cette étape provenaient de chez EMS (Electron Microscopy Science) distribué par Delta Microscopies en France. Une fois incluses, les rétines ont été observées dans ce même laboratoire à l’aide d’un MET Hitachi H-7650 équipé d’un système de camera AMT 40 Hamamatsu. Différents clichés représentatifs de l’échantillon ont été pris pour chaque coupe de telle sorte à visualiser l’ensemble des photorécepteurs et de l’épithélium pigmentaire. Le reste de la rétine n’a pas été étudié faute de temps. Après avoir observé l’ensemble des coupes au MET, des clichés des zones pouvant paraître anormales ont été effectués par Isabelle Ranchon-Cole et moi-même. Ces clichés ont été présentés à une spécialiste de la MET, Mme Claire Szczepaniak, afin de tenter de faire la part des choses entre des variations physiologiques et de possibles anomalies structurales des photorécepteurs ou de l’épithélium pigmentaire. [141] 9. Analyse de la composition lipidique des rétines et des sécrétions des glandes de Méibomius Cette analyse a été réalisée en collaboration avec le Professeur Robert Anderson du laboratoire de biophysique du Dean McGee Eye Institute, États-Unis. Étant donné la complexité du transfert des rétines et les coûts induits, seules les compositions lipidiques des rétines de 14 souris ont été analysées dans un premier temps. Les souris utilisées pour cette étude, souris du lot E, étaient des souris femelles âgées d’environ 18 mois. Elles ont toutes subi un examen clinique (cornée et fond d’œil) préalable et un examen ERG environ un mois plus tard. L’ensemble des ERG ont été réalisés sur deux jours et les souris ont été euthanasiées dans l’après midi du deuxième jour par dislocation cervicale et un morceau de queue a été prélevé pour contrôle du génotype. Les souris étaient ensuite placées sous une lampe binoculaire et les paupières étaient compressées à l’aide de pince afin d’extérioriser le contenu des glandes de Méibomius (Figure 29) (Butovich et al., 2012). Le matériel ainsi obtenu était récupéré à l’aide d’une aiguille et placé dans un tube eppendorf. Faute de temps et en raison de difficultés techniques rencontrées, cette étape n’a finalement été réalisée que sur la moitié des souris du lot E. Les analyses lipidiques n’ont donc pas été effectuées à partir de ces échantillons. L’œil droit était ensuite prélevé suivant la technique exposée paragraphe II.3. Il était placé sous une lampe binoculaire et un second manipulateur s’occupait d’isoler la rétine. Pour cela, l’œil était ouvert par section autour de la cornée. Le cristallin était mis de côté et la rétine, matériel gélatineux apparaissant derrière le cristallin, était récupérée et placée dans un tube eppendorf préalablement identifié. [142] En parallèle, le premier manipulateur prélevait l’œil gauche qui était fixé en milieu Excalibur pour une analyse histologique comme indiqué précédemment, paragraphe II. 4-5. Figure 29 : Aspect des sécrétions des glandes de méibomius chez la souris à température ambiante (20°C environ) (A) et à température corporelle (B). D’après Butovich et al. 2012. Les flèches indiquent la position des orifices des glandes de méibomius Les deux tubes eppendorfs contenant respectivement la rétine et les sécrétions des glandes de Méibomius étaient remplis d’argon et congelés à -80°C afin conserver leur contenu sans affecter leur composition lipidique. Ces tubes ont finalement été envoyés au laboratoire de biophysique du Dean McGee Eye Institute en carboglace pour analyse. [143] III. RÉSULTATS ET DISCUSSION Dans ce paragraphe, les souris homozygotes mutées pour le gène Hacd1 (-/-) sont nommées « Hacd1-KO », les souris homozygotes sauvages (+/+) seront nommées « sauvages » et on utilise le terme de souris « hétérozygotes » pour les souris +/-. En général, le lot de souris contrôle était constitué de souris sauvages et hétérozygotes. 1. Étude clinique et fonctionnelle de la rétine des souris mutées pour le gène Hacd1 a. Résultats de l’examen ophtalmologique i. Observation de la cornée et des structures intraoculaires autres que la rétine Les résultats des observations de la cornée et des structures intraoculaires à la lampe à fente sont présentés dans le Tableau 5. On note, en particulier, que la présence d’une opacité cornée ponctiforme bilatérale a été significativement plus souvent observée parmi les souris Hacd1-KO que parmi les souris contrôles, avec un risque relatif RR = 6 et p < 0.01. Ces opacités étaient le plus souvent situées en miroir en région paraventrale et nasale. Elles étaient de relativement petite taille, environ 0,5 mm de diamètre en moyenne. [145] Tableau 5 : Résultats des observations de la cornée et des structures intraoculaires à la lampe à fente. Effectif de 39 souris provenant des lots C, D et E. Génotype Absence Opacification cornéenne ponctiforme Autre Total d’anomalie anomalie unilatérale bilatérale Souris +/+ 8 1 1 0 10 Souris +/8 3 1 4 16 Souris -/3 1 6 3 13 Total 19 5 8 7 39 Exemples d’autres anomalies observées : opacification généralisée de la cornée, microphtalmie, kératite, discories, cataracte. ** : significatif, p < 0.01 Notons qu’il s’agit là d’une découverte fortuite. À l’origine, l’observation de la cornée de nos souris avait été réalisée en prévision des examens électrorétinographie afin de s’assurer de l’absence d’anomalie de la cornée pouvant interférer avec l’évaluation fonctionnelle de la rétine. Sur l’ensemble des souries des lots E et F, seules trois souris hétérozygotes, appartenant au lot E, présentaient des anomalies justifiant leur exclusion de l’étude ERG. Ces trois souris avaient des opacifications massives et unilatérales de la cornée empêchant la visualisation du fond d’œil. Une observation de la cornée à la lampe à fente a aussi été réalisée sur le lot G, composé de six jeunes souris, deux Hacd1-KO et quatre sauvages, mâles et femelles âgées d’environ six mois au moment des mesures. Sur l’ensemble des six souris, aucune ne présentait d’opacification de la cornée. Ce lot n’a pas été pris en compte au même titre que les autres en raison de l’importante différence d’âge et de son faible effectif. En effet, selon la littérature, les déficits en VLCFA seraient à l’origine de phénotypes accentués avec l’âge (Bennett et al., 2014a). Il se pourrait donc que ces [146] jeunes souris n’aient pas encore développé les anomalies observées chez les souris Hacd1-KO plus âgées. ii. Observation du fond d’œil Les résultats de l’observation des fonds d’œil sont synthétisés dans le Tableau 6. Tableau 6 : Résultats de l'observation des fonds d'œil pour un effectif de 36 souris. Génotype Fond d’œil normal Fond d’œil douteux Atrophie rétinienne modérée Atrophie rétinienne marquée Total Souris +/+ 10 0 0 0 10 Souris +/Souris -/- 9 1 2 4 0 3 (2) 5 13 13 Total 20 6 3 5 36 « Fond d’œil douteux » : fond d’œil pâle mais vaisseaux normaux ou fond d’œil normal mais vaisseaux de calibre réduit. « Atrophie rétinienne modérée » : vaisseaux visibles mais de calibre diminué, fond d’œil éclairci. « Atrophie rétinienne marquée » : disparition des vaisseaux et fond d’œil pâle présentant éventuellement des plages de couleur hétérogène ou fond d’œil bien pigmenté (*), plutôt évocateur d’une dégénérescence rétinienne liée à l’âge. ** : significatif, p < 0.001 [147] La proportion de souris présentant des signes d’atrophie complète ou modérée, liée à l’âge ou non, était bien plus importante parmi les souris Hacd1-KO de l’échantillon : RR = 7 avec p < 0.0015. Notons, en particulier, que sur les 10 souris présentant des signes d’atrophie rétinienne (modérée ou marquée), 8 étaient des souris Hacd1-KO. Finalement, les deux autres présentaient un phénotype légèrement différent, fonds d’œil hyperpigmentés et non pâles, évoquant plutôt une dégénérescence rétinienne liée à l’âge, d’après le Dr Chahory. b. Discussion concernant l’examen ophtalmologique i. Aspects techniques Les examens de la cornée et du fond d’œil ont été réalisés par un seul examinateur : le Dr Sabine Chahory, spécialiste en ophtalmologie vétérinaire exerçant sur l’ENVA. Nous avons donc fortement confiance en ses observations. Cependant, les examens ont été réalisés sur souris vigiles. L’observation du fond d’œil était donc plus difficile car les souris bougeaient régulièrement la tête. Ce point n’a pas semblé perturber l’examinatrice mais il est possible qu’elle aurait réussi à voir des anomalies plus fines avec une meilleure contention des souris, éventuellement une sédation. Notons que si cela entraîne un biais, il s’agirait d’un biais de classement non différentiel ce qui ne remettrait, a priori, pas en cause nos conclusions. D’autre part, nous aurions aimé pouvoir prendre des clichés des fonds d’œil pour les faire relire à l’aveugle par un second examinateur et pour illustrer les différents phénotypes. Toutefois, nous ne disposions pas d’une caméra adaptée. Dernièrement, une technique de prise de cliché des fonds d’œil à l’aide d’une loupe binoculaire a été mise au point (Pinto et Enroth-Cugell, 2000) (celle-ci est décrite dans la partie bibliographie). Il serait intéressant de la tester sur nos souris étant donné qu’elle semble relativement facile à mettre en œuvre et ne nécessite pas de matériel particulier. Notons toutefois que cette technique nécessite de sédater l’animal, ce qui peut présenter un léger risque. [148] ii. Bilan des observations de la cornée et du fond d’œil Notre étude semble montrer que les souris Hacd1-KO de cet échantillon étaient prédisposées à une atrophie rétinienne (RR = 7) et qu’elles avaient plus de risques de présenter des opacifications ponctiformes bilatérales de la cornée, principalement localisées en région paraventrale et nasale (RR = 6). L’observation d’opacifications ponctiformes bilatérales sur les cornées de nos souris Hacd1-KO n’était pas attendue. Nous avons émis différentes hypothèses quant à la nature de ces dépôts et, en particulier, nous avons envisagé la possibilité que ce soit des dépôts lipidiques secondaires à une accumulation de précurseurs des acides gras à très longue chaîne au niveau des yeux ou dans les glandes de Méibomius. Afin de confirmer cette hypothèse, il serait intéressant de rechercher la présence de lipides au niveau de ces dépôts. Pour cela, il serait possible de réaliser des colorations des cornées par du red oil ou soudan noir, colorant histologiques permettant de marquer les graisses. Notons toutefois que des opacifications des cornées ont précédemment été décrites chez de nombreuses souches de souris de laboratoire (Percy et Barthold, 2013). En général, ces opacifications sont des conséquences de phénomènes inflammatoires aigus ou chroniques de type kératites, ulcères cornéens… et le rôle de facteurs environnementaux, dont le taux d’ammoniac, semble prépondérant. Ici, la prédominance de ces opacifications parmi les souris Hacd1-KO de la cohorte ainsi que l’aspect bilatéral des lésions seraient plutôt en faveur d’un lien direct avec notre mutation d’étude et non d’une conséquence environnementale. Par ailleurs, les niveaux d’ammoniac et les paramètres d’ambiance sont bien maîtrisés au sein de notre animalerie et les souris Hacd1-KO sont mélangées aux souris contrôles dans les cages. Finalement, les souris Hacd1-KO de notre étude ont présenté significativement plus de lésions du fond d’œil compatibles avec une atrophie rétinienne plus ou moins marquée. Ce résultat est particulièrement intéressant étant donné qu’il a été démontré que la mutation d’ELOVL4 est à l’origine d’une dégénérescence maculaire juvénile chez l’Homme. [149] Remarque : nous aurions aussi pu choisir de tester la significativité de l’atrophie marquée (disparition totale des vaisseaux, liée à l’âge ou non) en considérant que les phénotypes intermédiaires n’étaient pas suffisants pour être pris en compte. Si on réalise alors un test de Fisher avec les nouvelles répartition, on obtient p = 0.07 avec un RR = 4. La différence ne serait donc plus significative et une telle répartition de l’atrophie chez nos souris pourrait être due au hasard. Toutefois, la taille de notre échantillon ainsi que l’incidence de la maladie (atrophie rétinienne marquée) étant relativement faibles, il est possible que nous ayons juste manqué de puissance statistique pour mettre en évidence une différence réelle. c. Résultats de l’étude fonctionnelle de la rétine par électrorétinographie i. Résultats de l’étude des électrorétinogrammes Flash L’amplitude et le temps de latence de l’onde a et de l’onde b ont été extrapolés, par Isabelle Ranchon-Cole, à partir des ERG obtenus sur les 30 souris des lots E et F. Les statistiques ont été réalisées sur les deux lots pris séparément étant donné que les conditions environnementales influencent fortement les tracés et que les mesures ont été faites avec trois mois d’écart. Les souris présentant des valeurs très différentes comparées aux autres souris d’un même génotype n’ont pas été prises en compte dans le calcul des moyennes et des écarts types. Ainsi, par exemple, les souris à ERG nul ont été mises à part. Il s’agissait de souris présentant une atrophie rétinienne complète lors de l’examen du fond d’œil ; ce cas particulier a donc déjà été identifié et discuté précédemment. Contrairement à ce qui avait observé lors de l’étude préliminaire réalisées en 2012 sur l’ENVA, aucune différence significative n’a été observée concernant l’ensemble de ces paramètres, analysés sur les lots E et F à Clermont-Ferrand. Une tendance semble toutefois se dégager concernant l’onde b dont l’amplitude est [150] légèrement diminuée chez les souris Hacd1-KO, en particulier à partir d’une luminance supérieure ou égale à -0.76 log(cd.s.m-2) comme l’illustre la Figure 30. Cette observation a été réalisée à partir des données du lot F mais n’a pas pu être vérifiée en ce qui concerne le lot E pour lequel les données brutes ne sont pas disponibles. Figure 30 : Amplitudes moyennes de l'onde b en fonction de l’intensité du flash lumineux. Mesures réalisées chez les souris Hacd1-KO (-/-), hétérozygotes (+/-) et sauvages (+/+). Les barres d’erreur correspondent aux écarts types. 1000 900 800 Amplitude (µV) 700 +/+ 600 +/- 500 -/- 400 300 200 100 0 -3 -2,5 -2 -1,5 -1 -0,5 0 0,5 Flash Luminance (log(cd.s.m-2)) ii. Résultats de l’étude des potentiels oscillatoires En plus des tracés ERG, des mesures de potentiels oscillatoires ont été réalisées sur les souris du lot F. Suite à ses mesures, nous avons pu comparer les amplitudes des quatre potentiels : OP1, OP2, OP3, OP4 et leur temps de latence respectif. Les seules différences significatives notables concernaient l’amplitude d’OP1. Ainsi, l’effet [151] du génotype était significatif (p = 0.035) avec en particulier une différence fortement significative entre les souris sauvages et Hacd1-KO (p1 = 0,0184). Les différences entre les souris sauvages et hétérozygotes ou entre les souris Hacd1-KO et hétérozygotes n’étaient pas significatives (p2 = 0,059 et p3 = 0,3 respectivement). d. Discussion concernant l’évaluation fonctionnelle de la rétine : comparaison du protocole et des résultats entre notre étude et l’étude préliminaire Aucune anomalie notable n’a été mise en évidence lors de cette nouvelle série d’ERG. Ces résultats sont surprenants au vu des résultats de l’étude préliminaire, comme l’illustre la comparaison de ces deux études détaillés ci-dessous. i. Comparaison de l’aspect des tracés des électrorétinogrammes La Figure 31 illustre les trois différents types de tracés obtenus lors de la réalisation des ERG sur Alfort en 2012 (étude préliminaire) et sur Clermont-Ferrand en 2014. Seul le tracé d’une souris sauvage est présenté en ce qui concerne notre étude car les Hacd1-KO avaient des tracés très similaires. D’autre part, le Tableau 7 compare les différents paramètres d’intérêt extrapolés à partir de ces trois tracés ERG. Nous tenterons d’expliquer les différences observées dans le paragraphe suivant. La première différence notable est la différence d’échelle entre les électrorétinogrammes obtenus à l’ENVA et à la faculté de Clermont-Ferrand. Ainsi, par exemple, les tracés d’ERG obtenus chez les souris sauvages au cours de notre étude variaient entre [-400 ; 600]μV contre [-100 ; 150]μV lors de l’étude préliminaire. De même, les temps de latence étaient plus longs dans les ERG réalisés à ClermontFerrand. [152] Figure 31: Comparaison des 3 tracés électrorétinogrammes types obtenus à l'ENVA en 2012 et à la faculté de Clermont-Ferrand en 2014. Tableau 7 : Comparaison des tracés d'électrorétinogrammes flash obtenus chez les souris sauvages (+/+) et les souris mutantes (-/-) à l'ENVA en 2012 et à la faculté de Clermont-Ferrand en 2014. [153] Une seconde différence notable était l’absence de différence significative dans les amplitudes et temps de latence des ondes a et b entre les tracés des souris mutantes et contrôles lors des mesures réalisées à Clermont-Ferrand. Pour rappel, lors de l’étude préliminaire des différences significatives importantes avaient été notées notamment en ce qui concernait l’amplitude des ondes a et b (p < 0,05 pour plusieurs intensités de stimulation différentes (Blondelle, 2013)) (Figure 32). Notons que lors de notre étude, les résultats de deux souris Hacd1-KO n’ont pas pu être pris en compte dans les calculs statistiques car elles présentaient des ERG plats quelle que soit l’intensité de stimulation. Finalement, dans cette dernière étude, nous n’avons observé aucun phénotype d’ERG intermédiaire. Nous nous attendions pourtant à observer de tels phénotypes en cas de début de dégénérescence rétinienne, ce que suggérait l’étude clinique décrite précédemment. Par contre, les deux souris qui semblaient présenter une atrophie rétinienne marquée à l’examen du fond d’œil correspondent bien aux deux souris qui ont présenté un ERG plat. [154] Figure 32 : Comparaison de l'amplitude des ondes b chez les Hacd1-KO et sauvages en fonction de l'intensité du flash lumineux. A. Mesures réalisées lors de l’étude préliminaire à l’ENVA en 2012. Légende : ko, souris Hacd1-KO; wt, souris sauvages. B. Mesures réalisées sur le lot E lors de notre étude à la faculté de Clermont-Ferrand en 2014. Légende : +/+, souris sauvages ; +/-, souris hétérozygotes ; -/-, souris Hacd1-KO. Amplitude de l'onde b en uV 250,0 200,0 A 150,0 moyenne ko moyenne wt 100,0 50,0 0,0 -3,5 -3,0 -2,5 -2,0 -1,5 -1,0 -0,5 0,0 0,5 1,0 Intensité Flash log (cds/m2) Amplitude de l'onde b (µV) 1200 B 1000 800 600 +/+ +/- 400 -/200 0 -4 -3,5 -3 -2,5 -2 -1,5 -1 Intensité Flash log (cds/m²) [155] -0,5 0 ii. Comparaison des protocoles employés Suite à ces premières observations, nous avons cherché à comprendre l’origine de telles différences entre l’étude préliminaire et notre étude. Pour cela, nous avons commencé par comparer les deux protocoles. Comparaison des souris d’étude Dans un premier temps, nous avons cherché à comparer les caractéristiques des deux lots de souris testées. Le Tableau 8 résume les caractéristiques des souris utilisées dans ces deux études. Tableau 8 : Comparaison des lots étudiés par électrorétinographie. KO = souris Hacd1-KO, WT = souris sauvages, +/- souris hétérozygotes Il existe deux différences notables entre ces lots de souris. La première concerne l’âge des souris. En effet, les souris testées pour ma thèse étaient un peu plus âgées que les premières en raison de contraintes d’emploi du temps concernant la réalisation de ces ERG à Clermont-Ferrand. Cependant, il nous semble peu probable que ces variations d’âge puissent expliquer de telles différences, d’autant plus que l’on s’attendrait plutôt à une aggravation du phénotype avec l’âge. Afin de vérifier l’impact réel de l’âge sur cette mutation, il serait intéressant de réaliser des comparaisons entre des tracés ERG obtenus chez des mêmes souris à des âges différents. [156] La seconde différence concerne le type d’alimentation. En effet, les souris appartenant aux lots testés à Clermont-Ferrand avaient reçu, par erreur, une alimentation très riche en lipides alors qu’elles étaient âgées d’environ six mois pour le lot E et d’un mois pour le lot F. D’autre part, une étude réalisée au sein du laboratoire, en parallèle à la nôtre, a mis en évidence que les frères des souris du lot F, ne présentaient pas le phénotype musculaire systématiquement rencontré chez les souris Hacd1-KO. Cet apport nutritionnel avait sauvé le phénotype musculaire. Il se peut donc que le phénotype rétinien ait lui aussi été en partie compensé par ces apports lipidiques. Bien que conscients de cette erreur d’alimentation, nous avons choisi de maintenir ces souris dans notre étude car les résultats obtenus lors de l’étude clinique semblaient prometteurs. Les résultats de l’étude clinique et de l’étude fonctionnelle semblent donc contradictoires en ce sens. Comparaison des protocoles à proprement parler Dans un second temps, nous avons comparé les protocoles ERG employés dans ces deux études. Le Tableau 9, résume les principales caractéristiques des deux protocoles mis en place pour l’acquisition des électrorétinogrammes. On constate qu’il existe plusieurs différences notables entre ces deux protocoles. Certaines, telles que le type de mydriatique utilisé ou la bande passante, ne devraient pas permettre d’expliquer les différences dans l’aspect des tracés. En effet, bien que les tracés obtenus sur Alfort ressemblent un peu à des potentiels oscillatoires, ce sont bel et bien des ERG Flash car la bande passante utilisée comprenait bien les signaux de 1 et 100 Hz. [157] Tableau 9 : Comparaison des principales caractéristiques des deux protocoles d'acquisition des électrorétinogrammes. Par contre, le nombre de flash par intensité pourrait avoir un impact important sur l’aspect des tracés d’ERG si les souris mutées présentaient des difficultés à régénérer leurs photopigments. Ainsi, lors du premier flash, la réponse de la rétine serait quasiment normale chez toutes les souris, alors qu’elle serait diminuée voire absente après plusieurs flashs si les photopigments n’avaient pas pu se régénérer à temps. Par ailleurs, l’intervalle entre deux flashs d’intensités différentes étant plus important qu’entre deux flashs successifs d’une même intensité, les photopigments auraient possiblement le temps d’être régénérés à chaque changement d’intensité. Selon cette hypothèse, les tracés d’ERG devraient être quasiment normaux si le protocole ne comprend qu’un seul flash par intensité comme cela a été le cas à Clermont-Ferrand. À l’inverse, lorsque les mesures consistent en une moyenne des réponses obtenues suite à dix flashs d’une même intensité, des différences pourraient apparaître chez les souris mutées. Cela permettrait éventuellement d’expliquer pourquoi nous avons observé des différences à l’ENVA en 2012 mais pas à ClermontFerrand en 2014. Malheureusement, le logiciel utilisé en 2012 ne permettait d’enregistrer que la valeur moyenne des réponses. Ainsi, il ne nous a pas été possible [158] de contrôler les réponses obtenues pour chacun des dix flashs pris séparément, ce qui aurait pu nous permettre de vérifier cette hypothèse. Il faudrait donc maintenant réaliser deux séries d’ERG sur les mêmes souris, une avec un seul flash par intensité, l’autre avec dix flashs par intensité sur une nouvelle version de logiciel permettant d’obtenir les valeurs pour chaque flash. Finalement, s’il s’avère que nos souris Hacd1-KO présentent bel et bien un défaut de régénération de leurs photopigments, cela pourrait avoir deux origines. Dans un premier temps, le cycle de régénération des photopigments implique les photorécepteurs. Toutefois, en cas d’atteinte des photorécepteurs, nous aurions dû observer des anomalies de l’onde a dès le premier flash. Les cellules de l’épithélium pigmentaire sont le deuxième type cellulaire participant à la régénération des photopigments. Notons de plus que ces cellules jouent aussi un rôle important dans la survie des photorécepteurs. Une atteinte de l’épithélium pigmentaire pourrait donc entraîner une atrophie rétinienne complète dans les formes les plus avancées, comme celle observée chez deux des souris Hacd1-KO. Afin de vérifier cette hypothèse, il serait intéressant de trouver un protocole permettant de tester spécifiquement le fonctionnement de l’épithélium pigmentaire ou de tester la régénération des photopigments, par dark adaptometry par exemple (Cf. paragraphe V sur les nouvelles perspectives). L’hypothèse d’une atteinte primaire de l’épithélium pigmentaire est intéressante ici car elle permettrait d’expliquer pourquoi les souris mutées présentaient une atteinte fonctionnelle des photorécepteurs, d’après les résultats de l’étude préliminaire, sans que le gène ne s’exprime dans ce type cellulaire. Cependant, il nous est pour le moment impossible de vérifier que le gène Hacd1 s’exprime dans l’épithélium pigmentaire. En effet, comme son nom l’indique, les cellules de l’épithélium pigmentaire sont très foncées ce qui rend le marquage de l’expression d’un gène difficilement visualisable. En général, les études de l’épithélium pigmentaire sont réalisées sur des souris albinos dont nous ne disposions pas. [159] 2. Analyse structurale des rétines de souris a. Analyse morphométrique : observation des clichés d’œil entier de coupes colorées à l’Hémalun-Éosine-Safran i. Résultats de l’analyse morphométrique globale Les résultats de l’observation des clichés d’œil entier sont synthétisés dans le Tableau 10. En tout, les analyses morphométriques globales ont été réalisées sur 53 coupes de rétine de souris, 44 préparées avec une coloration HES et 9 préparées en IF. En effet, la structure histologique globale de ces dernières rétines pouvait être appréciée grâce au marquage des noyaux par le DAPI. Seules les coupes colorées en HES ont servi par la suite aux analyses morphométriques fines. Finalement, faute de temps, tous les clichés n’ont pas pu être analysés finement pour cette thèse. Par ailleurs, sur l’ensemble de ces coupes de rétines, huit ont été éliminées de l’étude en raison d’artéfacts (critères d’exclusion décrits dans la partie matériel et méthodes). Parmi ces huit souris éliminées, sept faisaient partie du lot C sur lequel nous avons tenté de placer un repère en suturant un fil en région nasale de la conjonctive bulbaire. D’autre part, quatre étaient des souris sauvages, deux des souris Hacd1-KO présentant une atrophie complète à l’examen du fond d’œil et deux des souris hétérozygotes. [160] Tableau 10 : Observation des clichés d’œil entier et recherche d'anomalie majeure Absence d’anomalie majeure Atrophie rétinienne Total Souris +/+ 12 1 13 Souris +/- 13 0 13 Souris -/- 15 3 18 Total 40 4 44 Souris contrôles Souris Hacd1-KO 96% 83% 17% 4% Absence d’anomalie majeure Atrophie rétinienne On retiendra en particulier que 20% des souris Hacd1-KO présentaient une atrophie rétinienne marquée contre seulement 4% des souris contrôles. D’après le test de Fisher, cette différence n’est pas significative (p = 0,29). Toutefois, étant donné la faible incidence des signes d’atrophie objectivables lors de l’analyse morphométrique globale ainsi que les différences significatives observées lors des analyses du fond d’œil, il se peut que notre échantillon ait été trop petit et que nous ayions donc manqué de puissance statistique pour de révéler une différence réelle. Notons, de plus, que sur les cinq souris présentant une atrophie marquée à l’examen du fond d’œil, deux ont été éliminées de l’étude histologique en raison d’un artéfact et les trois autres ont bien présenté une atrophie complète avec disparition de la couche des photorécepteurs à l’analyse histologique. [161] ii. Discussion sur la pertinence des critères de distinction entre artéfacts et lésions réelles Afin de différencier les artéfacts des véritables lésions lors des analyses histologiques, nous avons considéré, sur les conseils d’un spécialiste en anatomie pathologique, que l’aspect plissé des rétines devait être artéfactuel alors que l’amincissement homogène voire la disparition d’une couche cellulaire de la rétine devait être considérée comme une lésion. A posteriori, ces critères nous semblent pertinents étant donnés que seuls des yeux qui présentaient un risque plus important d’avoir été percés suite au positionnement d’un fil de propylène ont ainsi été éliminés de l’étude. De plus, l’aspect plissé de la rétine était souvent associé à une disparition des chambres antérieure et postérieure avec le cristallin qui occupait l’ensemble du globe oculaire. Cette observation semble être un élément en faveur d’une origine artéfactuelle car il serait possible d’expliquer cette anomalie si on considère que l’œil a été percé. En effet, l’application d’une surpression sur un œil percé peut entraîner la sortie du contenu des chambres antérieures et postérieures. Les parois du globe oculaire se retrouveraient alors accolées à la structure solide du cristallin et les chambres ne seraient plus visibles. De plus, du matériel rétinien a été retrouvé en dehors de l’œil sur l’une des coupes. À l’inverse, la disparition de la couche des photorécepteurs est une lésion histologique fréquemment rencontrée en cas de dégénérescence rétinienne. De plus, cette anomalie n’a été observée que chez des souris présentant une atrophie rétinienne marquée à l’examen du fond d’œil. Il semble donc justifié de considérer cette anomalie comme étant une lésion et non un artéfact. [162] b. Analyse morphométrique fine des coupes colorées à l’HémalunÉosine-Safran i. Résultats de l’analyse morphométrique fine Les données obtenues dans le cadre des analyses plus poussées de la structure rétinienne au grossissement 20 et 40 n’ont pu être testées statistiquement faute de données analysées. En effet, seules une dizaine de coupes ont pu être analysées dans suivant le protocole décrit dans le paragraphe II dans les temps impartis. La Figure 33 illustre la comparaison des six paramètres morphométriques nous paraissant les plus prometteurs au vu de la bibliographie. Aucune différence notable ne semble ressortir entre les souris de génotype différent. Notons toutefois que ces graphiques ont été réalisés à partir des données obtenues chez 9 souris (2 mutantes, 2 sauvages et 5 hétérozygotes). L’interprétation des clichés en double aveugle explique la surreprésentation des souris hétérozygotes sachant que seule la moitié des clichés ont pu être exploités à ce jour. La seule impression qui ressort, à ce stade, de l’étude morphométrique fine concerne la couche plexiforme externe. En effet, cette couche semblait parfois d’aspect différent, avec des noyaux mal situés, chez les souris Hacd1-KO. Cette remarque découle d’une impression subjective de l’examinateur, elle nécessite donc d’être confirmer par une analyse quantitative avant de pouvoir conclure à ce sujet. Notons que cette observation avait été réalisée avant que l’examinateur ne prenne connaissance des études morphométriques réalisées chez les souris mutantes Elovl4. Or ces souris présentent une désorganisation de la couche plexiforme externe. [163] Figure 33 : Comparaison des différents paramètres évalués lors de l'analyse morphométrique fine chez les souris Hacd1-KO (mutantes), sauvages et hétérozygotes. (Effectif = 9) [164] ii. Aspect technique Une des difficultés techniques majeures rencontrées dans cette étude a été de déterminer la limite entre couches nucléaires et couches plexiformes. En effet, les limites entre les couches rétiniennes ne sont pas toujours nettes et il était compliqué de trouver un critère applicable à tous les clichés, permettant de dire si les noyaux observés se trouvaient dans une couche nucléaire ou dans une couche plexiforme. Au final, la limite a été fixée subjectivement par l’expérimentateur et, afin de ne pas entraîner de biais de classement différentiel, les mesures étaient réalisées à l’aveugle par un seul manipulateur. Ainsi, cette incertitude serait à l’origine d’un biais de classement non différentiel pouvant provoquer une sous-estimation ou sur-estimation globale de la fréquence de malposition des noyaux. Elle ne devrait toutefois pas avoir de conséquence sur la différence possiblement observée entre les souris Hacd1-KO et les souris contrôles. Par ailleurs, l’utilisation de la fonction « grid » présentait deux avantages : cela permettait de définir parfaitement et de manière reproductible la taille de la zone de décompte et cela permettait de randomiser l’emplacement des zones de mesures. c. Bilan concernant les analyses morphométriques : Les analyses morphométriques globales et fines n’ont pas permis de mettre en évidence d’anomalie notable dans les rétines des souris Hacd1-KO. Toutefois, l’absence d’anomalie à cette échelle est à relativiser au vu des résultats des dernières études concernant Elovl4. En effet, l’étude des souris Elovl4-cKO montrait un dysfonctionnement des bâtonnets et des cellules bipolaires qui n’étaient pas associés à des remaniements structuraux globaux observables à l’analyse histologique (Bennett et al., 2014a; Harkewicz et al., 2012). Seules des anomalies structurales fines avaient été mises en évidence par des techniques d’IF et de MET ; nous en discuterons dans les paragraphes suivants. [165] Dégénérescence rétinienne liée à la mutation du gène Hacd1 ou liée à l’âge Malgré l’absence de significativité, 20% des souris Hacd1-KO ont présenté des signes de dégénérescence rétinienne avancée lors des analyses morphométriques globales contre 4% chez les souris contrôles. De plus, d’après l’examen ophtalmologique d’œil, les souris Hacd1-KO présenteraient des lésions du fond d’œil compatibles avec une dégénérescence rétinienne significativement plus fréquemment que les souris contrôles. Il nous semble important de se demander ici si les dégénérescences observées chez nos Hacd1-KO sont bel et bien une conséquence de la mutation du gène Hacd1 ou s’il ne s’agirait pas d’une forme de dégénérescence rétinienne autre telle que la dégénérescence liée à l’âge, par exemple. En effet, la dégénérescence liée à l’âge est une affection fréquemment rencontrée chez les souris de laboratoire. L’observation de dégénérescence rétinienne liée à l’âge chez nos souris ne peut pas être écartée dans un premier temps car nous avons choisi d’étudier des souris âgées pour cette étude. De plus, lors de l’observation des fonds d’œil, le Dr Chahory avait observé chez quelques souris contrôles une forme d’atrophie rétinienne particulière, avec une nette diminution du calibre des vaisseaux associé à un fond d’œil plus foncé, qui serait évocateur, selon elle, d’une dégénérescence liée à l’âge. Chez les souris Hacd1-KO présentant une perte des vaisseaux, le fond d’œil était au contraire plus pâle, signe caractéristique d’une atteinte de l’épithélium pigmentaire Afin de confirmer que nous avons ici une forme de dégénérescence spécifique liée à la mutation du gène Hacd1, il serait intéressant de trouver des critères histologiques permettant de faire la différence entre la dégénérescence liée à l’âge et la dégénérescence induite par la mutation du gène Hacd1. La réalisation de fond d’œil systématiques, à partir de l’âge d’un an, permettrait également d’accroître l’effectif étudié et de déterminer l’âge d’apparition de cette forme de dégénérescence, le cas échéant. [166] d. Observation des rétines au microscope électronique à transmission i. Atlas de cliché de microscopie électronique à transmission L’observation des rétines de trois souris Hacd1-KO et trois souris sauvages par microscope électronique à transmission (MET) a permis de réaliser un atlas de photos illustrant les différents segments des photorécepteurs et l’épithélium pigmentaire (Figure 34 à Figure 37). Figure 34 : Aspect de l'épithélium pigmentaire en microscopie électronique à transmission. Clichés de l’épithélium pigmentaire chez trois souris contrôles (A, B, C) et trois souris Hacd1-KO (D, E, F) (80kV). Absence d’anomalie de structure évidente. Barre d’échelle : 2μm. [167] Figure 35 : Aspect de la limite entre la couche nucléaire externe et le segment interne des photorécepteurs en microscopie électronique à transmission. Souris contrôles : clichés A, B, C. Souris Hacd1-KO clichés D, E, F (80kVolts). Les noyaux des photorécepteurs sont en bas et le segment interne des photorécepteurs en haut. Absence d’anomalie de structure évidente. Barre d’échelle : 5μm Aucune anomalie de structure fine ne nous a paru évidente lors de l’observation des rétines au MET. Toutefois des doutes subsistaient quant à : - La présence de possibles phagosomes ou lysosomes de taille très importante à la jonction de l’épithélium pigmentaire et des segments externes des photorécepteurs. Ce type de structure a été observé sur une rétine de souris mutante, (Figure 37 B). Des structures similaires mais moins imposantes ont aussi été notées à deux autres reprises, chez une souris mutante et une souris contrôle (respectivement Figure 37 C et A). [168] - Une possible désorganisation des membranes des segments externes des photorécepteurs chez les souris Hacd1-KO. Cette observation est toutefois difficile à confirmer en raison des variations dans l’angle de découpe de la rétine (Figure 37 D à G). Figure 36 : Aspect des segments externes des photorécepteurs en microscopie électronique à transmission. Souris contrôles : clichés A, B, C. Souris Hacd1-KO : clichés D, E, F. (80kV). Les segments externes des photorécepteurs sont en haut, l’épithélium pigmentaire figure en bas des clichés B, C et D. Absence d’anomalie de structure évidente. Barre d’échelle : 2μm. Notons que le nom des souris est conservé pour les Figures 32 à 34, c'est-à-dire que les trois clichés A - Figures 32, 33 et 34 - proviennent de la rétine d’une même souris. [169] ii. Discussion – aspects techniques En raison du coût de la microscopie électronique à transmission et de la lourdeur des prises de cliché, le nombre de souris utilisées pour l’étude est relativement faible et ne permet pas de conclure sur d’éventuelles anomalies. Toutefois, l’objectif était ici de déterminer s’il y avait une anomalie évidente justifiant de lancer une étude MET plus poussée sur nos souris. Par ailleurs, les observations de microscopie électronique nécessitent une certaine expérience afin de faire la différence entre des anomalies réelles ou des variations physiologiques, liées à l’âge par exemple, ou encore des artéfacts de montage. Les clichés pris lors de ces observations ont été visualisés rapidement par une spécialiste en MET du laboratoire d’imagerie de Clermont-Ferrand afin de s’assurer qu’il n’y avait pas d’anomalies évidentes de nos rétines. Il nous est donc possible d’affirmer que les rétines ne présentaient pas d’anomalie structurale majeure des segments externes des photorécepteurs ni de l’épithélium pigmentaire. Toutefois, au vu des études sur les souris Elovl4-cKO qui présentaient une désorganisation des synapses des bâtonnets, il serait intéressant de reprendre les clichés afin d’analyser plus particulièrement : - le nombre et l’organisation des terminaisons synaptiques, - le nombre de noyaux de bâtonnet en apoptose, - la présence ou non de gouttelettes lipidiques et de gouttelettes de lipofuscine dans l’épithélium pigmentaire. À ce jour, nous n’avons pas eu l’occasion d’organiser une relecture plus précise de nos clichés par un spécialiste en MET dans cette optique. S’il s’avérait par la suite que l’un de ces paramètres semble anormal, il sera éventuellement intéressant d’observer un plus grand nombre de souris pour compléter l’étude. [170] Figure 37 : Possibles anomalies observées en microscopie électronique à transmission sur les rétines des souris Hacd1-KO Souris Hacd1-KO : clichés B, C, F et G. Souris contrôles : clichés A, D et E. (80kV). Sur la première ligne, clichés A, B et C : les astérisques indiquent de possibles phagosomes ou lysosomes. Ces structures sont localisées au niveau des segments externes de photorécepteurs. Notons que la structure observée sur le cliché B, soit chez une souris mutante, est particulièrement volumineuse et semble déformer légèrement l’épithélium pigmentaire. La seconde ligne, cliché D à G, illustre des zones des segments externes de photorécepteurs nous semblant particulièrement désorganisées chez une souris contrôle (D et E) et une souris mutante (F et G). Dans le cas de la souris contrôle (D et E) il peut s’agir d’un artéfact de montage mais pour la souris Hacd1-KO (G) l’aspect nous semble plutôt évocateur d’une lésion. Barres d’échelle : 2μm. [171] e. Analyse structurale par immunofluorescence i. Résultats des différents marquages par immunofluorescence Une illustration des différents marquages obtenus par IF, en dehors des marquages β-Gal, est présentée Figure 38. Les marquages CtBP, Neun, PKCα et GFAP semblaient avoir bien fonctionné et donnaient de beaux résultats. Une comparaison rapide des résultats obtenus avec ces marquages chez les souris contrôles et Hacd1KO n’a pas permis de mettre en évidence des différences notables. Les marquages CTBP2 ont permis de visualiser les synapses à ruban au niveau des couches plexiformes interne et externe (Figure 38, A et C). Les marquages Neun, PKC et GFAP nous semblaient intéressants à ce stade afin de localiser respectivement les cellules ganglionnaires, bipolaires, et gliales sur les coupes de rétine. Ces anticorps pourraient donc servir, à terme, à la réalisation de doubles marquages avec l’anticorps anti-β-Gal dans l’objectif de caractériser avec plus de précision les cellules exprimant le gène Hacd1. Notons que, n’ayant pas réussi à obtenir un marquage anti-β-Gal satisfaisant pour le moment, ces doubles marquages devront être envisagés dans une prochaine étude. Les IF réalisées avec les anticorps anti-rhodopsine, marqueur des segments externe des photorécepteurs, et de la nestine, marqueur des cellules gliales dédifférenciées, n’ont pas été illustrés dans la Figure 38 en raison des difficultés techniques rencontrées avec ces deux anticorps. En effet, le marquage de la rhodopsine semblait difficilement interprétable en raison d’une forte autofluorescence des segments externes qui se superposait au signal. Ainsi, les coupes réalisées en contrôle négatif (anticorps secondaire seul) apparaissaient aussi marquées que les coupes ayant reçu les deux anticorps. Notons seulement que cette autofluorescence était moins nette en rouge lointain qu’en vert. Le marquage anti-nestine n’a quant à lui pas fonctionné malgré l’étape d’amplification. En effet, aucune fluorescence n’a été notée lors de l’observation des diverses coupes. [173] ii. Discussion - Comparaison des rétines suite aux marquages par immunofluorescence Malheureusement, faute de temps et de moyens, cette étude n’a pas pu aboutir. Toutefois, ce début d’étude nous aura permis de tester différents protocoles, de vérifier le fonctionnement des anticorps et d’avoir une idée du type de marquages obtenus. Les anticorps PKCα ainsi que CtBP avaient été testés précédemment par l’équipe du Dr. Bennett sur les souris Elovl4-cKO (Bennett et al., 2014b). Ces deux immuno-marquages auraient permis de montrer que les souris déficitaires en VLCFA présentaient une désorganisation des synapses de la rétine. En particulier, l’auteur avait observé un marquage spécifique des terminaisons synaptiques des cellules bipolaires dans la couche nucléaire interne chez les souris Elovl4-cKO avec l’anticorps PKCα et une possible désorganisation des couches rétiniennes plus internes avec l’anticorps CtBP. Nous avons donc cherché à mettre en évidence des marquages d’aspect similaires chez les souris Hacd1_KO. Cependant, faute de disponibilité de l’anticorps PKCα et faute de temps, seuls six souris ont pu être marquées avec l’anticorps CtBP et deux avec l’anticorps PKCα. Aucune différence de marquage ne nous a paru évidente entre les souris Hacd1-KO et les souris contrôles. Toutefois, il serait très intéressant de renouveler l’étude sur un plus grand échantillon de souris afin de pouvoir conclure. L’absence totale de marquage avec l’anticorps anti-nestine peut être dû à un problème au niveau de l’anticorps en lui-même ou à l’absence de cellules gliales activées sur nos coupes. Par ailleurs, la nestine est un marqueur d’un processus inflammatoire alors que la dégénérescence rétinienne met plutôt en jeu un phénomène d’apoptose. Dans le cadre de notre étude, il serait plutôt intéressant de développer des marqueurs d’apoptose par la suite. [174] Figure 38 : Marquages par immunofluorescence des rétines de souris Hacd1-KO Lecture en lignes : - première ligne (clichés A, B, C, D) : anticorps anti-CTBP2, - deuxième ligne (clichés E, F, G, H) : anticorps anti-Neun, - troisième ligne (clichés I, J, K) : anticorps anti-PKCα, - quatrième ligne (clichés L, M , N, O) : anticorps anti-GFAP. Lecture en colonnes : - première colonne (clichés A, E, I, L) : souris contrôles, anticorps secondaire seul, - deuxième colonne (clichés B, F, J, M) : souris contrôles, anticorps primaire et secondaire, - troisième colonne (clichés C, G, N) : souris Hacd1-KO, anticorps secondaire seul, - quatrième ligne (clichés D, H, K, O) : souris Hacd1-KO, anticorps primaire et secondaire. L’astérisque indique les zones de marquage non spécifique ou de bruit de fond, la tête de flèche indique les zones de marquage spécifique de l’anticorps primaire. Échelle = 50 μm. [175] 3. Étude de l’expression du gène Hacd1 dans la rétine de Souris a. Marquage indirect de l’expression du gène Hacd1 par immunofluorescence Dans un premier temps, nous avons réalisé les marquages anti-β-Gal à l’aide d’un anticorps obtenu fourni par Abcam afin de pouvoir réaliser des doubles marquages avec les marqueurs des cellules bipolaires ou ganglionnaires (voir la partie précédente). N’ayant que peu de documentation sur cet anticorps nous avons commencé par tester différentes concentrations d’anticorps primaire sur nos coupes (1/50, 1/100, 1/200 et 1/400) après fixation par le formaldhéhyde à 4%. Au vu des premiers résultats, nous avons choisi d’utiliser la concentration 1/200 pour la suite de notre étude (Figure 39). Nous avons observé une forte variabilité du niveau de marquage au sein des souris contrôles et au sein des souris Hacd1-KO. Par ailleurs, on constate que les souris sauvages (Figure 39, A-C), présentaient un marquage important, voire plus fort que les souris Hacd1-KO (Figure 39, D et E) alors même qu’elles ne possédaient pas le transgène LacZ. Nos coupes présentaient donc un marquage non spécifique très important dû à une mauvaise spécificité de l’anticorps primaire utilisé avec ce protocole. De plus, le marquage observé lors des études préliminaires en coloration X-Gal n’était pas retrouvé chez les souris Hacd1-KO porteuses de 2 copies du transgène LacZ. Cet anticorps présentait donc une sensibilité insuffisante avec ce protocole. [176] Figure 39 : Marquages par immunofluorescence de coupes de rétines par un anticorps anti-β-Gal d'Abcam dilué au 1/200 sur coupes fixées en formaldéhyde à 4%. A à C : rétines de souris contrôles traitées avec l’anticorps primaire et l’anticorps secondaire. D et E : rétines de souris Hacd1-KO traitées avec l’anticorps primaire et secondaire. F : rétine de souris Hacd1-KO traitée avec l’anticorps secondaire seul en contrôle négatif. Échelle = 50μm. Étant donné cette mauvaise spécificité de l’anticorps anti-β-Gal d’Abcam, nous avons testé, dans un second temps, un anticorps anti-β-Gal produit par Cappel sur coupes congelées en isopentane car le bruit de fond était nettement plus faible dans ces conditions. Un marquage spécifique des cellules ganglionnaires et bipolaires a été noté sur les rétines des souris Hacd1-KO, sous forme de points très lumineux, comme l’illustre la Figure 40. [177] Figure 40 : Marquages par immunofluorescence de coupes de rétines, anticorps anti-β-Gal de Cappel dilué au 1/500 sur coupe congelées. A : rétine de souris sauvage, B : rétine de souris Hacd1-KO. Grossissement (x20). Les astérisques indiquent les différentes couches nucléaires de la rétine : * couche nucléaire externe (photorécepteurs), ** couche nucléaire interne (cellules bipolaires), *** couche de cellules ganglionnaires. Les têtes de flèches indiquent un marquage β-gal spécifique dans les couches des cellules bipolaires et ganglionnaires. Ce marquage indirect spécifique donnait un résultat similaire aux observations réalisées par coloration X-Gal lors des études préliminaires. Malheureusement, faute de temps suite aux difficultés techniques rencontrées lors de la mise en place de ces IF β-Gal, nous n’avons pas pu réaliser les doubles marquages avec PKCα, Neun ou GFAP pour préciser les cellules marquées. Nous n’avons donc pas pu identifier avec précision la nature des cellules qui exprimaient le gène. [178] b. Marquage direct de l’expression de Hacd1 par hybridation in situ i. Hybridation in situ sur coupes congelées en isopentane Les HIS ont été testées dans un premier temps sur coupes congelées. Toutefois, malgré l’étape de séchage préalable d’1h30 sous hôte à la sortie du congélateur et malgré l’étape de fixation initiale (PFA 4% pendant 20 min) la qualité des coupes diminuait au fur et à mesure des nombreux lavages et la rétine n’était même plus visible lors de l’observation finale des coupes. Suite à ces échecs, nous avons décidé de tester un protocole d’HIS sur coupe fixée en formaldéhyde à 4%. Ce type de fixation avait été écarté dans un premier temps car la réalisation des HIS sur coupes fixées peut être à l’origine de marquages plus faibles. En effet, la sonde peut avoir du mal à accéder aux ARNm suite aux pontages créés par le formaldéhyde. ii. Hybridations in situ sur coupe fixées par formaldéhyde Les hybridations in situ, HIS, sur coupe fixées en formaldéhyde ont été réalisées sur des lames provenant des souris du lot B, souris femelles âgées d’environ 2 ans. Les résultats obtenus sont synthétisés dans le Tableau 11 et la Figure 41. L’ensemble illustre la grande variabilité des marquages directs de l’expression du gène Hacd1 obtenus avec le protocole retenu. [179] Tableau 11 : Synthèse des différents niveaux de marquages observés sur les rétines de souris testées par hybridation in situ. Pour chaque souris, deux coupes de rétine (coupe 1 et 2) ont été marquées dans les mêmes conditions afin de tester la reproductivité du marquage. Les niveaux de marquage ont été notés suivant la grille suivante : 0 marquage nul, + marquage douteux, ++ marquage moyen, +++ marquage important. (Figure 39). Les éléments indiqués en rouge et vert correspondent à des résultats surprenants (marquages non spécifiques par la sonde sens en vert ; marquage des souris Hacd1-KO ou absence de marquage des souris sauvages par la sonde antisens en rouge). L’absence totale de marquage au niveau d’une des rétines de souris sauvage est vraisemblablement due à une erreur de manipulation. La sonde sens est de même nature que la sonde antisens mais, ne pouvant s’hybrider aux ARNm de Hacd1, elle permettait d’évaluer le niveau d’hybridation non spécifique de notre protocole. L’obtention dans certains cas d’un marquage douteux ou moyen avec la sonde sens nécessitait de ne tenir compte que des marquages plus forts avec la sonde antisens, c'est-à-dire les marquages importants (+++). [180] Figure 41 : Illustration de la grille de notation des différents niveaux de marquage observés par hybridations in situ Première ligne : grossissement 5, seconde ligne : grossissement 20. Les clichés A et A’ illustrent le niveau de marquage nul, les clichés B et B’ celui de marquage douteux, les clichés C et C’ celui de marquage moyen et finalement, les clichés D et D’ celui de marquage important. D’autre part, contrairement à la révélation du transgène LacZ par IF ou coloration X-Gal, lors de la réalisation d’HIS, seules les souris sauvages, et non les souris Hacd1-KO, devaient être marquées. En effet, la sonde ARN était choisie de manière à ce qu’elle soit complémentaire de la séquence des ARNm de Hacd1. Nous avons pourtant parfois observé un marquage moyen des rétines de souris Hacd1-KO (Tableau 11). [181] Finalement, nous avons aussi parfois observé des marquages d’intensité variable au sein d’une même coupe (Figure 42). Dans tous les cas, le marquage observé comprenait les couches des cellules bipolaires, des cellules ganglionnaires et des photorécepteurs. Toutefois, l’ensemble des éléments soulignés précédemment signifie que notre protocole, avec cette séquence de sonde spécifique, ne présentait pas une grande spécificité. Ainsi, même si un marquage important (+++) a été observé uniquement avec la sonde antisens sur une souris sauvage, il est nécessaire de considérer l’expression observée dans toutes les couches rétiniennes avec beaucoup de prudence. Cette expérience s’avère néanmoins indispensable à recommencer pour conclure quant à l’expression du gène Hacd1 dans les photorécepteurs, notamment en changeant de sonde et peut-être en utilisant des souris plus jeunes. Figure 42: Différents niveaux de marquage observés sur une même coupe suite à une hybridation in situ pour le gène Hacd1 Grossissement : x20 [182] 4. Analyse de la composition lipidique des rétines Les analyses de la composition lipidique, qui ont été réalisées au Dean A. McGee Eye Institute, nous ont permis de quantifier les phosphatidylcholines (PC), les phosphatidylsérines et les phosphatidyléthanolamines retrouvées dans les rétines de nos souris. Il s’agit là des trois espèces de phospholipides les plus abondantes dans la rétine. Les phosphatidylcholines sont celles qui nous intéressent plus particulièrement car c’est sous cette forme qu’on retrouve les VLC-PUFA de la rétine. Dans un second temps, les phospholipides ont été séparés en fonction de la taille de leurs chaînes carbonées et leurs pourcentages relatifs ont été calculés au sein de chacune de ces espèces. Ces analyses n’ont pas révélé de différences significatives entre les souris Hacd1-KO, les souris sauvages ou les souris hétérozygotes. Seules les rétines de deux souris Hacd1-KO présentaient des compositions lipidiques très différentes de l’ensemble des autres souris comme l’illustre la Figures 41. En effet, elles étaient dépourvues des acides gras les plus longs avec en particulier une absence totale de VLC-PUFA, comme l’illustre la Figure 43. Il s’agissait là des deux seules souris du lot ayant présenté des signes d’atrophie complète à l’analyse du fond d’œil, un ERG nul pour les deux yeux et une disparition de la couche de photorécepteurs à l’analyse histologique. Cette composition lipidique modifiée est donc à mettre en lien avec leur absence de photorécepteurs dont les segments externes sont très enrichis en acides gras à très longue chaîne. Notons qu’en raison de la très faible quantité de méibum récolté, l’analyse de la composition lipidique des glandes de Méibomius n’a finalement pas été réalisée. [183] Figure 43 : Composition relative en phosphatidylcholines des rétines des souris du lot E. A. Comparaison de la composition en phosphatidylcholines des rétines de souris sauvages, hétérozygotes et mutantes. B. Détail de la comparaison en ce qui concerne les phosphatidylcholines constituées d’acides gras polyinsaturés de plus de 28 carbones. A 35,000 30,000 Moyenne des souris homozygotes sauvages 25,000 Moyenne des souris hétérozygotes 20,000 15,000 Moyenne des souris homozygotes mutantes * 10,000 Moyenne des souris homozygotes mutantes à atrophie complète 5,000 0,000 Différentes molécules de phosphatidylcholines quantifiés dans nos échantillons 3,500 B 3,000 2,500 Pourcentage Pourcentage par rapport à la quantité totale de Phosphatidylcholine mesurée dans nos échantillons 40,000 Légende 2,000 +/+ : souris sauvages 1,500 +/- : souris hétérozygotes 1,000 -/- : souris Hacd1-KO 0,500 Ε : quantité très faible 0,000 +/+ +/- -/- -/- atrophie totale [184] iii. Discussion concernant les aspects techniques de l’analyse lipidique Au cours de cette étude nous avons rencontrées principalement deux difficultés techniques. La première était liée à des difficultés de prélèvement, en particulier, en ce qui concernait le méibum. En effet, cette étape était très longue, à raison d’environ 30 min par souris, et elle devait être réalisée avant le prélèvement des yeux. Il y avait donc un risque relativement important que la qualité de la rétine se dégrade pendant ce temps. Par ailleurs, nous n’avons réussi à prélever que de très faibles quantités de méibum, insuffisantes pour réaliser les analyses de composition lipidique. Étant données les lésions cornéennes observées chez souris Hacd1-KO (paragraphe III.1.) ainsi que l’importance des VLC-FA dans le méibum, il serait tout de même utile de pousser les investigations jusqu’à obtenir des informations sur la composition lipidiques des glandes de Méibomius chez nos souris Hacd1-KO. Il serait toutefois nécessaire de trouver ou mettre au point un protocole de prélèvement du méibum plus facile. La deuxième difficulté rencontrée concerne le manque de précision des résultats des analyses de la composition lipidique des rétines de nos souris. En effet, ces analyses n’ont pu nous fournir le détail par chaîne des acides gras constituant les PC. Seuls le nombre total de carbones et le nombre global d’insaturations des phospholipides étaient connus. Il était alors possible d’en déduire, dans un second temps, la taille et le nombre d’insaturations des VLC-PUFA des PC car ceux-ci sont couplés à du DHA (C22:6n3). Ainsi, par exemple, les molécules de PC 54:12 sont forcément constituées d’un DHA (C22:6n3) et d’un VLC-FA (C32:6). Toutefois, l’analyse du nombre d’insaturations ou de carbones des autres acides gras constituant des phospholipides n’était pas possible. Cela est dommage car des études de la fonction du gène Hacd1 ont montré que la synthèse des acides gras C18:1n7 et C18:1n9 étaient augmentée avec l’expression du gène. Or notre étude a mis en évidence un léger déficit en PS et PE 36:2 qui pourraient être constituées de deux acides gras de ce type. Nous ne pouvons cependant pas l’affirmer à ce stade. Il serait donc intéressant de renouveler l’analyse de la composition lipidique des rétines des souris Hacd1-KO en utilisant une autre technique, analyse FAMES, afin d’obtenir la composition en acides gras des phospholipides. [185] CONCLUSION ET PERSPECTIVES 1. Bilan de nos quatre études a. Bilan des analyses cliniques et fonctionnelles Au cours de cette étude, nous avons mis en évidence que nos souris Hacd1-KO étaient prédisposées au développement d’opacifications cornéennes ponctiformes bilatérales. Cette observation était le résultat d’une découverte fortuite et notre principale hypothèse est que ces opacifications seraient la conséquence d’une modification de la composition lipidique des glandes de Méibomius. Suite à des difficultés techniques, nous n’avons pas pu tester cette hypothèse. Il serait intéressant de réaliser des colorations des cornées de nos souris par le Red Oil et de mettre au point un protocole de prélèvement du méibum afin d’avancer dans notre étude. Lors de l’observation des fonds d’œil, nous avons aussi pu montrer que nos souris Hacd1-KO étaient prédisposées à une atrophie rétinienne modérée ou marquée. De façon surprenante, ce résultat ne fut que partiellement confirmé à l’analyse histologique fine et à l’ERG. En effet, les souris présentant des signes d’atrophie rétinienne marquée à l’examen du fond d’œil avaient aussi des anomalies structurales majeures à l’analyse histologique, disparition de la couche des photorécepteurs, et leurs ERG étaient plats. Par contre, aucun phénotype intermédiaire n’a été identifié à l’analyse histologique ou à l’ERG chez les souris présentant pourtant des signes d’atrophie rétinienne modérée à l’examen du fond d’œil. S’il a déjà été montré lors de l’étude de la mutation Elovl4 que les anomalies fonctionnelles ne sont pas toujours associées à des analyses structurales, il semble néanmoins surprenant que des souris présentant des signes d’atrophie rétinienne modérée ne présentent pas d’anomalie ERG. [187] Finalement, au cours de notre étude d’électrorétinographie et contrairement à ce qui avait été observé lors de l’analyse préliminaire, nous n’avons pas pu mettre en évidence d’anomalie significative dans le fonctionnement de la rétine chez nos souris Hacd1-KO. Compte tenu des différences relevées entre les deux protocoles employés nous pouvons émettre quatre hypothèses pour expliquer cela : - Un apport accidentel d’acides gras dans l’alimentation de nos souris aurait corrigé le phénotype chez les souris testées au cours de cette étude, - Les VLC-PUFA joueraient essentiellement un rôle dans la régénération des photopigments qui n’aurait pas pu être mis en évidence ici en raison des plus grands intervalles entre deux flashs lors de cette étude, - Les gènes Hacd2-4, présentant aussi un niveau d’expression non négligeable dans la rétine, ils suffiraient à compenser au moins partiellement la perte de fonction du gène Hacd1. - Il n’existe pas de réel phénotype chez nos souris et les anomalies détectées précédemment étaient dues au hasard. Il n’est actuellement pas possible de trancher entre ces différentes hypothèses, il faudrait donc réaliser de nouveaux ERG sur un plus grand nombre de souris et si possible à des âges différents pour une même souris afin d’augmenter notre puissance statistique. Il serait aussi intéressant de tester certains protocoles plus spécialisés afin de tester spécifiquement la régénération des photopigments ou le fonctionnement de l’un des types cellulaires de la rétine. Ainsi par exemple les ERG conventionnels permettent de tester le fonctionnement des cellules bipolaires et des photorécepteurs mais pas celui des cellules ganglionnaires. L’expression de Hacd1 étant très importante dans cette dernière couche cellulaire, il serait intéressant d’étudier également leur fonctionnement. Il existe des techniques très particulières permettant d’étudier le fonctionnement des cellules ganglionnaires, telles que le pattern-électrorétinogramme (p-ERG), mais celles-ci ne sont pour l’instant pas disponibles dans notre laboratoire ou chez nos collaborateurs. [188] b. Bilan de l’analyse structurale des rétines Contrairement à ce qui avait été observé à l’analyse du fond d’œil, les analyses structurales globales des rétines de nos souris, n’ont pas permis de montrer que les souris Hacd1-KO présentaient significativement plus de risque d’avoir une atrophie rétinienne que les souris contrôles. Cependant, il se peut que nous ayons juste manqué de puissance statistique afin de mettre en évidence un événement rare. Par ailleurs, au vu des résultats des analyses structurales des rétines des souris Elovl4-cKO, il semblerait intéressant d’approfondir l’analyse des terminaisons synapses des photorécepteurs ainsi que celle de l’épithélium pigmentaire chez les souris Hacd1-KO. En effet, cette étude ne permet pas de conclure à ce sujet pour le moment. c. Bilan de l’analyse de l’expression du gène Hacd1 Faute de temps et en raison de difficultés techniques rencontrées, nous n’avons pas réussi à mettre au point les doubles marquages IF de l’expression de notre gène d’intérêt. Cependant, les derniers résultats des HIS semblent confirmer le gène Hacd1 s’exprime dans la rétine au niveau des couches de cellules ganglionnaire et de la couche nucléaire interne mais pas au niveau des photorécepteurs. Une étude à plus large échelle et employant éventuellement des sondes plus spécifiques et plus sensibles sera nécessaire afin de confirmer ce résultat en vu d’une publication. d. Bilan des analyses lipidiques Les analyses lipidiques n’ont pas révélé de différences significatives entre les souris Hacd1-KO, les souris sauvages et les souris hétérozygotes. Seules les rétines de deux souris Hacd1-KO présentaient des compositions lipidiques particulières caractérisées par une absence totale de VLC-PUFA. Ces deux souris avaient par [189] ailleurs présentées des signes d’atrophie rétinienne complète à l’analyse du fond d’œil, un ERG nul pour les deux yeux et une disparition de la couche de photorécepteurs à l’analyse histologique. Comme pour les ERG et l’analyse morphométrique fine, et contrairement à l’observation des fonds d’œil, aucun phénotype intermédiaire n’a été observé. La réalisation d’une analyse lipidique FAMES semble recommandée afin d’obtenir la composition précise en acides gras des différents phospholipides. 2. Perspectives Notre étude a permis de mieux comprendre le rôle du gène Hacd1 au niveau de la rétine. Toutefois, nous en sommes encore au stade des hypothèses. Au vu de nos nouveaux résultats, il semble intéressant de réaliser des expériences plus spécifiques afin d’approfondir certains points. Voici quelques exemples d’études qu’il semblerait judicieux de réaliser dans un futur proche. a. Observation de la vascularisation rétinienne L’observation des fonds d’œil dans notre étude a mis en évidence que de nombreuses souris Hacd1-KO présentaient des anomalies de vascularisation rétinienne évocatrices de dégénérescence rétinienne plus ou moins marquée. En effet, 61% des souris Hacd1-KO présentaient des vaisseaux de diamètre réduit voire une disparition complète de la vascularisation. Cependant, les analyses morphométriques fines et structurales réalisées pour le moment ne nous ont pas permis d’étudier la vascularisation de la rétine de nos souris. [190] Il existe différents protocoles permettant d’étudier la vascularisation des rétines avec plus de précision. Ces protocoles sont réalisables in vivo ou ex vivo. Toutefois, ces manipulations nécessitent du matériel relativement coûteux, que nous n’avons actuellement pas à notre disposition. Le protocole de montage des rétines à plat permet quant à lui de réaliser une étude de la vascularisation des rétines après prélèvement. Il serait intéressant de tester ce protocole sur nos souris afin de vérifier nos observations cliniques. b. Dosage de la rhodopsine Afin de mieux comprendre d’où provient le défaut de fonctionnement des photorécepteurs observé à l’ERG lors des études préliminaires, il serait intéressant de chercher à doser la quantité de rhodopsine dans les rétines de nos souris. En effet, la rhodopsine est un photopigment qui permet la réception du signal lumineux. Une quantité insuffisante de rhodopsine pourrait être à l’origine de la réduction de l’onde a observée à l’ERG dans l’étude préliminaire. Compte tenu du lien étroit entre l’épithélium pigmentaire et le segment externe des photorécepteurs ainsi que de l’atteinte systématique de l’épithélium pigmentaire chez les souris mutantes pour Elovl4, ce dosage serait sûrement pertinent. Un protocole de dosage de la rhodopsine après prélèvement des rétines nous a été proposé par le laboratoire de biophysiques de Clermont-Ferrand. Il repose sur la mesure de l’absorbance de la rhodopsine par spectrophotométrie. Toutefois, ce protocole présente de nombreuses difficultés techniques. Par exemple, il nécessite de réaliser l’ensemble des manipulations, dont le prélèvement des rétines, sous lumière inactinique. De plus, lors d’un test préliminaire, nous ne sommes pas parvenus à doser les protéines totales de nos échantillons pour cause d’interférence avec le tampon utilisé. La mise au point d’un nouveau protocole serait intéressant dans un futur proche afin de compléter notre étude. [191] c. Dark adaptometry La dark adaptometry est un protocole d’ERG permettant d’évaluer la capacité d’un individu à s’adapter à la pénombre et plus particulièrement à retrouver une bonne sensibilité visuelle dans l’obscurité (Geller, 2005). La durée de cette phase de récupération, après une phase de saturation en lumière vive, serait directement corrélée à la capacité de régénération des photopigments. Une récupération ralentie témoignerait alors d’un dysfonctionnement soit de l’épithélium pigmentaire soit des enzymes impliquées dans le cycle de régénération de la rhodopsine. Concrètement, la phase de récupération après saturation des photopigments en lumière vive a été évaluée chez le rat en déterminant l’intensité seuil du flash lumineux permettant d’obtenir une onde b d’amplitude prédéfinie à l’ERG (Geller, 2005). Cette technique permettrait aussi de faire la différence entre le temps de récupération des cônes d’abord, puis des bâtonnets. Il semblerait très intéressant de tester ce protocole chez nos souris afin de vérifier l’hypothèse selon laquelle les souris Hacd1-KO présenteraient une atteinte de l’épithélium pigmentaire ayant pour conséquence un déficit de régénération des photopigments. Un protocole utilisable sur nos souris a été décrit par (Mata et al., 2001). [192] BIBLIOGRAPHIE AGBAGA M-P, MANDAL MNA, ANDERSON RE. Retinal very long-chain PUFAs: new insights from studies on ELOVL4 protein. J. Lipid Res.. 2010, 51, 1624‑1642. AGBAGA M-P, TAM BM, WONG JS, YANG LL, ANDERSON RE, MORITZ OL. Mutant ELOVL4 That Causes Autosomal Dominant Stargardt-3 Macular Dystrophy Is Misrouted to Rod Outer Segment Disks. Invest. Ophthalmol. Vis. Sci.. 2014, 55, 3669‑3680. ATHANASIOU D, AGUILÀ M, BEVILACQUA D, NOVOSELOV SS, PARFITT DA, CHEETHAM ME. The cell stress machinery and retinal degeneration. FEBS Lett., St. Petersburg. 2013, 587, 2008‑2017. BARABAS P, LIU A, XING W, CHEN C-K, TONG Z, WATT CB, et al. Role of ELOVL4 and very long-chain polyunsaturated fatty acids in mouse models of Stargardt type 3 retinal degeneration. Proc. Natl. Acad. Sci.. 2013, 110, 5181–5186. BAYER AU, COOK P, BRODIE SE, MAAG K-P, MITTAG T. 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Les coupes étaient ensuite déparaffinées suivant le protocole décrit dans le Tableau 12 ci-dessous : Tableau 12 : Protocole de déparaffinage Sous-Étapes Solvant Temps 1 et 2 Xylène 2 x 15 minutes 3 et 4 Éthanol 100% 2 x 5 minutes 5 Éthanol 70% 10 minutes * 6 Éthanol 50% 5 minutes 7 PBS 5 minutes * Commencer à préparer le démasquage : préchauffer le tampon citrate et préparer la chambre humide (placer du papier absorbant humidifié au fond d’un présentoir à lame horizontal). Remarque : Si le démasquage ne se faisait pas tout de suite, les lames étaient laissées dans du PBS. Étape 2 : Démasquage des sites (durée environ 1h10) [201] Préchauffer environ 1,5 L de tampon citrate 1 X au four à microondes, 10 min à 300 W. Tampon citrate 10 X , pH6 (0,1 M) : Acide monohydraté 21 g , compléter à 1L. Ajuster à pH 6 Placer les lames déparaffinées dans un panier et les plonger rapidement dans le tampon citrate chaud. Réchauffer l’ensemble 20 min à 500 W. Laisser refroidir une bonne demi-heure. Rincer les lames dans du PBS. Sécher les lames et entourer de Dako Pen (référence : S2002 , Dako). Étape 3 : Perméabilisation des membranes Déposer par coupe environ 40 µl de Triton 100 X dilué à 0,3 % dans du PBS. Laisser agir 5 min. Laver 2 x 5 min en PBS. Étape 4 : Blocage des sites non spécifiques Éponger avec un papier absorbant autour de la rétine. Déposer 40 μL par coupe de Bovine Serum Albumin (BSA) diluée à 3% dans du PBS. Laisser 30 min à température ambiante. Étape 5 : Anticorps primaire (Anticorps I) Éponger avec un papier absorbant autour de la rétine. Déposer 40 µl par coupe d’anticorps dilué dans de la BSA 3%. Placer les lames à 4°C pendant la nuit en chambre humide. Étape 6 : Anticorps secondaire (Anticorps II) Le lendemain matin : Récupérer les anticorps I et les conserver en ajoutant de l’azide de sodium à 0,01%. Laver 2x 5 min dans du PBS. [202] L’ensemble des étapes suivantes étaient réalisées à l’obscurité afin de protéger les fluorochromes. Éponger avec un papier absorbant autour de la rétine. Mettre 40 μL par coupe d’anticorps secondaire dilué au 1/500 dans du PBS. Laisser 1h à température ambiante, à l’obscurité. Laver 3x 5 min dans du PBS. Remarque : certains anticorps primaires nécessitent une amplification. Pour cela, utiliser des anticorps secondaires biotinylés dilués au 1/200 dans du PBS puis placer 40 μL par coupe de streptavidine diluée à 1/1000 dans du PBS. Laisser agir 30 min. Étape 7 : Coloration des noyaux Éponger avec un papier absorbant autour de la rétine. Déposer 40 µl de DAPI (1mg/ml, 62248, Thermoscientific) dilué au 1/1000. Rincer 2x 5 min dans du PBS. Étape 8 : Montage de la lame Éponger avec un papier absorbant autour de la rétine. Mettre deux à trois gouttes de Vectashield « fluorescent mounting medium » pour IF. Placer une lamelle et laisser sécher. Placer du vernis à ongle sur les contours de la lamelle afin de l’étanchéifier et ainsi limiter l’évaporation du milieu. Cela permet de conserver les lames plus longtemps. Dans l’attente de l’observation des lames au microscope à fluorescence, celles–ci pouvaient être conservées à 4°C, à l’abri de la lumière. Toutefois, les observations ainsi que les prises de clichés devaient réalisées sous une à deux semaine car le marquage des fluorochromes s’atténue avec le temps ce qui aurait pu fausser nos interprétations. Témoins négatifs [203] Chaque lame comportait deux coupes sériées. La première coupe était mise en contact successivement avec l’anticorps I puis l’anticorps II selon le protocole décrit précédemment. La seconde coupe n’était quant à elle mise en contact qu’avec l’anticorps II (lors de l’étape 5, de la BSA 3% était déposée à la place de l’anticorps I sur la coupe). Ainsi, la fluorescence détectée sur cette seconde coupe mettait en évidence le niveau de marquage non spécifique de l’anticorps secondaire ainsi que l’autofluorescence liée au tissu en lui-même (figure ci-dessous). Figure 44 : Marquage et témoin négatif lors d'immunofluorescence [204] ANNEXE 2 : Résumé des caractéristiques des anticorps utilisés pour les marquages par immunofluorescences Tableau 13 : Caractéristiques des différents anticorps utilisés. Anticorps I β-Gal CtBP2 Rhodopsin Marquage β-Galactosidase Synapses à ruban Photorécepteurs PKCα Cellules bipolaires NeuN Cellules ganglionnaires Nestin : NS-1 Cellules gliales dédifférenciés GFAP Cellules gliales Fournisseur Abcam Ref : ab9361 Cappel Ref : 55976 BD transduction Ref : 612044 Abcam Ref : ab3267 Millipore Ref : DAM1530428 Abcam Ref : ab104225 Hybridoma bank Ref : rat-401 Ventana Ref : EP672Y Espèce Dilution Ac I Amplification ? Anticorps II Dilution AcII Poulet 1/200 Non De chèvre anti-poulet 1/500 Lapin 1/500 Non Anti-lapin 1/500 Souris (IgG1) 1/50 Non Anti-souris 1/500 Souris (IgG1) 1/2000 Non Anti-souris 1/500 Souris (IgG1) 1/50 Non Anti-souris 1/500 Lapin 1/1200 Non Souris (IgG1) 1/50 Oui Lapin 1/1000 Non [205] De chèvre anti-lapin Biotin anti-souris IgG1 De chèvre anti-lapin hight 1/500 1/200 1/500 ANNEXE 3 : Synthèse des sondes d’hybridation in situ par réaction de polymérisation en chaîne Contenu d’un tube pour 1 PCR : Contenu du Mix pour 1 PCR : 46 μL de Mix 5 μL de tampon 10X + 2 μL plasmide (ADNc) 5μg/μL + 1 μL de dNTP (nucléotides) + 1 μL d’amorce sens à 10μM + 0,4 μL de Taq polymérase + 1 μL d’amorce antisens à 10μM + 39,6 μL d’eau distillée Total : 50 μL Programmation de la machine à PCR utilisée : Étape 1 : 2 min à 94°C – dénaturation initiale Étape 2 : 30 s à 94°C – dénaturation Étape 3 : 30 s à 54°C – hybridation Étape 4 : 45 s à 72°C – élongation Étape 5 : 2 min à 72°C – élongation finale Étape 6 : maintien à 15°C [206] Répétition sur 30 cycles ANNEXE 4 : Protocole d’hybridation in situ Tableau 14 : Protocole d'hybridation in situ adapté aux rétines et mis au point pendant la thèse à partir des recommandations du Dr Giorgia Egidy, laboratoire de génétique fonctionnelle médicale, ENVA. Les abréviations sont définies à la fin du tableau. Étape Étape 1 : déparaffinage Step 1 : toluène Step 3 : réhydratation Étape 2 : prétraitement Step 1 : action PK Step 2 : rinçage Étape 3 : postfixation Step 1 : fixation Step 2 : rinçage Étape 4 : Acétylation Step 1 : acétylation Step 2 : rinçage Step 3 : Dako Pen Step 4 : pré-hybridation Étape 5 : hybridation Step 1 : sondes Step 2 : dépôt sondes Step 3 : hybridation Détails Durée / remarques Rincer les lames au toluène 2x15min 1h30 Préchauffer incubateur à 70°C Éthanol 100% => 2x 5min Éthanol 70% => 10 min Éthanol 50% => 5min PBS => 5 min Traitement PK, 8 à 10 min RT Concentration PK : 0,01 mg/ml dilué dans PK buffer soit 0,5 µL de PK à 20 mg/ml pour 1 mL de Tampon Rincer PBS à RT 5min 15min Préchauffer HB buffer 20min Placer les lames dans du PFA 4% RT 10 min Rincer 2x 5 min dans du PBS Sous agitation, ajouter l’acide acétique anhydre dans le tampon triéthanolamine (à raison de 50 µl pour 20 mL). Placer les lames 15 min dans la solution obtenue Rincer 3x 5 min en PBS Encercler les lames avec du Dako Pen Placer 100 uL de HB buffer préchauffé par coupe et placer 1h à 70°C Mélanger 200 ng de sonde/100 µL HB x nombre de coupes (soit 2 µL de sonde/100 µL HB actuellement) Dénaturation : 5 min à 95°C puis vortex 5 s Placer sur glace Déposer 100 μL du mélange HB + sonde / coupe Recouvrir d’une lamelle stérile Placer les lames dans une chambre humide Étanchéifier avec parafilm [207] 1h40 Nettoyer la chambre humide avant de l’utiliser : Rincer avec NaOH à 3M Rincer avec SDS 1% Chambre humide PBS Préparer les sondes 30 min + Over night Chambre humide : SSC 2X Étape 6 : rinçage post-hybridation Step 1 : retrait lamelle Step 2 : rinçage Step 3 : RNAse A Step 4 : rinçage Étape 7 : Détection Step 1 : buffer B1 Step 2 : blocage Step 3 : anti-DiG Étape 8 : révélation Step 1 : Rinçage B1 Step 2 : Rinçage B1 Step 3 : incubation B3 Step 4 : NBT/BCIP Step 5 : arrêter la réaction Step 6 : Cliché au microscope apotome 3h Préchauffer la solution de SSC 2X à 60-65°C Placer les lames dedans pendant 15 min Laisser les lamelles se décoller seules Rincer dans un nouveau bain de SSC 2X à 65°C 30 min Rincer 1 min dans du STE Retirer le STE et incuber avec la ARNase A (15 µg/mL dilué dans STE) 30 min à 37°C (à plat) Rincer 2x 5 min avec du SSC 2X Rincer 2x 30 min avec du SSC 0,2X à 65°C (à plat, 100 μL de SSC 0,2X par coupe) Rincer avec SSC 2x 5 min à RT Rinçage 30 min à RT avec B1 Δ Penser à diluer B1 qui est préparé au 10X et à ajouter le tween !!! Placer 200 μL de solution de blocage /coupe Solution de blocage = Buffer B1 + 20% sheep serum Incuber 30 min à RT Retirer la solution de blocage Ajouter 300 μL de phosphatase alkaline + l’anticorps anti DIG dilué au 1/2000 dans B1 + 10% sheep serum Recouvrir d’une lamelle, placer en chambre humide à 4°C Rincer les lames et retirer les lamelles dans B1 pendant 10 min à RT Nouveau rinçage avec B1 10 min à RT Incuber avec B3 30 min à RT Placer les lames horizontalement et ajouter 400 μL de NBT/BCIP et recouvrir d’une lamelle Maintenir dans le noir à RT ou 4°C et vérifier la coloration à 30 min, 1h, 3h et 6h Placer les lames dans du PBST => laisser 10 min puis laver avec eau et monter en aquatex Prendre les clichés dans la journée ou le lendemain au plus tard (garder la même intensité lumineuse pour toutes les coupes) Ne pas laisser les lames refroidir entre deux Penser à baisser la T à 60°C Préchauffer le SSC 0,2X pour s4. Faire cette étape dans une autre salle pour ne pas contaminer le plan de travail Chambre humide en PBS (ne pas utiliser la boite d’HIS mais celle d’IF car on a mis de l’ARNase en s3) 1h + Over night Préparer solution de blocage Buffer B1 + 20% sheep serum Lancer le plus tard possible 50 min + 5h environ Préparer B3 pour s3. Durée approximative à RT : 5 à 6 heures Légende du tableau 13 HB : Hybridization Buffer [208] NBT/BCIP : nitro-blue tetrazolium and 5bromo-4-chloro-3'-indolyphosphate, colorant ANNEXE 5 : Formulation des différents tampons utilisés pour l’hybridation in situ Tampons de base à préparer en avance NaCl 5M 500 mL : 146,1g de NaCl qsp 500 mL d’eau mQ Diluer progressivement les 146,1g de NaCl dans 450 mL d’eau puis compléter jusqu’à 500 mL. MgCl2 1M 100 mL 20,33g de MgCl2.6H2O qsp 100 mL d’eau mQ Diluer progressivement les 20,33g de poudre dans 80 mL d’eau puis ajuster à 100 mL. Tris HCl 1M pH7,5 250 mL 30.27g de Tris base 13 mL environ d’HCl 37% qsp 250 mL eau mQ Diluer sous agitation le Tris dans 150 mL d’eau, ajuster le pH à 7,5 en rajoutant progressivement l’HCl puis compléter jusqu’à 250 mL avec l’eau. EDTA pH8 250 mL 46,5g d’EDTA.Na2.2H2O 5g environ de NaOH qsp 250 mL eau mQ Diluer sous agitation l’EDTA dans 150 mL d’eau, ajuster le pH à 8 en rajoutant progressivement la soude puis compléter jusqu’à 250 mL avec l’eau. SSC 20X 100 mL 17,5g NaCl 8.8g trisodium citrate qsp 100 mL eau mQ Vérifier que le pH est compris entre 7 et 7,5. Légende : qsp = « quantité suffisante pour », signifie que le soluté doit être ajouté à la solution en proportion aussi importante que nécessaire afin d'atteindre la quantité requise de produit final. Exemple : qsp 100 mL d’eau compléter la solution jusqu’à atteintre 100mL avec de l’eau Eau mQ, ou eau milliQ : eau purifiée répondant [209]aux recommandations internationales définissant une eau « ultrapure », type 1 Tampons spéciaux à préparer en avance Protéinase K PRÉ-Buffer 100 mL Tris HCl 1M pH7,5 : 5 mL EDTA 0,5M : 1 mL qsp 100 mL eau mQ ∆ Penser à ajouter la Protéinase K avant de l’utiliser sur les coupes !! HB Buffer 100 mL 50 mL Formamide RNAse free 25 mL SSC 20X 10 mL Denhardts 50X 5 mL sperme de hareng (10mg/mL) 2,5 mL ARN T (10mg/mL) qsp 100mL eau mQ autoclavée Remarques : à préparer sous hôte, à conserver à -20°C (ne pas autoclaver !). STE Buffer 100 mL 10 mL NaCl 5M 2 mL Tris HCl 1M pH7,5 200 μL EDTA 0,5M pH8 Buffer B1 10X 200 mL 100 mL d’eau mQ 17,5g NaCl 23,2g acide maléique 33,5 mL NaOH 10N ou 16g de NaOH solide Ajuster le pH à 7,5 (attention saut de pH autour de 6-7, pente très rapide) Qsp à 200 mL avec de l’eau mQ. Tampons spéciaux à préparer juste avant leur utilisation Triéthanolamine Buffer pH 8, 250 mL 3 mL triéthanolamine 0,75 mL environ de HCl 37% qsp 250 mL eau mQ Remarque concernant le prélévement du triéthanolamine : substance très visqueuse (aspirer doucement puis bien rincer la pipette avec l’eau). Réaliser le mélange sous agitation ! Ajuster le pH à 8 à l’aide de HCl. FAM/SSC Tween 500 mL 250 mL Formamide 50% [210] 250 mL SSC 4X autoclavé 0,5 mL Tween 20 Remarque : à préparer sous hôte et dans des falcons. Tween visqueux et bien autoclaver le SSC avant ! Buffer B3 200 mL 20 mL de Tris HCl pH=9,5 100 mL de MgCl2 1M 1 mL NaCl 5M 100 µL Tween 20 qsp à 200 mL avec de l’eau mQ. Solution à autoclaver en prévision des manipulations Protéinase K pré-buffer STE buffer SSC 20x SSC 2x Buffer B1 Tris HCl pH 9,5 (possiblement 7,5 aussi) MgCl2 50 mL NaCl 5M 50 mL Eau mQ => 1,5 L PBS 1X => 1, 5 L [211] ANNEXE 6 : Protocole d’inclusion des rétines en vue d’une observation au microscope électronique à transmission 1. Fixation des rétines dans un mélange de glutaraldéhyde 2% + paraformaldéhyde 0.5% en tampon cacodylate de sodium 0.2M pH 7.4. Durée : 2 jours à 4°C. 2. Rinçage : 3x10 min tampon cacodylate de sodium 0.2M pH 7.4. 3. Post-fixation dans du tetroxyde d'osmium (OsO4) 1% en tampon cacodylate de sodium 0.2M pH 7.4. Durée : 1h00 à température ambiante. 4. Rinçage : 3x10 min tampon cacodylate de sodium 0.2M pH 7.4 . 5. Déshydratation dans de l’éthanol 70% la nuit à 4°C. 6. Déshydratation (suite) et imprégnation en résine épon automatisée dans AMW (Automate à micro-ondes) de Leica. 7. Inclusion dans résine épon. 8. Polymérisation, soit durcissement de la résine, pendant 2 jours à 60°C. 9. Coupe : réalisation de coupes ultra-fines 70nm (ultramicrotome Leica UC6). 10. Coloration contrastante Acétate d'Uranyl puis Citrate de Plomb. 11. Évaporation carbone (stabilise coupe sous faisceau d'électrons) (Evaporateur C E6500). [212] ANNEXE 7 : Tableau de suivi des souris Tableau 15: Suivi et caractéristiques des souris utilisées dans le cadre de cette thèse Date de naissance 05/12/2011 05/12/2011 18/12/2011 27/10/2011 05/12/2011 18/12/2011 14/12/2011 26/06/2012 31/05/2012 15/04/2012 15/04/2012 12/04/2012 19/07/2012 02/05/2012 02/05/2012 01/05/2013 05/07/2013 05/07/2013 13/08/2013 27/04/2013 05/07/2013 31/01/2013 31/01/2013 31/01/2013 28/04/2013 31/01/2013 31/01/2013 ? Date Fixation œil d'euthanasie n°1 29/01/2014 Davidson 29/01/2014 Davidson 29/01/2014 Davidson 29/01/2014 Davidson 29/01/2014 Davidson 29/01/2014 Davidson 13/03/2014 PFA 17/06/2014 PFA (D) 17/06/2014 PFA 17/06/2014 PFA 17/06/2014 PFA 17/06/2014 PFA 17/06/2014 PFA 17/06/2014 PFA 17/06/2014 PFA 27/10/2014 Davidson 27/10/2014 Davidson 27/10/2014 Davidson 27/10/2014 Davidson 29/10/2014 Davidson 29/10/2014 Davidson 29/10/2014 Davidson 31/10/2014 Davidson 31/10/2014 Davidson 31/10/2014 Davidson 31/10/2014 Davidson 31/10/2014 Davidson 30/10/2014 PFA Fixation œil n°2 ? Davidson ? ? ? Isopentane PFA / PFA PFA PFA PFA PFA PFA PFA Isopentane Isopentane Isopentane isopentane PFA PFA PFA PFA PFA PFA PFA PFA Isopentane Lot ID Génotype Sexe A A A A A A B B B B B B B B B C C C C C C C C C C C C C bis F4-81-205 F4-81-206 F4-75-215 F3-72-177 F4-81-207 F4-75-217 F2-146-201 F4-175-327 F4-174-291 F4-197-295 F4-197-297 F4-196-282 F5-307-315 F2-154-311 F2-154-310 F7-355-386 F8-390-398 F8-390-400 F8-366-408 F6-354-375 F8-390-399 F7-344-378 F7-344-383 F7-344-382 F7-360-390 F7-344-379 F7-344-380 F9-405-447 +/+ +/+/+ -/-/-/F/F +/+ +/+ -/-/-/+/+ +/+ +/+ +/-/-/+/+/-/+/+ +/+ +/+ -/+/+ +/+ -/- F F F F F F M F F F F F F F F M M M M M M M M M M M M F C bis F8-412-438 +/+ F ? 30/10/2014 PFA Isopentane D D D D D D D D D E E E E E E E E E E E E E E E E E E F F F F F F F F F F F F F F F7-352-366 F7-350-371 F7-350-372 F6-317-351 F6-359-366 F6-359-367 F7-352-364 F6-316-348 F5-324-357 F8-366-402 F8-390-396 F8-366-405 F8-366-407 F6-356-379 F8-366-406 F7-360-391 F8-366-404 F7-360-388 F8-366-403 F8-390-394 F6-354-373 F8-390-397 F8-390-395 F6-356-380 F7-355-389 F6-354-374 F7-355-387 F7-379-396 F7-379-395 F8-366-409 F8-366-416 F8-366-415 F7-379-389 F7-379-391 F7-379-392 F7-374-403 F7-374-402 F7-379-3 F7-379-4 F7-379-394 F8-366-412 +/+/-/-/+/+ +/+ +/+/+/+/+ -/+/+/+ +/+/-/+/+/+/-/-/-/-/-/+/+/+/-/-/-/-/-/-/+/+ +/+ +/+/+ +/+/+/+/- F F F F F F F F F F F F F F F F F F F F F F F F F F F F F F F F F F F F F F F F F 20/01/2013 31/01/2013 31/01/2013 19/11/2012 31/01/2013 31/01/2013 20/01/2013 19/11/2012 27/10/2011 13/08/2013 05/07/2013 13/08/2013 13/08/2013 30/04/2013 13/08/2013 28/04/2013 13/08/2013 01/05/2013 13/08/2013 05/07/2013 27/04/2013 05/07/2013 05/07/2013 30/04/2013 01/05/2013 27/04/2013 01/05/2013 01/11/2013 01/11/2013 20/11/2013 20/11/2013 20/11/2013 01/11/2013 01/11/2013 01/11/2013 08/11/2013 08/11/2013 07/02/2014 07/02/2014 01/11/2013 20/11/2013 12/11/2014 12/11/2014 12/11/2014 12/11/2014 12/11/2014 12/11/2014 14/11/2014 14/11/2014 14/11/2014 05/12/2014 05/12/2014 05/12/2014 05/12/2014 05/12/2014 05/12/2014 05/12/2014 05/12/2014 05/12/2014 05/12/2014 05/12/2014 05/12/2014 05/12/2014 05/12/2014 05/12/2014 16/10/2014 16/10/2014 16/10/2014 19/01/2015 19/01/2015 19/01/2015 09/03/2015 09/03/2015 09/03/2015 19/01/2015 19/01/2015 19/01/2015 19/01/2015 09/03/2015 09/03/2015 09/03/2015 09/03/2015 Davidson Davidson Davidson Davidson Davidson Davidson Davidson Davidson Davidson Argon Argon Argon Argon Argon Argon Argon Argon Argon Argon Argon Argon Argon Argon Argon / / / Excalibur Excalibur Excalibur Excalibur Excalibur Excalibur Excalibur Excalibur Excalibur Excalibur Excalibur Excalibur Excalibur Excalibur PFA PFA PFA PFA PFA PFA PFA PFA PFA Excalibur Excalibur Excalibur Excalibur Excalibur Excalibur Excalibur Excalibur Excalibur Excalibur Excalibur Excalibur Excalibur Excalibur Excalibur / / / Excalibur Excalibur Excalibur Excalibur Excalibur Excalibur Excalibur Excalibur Excalibur Excalibur Excalibur Excalibur Excalibur Excalibur [213] Numéro d’histologie 14-0122-62 A 14-0122-62 B 14-0122-62 C 14-0123-08 A 14-0123-08 B 14-0123-08 C 14-0871-00 C 14-0871-00 F 14-0871-00 G 14-0871-00 H 14-0871-00 I 14-0871-00 J 14-0871-00 K 14-0871-00 L 14-0871-00 M 14-1280-33 N 14-1280-33 O 14-1280-33 P 14-1280-33 Q 14-1280-33 R 14-1280-33 S 14-1280-33 T 14-1280-33 U 14-1280-33 V 14-1280-33 W 14-1280-33 X 14-1280-33 Y 14-1280-33 AA 14-1280-33 AB Expérience HES HES / IF HES HES HES HES IF IF IF IF IF IF IF IF HES Exclue HES X gal HES, HES HES HES Exclue HES Exclue HES Exclue HES HES Exclue HES Exclue HES X-Gal, ISH ISH 14-1374-30 AC 14-1374-30 AD 14-1374-30 AE 14-1374-30 AF Cornée, 14-1374-30 AG Fond d'œil, 14-1374-30 AH HES, 14-1374-30 AI 14-1374-30 AJ 14-1374-30 AK 14-1377-70 US1 14-1377-70 US2 14-1377-70 US3 14-1377-70 US4 14-1377-70 US5 Cornée, 14-1377-70 US6 14-1377-70 US7 Fond d'œil, 14-1377-70 US8 ERG, HES, Analyse 14-1377-70 US9 14-1377-70 US10 lipidique 14-1377-70 US11 14-1377-70 US12 14-1377-70 US13 14-1377-70 US14 14-1377-70 US15 / Cornée, / Fond d’œil / (exclues / ERG / ERG / ERG / ERG, MET / ERG, MET / ERG, MET / ERG / ERG / ERG / ERG, MET / ERG, MET / ERG, MET / ERG, MET / ERG CARACTÉRISATION FONCTIONNELLE DU GÈNE Hacd1 DANS LA RÉTINE CHEZ LA SOURIS NOM et Prénom : DAVIDSON Marion Résumé : La mutation du gène HACD1, anciennement nommé PTPLA, est à l'origine d'une myopathie chez le Chien, la Souris et l’Homme et il a été démontré que ce gène code une enzyme participant au cycle d'élongation des acides gras à très longue chaîne. Ces derniers ne représentent qu'une faible proportion des acides gras d'un organisme mais ils sont surreprésentés dans la rétine où ils semblent jouer des rôles essentiels à la fonction visuelle comme l’illustrent les études de la maladie de Stargardt 3. Cette maladie génétique liée à une mutation du gène ELOVL4, intervenant dans la 1re étape de la synthèse des acides gras à très longue chaîne, est à l’origine d’une dégénérescence maculaire juvénile chez l’Homme. Les souris modèles pour cette maladie présentent des réductions de leurs réponses en électrorétinographie et une atteinte de l’épithélium pigmentaire. Une étude préliminaire menée par Myriam Taleb, Renaud Fouchère et Jordan Blondelle a révélé que le gène Hacd1 était aussi exprimé dans la rétine et que sa mutation chez la Souris s’accompagnait d’une réponse réduite en électrorétinographie, sans atteinte histologique majeure. Dans cette nouvelle étude expérimentale, nous avons cherché à approfondir l’étude de l'expression du gène Hacd1 dans la rétine ainsi que les conséquences phénotypiques de sa mutation. Des examens du fond d'œil ont mis en évidence que les atrophies rétiniennes modérées et complètes étaient plus fréquemment rencontrées parmi les souris mutées que parmi les contrôles. Les atrophies complètes ont été confirmées à l’électrorétinographie et à l'analyse histologique cependant aucun phénotype intermédiaire n'a été retrouvé à l'électrorétinographie ni objectivée à l’analyse histologique fine, par microscopie optique ou électronique chez les autres souris mutées. Les analyses lipidiques n’ont pas révélé de différence majeure dans la composition rétinienne des souris mutantes. En revanche, les souris mutées présentaient plus fréquemment des opacifications cornéennes ponctiformes bilatérales qui pourraient être la conséquence d’une modification de la composition en acide gras du film lipidique des larmes. Des hypothèses permettant d’expliquer ces différentes observations sont discutées et nous proposons en perspective plusieurs approches afin de mieux cerner le rôle potentiel du gène Hacd1 dans la rétine. Mots clés : GÈNE, HACD1, MUTATION, ENZYME, LIPIDE, ACIDES GRAS, PHOTORÉCÉPTEURS, RÉTINE, ÉPITHÉLIUM PIGMENTAIRE, ATROPHIE ÉLECTRORÉTINOGRAPHIE, RONGEURS, SOURIS. RÉTINIENNE, Jury : Président : Pr Eric SOUIED Directeur : Dr Fanny PILOT-STORCK Assesseur : Dr Sabine CHAHORY [214] ÉTUDE EXPÉRIMENTALE, FUNCTIONAL ASSESSMENT OF THE Hacd1 GENE IN MOUSE RETINA SURNAME: DAVIDSON Given name: Marion Summary A mutation in the gene HACD1, previously named PTPLA, is responsible for a myopathy in Dogs, Mice and Humans and it has been proven that this gene codes for an enzyme that takes part in the very long chain fatty acids elongation cycle. Very long chain fatty acids only represent a small portion of the total fatty acid components of an organism. However, they concentrate in the retina where they seem to be critical to vision as the studies of the Stargardt 3 disease suggest. Indeed, this genetic disease has been linked to a mutation in the ELOVL4 gene that also takes part in this elongation cycle. This mutation is responsible for a juvenile macular degeneration in Humans. The mouse model of this disease presents decreased electroretinography responses to light stimuli and an abnormal retinal pigment epithelium. Preliminary studies conducted by Myriam Taleb, Renaud Fouchère and Jordan Blondelle revealed that the Hacd1 gene is expressed in the retina as well and that its mutation also induces decreased electroretinography responses without any major histological modification. The goal of this new experimental study was to gather more information on the expression of the gene Hacd1 in the retina and to investigate the phenotypic consequences of its mutation. Fundus examination showed signs of partial and complete retinal atrophies in the mutant mice. Complete retinal atrophies were confirmed in the both the electroretinography and histology studies. However, no partial phenotype was found in either the electroretinography study or the morphological study, based on optical and electronic microscopy, in the other mutant mice. The lipid analysis did not reveal any major differences in the lipid contents of the retinas of mutant mice. We did however notice serendipitously that the mutant mice often showed bilateral punctiform opacifications of the cornea, which could possibly be a consequence of a modification in the fatty acid formula of the tear film. Different hypotheses put forward to explain these results are discussed and we have suggested a few interesting new prospective studies that could help investigate the impact of the Hacd1 gene within the retina. Keywords: GENE, HACD1, MUTATION, ENZYME, LIPID, FATTY ACID, PHOTORECEPTOR, RETINA, RETINAL PIGMENT EPITHELIUM, ELECTRORETINOGRAPHY, RODENT, MICE. RETINAL Jury: President: Pr. Eric SOUIED Director: Dr. Fanny PILOT-STORCK Assessor: Dr. Sabine CHAHORY [215] ATROPHY, EXPERIMENTAL STUDY,