II La nature du probl`
eme
Mais, mˆeme si les «forces », les «champs », les «contraintes g´eom´etriques »qui
d´eterminent les trajectoires des corps sont myst´erieuses, il n’en demeure pas moins que ce
sur quoi porte la th´eorie, `a savoir ces trajectoires, est intuitivement clair. Une fois que la
notion de trajectoire et de mouvement est claire, d’autres notions peuvent ˆetre introduites
et acqui`erent indirectement un sens : la notion de vitesse par exemple, ou celle d’´energie
(qui est une fonction, en g´en´eral assez compliqu´ee mais bien d´efinie, des positions et des
vitesses) ou encore ce qu’on appelle le moment angulaire, qui est d´etermin´e par la fa¸con
dont le corps tourne sur lui-mˆeme. Cependant, comme l’exemple des forces agissant `a
distance le montre, on ne peut pas exiger d’une th´eorie physique qu’elle nous donne une
compr´ehension intuitive du monde, mais simplement qu’elle en donne une description
math´ematique pr´ecise, qu’elle m`ene `a nombre ´elev´e de pr´edictions v´erifiables et que ces
pr´edictions soient confirm´ees par l’observation et l’exp´erience, et cela, la physique classique
le fait. Du moins, tant qu’on ne s’int´eresse pas `a des objets trop petits, comme les atomes
ou les ´electrons, pour l’´etude desquels on introduit la m´ecanique quantique4.
En particulier, la physique classique donne une description du monde ind´ependante
du fait que des scientifiques observent ou non ce monde, ou mˆeme que des ˆetres humains
ou vivants existent ou non. Dans un cadre classique, on peut parfaitement penser que les
plan`etes se d´epla¸caient selon leur orbite `a l’´epoque o`u la Terre ´etait peupl´ee de dinosaures
ou avant que n’apparaisse la premi`ere cellule vivante.
La m´ecanique quantique est tr`es diff´erente de la m´ecanique classique, mais, pour
ce qui nous int´eresse, il suffit de savoir que l’on peut toujours repr´esenter un syst`eme
math´ematiquement par un ‘´etat’, appel´e ‘foncion d’onde’, qui est un objet math´ematique
abstrait, sans lien ´evident avec des quantit´es ‘concr`etes’ telles que les trajectoires. Cet
objet change au cours du temps de fa¸con pr´ecise, en fonction des interactions entre les
ceux-ci sont diff´erents des bouleversements introduits par la m´ecanique quantique, et les th´eories de la
relativit´e s’ins`erent de fa¸con naturelle dans le cadre classique tel qu’il est d´ecrit ici.
4Notons n´eanmoins que les premi`eres anomalies constat´ees `a l’int´erieur de la physique classique concer-
naient des quantit´es macroscopiques telles que les chaleurs sp´ecifiques des corps `a basses temp´eratures ou
le rayonnement du corps noir, qui ont men´e `a des mod`eles ad hoc, pr´e-quantiques (de Planck, Einstein,
Debye,...), lesquels n’ont acquis qu’ult´erieurement un statut conceptuel satisfaisant, `a l’int´erieur de la
physique quantique.
4