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La collection de photographies
En 1910, il donne quelques 450 tirages sur papier aristotype
9
, ainsi que les négatifs sur plaque
de verre
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, au laboratoire d’anthropologie du Muséum, qui est ensuite transféré, comme toute
la collection de photographies, au musée de l’Homme. La photothèque de ce dernier se
constitue dans les années 1930, afin de devenir l’ensemble documentaire le plus important en
ethnographie à Paris. Tous les tirages sur papier sont alors montés sur carton gris et classés,
comme toutes les autres, selon deux critères, géographiques et thématiques
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, suivant les
méthodes les plus modernes de l’époque.
En 2004, le musée du quai Branly regroupe les collections provenant du laboratoire
d’ethnologie du musée de l’Homme ainsi que celles provenant du musée national des arts
d’Afrique et d’Océanie. La médiathèque permet de réunir les bibliothèques et les collections
de photographies de ces institutions
12
. Un large programme de conservation préventive est
alors lancé, avant l’ouverture du musée en 2006
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, qui permet d’améliorer les conditions de
conservation et de numériser plus de 200 000 pièces. La collection de photographies de Louis
Lapicque est aujourd’hui consultable sur le catalogue de l’iconothèque
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sur le site web du
musée.
Le sujet de la mission de Lapicque porte sur l’étude des Négritos, un peuple en voie de
disparition. Il s’inscrit pleinement dans l’anthropologie physique de la deuxième moitié du
XIX
ème
siècle, qui cherche à décrire toutes les races humaines, les classer et les hiérarchiser
par leurs aspects. Mais l’étude du corpus photographique dans son ensemble, ainsi que de ses
textes, montre qu’il ne peut se contenter d’observations purement anthropométriques, qu’il
doit ouvrir ces recherches aux peuples, leurs systèmes et l’ensemble de leurs productions pour
mieux les comprendre. C’est sur le terrain qu’il réalise leur diversité culturelle et qu’il remet
en cause le système de hiérarchisation des races humaines qu’on lui avait enseignée.
Ethnographe moderne, il établit par l’image une véritable anthologie de leur civilisation.
Le corpus de Lapicque ne présente pas uniquement des photographies du « type » Négrito,
mais également de toutes les autres populations rencontrées, prises aussi bien sous forme
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Le papier aristotype est l’un des premiers procédés sur papier à être fabriqué industriellement et à être
commercialisé vers 1885. Il est largement utilisé aussi bien par les amateurs que les professionnels, en
raison de sa facilité d’emploi, ne nécessitant aucun développement chimique, et se conservant plus
longtemps que les autres jusqu’à utilisation. Cette émulsion à noircissement direct permet par contact avec
le négatif des images d’une très grande finesse et brillance, de tonalité brune, dont les contrastes rosés se
renforcent en vieillissant.
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Il s’agit de négatifs au gélatino-bromure d’argent sur plaque de verre. Ce procédé commercialisé à la fin
du XIXème siècle offre un grand confort aux voyageurs notamment, puisque les plaques sont vendues
préparées ce qui évite au photographe d’emporter avec lui des produits chimiques et le matériel nécessaire.
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A ce sujet, voir Christine Barthe, « De l'échantillon à la personne, du type au corpus », Journal des
Anthropologues, Paris, 2000 :
http://www.mae.u-paris10.fr/siteums/bibethno/materiaux/Atelier2Bannelaurepierre.php
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A ce sujet, voir Carine Peltier, « L'iconothèque du musée du quai Branly », BBF, 2007, n° 4, p. 10-11 :
http://bbf.enssib.fr/consulter/bbf-2007-04-0010-004
13
A ce sujet, voir Carine Peltier, « Le chantier de l’iconothèque du musée du quai Branly 2004-2005 »,
International Preservation News IFLA, Mai 2011, n°53 :
http://www.ifla.org/files/pac/ipn/IPN%2053.indd.web.pdf
14
Le catalogue de l’iconothèque : http://www.quaibranly.fr/fr/documentation/le-catalogue-de-l-
iconotheque.html