Réévaluation d`actif

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Réflexion
RÉÉVALUATION DES ACTIFS DANS LES COMPTES
INDIVIDUELS ET CONSOLIDÉS :
FOCUS SUR QUELQUES DIFFICULTÉS TECHNIQUES
Eric TORT
Diplômé d’expertise comptable,
docteur HDR en sciences de gestion,
DAF Groupe Pierre Martinet
D
ans un contexte difficile, les entreprises peuvent
avoir intérêt à pratiquer la réévaluation des actifs
tant dans leurs comptes sociaux que dans leurs
comptes consolidés. Au niveau individuel, la réévaluation
libre du PCG (optionnelle) permet en effet :
22
• d’une part, de renforcer les fonds propres d’une société
dont, par exemple, la situation nette aurait été affectée
par des pertes accumulées au cours des dernières
années (cf. tableau 1) ;
• d’autre part, d’éviter une fiscalisation effective de la
plus-value dégagée en utilisant les déficits fiscaux
reportables liés à des pertes antérieures tout en
conservant la possibilité de les “récupérer” au cours
des exercices futurs par le biais des suppléments
d’amortissement déductibles.
Au niveau du groupe, la question du maintien ou pas
de cette réévaluation peut, en outre, se poser avec des
traitements différents suivant le référentiel utilisé, IFRS
ou CRC 99-02.
Au niveau des comptes individuels, les opérations de réévaluation libre (PCG art. 350-1) ont un impact négatif sur l’EBIT, le
résultat net et la rentabilité financière mesurée par le ROE (return
on equity (1)). Il en va différemment dans les comptes consolidés
en IFRS du modèle de réévaluation d’IAS 16 dans la mesure où
les agrégats du résultat consolidé ne sont pas affectés du fait de
la compensation des sur-amortissements par la reprise en résultat à due concurrence de l’écart de réévaluation. En tout état de
cause, dans les comptes individuels comme consolidés, ces opérations améliorent sensiblement le ratio d’autonomie financière
(gearing) sans détériorer la capacité de remboursement mesurée
par le ratio dettes financières nettes / CAF ou EBITDA. A cet
égard, elles sont de nature à mettre une PME en situation plus
favorable pour recourir à des financements bancaires en étant
plus en phase avec les exigences des établissements financiers
en matière, notamment, de covenants financiers.
Dans cet article, nous mettons l’accent sur quelques difficultés
et particularités techniques posées par ces opérations de réévaluation pour une société française consolidant ses comptes en
règles françaises ou internationales.
1.
ROE = résultat net comptable / capitaux propres.
Résumé de l’article
Dans le prolongement de l’article de B. Poulard paru dans
le numéro 411 de juin 2008 de la Revue française de comptabilité, nous nous intéressons ici aux difficultés techniques
des opérations de réévaluation des actifs dans les comptes
individuels et consolidés.
Tableau 1 : impact des réévaluations d’actif sur la présentation des états financiers
Incidence d’une réévaluation des actifs
Augmentation des fonds propres
Suppléments d’amortissement
R.F.C. 414 Octobre 2008
Comptes individuels (PCG art. 350-1)
et consolidés (CRC 99-02 § 302)
Comptes consolidés (IFRS)
- modèle de réévaluation d’IAS 16
Amélioration du gearing (dettes financières nettes / situation nette)
Possibilité d’incorporation en capital social
de l’écart de réévaluation en cas, par
exemple, de perte de la moitié du capital
Diminution progressive de l’écart de réévaluation inscrit en capitaux propres du fait sa
reprise au rythme des suppléments d’amortissement
Dégradation de l’EBIT et du résultat net
mais absence d’impact sur l’EBITDA
Pas d’impact sur les agrégats du compte de
résultat consolidé du fait de la reprise de
l’écart de réévaluation en fonction des suramortissements pratiqués
Comptabilité
1. RAPPEL DES PRINCIPALES DIFFÉRENCES
DE TRAITEMENT ENTRE COMPTES
INDIVIDUELS ET CONSOLIDÉS
Le tableau 2 reprend les principales divergences entre les règles
françaises et internationales, étant précisé que, dans les deux
référentiels, la réévaluation libre (PCG) et le modèle de la réévaluation des actifs (IAS 16) sont totalement optionnels puisque
relevant d’une décision de gestion de l’entreprise.
En règles françaises comme internationales, les amortissements
futurs sont calculés à partir des nouvelles valeurs issues de la
réévaluation des actifs amortissables avec application du plan
initial sauf modification significative et justifiée des conditions
d’utilisation mais avec les quelques divergences normatives existant, par ailleurs, en matière d’amortissement (6).
Pour une société soumise au double référentiel, les divergences
principales décrites dans le tableau 2 sont susceptibles de sensiblement complexifier le passage des comptes individuels français aux comptes consolidés en IFRS en présence de réévaluations (§ 3). En revanche, une société appliquant le règlement
CRC 99-02 au niveau de ses comptes consolidés aura la faculté,
2.
Voir aussi B. Poulard (2008), p. 38.
3. Dans le cadre du règlement CRC 99-02 (§ 302) dans les conditions fixées
par l’art. L 123-18 du code de commerce.
4.
Cf. IAS 38 pour les immobilisations incorporelles.
5. Il est distribuable uniquement dans des cas spécifiques visés par l’art. 350-1
al 4 du PCG se traduisant par un transfert dans un compte de réserves distribuables.
6. Exemple : révision annuelle obligatoire de la valeur résiduelle en IFRS, date
de début d’amortissement pouvant diverger en cas de différé dans la mise en
service effective, réexamen annuel obligatoire des plans d’amortissement en
IFRS, appréciation différenciée du caractère significatif pour l’application de l’approche par composant, etc. (cf. E. Tort, 2007).
Abstract
Following up on the article by B. Poulard published in Revue
Française de Comptabilité number 411, June 2008, the present
article concerns the technical difficulties involved when reassessing assets in individual and consolidated financial statements.
Tableau 2 : principales différences de traitement des réévaluations d’actifs entre les règles françaises et internationales (2)
Items
Réévaluation libre
prévue par le PCG (art. 350-1)
Modèle de la réévaluation
des actifs corporels d’IAS 16 (§ 30-40)
Comptes concernés en France
Comptes individuels et consolidés
en règles françaises
Actifs concernés
Immobilisations corporelles et financières
à l’exclusion des immobilisations
incorporelles, des stocks et des VMP
Immobilisations corporelles à l’exception
des immeubles de placement (IAS 40) (4)
Champ d’application
Réévaluation globale de l’ensemble des
immobilisations corporelles et financières
sans exceptions
Réévaluation catégorielle d’immobilisations
corporelles (et non pour un actif isolé).
Exemples de catégorie selon IAS 16 :
terrain, terrains et constructions, machines,
navires, avions, véhicules à moteur, mobilier
& agencements et matériel de bureau
Fréquence de réévaluation
Ponctuelle
Réévaluation avec une régularité suffisante
Méthode de réévaluation
Valeur actuelle correspondant à la valeur
d’utilité par référence au régime de
réévaluation légale, à savoir « le prix
qu’accepterait de décaisser un tiers pour
acquérir le bien compte tenu de son usage
propre » (cf. Delesalle, 2002)
Juste valeur selon une évaluation à dire
d’expert ou une estimation de celle-ci
(approche par le résultat ou coût de
remplacement amorti) en l’absence
de marché actif
Comptabilisation de l’écart de réévaluation
En capitaux propres net d’IS avec possibilité
d’incorporation ultérieure au capital (5)
En capitaux propres en tenant compte des
impôts différés et avec reprise ultérieure
en résultat au rythme des sur-amortissements
pratiqués pour les actifs amortissables
Présentation de la réévaluation
à l’actif du bilan
Réévaluation de la valeur brute sans
modification des amortissements
antérieurs à l’exception des amortissements
dérogatoires repris obligatoirement en résultat
Soit par un ajustement simultané et
proportionnel des valeurs brutes et des
amortissements cumulés, soit par
l’inscription du montant réévalué
en remplacement des anciennes valeurs
Perte de valeur ultérieure
Constatation en résultat sous forme de
provision ou d’amortissement exceptionnel
Diminution à due-concurrence de l’écart
de réévaluation et au-delà en charges
(3)
23
Comptes consolidés établis en IFRS
R.F.C. 414 Octobre 2008
Réflexion
dans certains cas, de gérer ce passage de manière plus homogène (§ 2). En tout état de cause, certaines problématiques fiscales sont à prendre en considération par les sociétés françaises
réalisant une réévaluation libre (§ 4).
24
■ Pour les autres entités, une réévaluation sera nécessaire
dans les comptes consolidés, conformément aux prescriptions
précitées du § 302 du CRC 99-02.
2. CAS DES SOCIÉTÉS NON COTÉES
APPLIQUANT LES RÈGLES FRANÇAISES
EN CONSOLIDATION
3. CAS DES SOCIÉTÉS FRANÇAISES
UTILISANT LE RÉFÉRENTIEL IFRS
POUR L’ÉTABLISSEMENT DE LEURS
COMPTES CONSOLIDÉS
Les sociétés non cotées n’ayant pas opté pour les IFRS dans leurs
comptes consolidés ont le choix en consolidation d’annuler les
réévaluations individuelles ou de les généraliser à l’ensemble des
entités du groupe. Ainsi, selon le § 302 du CRC 99-02, si une
entreprise consolidée a procédé à une réévaluation libre dans
ses comptes individuels (7), il y a lieu, soit de l’éliminer dans les
comptes consolidés, soit de pratiquer la réévaluation pour l’ensemble du groupe dans les conditions fixées par l’art. L 123-18
du code de commerce et selon des méthodes uniformes.
En dehors des cas particuliers concernant les premiers adoptants
et les immeubles de placement (cf. tableau 3), les sociétés cotées
(y compris les sociétés non cotées ayant opté pour les IFRS dans
leurs comptes consolidés) pratiquant la réévaluation libre dans
leurs comptes individuels pourront l’annuler totalement ou saisir
l’opportunité de réévaluer toutes les catégories d’actifs corporels
ou certaines d’entre-elles dans leurs comptes consolidés en IFRS
dans le cadre du modèle de la réévaluation catégorielle d’IAS 16.
Dans l’hypothèse d’une réévaluation de l'ensemble des entreprises consolidées, les dotations aux amortissements ainsi que
les plus ou moins-values de cession sont déterminées sur la base
des valeurs réévaluées et toutes informations utiles sont données
dans l'annexe sur la méthode de réévaluation, l'écart dégagé,
son incidence sur les écarts d'évaluation et d'acquisition ainsi
que sur les dotations aux amortissements et aux provisions relatives aux biens réévalués (CRC 99-02 § 302). Autrement dit :
■ A l’origine, en effet, certaines précautions sont à prendre
afin de s’assurer notamment :
■ Pour les entités françaises ayant déjà pratiqué la réévaluation libre dans leurs comptes individuels, il ne devrait
donc pas y avoir, en principe, de différences de traitement entre
les comptes sociaux et consolidés à l’exception des amortissements dérogatoires. En effet, après la réévaluation, il est possible
de constituer de nouveaux amortissements dérogatoires dans
les comptes sociaux qui devront être éliminés en consolidation
s’agissant de provisions à caractère fiscal.
■ S’agissant des entités étrangères ayant pratiqué une
réévaluation en fonction de la législation locale, des différences pourront apparaître en présence de méthodes non uniformes, pouvant entraîner des retraitements d’homogénéisation, par exemple, au niveau des amortissements.
Dans ce dernier cas, la réévaluation libre d’immobilisations corporelles mise en œuvre “en social” pourra être maintenue dans
les comptes consolidés , sous réserves des divergences suivantes
avec les dispositions d’IAS 16 (8).
• de la cohérence entre la méthode utilisée pour déterminer la
valeur d’utilité en matière de réévaluation libre et la définition
assez restrictive de la juste valeur d’IAS 16 comprenant généralement la valeur de marché pour les terrains et constructions et
le coût de remplacement net d’amortissement (CRNA) pour les
outils de production (9). En effet, suivant les actifs concernés, les
7. Y compris pour une filiale étrangère qui aurait procédé à une telle réévaluation autorisée par la législation locale dans son pays.
8. En l’absence de réévaluation libre “en social”, les actifs des autres sociétés
consolidées appartenant à la catégorie concernée devront faire l’objet d’une
réévaluation selon IAS 16 (cf. exemple en fin d’article).
9. Cf. par exemple, sur ces divergences de réévaluations, IFRS 2005, éd. F.
Lefebvre, § 6325.
Tableau 3 : les cas particuliers de réévaluations d’actifs non financiers prévus par les normes IFRS
Items
Lors de la 1er application des IFRS :
norme IFRS 1
Immeubles de placement :
norme IAS 40
Régime optionnel
Exemption facultative ponctuelle réservée
à la transition aux IFRS
(First time application – FTA)
Choix en régime de croisière entre le modèle
de la juste valeur (encouragé) et celui du
coût d’IAS 16
Modalités d’option
Application de la juste valeur immobilisation
par immobilisation uniquement lors de la
transition
Application à tous les immeubles de placement
d’une évaluation à la juste valeur actualisée
chaque année
Réévaluation à la juste valeur
Coût présumé correspondant à la date de
transition soit à la juste valeur, soit à une
réévaluation (y.c. antérieure) globalement
cohérente avec la juste valeur
Juste valeur résultant d’une évaluation faite
par un évaluateur indépendant
Comptabilisation de la réévaluation
Inscription en capitaux propres dans
le bilan d’ouverture (net d’impôt)
Enregistrement des variations annuelles
de juste valeur dans le résultat
R.F.C. 414 Octobre 2008
Comptabilité
experts immobiliers sont susceptibles d’utiliser différentes
méthodologies telles que la valeur vénale, une estimation de la
valeur d’utilité sur la base de la méthode DCF, etc. ;
• de la compatibilité de la méthode de décomposition mise en
œuvre des ensembles immobiliers entre la part du foncier et la
part de la construction avec les orientations données par la
CNCC dans sa note du 10 janvier 2006 (10). Cette décomposition
n’est pas neutre sur le niveau des suppléments d’amortissements futurs calculés (hors foncier) ;
• de la comptabilisation de l’écart de réévaluation net d’impôt
dans les capitaux propres individuels. En l’absence d’une telle
imputation comptable de l’IS “en social”, un ajustement sera
nécessaire dans les comptes consolidés à hauteur de l’impôt sur
la plus-value effectivement dû ou payé ;
• de la correcte présentation au bilan des actifs réévalués en fonction des “normes” de présentation retenues en IFRS avec, contrairement aux règles françaises, correction dans tous les cas des
amortissements antérieurs pour obtenir soit des valeurs nettes
réévaluées, soit des valeurs réévaluées décomposées en valeurs
brutes et amortissements cumulés (cf. exemple p. suivante).
En tout état de cause, l’existence de biens pris en location-financement constituera une source de distorsion entre comptes individuels et consolidés dans la mesure où ceux-ci devront être
réévalués au même titre que les biens détenus en propre. Bien
que les normes IFRS ne répondent pas spécifiquement à cette
question précise, notre analyse des normes IAS 16 et 17 confortée par celle de confrères conduit, en effet, à procéder à la
réévaluation de l’ensemble des actifs appartenant à la catégorie
concernée indépendamment de leur mode de financement
dont les locations financières constituent un cas particulier.
■ En régime de croisière, les différences existant entre les référentiels français et international (cf. tableau 2) nécessiteront des
écritures d’ajustement en consolidation. On peut citer ici d’une
part, la nécessité de constater en IFRS, en fin de période, la
reprise annuelle en résultat de l’écart de réévaluation au rythme
des sur-amortissements pratiqués et d’autre part, les conséquences de la mise en œuvre régulière de réévaluations en IFRS
susceptibles d’engendrer des corrections de valeur telles que,
par exemple :
• la constatation d‘une réévaluation complémentaire unique-
10. S’agissant de la part du foncier dans un ensemble immobilier, la CNCC fait
une distinction selon la localisation et la demande. Ainsi : dans les zones où le
foncier est rare et la demande forte, le prix du foncier pourra être estimé par différence entre le prix de marché de l’ensemble immobilier et le coût complet de
la construction ; dans les autres zones, le prix de l’ensemble immobilier est, en
général, fixé en cumulant le coût de la construction et celui du terrain (CNCC,
note du 10 janvier 2006).
11. Voir aussi E. Tort (2008).
12. En matière de TP, cf. par exemple, Mémento fiscal F. Lefebvre, § 3877 et
3878.
13. Le bénéfice fiscal utilisé pour l’imputation des déficits antérieurs à l’entrée
dans le groupe fiscal (2058 FC) est diminué du montant de la réévaluation libre
selon le mécanisme du plafonnement visé à l’art. 223 I.4 du CGI.
14. Egalement applicable aux titres de sociétés à prépondérance immobilière.
15. Voir, par exemple, Mémento fiscal, F. Lefebvre, § 1755.
ment dans les comptes consolidés avec la correction subséquente sur les amortissements futurs ;
• la constatation d’une diminution de valeur de l’actif imputable
prioritairement à l’écart de réévaluation résiduel en IFRS alors
que cette diminution transitera obligatoirement par le résultat
dans les comptes individuels sous forme de provision ou
d’amortissement exceptionnel.
4. PROBLÉMATIQUES FISCALES
D’UNE RÉÉVALUATION LIBRE AU REGARD
DE L’IMPÔT SUR LES SOCIÉTÉS (11)
Par application de l’art. 38-2 du CGI, la plus-value constatée
dans les comptes individuels, lors de la réévaluation libre, est
imposable à l’IS au taux de droit commun avec la possibilité
d’imputer sur celle-ci les éventuels déficits antérieurs. En phase
avec les règles comptables du PCG, la nouvelle valeur comptable sert de base de calcul pour la détermination des dotations futures aux amortissements et des plus ou moins-values
réalisées en cas de cession ultérieure. Toutefois, le traitement
fiscal d’une réévaluation libre au regard de l’IS présente certaines particularités (12) :
■ Spécificité déclarative : la réévaluation ne transitant pas
comptablement par le compte de résultat (inscription directe en
capitaux propres), le montant correspondant devra ainsi faire
l’objet d’une réintégration extracomptable dans le tableau
2058-A de la liasse fiscale de l’exercice.
25
■ En régime d’intégration fiscale, des limitations existent
conduisant à neutraliser les possibilités d’une accélération de
l’apurement des déficits par une réévaluation réalisée avant ou
pendant l’appartenance au groupe fiscal. En effet, il n’est pas
possible pour une société intégrée d’imputer ses propres déficits
reportables (antérieurs à l’intégration) sur la plus-value de réévaluation dégagée au cours d’un exercice intégré (13). Par ailleurs,
en cas de réévaluation antérieure à l’entrée dans le groupe fiscal, la quote-part de déficits correspondant aux suppléments
d’amortissement liés à la réévaluation des immobilisations par
une société membre doit être rapportée au résultat d’ensemble
(art. 223 I.1 du CGI).
■ S’agissant des immeubles réévalués (14) entre le 1er janvier
2004 et le 31 décembre 2009, soulignons ici que ceux-ci sont
susceptibles de bénéficier d’un taux réduit à 16,5 % hors éventuelle contribution sociale sous réserve d’un engagement de
conservation de 5 années à compter de la date de clôture de
l’exercice de réévaluation (art. 238 bis JA du CGI).
■ Existence de moins-value individuelle (15) : fiscalement, la
réévaluation ne peut pas conduire à la constatation d’une
moins-value sur un actif isolé autrement que sous forme de provision ou d’amortissement exceptionnel. Aussi convient-il dans
cette hypothèse de pratiquer une dotation exceptionnelle dans
les comptes individuels afin de ramener la VNC à la valeur réévaluée.
■ Amortissements dérogatoires : les amortissements dérogatoires antérieurs doivent faire l’objet d’une reprise totale en
résultat sans que cela fasse obstacle, pour autant, à la mise en
place de nouveaux amortissements dérogatoires post-réévaluation.
R.F.C. 414 Octobre 2008
Réflexion
Exemple de réévaluation catégorielle
d’une immobilisation corporelle
selon IAS 16
Au 1er janvier N, l’entreprise EVYTTE a acquis une machine d’une
valeur de 500 K€ qu’elle amortit sur 5 ans en mode linéaire. Trois
années plus tard, fin N+2, la valeur de la machine est évaluée à
400 K€ du fait de nouvelles conditions de marché (coût de remplacement).
Appliquant la méthode de la réévaluation prévue par la norme IAS
16 pour cette catégorie d’actif, la société EVYTTE met ainsi en
œuvre cette réévaluation fin N+2.
A fin N+3, la machine est frappée d’obsolescence technique en raison de la mise sur le marché de nouvelles machines ayant une performance et une longévité deux fois supérieures à celles des modèles
antérieurs. A fin N+3, la valeur de la machine est estimée à 80 K€.
Dans cet exemple, nous allons :
• Déterminer les amortissements et les valeurs nettes comptables
(VNC) de la machine à fin N et N+1.
• Mettre en œuvre la réévaluation catégorielle de la machine à fin
N+2.
• Constater la perte de valeur de la machine à fin N+3.
Valeur
brute
Dotation
annuelle
Amortissement
cumulé
A fin N+3 (en K€)
Débit
Crédit
Constatation de la dotation aux amortissements
Dotation aux amortissements (charges)
200,0
Ecart de réévaluation (capitaux propres)
100,0
Amortissement
200,0
Reprise d’écart de réévaluation (produits)
100,0
Après ces écritures d’inventaire, la VNC de l’actif ressort à 200 K€,
à savoir 1 000 K€ (valeur brute réestimée) - 800 K€ (amortissements cumulés).
A fin N+3, la valeur de la machine est révisée à la baisse à 80 K€
suite à une obsolescence technique. D’où la constatation d’une
perte de valeur de 120 K€ par imputation sur l’écart de réévaluation à hauteur de 100 K€ et pour le solde de 20 K€ en charge de
l’exercice.
Débit
Les amortissements et les valeurs nettes comptables (VNC) à fin N
et N+1 s’établissent comme suit :
Année
Lors de l’exercice N+3 (et N+4), le complément de dotation aux
amortissements lié à la réévaluation de la valeur brute (500 K€ / 5
ans = 100 K€) sera compensé par la reprise concomitante et à due
concurrence de l’écart de réévaluation (100 K€ sur N+3 et N+4,
soit un total de 200 K€).
A fin N+3 (en K€)
1. La détermination des amortissements et des VNC
à fin N et N+1
26
3. La constatation de la perte de valeur à fin N+3
VNC
A fin N
500
100 (*)
100
400
A fin N+1
500
100
200
300
(*) 500 K? (base amortissable) / 5 ans (durée d’amortissement) = 100 K?
Selon la méthode de la réévaluation catégorielle de la norme IAS
16, il y a lieu de procéder à une réévaluation avec une régularité
suffisante de manière à tenir compte des variations de valeur.
Après quelques mois d’utilisation, aucun élément ne justifie le
déclenchement d’une réévaluation à fin N et N+1.
Crédit
Constatation de la perte de valeur
Perte de valeur (charges)
20,0
Ecart de réévaluation (capitaux propres)
100,0
Amortissement de la machine
800,0
Machine
920,0
N.B : en termes de présentation, il est fait le choix ici d’annuler la totalité des
amortissements cumulés. Ainsi, seule la valeur brute ramenée à 80 K?
subsiste dans les états financiers.
Source : extrait partiel d’E. Tort, Exercices sur les normes comptables
internationales (IAS/IFRS) avec corrigés, Gualino Editeur, collection
Zoom’s, 2006, 131 p.
Eric TORT
2. La mise en œuvre de la réévaluation catégorielle à fin N+2
A fin N+2, la valeur de machine est estimée à 400 K€ alors que la
VNC s’établit à 200 K€ (VNC à fin N+1 de 300 K€ minorée de la
dotation N+2 de 100 K€).
La mise en œuvre de la réévaluation catégorielle conduit ainsi à
réestimer de + 100 % la valeur comptable en augmentant proportionnellement la valeur brute (500 K€ x 2) et les amortissements cumulés (300 K€ x2).
A fin N+2 (en K€)
Débit
Réévaluation catégorielle de la machine
Machine
Crédit
E. Delesalle, “La réévaluation libre des immobilisations”, Revue française de comptabilité, n° 347, septembre 2002, pp. 5-6.
B. Poulard, “La réévaluation des actifs à la juste valeur : quel(s)
enjeu(x) pour les sociétés françaises”, Revue française de comptabilité, n° 411, juin 2008, pp. 36-40.
H. Tondeur, “La réévaluation libre des bilans : présentation et comparaison avec la pratique internationale”, Revue française de
Comptabilité, n° 352, février 2003, pp. 31-36.
E. Tort, “La réévaluation libre des actifs en règles françaises”, Option
finance n° 985 du 16 juin 2008, p. 34.
500,0
Amortissement de la machine
300,0
Ecart de réévaluation (capitaux propres)
200,0
NB : en supposant un enregistrement comptable décomposé en valeur brute
et amortissement de la machine.
R.F.C. 414 Octobre 2008
Bibliographie
E. Tort, La comptabilisation des actifs, Numilog, collection e-thèque,
(www.numilog.com), 2007, 188 p.
E. Tort, “Les adaptations fiscales suite à l’application des règles comptables françaises sur les actifs”, Echanges, n° 241, mars 2007, pp. 73-74.
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