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3.1. Résultats généraux
La figure 1 montre que les arbres bios sont désignés en fonction de l’espèce dominante
des parcelles inventoriées. Ceci illustre l’expressiondes marteleurs: «on désigne en AB
ce que l’on trouve». Les feuillus (en clair) offrent plus de structures de micro-habitats
que les résineux (en foncé). Ces derniers sont souvent des arbres secs.
Les AB de gros diamètre (supérieur à 60 cm) sont les plus intéressants pour la biodi-
versité (LAROUSSINIE & GOSSELIN, 2004; BUTLER SAUVAIN & LACHAT,
2007). Les scientifiques suisses recommandent des arbres de plus de 60 cm de diamètre
comme arbre habitat sur la région du Plateau (LACHAT & BÜTLER SAUVAIN,
2008). On voit que plus d’un tiers des tiges ne correspondent pas à cet objectif (Figure
2). Cependant, il s’agit par exemple de petits chênes secs qui seraient probablement
exploités sans la marque (généralement un triangle), d’où l’utilité de les désigner pour
conserver du bois mort. La conservation de bois mort est en effet un enjeu important
en forêt gérée (VALLAURI et al., 2003).
Les chandelles mortes sont intéressantes pour la biodiversité mais ont une durée de
présence plus faible qu’un arbre vivant. D’où l’importance de compléter les popula-
tions d’AB à chaque martelage. Parmi les arbres vivants, environ 12 % sont des arbres
à cavités, 40 % ont des problèmes sanitaires et 45 % sont des arbres d’intérêt culturel
ou paysager (Figure 3).
Il est à noter que le marquage à la peinture est dominant, et ce phénomène s’accentue.
La visibilité des marques à long terme sur une écorce vivante fine (hêtre, érable) est
moins bonne avec de la peinture qu’avec un coup de griffe.
3.2 Cubage et estimation de la valeur marchande des arbres bios
Un cubage du volume total (grume + houppier) de bois contenu dans les AB
a été réalisé. Un tarif de cubage SCHAEFFER rapide numéro 13 a été conseillé par les
responsables des UT ONF des zones d’étude.
V = (N + 8)/1,4*(D – 0,1)*(D – 0,05)
D = diamètre à 1,30 m (en centi-
mètres)
N = numéro du tarif
V = volume total de l’arbre, houppier
compris (en mètres cubes)
Équation 1: Tarif SCHAEFFER rapide.
71 % des AB sont de qualité bois de feu ou d’industrie. 25 % possèdent une grume
de qualité bois d’œuvre courante (de type C ou D) et 4 % de qualité bois d’œuvre
élevée (de type A ou B). La valeur marchande moyenne actuelle d’un AB est infé-
rieure à 200 Euros. D’après les hypothèses de calcul économique considérant que
la concurrence exercée par les AB sur leurs voisins est négligeable (la majorité sont
morts, dépérissants ou dominés) et qu’ils ne capitaliseront pas en valeur (à cause
d’un risque élevé de dépréciation du bois), le manque à gagner lié à la mesure AB
est donc inférieur à 200 Euros par arbre désigné. La méthode de calcul du coût de
conservation d’arbres morts sur pied utilisée fait appel à différents paramètres (PEY-
RON, 2005).
4. Enquête sociale
L’enquête intervient comme complément pour l’interprétation des résultats précé-
dents. Le contexte humain joue en effet un rôle important dans l’application de la
mesure AB. La méthode a été élaborée avec l’aide de P. DEUFFIC (CEMAGREF
Bordeaux). Une enquête qualitative, individuelle avec entretien semi-dirigé a été
retenue. Trois groupes d’acteurs sociaux concernés par la mesure AB ont été ren-
contrés.
4.1. Groupe des élus de communes propriétaires de parcelles dans les sites Na-
tura 2000 (Saverne, Hattmatt, Dettwiller, Ernolsheim-lès-Saverne, Steinbourg)
La mesure AB n’est connue en détail par aucun des sondés mais le principe est
accepté. Pour les élus, les AB rentrent dans le cadre d’une gestion «durable» et
«patrimoniale». Les objectifs de sécurisation des sentiers sont cependant rappelés.
4.2. Groupe des chargés de mission du SYCOPARC travaillant sur la mesure AB
(Jean-Claude Génot, Loïc Duchamp, Sébastien Morelle)
La mesure AB est plébiscitée pour ses effets positifs sur l’état de conservation écolo-
gique des parcelles gérées. Les consignes d’application souhaitées sont celles des Di-
rectives régionales d’aménagement et des Schémas régionaux d’aménagement (DRA
– SRA) version 2008 de la région Alsace.
4.3. Groupe des marteleurs de l’ONF (12 agents interrogés)
La mesure AB est devenue une habitude de martelage, cependant le marquage systé-
matique des AB est jugé contraignant. L’utilité du suivi n’est pas reconnue par tous
les agents qui estiment que des arbres intéressants pour la biodiversité sont présents
dans les parcelles sans être nécessairement marqués. L’éventualité de confier le travail
de désignation des AB à des naturalistes externes à l’ONF est rejetée par cinq sondés.
Un encadrement de ces activités par convention avec un échelon de la hiérarchie
ONF est évoqué dans le cas contraire.