Discours 1er mai 2014
Maria Bernasconi, conseillère nationale, secrétaire générale de l’APC
Discours du 1er mai 2014 à Fribourg
« Ainsi, chaque année, chez les prolétaires, des milliers d’existences s’écartent des conditions
de vie normale de la classe ouvrière pour tomber dans la nuit de la misère
Ces mots de Rosa Luxemburg sont encore parfaitement d’actualité. En ce 1er mai, jour de la
fête du travail, j’exprime ma solidarité avec toutes les personnes qui travaillent à plein-temps
sans pouvoir nouer les deux bouts. Et ma révolte contre l’injuste répartition des richesses dans
notre pays. Car oui, la Suisse est un pays riche. Savez-vous par exemple que la productivité du
travail a augmenté de 6% durant la dernière décennie ? Qui en a profité ? Surtout les hauts
salaires. Les bas et moyens salaires n’y ont vu « que dalle ».
Pourtant les personnes payées moins de 22 francs de l’heure sont nombreuses. Surtout dans les
services à la personne, où l’on trouve beaucoup de femmes et où les conventions collectives
de travail sont quasi inexistantes.
Plus souvent que les hommes les femmes concernées par les bas salaires. Prenons l’exemple
d’une esthéticienne: malgré un CFC, elle touche 3000 misérables francs par mois, soit 16,50
francs de l’heure. À peine de quoi se nourrir et payer un loyer, l’assurance maladie et les
factures courantes. Les vacances, elle oublie… et bonjour l’angoisse qu’une facture
inattendue vienne bouleverser son précaire équilibre financier. C’est ça l’insécurité qui touche
aujourd’hui une grande partie des femmes salariées ! Bien davantage qu’un éventuel agresseur
embusqué derrière un arbre.
16 % des femmes touchent moins de 4’000 francs pour un plein-temps, contre 6%
d’hommes. Dans le commerce de détail à travail égal, les femmes gagnent 630 francs de moins
par mois. Inscrite depuis plus de 30 ans dans notre Constitution, l’égalité peine à se réaliser.
Pour agir contre cette discrimination salariale, les salaires minimums sont la mesure la plus
efficace.
La stratégie des opposants au salaire minimum ? Crier au loup: 4000 francs par mois, ce serait
beaucoup trop et menacerait l’économie. Totalement injustifié, cet alarmisme n’est pas
nouveau ! Crier à la faillite de notre système économique a été la stratégie utilisée contre
chaque avancée sociale : contre la diminution des heures de travail, contre l’abolition du
travail des enfants, contre la création de l’assurance maternité. Dan s le s faits, l’e xa ct
con traire s’est produit : ces progrès sociaux ont largement contribué au succès de la Suisse.
Parmi les personnes qui profiteraient du salaire minimum légal, beaucoup le refuseraient
aujourd’hui, par crainte de perdre leur emploi et de voir l’économie suisse sombrer. Pourtant,
c’est faux ! Rappelez-vous : à la fin des années 90, les syndicats ont revendiqué «pas de salaire
en dessous de 3000 francs ». La réponse des représentants de l’économie et des employeurs
a été la même qu’aujourd’hui : le chômage va augmenter ! 15 ans plus tard, non seule ment
les salaires inférieurs à 3000 francs ont quasiment disparu, mais les emplois en Suisse sont
aussi plus nombreux… Cherchez l’erreur ! Plusieurs études démontrent que la hausse des
salaires minimums ne crée pas de chômage. Bien au contraire : elle permet de stimuler
l’économie intérieure, en améliorant le pouvoir d’achat des classes inférieures.