Anatomie et pathologie de la tunique fibreuse de l`œil

Introduction
L’ophtalmologie du Lapin (Oryctolagus cuniculus), outre
sa place importante en physiologie et pathologie comparées,
prend depuis peu une importance croissante dans le cadre de
la consultation des Lapins de compagnie. Chez ces derniers,
les affections de la tunique fibreuse du bulbe (Tunica fibrosa
bulbi) sont, après les atteintes des organes oculaires acces-
soires (Organa oculi accessoria), les affections les plus fré-
quentes et en tous cas les mieux décelées par le propriétaire.
Elles constituent donc tout naturellement un motif de consul-
tation de plus en plus courant.
La tunique fibreuse du bulbe est constituée d’une partie
postérieure opaque, la sclère (Sclera), anciennement "scléro-
tique", et d’une partie antérieure transparente, la cornée
(Cornea), qui se raccordent à hauteur du limbe cornéen
(Limbus corneae). Chez le Lapin, la cornée représente 25 %
de la surface totale du bulbe oculaire contre 7 % seulement
chez l'Homme [20] ; elle est le siège de nombreuses atteintes,
traumatiques en particulier. Ce sont les affections cornéennes
qui dominent très largement la pathologie de la tunique
fibreuse du Lapin.
L’objet de cette revue est de présenter, dans cette espèce,
l’anatomie de la tunique fibreuse du bulbe pour aborder
SYNTHÈSE SCIENTIFIQUE
Anatomie et pathologie de la tunique fibreuse
de l’œil du Lapin domestique
°P. BARTHELEMY et °° L. MONNEREAU*
°Clinique Vétérinaire R. Deschamps et S. Vaqué, 22, avenue de Verdun, F-40130 Capbreton
°° Unité Pédagogique d’Anatomie-Embryologie, École Nationale Vétérinaire de Toulouse, 23, chemin des Capelles, F-31076 Toulouse Cedex 3
* Auteur assurant la correspondance
RÉSUMÉ
La consultation d’ophtalmologie d’un Lapin domestique ne relève plus
de la simple anecdote. Dans cette espèce, les principales affections du bulbe
de l’œil auxquelles le vétérinaire est confronté concernent surtout la tunique
fibreuse, et tout particulièrement la cornée. L’étude des caractéristiques ana-
tomiques et histologiques de la tunique fibreuse de l’œil du Lapin constitue
la première partie de cette revue. Celle-ci est ensuite consacrée à la patho-
logie. Ainsi, après avoir rappelé les principales malformations congénitales
de la tunique fibreuse rencontrées chez le Lapin, les auteurs se proposent de
faire le point sur les affections acquises de la cornée décrites dans cette
espèce. Sont successivement abordées les kératites ulcéreuses, infectieuses,
mycosiques et secondaires, ainsi que les dystrophies et dégénérescences
cornéennes. Dans la mesure du possible, l’étiopathogénie, l’approche dia-
gnostique et enfin le pronostic et le traitement font l’objet d’une brève syn-
thèse.
MOTS-CLÉS : sclère - cornée - Lapin - anatomie - kéra-
tites - dystrophies cornéennes - dégénérescences cor-
néennes - revue.
SUMMARY
Anatomy and pathology of the fibrous coat of the eyeball of the rabbit.
By P. BARTHELEMY and L. MONNEREAU.
Ophthalmology examination of a domestic rabbit isn't just a routine task
anymore. In this species, the main diseases of the eyeball met by veterina-
rians mainly affect the fibrous coat, especially the cornea. The first part of
this review will study the anatomic and histology characteristics of the
fibrous coat in the rabbit eye. Then, pathology will be considered.
Therefore, after recalling the main congenital malformations of the fibrous
coat of the rabbit eyeball, the authors will take stock of the diseases of the
cornea for this species : successively ulcerative keratitis, infectious kerati-
tis, keratomycosis, secondary keratitis, corneal dystrophys and degenera-
tions. As far as possible, a brief synthesis will be made on aetiopathogeny
and diagnosis as well as on prognosis and therapy.
KEY-WORDS : sclera - cornea - rabbit - anatomy - kerati-
tis - corneal dystrophies - corneal degenerations -
review.
Revue Méd. Vét., 2001, 152, 1, 5-28
ensuite l’étude de la cornée pathologique. Les termes anato-
miques et histologiques retenus dans cette synthèse ont été
empruntés, dans la mesure du possible, à la nomenclature
officielle [56, 101].
1. Anatomie de la tunique fibreuse
A) SCLÈRE
La sclère du Lapin présente au plan anatomique très peu de
particularités spécifiques ; en outre, elle n’est, à notre
connaissance, le siège d’aucune pathologie propre. Aussi
nous contenterons-nous de rappeler brièvement son organisa-
tion.
a) Caractères généraux [3, 70, 91, 94, 96, 98, 100]
La sclère du Lapin a une épaisseur variable : elle avoi-
sine 0,5 mm à hauteur du limbe cornéen, 0,25 mm dans la
région de l’équateur supérieur, 0,2 mm dans celle de
l’équateur inférieur, et 0,18 mm au niveau du pôle posté-
rieur [91].
Sa couleur dépend de son épaisseur et de sa pigmenta-
tion ; cette dernière étant liée à la pigmentation générale de
l’individu, elle est par exemple de couleur blanche chez le
Lapin blanc et chez le Lapin albinos.
La sclère est percée de nombreux petits orifices livrant
passage aux vaisseaux et aux nerfs qui gagnent ou quittent le
bulbe de l’œil. En particulier, les fibres du nerf optique tra-
versent sa paroi postérieure très amincie dans une région par-
ticulière : l’aire criblée de la sclère (Area cribrosa sclerae),
anciennement "lame criblée de la sclère".
b) Structure [70, 91, 100, 103, 107, 123-124]
La sclère est constituée, de l’extérieur vers l’intérieur,
des trois éléments suivants : la lame épisclérale (Lamina
episcleralis), la substance propre de la sclère (Substantia pro-
pria sclerae) et la lamina fusca de la sclère (Lamina fusca
sclerae).
• La lame épisclérale est séparée de la gaine du bulbe
(Vagina bulbi), anciennement "capsule de Tenon", par l’es-
pace episcléral (Spatium episclerale), sauf à certains endroits
où elle fusionne avec cette gaine. Constituée de tissu
conjonctif lâche, très richement vascularisée, elle représente
une structure nourricière pour la sclère, par ailleurs pratique-
ment avasculaire.
• La substance propre de la sclère, communément appelée
"stroma", contient tous les éléments rencontrés dans le tissu
conjonctif, en particulier des protéoglycanes et des fibrilles
de collagène. A hauteur de l’anneau scléral (Anulus sclerae),
ces dernières sont intimement mêlées à celles des tendons des
muscles oculomoteurs, assurant à ceux-ci un ancrage solide.
• La lamina fusca de la sclère, d’organisation à peu près
comparable à celle de la substance propre, est la structure
sclérale la plus interne, en continuité avec la lame supra-
choroïdienne (Lamina suprachoroidea) de la choroïde
(Choroidea). C’est l’homologue de l’arachnoïde (Arach-
noidea).
Bien qu’elle soit le lieu d’entrée et de sortie des vais-
seaux du bulbe de l’œil, la sclère est très faiblement vascula-
risée, sauf dans la lame épisclérale. Celle-ci est en effet per-
fusée par les artères épisclérales (Aa. episclerales) et contient
de nombreuses anastomoses artério-veineuses [103]. La
sclère se nourrit essentiellement par imbibition à partir de la
choroïde sous-jacente. Son innervation est assurée par les
nerfs ciliaires (Nn. ciliares) qui donnent en particulier de
riches plexus nerveux autour des anastomoses artério-vei-
neuses épisclérales.
B) CORNÉE
a) Conformation [3, 28, 70, 91, 94, 96, 98, 100]
La cornée est enchâssée dans la sclère à la manière d’un
verre de montre, à hauteur d’une zone de transition, le limbe
cornéen (Limbus corneae), anciennement "limbe scléro-cor-
néen". Chez le Lapin, elle est saillante et relativement large.
Elle ne présente quasiment pas de différence de courbure
avec la sclère, et le sillon scléral (Sulcus sclerae), ancienne-
ment "sillon cornéo-scléral", est de ce fait très peu marqué
[91].
Sa face antérieure (Facies anterior), convexe, est humi-
difiée en permanence par le film lacrymal précornéen. Elle a
une forme elliptique marquée avec un diamètre horizontal
moyen de 15 mm et un diamètre vertical compris entre 13,5
et 14 mm [28, 91]. Sa surface est donc proche de 2 cm2, soit
25 % de la surface oculaire totale [20, 47]. Sa face posté-
rieure (Facies posterior), concave, est au contact de l’humeur
aqueuse (Humor aquosus) contenue dans la chambre anté-
rieure du bulbe (Camera anterior bulbi). Elle est presque cir-
culaire car la cornée s’engage plus profondément dans la
sclère par cette face.
Le rayon de courbure cornéen varie de 7 à 7,5 mm [47].
L’épaisseur de la cornée, quasi constante quelle que soit la
région, est en moyenne de 0,4 mm [28, 91]. Elle peut néan-
moins être parfois légèrement plus faible 0,37 mm au niveau
du sommet ou vertex (Vertex corneae) par rapport au limbe
0,45 mm [91]. L’épaisseur augmente durant les périodes où
les paupières sont closes, suite à une hydratation importante
de la cornée ; cette variation d’épaisseur diurne est de l’ordre
de 3 % contre 8 % chez le Chat.
b) Structure histologique [26, 28, 47, 59, 70, 78, 83, 89,
91, 96, 98, 100]
Une coupe histologique de la cornée du Lapin montre
(Cf. Photographie A), d’avant en arrière, les éléments sui-
vants : l’épithélium antérieur de la cornée (Epithelium ante-
rius corneae) avec à sa surface le film lacrymal précornéen,
la lame limitante antérieure (Lamina limitans anterior), la
substance propre de la cornée (Substantia propria cornea), la
lame limitante postérieure (Lamina limitans posterior), et
l’épithélium postérieur de la cornée (Epithelium posterius
corneae).
Le film lacrymal précornéen est composé de trois
phases : une phase profonde muqueuse, une phase intermé-
diaire aqueuse et une phase superficielle lipidique. Il parti-
cipe à la protection, à la nutrition et au maintien de la trans-
Revue Méd. Vét., 2001, 152, 1, 5-28
6BARTHELEMY (P.) ET MONNEREAU (L.)
parence de la cornée. Maintenu en place par les microvillosi-
tés et microplis des cellules superficielles de l’épithélium
antérieur, il est indispensable à cet épithélium dont il est phy-
siologiquement indissociable.
L’épithélium antérieur de la cornée (Cf. Photographies
A et B), pavimenteux, stratifié, non kératinisé, est mis en
continuité avec l’épithélium de la tunique conjonctive bul-
baire (Tunica conjunctiva bulbi) par une zone de jonction,
l’anneau conjonctival (Anulus conjunctivae). D’une épais-
seur de 30 à 40 µm [91], cet épithélium est constitué de cinq à
sept couches cellulaires réparties en trois assises parallèles :
— une assise basale, constituée d’une couche monostrati-
fiée de cellules cylindriques hautes, parfois qualifiées de
"columineuses", reposant sur une fine membrane basale ; ces
cellules assurent par mitose le renouvellement de l’épithé-
lium et sont donc indispensables à son intégrité ;
— une assise intermédiaire de deux à trois couches de cel-
lules polygonales communément appelées "cellules à aile de
Ranvier" ("wing cells") ;
— une assise superficielle de deux à trois couches de cel-
lules pavimenteuses, d’autant plus aplaties qu’elles devien-
nent plus superficielles [26], et dont la surface, hérissée de
microvillosités et de microplis, retient le film lacrymal pré-
cornéen.
La lame limitante antérieure (Cf. Photographies A et B),
anciennement "membrane de Bowman", est une couche acel-
lulaire, appliquée sans délimitation nette à la face interne de
la membrane basale de l’épithélium antérieur. Elle ne
dépasse quasiment jamais 2 µm d’épaisseur contre 8 à 14 µm
chez l’Homme [91], ce qui explique que son existence chez
le Lapin a été discutée par le passé.
La substance propre de la cornée (Cf. Photographies A,
B et C), anciennement "stroma cornéen", ne mesure jamais
moins de 240 µm d’épaisseur [89, 91] ; elle représente envi-
ron les 9/10ede l’épaisseur totale de la cornée. C’est un tissu
conjonctif dont la proportion des constituants et leur agence-
ment original assurent la transparence de l’ensemble : on y
trouve des fibrilles de collagène parallèles organisées en
rubans et des kératocytes (fibroblastes de la cornée), agencés
de façon très ordonnée dans une substance fondamentale
faite de glycosaminoglycanes acides, de protéoglycanes et de
glycoprotéines de structure. Les kératocytes se distribuent
selon un gradient de densité décroissant dans le sens antéro-
postérieur [89]. Ces cellules produisent de façon préféren-
tielle des protéines enzymatiques hydrosolubles, comme la
transkétolase et l’aldéhyde déhydrogénase 1, qui semblent
contribuer à la transparence cornéenne [58].
La lame limitante postérieure (Cf. Photographies A et
C), anciennement "membrane de Descemet", est assez nette-
ment séparée de la substance propre [78]. C’est une couche
hyaline élastique, dont l’épaisseur moyenne de 7 à 8 µm [91]
augmente avec l’âge et dans certains processus pathologiques
(comme l’ulcération profonde de la substance propre de la
cornée). Elle représente la membrane basale de l’épithélium
postérieur de la cornée. Très résistante, c’est souvent la seule
structure cornéenne à subsister en cas d’ulcère non perforant ;
elle représente en tout cas la dernière barrière mécanique de
la cornée avant la rupture de la chambre antérieure.
L’épithélium postérieur de la cornée (Cf. Photographies
A et C), anciennement "endothélium de la chambre anté-
rieure", est un épithélium simple, pavimenteux, fait de cel-
lules pentagonales ou hexagonales régulièrement et étroite-
ment arrangées [83]. Chez le Lapin, sa densité cellulaire évo-
lue physiologiquement entre 1.800 et 3.500 cellules/mm2
[28, 83] ; elle diminue de façon significative chez les sujets
âgés de plus de un an [28, 83] (notons que l’épithélium
conserve son intégrité et ses fonctions avec seulement 300
cellules/mm2). L’épithélium postérieur de la cornée est en
continuité avec celui qui revêt la face antérieure de l’iris ; il
se trouve au contact direct de l’humeur aqueuse. Son intégrité
est indispensable au maintien de la transparence cornéenne,
car il régule de façon active et encore plus importante que
l’épithélium antérieur le degré d’hydratation de la substance
propre de la cornée [48, 96]. Toute altération de sa structure
peut entraîner un œdème de la cornée. Chez le Lapin, l’épi-
thélium postérieur de la cornée possède en outre une certaine
capacité de régénération (Cf. § 3.E.a.).
c) Vasculo-innervation [75-76, 78, 91, 96, 100, 121]
La cornée est normalement avasculaire et se nourrit à
partir du film lacrymal précornéen, de l’humeur aqueuse et
des anses capillaires de la région du limbe cornéen.
La cornée est, par contre, très richement innervée par les
nerfs ciliaires qui constituent un plexus à sa périphérie. Les
fibres nerveuses qui en procèdent pénètrent la cornée de
manière centripète et se distribuent dans son épaisseur pour
se terminer, chez le Lapin, au sein de l’épithélium postérieur
[96].
Cette innervation est essentiellement sensitive [75] et
conduit des stimuli tactiles et nociceptifs, point de départ de
nombreux réflexes (réflexe cornéo-palpébral de clignement,
réflexes de larmoiement et de vaso-dilatation). La sensibilité
thermique semble inexistante. On compte en moyenne pas
moins de 6.000 terminaisons nerveuses sensitives par mm3
de cornée, inégalement réparties puisque l’épithélium anté-
rieur en contient 20 fois plus que la substance propre. La cor-
née représente à ce titre un des tissus les plus sensibles de
l’animal. Cette sensibilité est maximale en son centre et dimi-
nue progressivement jusqu’au limbe cornéen.
• La cornée reçoit par ailleurs une innervation sympathique
[75]. On pense que ces fibres adrénergiques jouent, au même
titre que les fibres sensitives, un rôle important dans la tro-
phicité cornéenne et dans les mécanismes de cicatrisation.
Notons qu’une innervation parasympathique de la cornée a
été récemment mise en évidence chez le Rat [76].
d) Limbe cornéen [91, 96, 100, 114]
Le limbe cornéen est la zone de transition entre la cor-
née et la sclère. Il est large et taillé en biseau, la cornée s’in-
sinuant sous la sclère comme un coin. Par rapport à la cornée
proprement dite, il présente les principales caractéristiques
structurales suivantes [96, 114] :
Revue Méd. Vét., 2001, 152, 1, 5-28
ANATOMIE ET PATHOLOGIE DE LA TUNIQUE FIBREUSE DE L’ŒIL DU LAPIN DOMESTIQUE 7
— l’épithélium antérieur est plus épais et contient des cel-
lules pigmentaires dont l’ensemble constitue un anneau de
pigmentation dont la densité varie avec celle de la pigmenta-
tion générale du Lapin ;
— la lame limitante antérieure disparaît ;
— la substance propre perd son arrangement caractéris-
tique et devient beaucoup plus riche en cellules (fibroblastes,
mélanocytes, macrophages, lymphocytes, plasmocytes) ;
— la lame limitante postérieure disparaît ;
— le limbe est richement vascularisé par en moyenne huit
boucles artérielles issues des artères ciliaires antérieures (Aa.
ciliares anteriores) ou des artères ciliaires postérieures
longues (Aa. ciliares posteriores longae).
Notons que, juste en arrière du limbe cornéen, se trouve
le plexus veineux de la sclère (Plexus venosus sclerae)
constitué de nombreux petits sinus veineux (Sinus venosus
sclerae) localisés dans la profondeur de la sclère. Il reçoit
l’humeur aqueuse filtrée à travers l’angle irido-cornéen
(Angulus iridocornealis).
2. Malformations congénitales
de la tunique fibreuse
A) MICROCORNÉE
[21, 23, 27, 67, 77, 84, 87, 100, 110,
118]
La réduction de la taille de la cornée est en général liée à
la microphtalmie (Microphthalmia) dont l’apparition spon-
tanée est d’environ 4 pour 1.000 chez le Lapin [87]. La
microcornée est parfois associée à d’autres anomalies ocu-
laires incluant la cataracte congénitale (Cataracta congeni-
talis), les colobomes (Coloboma), la microphakie, la persis-
tance de la membrane pupillaire (Membrana pupillaris per-
sistens), la diminution de la taille des paupières ou de l’or-
bite. Dans de rares cas, un glaucome peut se développer
secondairement.
B) MÉGALOCORNÉE
[2, 4-5, 12-13, 23, 28, 41, 60, 62, 64,
70, 77, 84, 88, 110, 117-118]
Chez le Lapin, la mégalocornée est exceptionnellement
isolée. Elle peut être plus couramment associée à une
macrophtalmie (Macrophthalmia). Le plus souvent chez le
Lapin, elle est la conséquence de la distension rapide de la
tunique fibreuse du bulbe (buphtalmie ou hydrophtalmie)
chez le très jeune Lapin atteint de glaucome congénital
(Glaucoma congenitale) héréditaire. Cette anomalie se ren-
contre chez plusieurs souches de Lapins blancs néo-zélandais
et occasionnellement chez des Lapins de compagnie de races
apparentées [12]. L’anomalie est transmise héréditairement
par un gène autosomal récessif à pénétrance incomplète. Son
apparition spontanée est rare et serait de l’ordre de 1 pour
7.500 [110]. La distension cornéenne provoque des altéra-
tions irréversibles de la lame limitante postérieure ainsi que
de l’épithélium postérieur de la cornée. Un œdème cornéen
complique et opacifie ainsi souvent la mégalocornée.
C) DERMOÏDE CORNÉEN
[23, 84, 100, 117]
Le dermoïde cornéen se présente chez le jeune animal sous
la forme d’un lambeau cutané ectopique situé à la surface de
la cornée. Cet îlot cutané en relief, plus ou moins rosé, circu-
laire, assez ferme, peut contenir plusieurs follicules pileux
actifs. Cette affection congénitale rare est bien décrite chez le
Chien et le Chat pour lesquels le dermoïde est souvent lim-
bique. Chez le Lapin, l’anomalie semble exceptionnelle.
WAGNER et al. font part d’un cas personnel (Cf. Photo-
graphie D) pour lequel ils pratiquèrent une exérèse totale du
dermoïde suivie d’une kératectomie superficielle [117]. Ils
conseillent pour la suite un traitement antibiotique local à
base de chloramphénicol (Cf. Tableaux I et III). Si l’atteinte
est plus profonde, une blépharorraphie doit suivre la kératec-
tomie superficielle.
8BARTHELEMY (P.) ET MONNEREAU (L.)
Revue Méd. Vét., 2001, 152, 1, 5-28
PHOTOGRAPHIES A, B et C. — 1. Épithélium antérieur de la cornée ; 2. Lame limitante antérieure («membrane de Bowman») ; 3. Substance propre de la cornée
(«stroma cornéen») ; 4. Lame limitante postérieure («membrane de Descemet») ; 5. Épithélium postérieur de la cornée («endothélium de la chambre anté-
rieure»).
PHOTOGRAPHIE A. — Coupe histologique antéro-postérieure d’une cornée normale de Lapin (Hématoxyline et éosine, x 20). Vue d’ensemble. (Cliché aimable-
ment prêté par I. RAYMOND).
PHOTOGRAPHIE B. — Coupe histologique antéro-postérieure d’une cornée normale de Lapin (Hématoxyline et éosine, x 40). Détail de la partie antérieure. 6.
Assise cellulaire basale ; 7. Assise cellulaire intermédiaire ; 8. Assise cellulaire superficielle. (Cliché aimablement prêté par I. RAYMOND).
PHOTOGRAPHIE C. — Coupe histologique antéro-postérieure d’une cornée normale de Lapin (Hématoxyline et éosine, x 100). Détail de la partie postérieure. 9.
Ruban de fibrilles de collagène ; 10. Kératocyte. (Cliché aimablement prêté par I. RAYMOND).
PHOTOGRAPHIE D. — Dermoïde cornéen (indiqué par la flèche) sur l’œil d’un Lapin nain. (Cliché aimablement prêté par F. WAGNER [117]).
PHOTOGRAPHIE E. — Ulcère cornéen perforant par pénétration d’un corps stranger végétal compliqué d’une uvéite antérieure aiguë sur l’œil d’un Lapin nain albi-
nos. (Cliché aimablement prêté par F. WAGNER [117]).
PHOTOGRAPHIE F. — Descemetocœle central sur l’œil d’un Lapin nain. Noter la néovascularisation superficielle centripète de la cornée.(Cliché aimablement prêté
par F. WAGNER [117]).
PHOTOGRAPHIE G. — Diagnostic d’un ulcère cornéen profond par fixation de la fluorescéine sur l’œil d’un Lapin nain. Noter l’œdème stromal en périphérie de
la lésion et l’intense néovascularisation profonde de la cornée dans la région du limbe cornéen. (Cliché aimablement prêté par F. WAGNER [117]).
PHOTOGRAPHIE H. — Abcès cornéen très étendu sur l’œil d’un Lapin. Noter la néovascularisation superficielle de la cornée et l’aspect luisant de la lésion qui tra-
duit son épithélialisation. (Cliché aimablement prêté par J. DUCOS DELAHITTE).
PHOTOGRAPHIE I. — Kératoconjonctivite et blépharite chroniques compliquant une dacryocystite chronique à Pasteurella ssp. chez un Lapin. 11. Cornée (noter
l’œdème stromal diffus et la néovascularisation superficielle) ; 12. Plis semi-lunaire de la conjonctive ou troisième paupière (noter la procidence, l’intense
congestion vasculaire et l’épaississement) ; 13. Point lacrymal (noter l’épiphoora purulent) ; 14. Paupière supérieure (noter l’entropion cicatriciel et la dépila-
tion liée à l’épipoora). (Cliché aimablement prêté par A. REGNIER).
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