ENCART 30/06/04 19:27 Page 1 (1,1) [email protected] www.crid.asso.fr Économie solidaire / Économie populaire : Convergences et spécificités des approches Synthèse de l’étude réalisée pour le Groupe de travail Économie solidaire / Économie populaire du Crid Organisations concernées Au sein du CRID (Centre de recherche et d’information pour le développement) a été créé, en 2001, un Groupe de travail (GT) consacré aux questions relatives à l’économie solidaire / économie populaire (ES/EP). Formé par des membres du CRID, il s’est élargi au MES (Mouvement pour l’économie solidaire) et au GISEE (regroupement d’organisations issues de la migration). par l’étude : ■ ADEL le développement de l’économie locale) ■ APES En 2003 le GT a réalisé une étude sur les visions et les stratégies portées par ses membres dans leur travail dans le cadre de la thématique ES/EP. L’étude a été confiée à Caroline Dorémus-Mège et suivie par Rosa Miriam Ribeiro, de Frères des Hommes et Nathalie Grimoud, du CCFD, sur la base de questionnaires et d’entretiens réalisés auprès de neuf organisations. (Association pour (Association pour la promotion de l’économie solidaire) Nord - Pas-de-Calais ■ ASFODEVH (Association pour la formation en développement humain) Tout en promouvant une meilleure connaissance entre les membres du GT, cette étude doit servir de base pour développer un travail commun plus cohérent et plus constructif. Ainsi, elle a cherché à dégager la vision de l’ES/EP, les buts et les stratégies des différentes organisations concernées ainsi que les difficultés auxquelles elles sont confrontées. Cette publication résume les principaux points repérés (l’intégralité de l’étude est disponible sur www.crid.asso.fr/chantiers). L’étude présente des limites certaines, essentiellement liées à des contraintes de temps. Il serait intéressant d’aller plus loin dans la recherche d’éventuelles contradictions entre discours et pratiques pour chacune des structures, ainsi que de creuser leur vision et d’affiner certains points. ■ CNLRQ (Comité national de liaison des régies de quartier) ■ CCFD (Comité catholique contre la faim et pour le développement) ■ Fédération Artisans du monde ■ Frères des Hommes ■ GISEE (Groupement d’intérêt solidaire économique et d’échanges équitables) ■ Les Pénélopes ENCART 30/06/04 19:27 Page 2 (1,1) Une approche commune de l’économie solidaire / économie populaire Les structures interrogées ont une vision assez proche de l’ES/EP, à l’exception des Pénélopes. Tant les acteurs de l’ES en France que les organisations de solidarité internationale (OSI), estiment que l’économie solidaire est basée sur un groupe, concerne un territoire donné et participe au développement local ; elle intègre des valeurs de solidarité et d’entraide et replace l’Homme au centre de l’économie. Les structures interrogées considèrent qu’il est possible de créer un système économique différent, même s’il est intégré dans le système dominant. Pour elles, il ne faut pas marginaliser l’ES/EP ni “diaboliser l’entreprise privée”. Elles espèrent que l’ES/EP influe sur l’économie dominante et entendent que l’ES/EP est porteuse d’une dimension politique par son objet et ses sujets (volonté de transformation sociale). Seules les Pénélopes positionnent l’économie solidaire comme un nouveau système qui serait une “alternative à l’économie libérale”. Pour le CNLRQ, l’ES/EP serait caractérisée par l’ “hybridation des ressources” mises en œuvre. De même, l’APES Nord - Pas-de-Calais parle de la “mixité économique” et d’une “répartition équitable des résultats”. Toutes les structures ont défini et affiné leur vision au fur et à mesure, à force de pratique. Elles ont cherché a posteriori un cadre à leur travail de terrain. Chacune semble s’être construit sa vision selon ses propres expériences. Enfin, l’ES/EP est appropriée différemment entre les membres des sièges des organisations et ses membres locaux, “les acteurs de l’action” (militants, équipes locales, structures membres d’un réseau ou d’une entité nationale). Ceux-ci semblent être plus dans l’action que dans la réflexion. Dans ce sens, les réflexions menées par certaines personnes n’arrivent pas encore à bénéficier à tous. Une volonté de transformation sociale Les organisations interrogées ont présenté leurs objectifs de différentes façons. Certaines réponses relèvent de l’idéal visé et d’autres sont plus concrètes, concernant plus les objectifs. En ce qui concerne les finalités, les organisations engagées dans l’ES/EP ont clairement un objectif de changement. Cet objectif apparaît comme un dénominateur commun des attentes des différents acteurs. Les organisations considèrent que l’ES/EP peut favoriser un changement global de la société. Il s’agit en fait de créer un nouveau lien, des nouvelles relations sociales, entre citoyens mais aussi entre les citoyens et l’Etat. En outre, l’ES/EP participe au développement local. Les objectifs concrets des structures engagées dans l’ES/EP sont la reconnaissance et la valorisation des activités, des acteurs et des initiatives de l’ES/EP, dans le but de faire évoluer les mentalités et les comportements au Sud comme au Nord. Pour certaines, notamment il s’agit de faire réfléchir sur les modes de consommation au Nord et de faire reconnaître les porteurs et sujets de l’ES/EP comme des acteurs sociaux à part entière, capables d’interlocution avec les pouvoirs publics, par exemple. Des objectifs plus précis sont également visés tels que la promotion du développement local ou du “droit des acteurs économiques”. La question de genre, et notamment la place des femmes, a été abordée, même si certaines structures ne la traitent pas comme une question en soi mais comme une problématique transversale à l’ES/EP. Pour beaucoup, les femmes sont au centre du phénomène, porteuses d’initiatives et de pratiques alternatives, mais restent dans l’ombre des hommes qui sont les représentants de cette économie. L’ES/EP est également une “lutte pour l’égalité”. Des stratégies diverses mais complémentaires Les stratégies des différentes organisations concernent plusieurs domaines, qui ne sont pas exclusifs les uns des autres (une même organisation peut travailler dans plusieurs domaines), et qui apparaissent parfois complémentaires. Il s’agit de : ■ L’accompagnement, le suivi, le renforcement, l’appui Les modalités les plus courantes sont le “partenariat”, pour les OSI ou la “concertation” (avec les habitants, les associations locales, le public en difficulté…), pour les acteurs de l’ES en France. Elles visent au renforcement des acteurs. Pour Frères des Hommes le partenariat avec les acteurs du Sud est essentiel et incontournable. Cette association souligne aussi la nécessité d’articuler le local au global comme stratégie liée au partenariat. Le CCFD consulte ses partenaires pour la ENCART 30/06/04 19:27 Page 3 (1,1) définition d’une stratégie de lobbying. Le lobbying est plus actif de la part des OSI que de la part des acteurs de l’ES en France, qui sont plus concernées par la négociation et la représentation auprès des pouvoirs publics locaux. La recherche-action La recherche est mise en avant par certaines organisations, comme ADEL, pour laquelle cette modalité fait partie de sa stratégie, dans le but de lier action et réflexion. ASFODEVH privilégie la recherche-action qui débouche sur des formations. Leur stratégie se base sur la pratique des participants et se construit au fur et à mesure avec eux pour aboutir à des modules de formation. ■ L’évaluation et l’impact des actions sont des préoccupations générales. Plusieurs organisations travaillent sur la définition de “critères d’intérêt général” (ADEL, CRIDA…) et d’ “indicateurs de nouvelle richesse” (ADEL, Pôle Economie Solidaire et Sociale de l’Alliance pour un Monde Responsable et Solidaire). D’autres mettent en valeur les réussites constatées et leur impact (Pénélopes). La méthodologie d’évaluation est actuellement en construction. Le CCFD et Frères des Hommes pratiquent aussi l’évaluation des projets menés en partenariat. Artisans du Monde a réalisé une étude d’impact sur commerce équitable au Sud. ASFODEVH se situe plus dans une démarche d’évaluation continue. La question de l’évaluation est perçue comme fondamentale. ■ La mise en réseau, les alliances, les échanges sont des thèmes essentiels pour la plupart des organisations. Certaines en font leur stratégie. Les OSI intègrent cet aspect dans leur travail au Sud mais aussi en France, à destination de leurs militants ou d’autres acteurs nationaux. La construction d’alliances (entre structures de l’ES en France et OSI ou autres organisations, mouvements altermondialistes, mouvements féministes…) intéresse également toutes les structures. ■ Le plaidoyer, les campagnes, la sensibilisation. De nombreuses structures cherchent à faire progresser la réflexion de leurs membres et militants. ■ Toutes les organisations ressentent la nécessité de lier actions de terrain et travail à un niveau plus politique (lobbying, recherche d’alliances) et de chercher à échanger, à mettre en réseau. Les spécificités tiennent surtout aux priorités que se donnent les organisations en termes de stratégie et de public visé. En ce qui concerne les stratégies, trois domaines pourraient donner lieu à des échanges, voire à des formations réciproques : le lobbying, la mise en réseau, le partenariat avec les organisations du Sud et les échanges. La problématique de l’évaluation peut aussi constituer un thème de débats et de discussions. Des difficultés liées au public visé Les acteurs de l’ES en France et les OSI ne sont pas confrontés aux mêmes problèmes. Les difficultés rencontrées par les acteurs de l’ES en France sont tout d’abord financières. Cet accès difficile aux financements est lié au manque de reconnaissance globale qui entoure l’ES/EP. Les sujets porteurs de projets sont vus avec méfiance. D’où la difficulté de “mobiliser les partenaires institutionnels” et à “faire bouger les pouvoirs publics”. Pour les uns et pour les autres, il est difficile de trouver des financements pour des actions qui ne sont pas considérées comme prioritaires par les bailleurs de fonds (mises en réseau, rencontres, échanges) et d’obtenir des subventions de fonctionnement. Les difficultés à fédérer des initiatives variées, à forger une culture commune, à mettre en place des outils de “vulgarisation” ont également été énoncées. Les “freins politiques” (le jeu des partis, la méfiance de certains vis-à-vis des associations, l’alternance,…) sont également un obstacle. Les OSI ont aussi mentionné la “vulnérabilité” des acteurs sociaux appuyés et la capacité du pouvoir à les récupérer. La question de la viabilité des initiatives a également été mise en avant. Un intérêt à travailler ensemble Les perspectives s’ouvrant aux organisations interrogées sont différentes entre les structures dont l’objet même est l’économie solidaire et les autres. Pour les acteurs de l’ES (CNLRQ, les Pénélopes, APES, ADES), il s’agit de renforcer la réflexion, le travail de terrain et le tra- vail en réseau et les alliances. Des collaborations entre ces structures, la recherche d’alliances pour plus de travail en commun, le partage des réflexions autour du sens des actions et de l’évaluation, ainsi qu’une ouverture des réseaux dont est membre chacune des organisations permettraient des échanges nourris et bénéfiques. ENCART 30/06/04 19:27 Page 4 (1,1) Les OSI semblent privilégier l’aspect réseau/alliances, l’approfondissement du travail autour du thème de l’ES/EP et le renforcement de l’ouverture aux militants (par le biais de formations, sensibilisations, réflexions et l’appui aux actions communes et concertations des groupes locaux) et aux autres membres du réseau. En ce qui concerne l’ES/EP proprement dite, les OSI concernées (Frères des Hommes, CCFD, ADM) auraient tout intérêt à examiner ensemble les enjeux du travail au Nord et au Sud. Il ressort, malgré des différences, que tant les acteurs de l’ES en France que les OSI gagneraient à mutualiser et à croiser leurs réflexions sur l’ES/EP, pour une plus grande efficacité de leurs actions. Conclusions et pistes d’échanges et de travail envisagées Les acteurs de l’ES en France souhaitent partager leurs réseaux respectifs, réfléchir ensemble au sens de leurs actions et approfondir le travail d’évaluation. Les pistes de travail envisagées par les OSI concernent la mise en commun des réflexions autour des enjeux et difficultés et une plus grande sensibilisation des militants. Pour l’ensemble des organisations du GT, plusieurs points essentiels ont été pointés pour l’avenir : La mise en réseau et la construction d’alliances : au sein du GT (entre OSI, entre OSI et le MES ou ses membres, entre OSI et acteurs de l’ES en France), sur des bases d’actions communes et avec d’autres (partenaires de chaque organisation). ■ ■ Les échanges de méthodologie et de pratiques : touchant principalement deux aspects. D’un côté, la négociation avec les pouvoirs publics : des échanges constructifs pour déterminer des éléments de collaborations entre organisations et collectivités locales dans plusieurs domaines autour de l’ES/EP, la recherche d’appuis financiers à la participation dans la définition de plans de développement local, etc. Pour avancer dans la connaissance et reconnaissance réciproques, les organisations du GT pourraient échanger des informations, s’inviter mutuellement et diffuser leur actualité. On note une volonté générale de faire parler de l’ES/EP afin de sensibiliser l’opinion publique sur ce thème et de vulgariser les connaissances acquises. Les organisations membres ont manifesté leur préoccupation pour la question de l’évaluation des activités. Le GT serait un lieu adéquat de mise en commun et d’échanges. ■ Le partenariat avec les organisations du Sud, qui peut se concrétiser par la visite de partenaires, le partage de réflexions et d’expériences, des rencontres entre acteurs du Nord et du Sud… Des actions pouvant se faire au sein du GT. ■ Sur la question de genre, qui est mise en avant par les Pénélopes et ADEL, il serait intéressant d’échanger sur comment elle est traitée par les autres membres du GT. ■ Le dernier point concerne la problématique des migrants. Les acteurs de l’ES en France travaillent essentiellement avec des populations immigrées. Les associations du CRID ont certainement des partenaires dans les pays d’origine de ces populations. Des échanges, des mises en lien et éventuellement des actions communes sont envisageables entre tous. ■ En effet, sur la base de ces pistes, différents types d’actions peuvent être mis en place, tels que des partages d’expériences, des réunions et discussions, des rencontres de partenaires des uns et des autres, des échanges entre organisations (membres du GT mais aussi avec d’autres organisations, du Nord comme du Sud) sur des thèmes précis, des actions de plaidoyer communes, voire des projets élaborés conjointement. Enfin, il serait possible de mettre en relation des militants des OSI avec des initiatives et projets appuyés par les membres du MES par exemple. Par ailleurs, des échéances comme les forums sociaux mondiaux et européens peuvent être l’occasion de collaborations plus concrètes. Il est important de dépasser les approches de chacun en s’ouvrant aux autres : l’étude permet de constater que les buts sont communs et les stratégies complémentaires. Il convient donc de poursuivre cette connaissance réciproque en faisant un pas de plus dans les collaborations. Organisations membres du groupe de travail Économie solidaire - Économie populaire : ASFODEVH - CCFD - Fédération Artisans du monde - Frères des hommes - GISEE Mouvement pour l’économie solidaire - les Pénélopes