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disait, à ce propos, par exemple, que le capitalisme est supérieur à la féodalité ;
donc, le capitalisme est nécessairement inférieur – productivement parlant – au
communisme. Pour cette raison les enfants de Staline disaient, suivant son discours,
qu’on ne peut pas mettre en doute le développement prodigieux des forces
productives soviétiques.
C’est justement pour cette raison que les modernes se sentent supérieurs aux
anciens et que la pensée moderne ne peut être que supérieure à celle des temps
passés. Or, il n’est pas difficile de comprendre que nous sommes le produit d’une
régression culturelle de première importance. Au niveau de la métaphysique
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, par
exemple, on considère actuellement que la théorie du Big Bang est la théorie
scientifique par excellence. Or, rappelons que cette théorie pose à la base
l’existence d’un protoatom (G. Lemaître), d’une singularité première antérieure au Big
Bang. De sorte que cette explosion est le point de départ de la matière infinie que
nous constatons. A aucun moment on se pose la question de savoir d’où est sortie
toute la matière autre, en dehors de la singularité première. Cette théorie
créationniste est ainsi au centre de la pensée moderne, comme une sorte d’Absolu
sans fondement rationnel.
Pour ce qui est la théorie de la loi des contraires, on semble ne pas avoir
compris que chez Hegel l’autre est en tant qu’autre, l’autre et le non-autre de son
autre. Et que cette loi est valable aussi bien pour le monde physique que pour
l’univers éthique. Or, Aristote avait déjà signalé que si bien la loi des contraires est la
substance de l’Être, il n’en est pas moins vrai que cette loi se manifeste d’une
manière différente dans la sphère éthique que dans la sphère matérielle. En effet,
dans le domaine de la physique la loi des contraires se manifeste, soit sous la forme
de l’identité, soit sous la forme de la différence, tandis que dans le règne de l’éthique
– du comportement, de la pratique de l’humain – le positif s’oppose au négatif, soit
comme excès, soit comme défaut. Ceci veut dire, par conséquent que le positif est
ce qui est droit, ce qui est juste : ce qui s’accorde à l’idée de la justice. Par
conséquent, ce qui est équidistant, ce qui est équitable : ce qui s’accorde à la
proportion raisonnable.
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La métaphysique ne doit pas être ici comprise comme ce savoir qui est spéculation pure, arbitraire, sans aucun
fondement dans l’expérience objective. La métaphysique doit être plutôt comprise comme ce savoir qui concerne
la dimension absolue de l’Être. Les présocratiques nous ont fait comprendre, à ce niveau là que l’Être est illimité
et que rien ne vient à l’être à partir du non-être. « De nihilo, nihil », dira plus tard Lucrèce.