L`iridoplastie en pratique - Pratiques en Ophtalmologie

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PRATIQUES EN
OPHTALMOLOGIE
R E V U E
D I D A C T I Q U E
M É D I C O - C H I R U R G I C A L E
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En pratique
L’iridoplastie : l’essentiel sur
les indications, les techniques
et le suivi
Dr Hélène Bresson-Dumont
Mise au point
Quelle est la place
des compléments alimentaires
dans la prise en charge
de la DMLA ?
Dr Valérie Le Tien
A savoir
Comparatifs
des lasers femtoseconde
Partie 1 : chirurgie de la cataracte
Intérêt de la séquence Fat Sat après injection de gadolinium.
Dr Michaël Assouline
Explorations et innovations
Les aberromètres
“nouvelle génération” :
le système KR-1W
Raphaël Amar, Dr Dan Alexandre Lebuisson,
Dr Catherine Albou-Ganem
Compression du nerf optique par un anévrysme.
zoom sur…
Quand prescrire une IRM
en urgence chez le sujet jeune ?
Comment cibler les demandes d’IRM devant
une baisse d’acuité visuelle aigüe
Dr Samuel Bidot, Dr Frédérique Charbonneau, Dr Catherine Vignal-Clermont
Mars 2012 • Volume 6 • n° 52 • 8 e
PRATIQUES EN
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Mars 2012 • Vol. 6 • N° 52
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n en pratique
L’iridoplastie en pratique : l’essentiel sur les indications, les techniques et le suivi . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . p. 64
Dr Hélène Bresson-Dumont (Nantes)
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Quelle est la place des compléments alimentaires dans la prise en charge de la DMLA ?. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . p. 85
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actualités de la profession
Projet de loi
Déception des ophtalmologistes :
le projet de Dossier Médical Partagé suspendu
L
e mois dernier, l’Agence des Systèmes de Santé partagés (ASIP) a
annoncé la suspension du projet de
Dossier Médical Professionnel (Dossier
Optique Partagé).
En cause, la difficulté pour les opticiens,
ophtalmologistes et orthoptistes à s’en-
tendre sur la nature des informations partagées. Les opticiens refuseraient d’entrer
dans le DMP la nature des verres vendus
et les choix techniques de montage. Le
Dr Jean-Bernard Rottier, Président du
Syndicat National des Ophtalmologistes
de France (SNOF) s’est dit très déçu de
cette décision. Le DMP a pour objectif
de faciliter le suivi du patient, fluidifier
l’échange d’informations et de permettre
aux médecins de gagner en efficacité. Le
SNOF assure qu’il ne baissera pas les bras
et continuera son action en faveur de ce
projet.
ß
Evénement
Les Journées Vision ­d’Avenir se dérouleront
du 29 au 31 mars prochain à Lyon
“V
ision d’Avenir” est une association
née en 2011 de la collaboration
entre trois opticiens lyonnais. L’objectif
est de soutenir, pendant trois jours, une
dynamique pour présenter, expliquer et
valoriser la filière optique auprès du plus
grand nombre. Cette association vise à
fédérer tous les acteurs de la filière et du
marché et à affirmer leur place dans le
parcours de santé visuelle du patient.
Pour cette deuxième édition, l’accent sera
mis sur l’opticien et son métier, les enjeux,
les évolutions de ce métier : la responsabilité civile professionnelle, l’engagement
de qualité, les responsabilités respectives
des OCAM, des opticiens…
Retrouvez toutes les informations sur
le site www.visiondavenir.fr ß
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En pratique
L’iridoplastie en pratique
L’essentiel sur les indications,
les techniques et le suivi
Dr Hélène Bresson-Dumont*
Introduction
L’iridoplastie au laser est destinée à
modifier la forme de l’iris en le rétractant grâce au laser Argon. Elle
est pratiquée sur les iris qui sont
susceptibles de s’accoler dans
l’angle iridocornéen, pour éviter que
ne se forment des synéchies angulaires définitives. En effet, ces dernières risqueraient d’entraîner un
glaucome à angle fermé grave, très
difficile à traiter. On pratique l’iridoplastie principalement dans les
iris plateaux, mais aussi parfois en
phase aigüe de glaucome aigu, en
cas de synéchies dans une trappe
de trabéculectomie en association
au laser Yag, et en en cas de goniopunctures après chirurgie non
perforante pour éviter les risques
d’incarcération secondaire.
La fermeture de
l’angle iridocornéen
La fermeture de l’angle est définie
par la présence de contact iridotrabéculaire qu’elle soit par apposition ou par synéchies ; elle est
due à de nombreux mécanismes
(Fig. 1). La fermeture primitive
survient sur des yeux prédisposés anatomiquement (2, 3), en
l’absence de pathologie oculaire
pouvant induire la formation de
* Département du glaucome, clinique Sourdille, Nantes
64
Blocs anatomiques
Iris
Bloc pupillaire
Corps ciliaire
Bloc antérieur
non pupillaire
Bloc pupillaire
Iris plateau
Iridotomie +++
Iridoplastie
Cristallin
Zonule
Phacomorphique
Extraction cristallin
Rétrocristallinien
Luxations
PEC, traumas
Glaucome malin
Cycloplègie
Vitrectomie
Figure 1 - La fermeture de l’angle est définie par la présence d’un contact
­irido-trabéculaire qu’elle soit par apposition ou par synéchies, elle est due
à de nombreux mécanismes. D’après (1).
synéchies antérieures périphériques (uvéite, néovascularisation
irienne, traumatisme ou chirurgie). Le diagnostic se fait grâce à
la gonioscopie et en particulier la
gonioscopie dynamique. Cette
dernière se pratique d’une part
en faisant varier la lumière de la
fente pour apprécier les modifications iriennes en dilatation,
d’autre part en chassant l’humeur
aqueuse dans l’angle en effectuant
une pression centrale sur la cornée. Cette manœuvre a pour but
de différencier synéchie définitive
(l’angle ne pourra pas rouvrir lors
de la pression centrale du verre)
et apposition, et aussi de mettre
en évidence un bloc antérieur non
pupillaire devant la présence d’un
aspect en double bosse évoquant
un obstacle derrière l’iris.
Principaux
mécanismes
Le bloc pupillaire
Le mécanisme du bloc pupillaire
antérieur relatif est le plus fréquemment retrouvé dans le glaucome
chronique par fermeture de l’angle
(dans 75 % des cas environ). Le
flux d’humeur aqueuse à travers
la pupille est diminué en raison
d’un gradient de pression entre la
chambre antérieure et la chambre
postérieure, secondaire à une augmentation de la résistance liée à
une apposition trop importante de
la face postérieure de l’iris à la face
antérieure du cristallin. La périphérie irienne se déplace en avant
et entre en contact avec le trabéculum et/ou la cornée périphérique.
Ce mécanisme survient préféren-
Pratiques en Ophtalmologie • Mars 2012 • vol. 6 • numéro 52
L’iridoplastie en pratique
• Figure 2 - Echographie UBM avec épreuve de provocation à
l’obscurité. Iris plateau dont l’angle se ferme en dilatation. En
haut, échographie effectuée en pleine lumière : l’angle est ouvert.
En bas, en obscurité : l’angle est fermé.
• Figure 3 - Echographie UBM. Iris plateau avec une composante
de blocage pupillaire (la racine de l’iris est très convexe). Une
iridotomie périphérique laser pourra probablement lever, seule, la
fermeture de l’angle.
tiellement lorsque la chambre antérieure est étroite (hypermétropie), chez la femme âgée, et dans
certaines ethnies (Esquimaux, sujets asiatiques).
Le bloc antérieur
non pupillaire
Le diagnostic est évoqué devant
un angle étroit, mais avec chambre
antérieure profonde au centre. On
retrouve un obstacle postérieur
qui empêche la dépression de l’iris
à la gonioscopie dynamique et
donne un aspect de double bosse :
il peut s’agir d’un iris plateau, de
kystes iriens ou du corps ciliaire,
d’un creeping angle glaucoma,
d’une racine irienne anormalement épaisse, d’une tumeur (4, 5).
Le diagnostic se fait grâce à l’UBM
qui visualise l’anatomie rétroirienne et peut analyser les mouvements de l’iris en dilatation. Une
apposition irienne intermittente
peut être ainsi mise en évidence
(Fig. 2).
Le plus fréquent est l’iris plateau,
qui désigne, en fait, plusieurs anomalies de forme et/ou de position
de la racine de l’iris et du corps
ciliaire (racine irienne épaisse, antéroposition des procès ciliaires,
insertion antérieure de l’iris) qui
favorisent le contact de la périphérie irienne avec la maille trabéculaire. On distingue la “configuration iris plateau”, fréquente, et le
“syndrome d’iris plateau”, plus
rare (6). Dans la configuration iris
plateau, il existe un certain degré de blocage pupillaire associé,
et une iridotomie périphérique,
seule, peut suffire à rouvrir l’angle
(Fig. 3). Dans le syndrome iris plateau, la fermeture angulaire n’est
pas levée par l’iridotomie car l’anomalie anatomique est plus importante. L’iridoplastie est dans ce cas
intéressante pour éviter la constitution de synéchies définitives secondaires à l’accolement irien et donc
une fermeture subaigüe intermittente de l’angle en dilatation.
Pratiques en Ophtalmologie • Mars 2012 • vol. 6 • numéro 52
Les patients présentant un iris
plateau sont plus volontiers des
femmes jeunes (30 à 50 ans) et
sont moins hypermétropes que les
patients présentant un bloc pupillaire. Des antécédents familiaux
de glaucome à angle étroit sont
fréquemment retrouvés.
Indications de
l’iridoplastie
L’iridoplastie a pour but de rétracter la racine de l’iris, on peut la
proposer dans un certain nombre
d’indications (7) :
• élimination d’une fermeture par
apposition en présence d’une iridotomie perméable sans synéchies
antérieures périphériques étendues (à la gonioscopie avec indentation) ;
• prévention de la formation de synéchies antérieures périphériques ;
• rétracter la périphérie de l’iris en
utilisant l’effet thermique du laser
afin d’élargir l’angle iridocornéen ;
• syndrome d’iris plateau (après
l’iridotomie périphérique au laser) ;
• en préparatoire d’une trabéculoplastie au laser (argon ou SLT) si
l’angle est étroit afin de visualiser
65
En pratique
le trabéculum ;
• fermeture de l’angle en cas de nanophtalmie ;
• dans certains cas de fermeture
aigüe de l’angle ;
• après chirurgie du glaucome en
cas de synéchies dans la trappe ou
associé à des goniopunctures.
La place de l’iridoplastie
dans l’iris plateau
En cas de suspicion d’iris plateau,
il est indispensable de réaliser,
dans un premier temps, une iridotomie périphérique au laser pour
lever l’éventuel bloc pupillaire
associé. Cela peut d’ailleurs suffire pour rouvrir dans le cas d’une
“configuration iris plateau”.
Si la racine de l’iris reste convexe,
la gonioscopie dynamique doit
éliminer des synéchies angulaires
définitives qui contre-indiqueraient l’iridoplastie. Elle permet de
mettre en évidence un accolement
en dilatation (lors des variations
de lumière). Si cela est possible, Il
est intéressant de pratiquer une
échographie UBM pour affiner le
diagnostic de blocage antérieur
non pupillaire, en analysant avec
précision l’anatomie de l’angle, de
l’iris, du corps ciliaire et du sulcus.
L’épreuve en obscurité de l’UBM
met en évidence un accolement
antérieur de l’iris en dilatation et
l’iridoplastie est destinée à rétracter la base de l’iris pour éviter l’accolement. L’iris est aminci par le
laser, rigidifié, et ne bougera plus
à la dilatation (Fig. 4). L’effet de la
plastie est toutefois temporaire,
et il est parfois nécessaire de la refaire. La surveillance régulière de
la gonioscopie est indispensable,
d’autant que l’angle évolue en
fonction des modifications physiologiques du cristallin.
En cas de kystes importants, l’iridoplastie n’est souvent pas suffi66
Avant iridoplastie
Après iridoplastie
Figure 4 - Echographie UBM avec épreuve de provocation à l’obscurité. Iris plateau
après iridoplastie dont l’angle ne se ferme plus en dilatation. En haut, échographie effectuée en pleine lumière, en bas en l’obscurité, la racine de l’iris est rigide et ne bouge
plus à l’obscurité.
Figure 5 - Iridoplastie. En cas crise de glaucome aigu par fermeture de l’angle, lorsque
la cornée reste très œdémateuse, il est difficile de réaliser une iridotomie périphérique
au laser. On peut réaliser une iridoplastie au laser Argon pour diminuer le blocage
pupillaire et ainsi l’œdème afin de pouvoir pratiquer l’iridotomie dans de meilleures
conditions. La plastie est effectuée soit au niveau du sphincter irien pour rétracter l’iris
et permettre à l’humeur aqueuse de passer en chambre antérieure soit à la base de
l’iris pour l’éloigner de la cornée.
samment efficace et il faut avoir
recours à l’extraction du cristallin
ou la trabéculectomie perforante,
surtout si une hypertonie oculaire,
voire des altérations anatomiques
ou fonctionnelles, apparaissent.
L’iridoplastie à la phase
aigüe d’une crise de blocage
pupillaire aigu
En cas crise de glaucome aigu par
fermeture de l’angle, lorsque la cornée reste très œdémateuse malgré
les traitements hypotonisants, il
est parfois difficile de réaliser sans
risque une iridotomie périphérique au laser. Il est alors intéressant d’effectuer une iridoplastie au
laser Argon pour diminuer le blo-
cage pupillaire et ainsi l’œdème ;
il suffit de faire en sorte qu’un peu
d’humeur aqueuse passe dans la
chambre antérieure pour lever
partiellement l’obstacle, rompre le
cercle vicieux et pouvoir pratiquer
l’iridotomie périphérique au laser
dans de meilleures conditions.
Deux techniques sont utilisables :
au niveau du sphincter iriens pour
rétracter l’iris et permettre à l’humeur aqueuse de passer en avant
ou à la base de l’iris pour éloigner
l’iris de la cornée (Fig. 5).
L’iridoplastie en chirurgie
du glaucome
Si la pression remonte après
une chirurgie du glaucome, il
Pratiques en Ophtalmologie • Mars 2012 • vol. 6 • numéro 52
L’iridoplastie en pratique
est indispensable de réaliser une
gonioscopie pour dépister un
obstacle interne. Il faut vérifier la
bonne position de la fenêtre trabéculaire, et éliminer une synéchie
irienne qui empêcherait l’humeur
aqueuse de sortir de l’œil ; elle
devra être levée au laser sans attendre. Le plus aisé est d’associer
le laser Yag pour libérer la base de
la synéchie, et une iridoplastie au
laser Argon sur l’iris en regard de
l’incarcération pour le rétracter et
éviter la récidive.
En cas de trabéculectomie non
perforante, s’il n’existe pas de synéchie, il faut réaliser des goniopunctures, associées à une iridoplastie à la base de l’iris pour éviter
les risques d’incarcération irienne
secondaire.
technique de
l’Iridoplastie
L’iridoplastie au laser (7, 8) est
destinée à modifier la forme de
l’iris en le rétractant grâce au laser
Argon. Pour rétracter l’iris, on utilise des impacts larges, des temps
longs et une puissance moyenne.
Le but est d’éloigner l’iris de l’angle
et de le rendre immobile, indifférent aux mouvements pupillaires.
Préparation
Collyre alpha2-agoniste (apraclonidine ou brimodonidine) et/ou
acétazolamide, une heure avant le
laser et juste après, une goutte de
pilocarpine 2, anesthésie topique.
Réalisation du Laser Argon
grâce à un verre contact
pour visualiser l’angle
(CGA, G2, verre à gonioscopie
du V3M)
Les impacts sont larges (de 300
à 500 microns), longs (temps de
0,3 à 0,5 secondes) et d’intensité moyenne (puissance de 300 à
Figure 6 - Iridoplastie au laser Argon
avec verre contact pour visualiser
l’angle (CGA, G2, verre à gonioscopie du
V3M). Les impacts sont larges (de 300
à 500 microns), longs (temps de 0,3 à
0,5 secondes) et d’intensité moyenne
(puissance de 300 à 500 mW). Ils sont
appliqués à la base de l’iris au niveau de
Figure 7 - Aspect à la lampe à fente
d’une iridoplastie, sans brûlure excessive ni cratère.
la double bosse, espacés de la taille de
2 à 3 impacts ; ils doivent contracter la
racine de l’iris sans créer de cratère.
500 mW). Ils sont appliqués à la
base de l’iris au niveau de la double
bosse (Fig. 6), espacés de la taille de
2 à 3 impacts ; ils doivent contracter la racine de l’iris sans créer de
cratère (Fig. 7). La rétraction de l’iris
à chaque impact doit être visible
et contrôlée, ainsi que l’ouverture
de l’angle iridocornéen. Le traitement est de préférence appliqué
dans un premier temps sur les
170° inférieurs en évitant les méridiens 3 h et 9 h et les vaisseaux
radiaires, soit une vingtaine d’impacts. Si la réouverture n’est pas
suffisante,
l’hémicirconférence
supérieure pourra être rétractée
secondairement. Lorsque l’iris est
clair, la plastie laser est souvent
moins efficace.
Certains auteurs ont proposé de
réaliser des impacts directs à l’aide
du verre d’Abraham (verre à IP).
Cependant les impacts sont souvent trop intenses et insuffisamment périphériques ; il n’est pas
possible de visualiser l’effet réel
sur l’iris, donc la plastie est plus
difficile à contrôler.
Traitement post-laser
Collyre stéroïdien pendant une
semaine et un traitement hypo-
Pratiques en Ophtalmologie • Mars 2012 • vol. 6 • numéro 52
tonisant pendant quelques jours,
les réactions inflammatoires à minima ne sont pas rares.
L’effet de l’iridoplastie est évaluable immédiatement mais diminue dans le temps. L’épreuve
avec provocation à l’obscurité en
l’UBM permet de vérifier que l’iris
ne s’appose plus dans l’angle en
dilatation, il est aminci et rigidifié (9, 10). Il est parfois nécessaire
de réitérer le laser, d’autant que le
cristallin continue à augmenter de
volume. La surveillance gonioscopique doit donc se poursuivre, régulièrement tous les 6 à 12 mois, à
vie, jusqu’à extraction du cristallin.
En cas de syndrome d’iris plateau
vrai, le risque d’apposition peut
persister malgré l’extraction du
cristallin.
Complications
Une réaction inflammatoire torpide peut survenir pendant une dizaine de jours, une augmentation
temporaire de la pression intraoculaire est plus rare.
En cas d’impacts trop dosés, il
peut exister des brûlures iriennes
inesthétiques, et des rétractions
iriennes entraînant une modification de la pupille. Si les impacts
sont placés sur toute la circonférence, le risque est la mydriase
67
En pratique
aréflexique, particulièrement gênante. La brûlure de l’endothélium
cornéen est due à des impacts mal
focalisés.
Si la plastie ne fonctionne pas,
le risque est la constitution d’un
glaucome chronique à angle fermé.
Il est impératif de lutter contre la
constitution de synéchies angulaires. Il est alors préférable de
pratiquer l’ablation du cristallin
même en présence d’une cataracte
débutante, éventuellement associée à des gonio-synéchodialyses.
Conclusion
L’iridoplastie laser sert à empêcher la constitution de synéchies
définitives dans l’angle iridocornéen en rétractant la base de l’iris.
L’iris, ainsi aminci et rigidifié, ne
viendra plus s’apposer dans l’angle,
en particulier lors d’une dilatation.
Les indications sont principalement les formes de bloc pupillaire
non antérieur, diagnostiquées par
la gonioscopie dynamique, et caractérisées au mieux par l’échographie UBM, avec épreuve de
provocation à l’obscurité. Dans le
cas des iris plateaux, il faut, dans
un premier temps, pratiquer une
iridotomie périphérique afin de
lever le blocage pupillaire souvent
associé. Si l’angle n’est pas suffisamment rouvert, l’iridoplastie
est réalisée au laser Argon grâce
Classification des fermetures de l’angle
Personnes à risque de développer une fermeture de l’angle
Le trabéculum pigmenté est visible sur moins de 180°, la structure et
la fonction sont préservées, il n’existe pas de glaucome. L’indication de
l’iridotomie périphérique est discutable en l’absence de signe fonctionnel
de fermeture ou d’antécédents familiaux de glaucome aigu.
Les fermetures de l’angle
Patient précédent mais qui présente des signes témoignant de crises de
fermeture de l’angle spontanément résolutives et passées inaperçues :
- opacités cristalliniennes (glaucoma flecken) ;
- pigments en mottes irrégulières surtout en inférieur ;
- synéchies antérieures périphériques ;
- distorsion des plis radiaires de l’iris ;
- PIO > 21 mm Hg.
Des épisodes de fermetures sont objectivés et il est nécessaire de
pratiquer une iridotomie périphérique laser pour éviter la constitution
de synéchies définitives (avec le risque de transformation en glaucome
avéré par fermeture de l’angle) ou une crise de blocage aigu. Si
l’iridotomie n’a pas suffisamment rouvert l’angle, l’iridoplastie peut être
indiquée, surtout en cas de blocage antérieur non pupillaire.
Les glaucomes par fermeture de l’angle
On retrouve une atteinte définitive de l’angle, avec synéchies, ou
accolements définitifs. La structure et/ou la fonction sont atteintes, il
s’agit de glaucome potentiellement grave et évolutif, difficile à gérer. Le
laser n’est plus une indication (le stade est trop tardif) et il faut passer
à la chirurgie filtrante perforante, souvent difficile avec un risque de
glaucome malin.
à des impacts larges et des temps
longs. Cependant, la surveillance
gonioscopique des patients doit
se poursuivre à vie, car la forme de
l’angle iridocornéen évolue dans le
temps en raison de l’augmentation
progressive du volume du cristallin. Le risque est la fermeture
chronique de l’angle qui induit
des glaucomes chroniques à angle
étroit, graves, évolutifs, difficiles à
n
traiter. Mots-clés : Glaucome, Iridoplastie,
Iris plateau, Angle étroit
Bibliographie
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17e symposium Recherche et Glaucome, Ed EDK, 2010.
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Pratiques en Ophtalmologie • Mars 2012 • vol. 6 • numéro 52
à savoir
Comparaison
des lasers femtoseconde
Partie 2 : chirurgie de la cataracte
n Le marché de la chirurgie de la cataracte est en constante augmentation avec plus de 15 millions de procédures annuelles dans le monde, dont 3 millions aux USA et près de 600 000 en
France.
Les évolutions
de la chirurgie
de la cataracte
La chirurgie de la cataracte a
connu une évolution, depuis le
début des années 1980, catactérisée par une succession de révolutions techniques remplaçant à
chaque fois la technologie précédente : intracapsulaire, extracapsulaire, phacoémulsification.
La technologie de la phacoémulsification relativement stable et
inchangée, depuis le début des
années 1990, a permis l’avènement des incisions étroites qui
ont apporté une meilleure sécurité intraopératoire (chirurgie à
globe fermé) et postopératoire
(réduction de l’inflammation),
ainsi que la possibilité d’améliorer significativement les résultats réfractifs (neutralité de
l’astigmatisme induit autorisant
l’utilisation plus efficace et prédictible d’implants réfractifs
“premium”, toriques ou multifocaux)
* Centre Iéna Vision & Clinique de la Vision, Paris
www.ienavision.fr
Dr Michael Assouline*
Malgré tout, si plus de 90 % des
opérés de Lasik atteignent un excellent résultat réfractif (10/10
sans correction), seuls 40 % des
opérés de cataracte avec les implants les plus récents (implant
“premium”) obtiennent une acuité non corrigée “normale” ou identique à l’acuité corrigée. On estime
que moins de 45 % des opérés sont
à moins de 0,5 D d’erreur réfractive
résiduelle, et 6 % ont une erreur de
plus de 2 D. Cependant, l’utilisation croissante d’implants “premium” multifocaux et/ou toriques
destinés à compenser la presbytie et l’astigmatisme, contribue à
augmenter les attentes visuelles
des patients en termes de rapidité
et de qualité de la réhabilitation
fonctionnelle non corrigée après
chirurgie de la cataracte.
L’utilisation de lasers en chirurgie
cristallinienne est déjà ancienne.
Krasnov (Laser rubis Q-switched
698 nm, 1975), puis Aron-Rosa
(Nd-YAG, 1980), et plus récemment Dodick (Erbium YAG 2003)
ont perfectionné les applications
de l’effet photodisruptif pour la
capsulotomie et la lyse nucléaire
cristallinienne, sans parvenir à
supplanter la phacoémulsification
Pratiques en Ophtalmologie • Mars 2012 • vol. 6 • numéro 52
aux ultrasons, du fait d’un rapport
énergie/efficacité défavorable.
Utilisation du laser
femtoseconde
La technologie du laser femtoseconde, développée commercialement pour la découpe des volets
cornéens au cours du Lasik en
2001, puis appliquée aux différentes techniques de chirurgie
cornéenne, paraît aujourd’hui
susceptible de modifier à nouveau
profondément les habitudes des
chirurgiens de la cataracte, sans
que les bénéfices en soient encore
clairement démontrés scientifiquement.
Le laser femtoseconde émet dans
l’infrarouge, et n’est donc pas absorbé par les structures transparentes, ce qui permet de focaliser
les impacts avec précision sur les
tissus cibles du segment antérieur
de l’œil.
Le laser délivre une quantité
d’énergie en un temps très bref
dans une zone de focalisation très
étroite, ce qui crée un plasma dont
l’expansion de la zone de vaporisation entraîne la formation d’une
69
à savoir
Figure 1 - Machines disponibles (OptiMedica, Technovision, Lensar et LensX).
bulle de cavitation responsable de
l’effet de photodisruption tissulaire.
Le laser femtoseconde utilise
des pulses de 10-15 s au lieu de
10-9 comme dans le laser Argon
(photocoagulation), le laser Nd
Yag (photodisruption) ou le laser
excimer (photoablation), ce qui
permet de réduire de façon très
importante l’energie nécessaire
pour un effet tissulaire donné (la
puissance étant liée à l’énergie délivrée par unité de temps), et donc
de mieux respecter les structures
intraoculaires adjacentes fragiles
(capsule, zonule, iris, endothélium
cornéen).
Il existe actuellement 4 lasers commercialement disponibles pour la
chirurgie de la cataracte (Fig. 1).
• LenSx Lasers Inc. (Aliso Viejo,
CA) ;
• LensAR Inc. (Winter Park, FL) ;
• OptiMedica Corp. (Santa Ana,
CA) ;
• Victus (Technovision, Bausch &
Lomb, Munich).
A notre connaissance, à la date
de parution de cet article, seul un
centre chirurgical est actuellement équipé en France (Centre
ophtalmologque des Flandres
à Lille), mais plusieurs autres
centres, dont la Clinique de la Vision (Paris), disposent déjà d’un
laser Technovision, susceptible
70
Figure 2 - écrans de contrôle.
d’être upgradé rapidement pour la
chirurgie de la cataracte.
Des interfaces
spécifiques pour
chaque machine
Les lasers femtoseconde, pour la
chirurgie de la cataracte, utilisent
une interface patient comparable à
celle de la chirurgie cornéenne.
Cette interface (Fig. 2 et 3) permet de
stabiliser l’œil du patient pendant
l’action du laser tant dans un but
de sécurité que de précision. Par
rapport aux interfaces utilisées
pour la chirurgie réfractive chez
des patients plus jeune, les pressions d’applanation au moyen de
lentilles planes ou concaves, qui
étaient d’environ 80 mmHg pour
les lasers Intralase ou Zeiss Meditec, ont été réduites, afin :
• de pouvoir être utilisées sans
inconvénient chez des sujets plus
âgés suspectibles de présenter
une pathologie glaucomateuse ou
vasculaire rétinienne associée ;
• de réduire les plis cornéens liés
à une aplanation trop poussée qui
pourrait interférer avec la focalisation du laser dans le segment
antérieur ;
• de favoriser un large champ
de vision permettant de réaliser
les incisions périphériques relaxantes ou cornéennes claires
requises.
Dans le système LenSX, une interface concave est employée.
Le Laser Lensar utilise un sys-
Pratiques en Ophtalmologie • Mars 2012 • vol. 6 • numéro 52
Comparaison des lasers femtoseconde
tème non contact, avec une interface liquide par immersion contenue par l’anneau de succion.
Dans le système OptiMedica,
une interface optique patient liquide permet de limiter l’augmen­
tation de pression intraoculaire à
12 mmHg et réduit le risque d’ecchymoses conjonctivales.
Dans le système Customlens de
Technovision, la même interface
concave que celle utilisée pour la
chirurgie est employée.
Systèmes d’imagerie
en temps réel
Figure 3 - Interface patient.
Ces lasers sont également dotés
d’une station d’imagerie en temps
réel du segment antérieur destinée à contrôler la géométrie spatiale de la cible tissulaire et de la
délivrance des impacts.
Ces systèmes sont basés :
• pour le LenSX et l’OptiMedica sur
l’OCT spectral domain de haute résolution analysé par transformées
de Fourier ;
• pour le Lensar sur un système de
caméra Scheimpflug confocal 3D à
balayage.
Ces systèmes ont pour fonction
de mesurer avec précision et en
temps réel la position et les dimensions des structures intraoculaires
critiques :
• profil cornéen antérieur et postérieur, destinés à planifier les incisions relaxantes et cornéennes
claires ;
• angel iridocornéen et position
antéropostérieure de l’iris ;
• taille et position de la pupille
même en cas de dilatation asymétrique ;
• position et centre de la capsule
antérieure (souvent avec une
meilleure précision que ne le permettent les repères visuels utilisés
par le chirurgien pour le centrage
Figure 4 - Types de traitement (capsulotomie, incision limbique relaxante, incision
primaire et incision de service : le profil de l’incision en OCT montre parfaitement
la succession des 3 plans qui conditionne une autoétanchéité optimale.
de la capsulotomie) ;
• et surtout postérieure du cristallin, afin de limiter une zone de
sécurité préventive lors de la fragmentation nucléaire.
L’OCT est relativement insensible
aux opacités cornéennes.
Le système Scheimpflug confocal
3D permet en outre :
• de quantifier les opacités cornéen­
nes et cristalliniennes afin de calibrer la puissance nécessaire pour la
phacofragmentation du noyau ;
• de mesurer la topograhie cornéenne, l’élévation et sa puissance
réfractive totale ;
• d’extrapoler le front d’onde cornéen.
Pratiques en Ophtalmologie • Mars 2012 • vol. 6 • numéro 52
Optimisation des
étapes clés
de la cataracte
Sans se substituer totalement à
la phacoémulsification, les lasers
femtoseconde contribuent, dès
à présent, à optimiser certaine
étapes clés de la chirurgie de la cataracte.
Les principales machines femtoseconde actuelles permettant la
chirurgie de la cataracte réalisent
4 types de traitements de façon séquentielle rapide (moins de une à
deux minutes) avec un gain de précision et de reproductibilité très significatif par rapport aux résultats
des gestes manuels correspondant
(Fig. 4) :
71
à savoir
s’affranchir des facteurs de variabilité de la capsulotomie et les
études in vitro ou in vivo confirment de façon univoque le gain
de précision et de fiabilité obtenu
avec cette méthode pour le diamètre, le centrage et la circularité
de l’ouverture capsulaire par rapport à une technique manuelle
même bien maîtrisée.
Figure 5 - Rhexis femtoseconde (le diamètre, la régularité, le centrage et la circularité
sont améliorés de façon significative).
• capsulotomie ;
• incisions relaxantes pour la correction des astigmatismes ;
• incisions cornéennes claires tunnellisées autoétanches ;
• fragmentation du noyau cristallinien.
Capsulotomie
La capsulotomie manuelle a été
révolutionnée par la technique du
capsulorhexis curviligne continu.
Malgré l’entraînement et le développement de micropinces sophistiquées destinées à compenser les
difficultés ajoutées par la réduction de la taille des incisions, la
géométrie du capsulorhexis final
obtenu (taille, position, circularité) demeure variable. En dépits
des repères visuels qui sont la
géométrie pupillaire et limbique,
la déchirure capsulaire manuelle
est soumise aux aléas du mouvement de l’œil et de la tête du patient, de l’irrégularité de la dilatation, de l’angle de traction exercée
par la pince, de l’équilibre instable
entre pressions camérulaire et
cristalinienne et de la résistance
capsulo-zonulaire.
Pourtant cette géométrie joue un
rôle particulièrement important
dans le résultat de l’intervention.
• Un capsulorhexis trop petit
(< 5 ou 5,5 mm) favorise une fi72
brose capsulaire antérieure et un
capsulophymosis (en cas de laxité
zonulaire associée) ou un déplacement postérieur de l’optique
avec shift hypermétropique.
• Un capsulorhexis trop grand
(> 6 ou 6,5 mm) ou décentré favorise une capture de l’optique par la
capsule antérieure, occasionnant
un risque de tilt, de décentrement, d’opacification capsulaire
précoce ou de luxation antérieure
de l’implant.
• La taille ou la forme du capsulorhexis et le matériau ainsi que
le design de l’implant conditionnent la position antéropostérieure finale de l’optique qui est le
principal facteur de variation de
la puissance optique de l’implant
à long terme (pour les implants
les plus puissants, une différence
de 1 mm entraîne une erreur de
plus de 1,25 D).
• Les implants “premium” nécessitent une précision accrue, car
un décentrement.
• Les nouveaux implants accommodatifs nécessitent pour certains une géométrie spécifique
(élargie au niveau de la charnière
des haptiques afin de permettre le
débattement pour le Crystalens,
rétrécie pour s’opposer à la luxation antérieure du Synchrony).
Le laser femtoseconde permet de
Les études cliniques montrent
par exemple que le diamètre
moyen des capsulotomies varie
par rapport au diamètre prévu de :
• 27 ± 25 µm pour le système OptiMedica Catalys ;
• 183 ± 246 µm pour le système
LenSX ;
• moins de 250 µm pour le système Lensar ;
• 339 ± 248 µm (et jusqu’à
500 µm) pour les capsulotomies
manuelles.
Dans ces études, le centrage et la
circularité étaient significativement “meilleurs” pour le laser
femtoseconde que pour la méthode manuelle, et la variation
ultérieure de la taille et de la position du rhexis était réduite, indiquant une meilleure élasticité
résiduelle avec la cicatrisation
capsulaire (Fig. 5).
Incisions cornéennes
limbiques relaxantes
pour la correction de
l’astigmatisme
Les incisions relaxantes manuelles
sont efficaces mais peu précises
en raison d’une variabilité importante du résultat anatomique
(alignement sur l’axe de l’astigmatisme, profondeur, longueur angulaire et distance par rapport à l’axe
optique). Elles ne sont donc, de ce
fait, que peu utilisées par la majorité des opérateurs, qui leur préfèrent de plus en plus les implants
toriques, et la réalisation d’une
Pratiques en Ophtalmologie • Mars 2012 • vol. 6 • numéro 52
Comparaison des lasers femtoseconde
microincision cornéenne étroite
“optiquement neutre”.
Le laser femtoseconde permettra
sans doute d’améliorer, de façon
importante, la précision des incisions relaxantes conventionnelles
en automatisant la réalisation de
ces incisions en fonction de paramètres précis d’imagerie du segment antérieur en temps réel.
De nouveaux types d’incisions
intrastromales pures, moins efficaces mais plus stables, pourraient
également être réalisée par le laser femtoseconde pour réhabiliter cette approche réfractive en
chirurgie de la cataracte.
Incision cornéenne claire
L’incision cornéenne claire autoétanche est la voie d’abord majoritairement utilisée pour la phacoémulsification. Plus stable, plus
étanche et moins astigmatogène
que l’incision sclérale limbique
tunnellisée, sa réalisation a été optimisée par l’emploi systématique
de couteaux précalibrés à usage
unique de grande qualité, réduisant en particulier l’effort de pénétration nécessaire (nuisible à la
précision du geste) et le risque de
décollement descemétique.
Cependant, comme pour le capsulorhexis, et malgré l’expérience
croissante des opérateurs, cette
incision manuelle ne bénéficie
par toujours d’une “construction”
idéale, du fait de la variabilité des
repères tactiles et visuels permettant de contrôler la géométrie intracornéenne des plans successifs
assurant l’autoétanchéité. Il n’est
pas exceptionnel de constater une
tunnellisation trop courte ou trop
superficielle pouvant entraîner
une béance postérieure de l’incision peropératoire ou postopératoire, favorisée par la rétraction
thermique du stroma. Cette in-
Figure 6 - Exemples de schémas de fragmentation (en part de tarte, en damier,
­combiné).
suffisance d’efficacité de la valve
incisionnelle explique les rares
hernies iriennes peropératoire
(favorisées par une dilatation insuffisante ou par un floppy iris syndrome) et surtout l’augmentation
statistique du taux d’endophtalmie avec les incisions cornéennes
claires, notamment directes non
suturées par rapport aux incisions
en marches d’escalier en 3 plans.
Le laser femtoseconde apporte
dans ce domaine une précision
remarquable, permettant en particulier de réaliser des designs
d’incision angulée “manuellement impossibles”, destinés à favoriser l’engrènement des berges
et leur autoétanchéité spontanée.
La réduction de la durée de l’intervention pourrait également
contribuer à réduire le traumatisme des berges par l’effet thermique de la sonde de phacoémulsification et par la manipulation
des instruments.
Fragmentation nucléaire
du cristallin (Fig. 6)
Le laser femtoseconde permet
de créer des incisions intracristalliniennes selon un schéma
préétabli (circulaire, en damier,
en quadrants…) afin de favoriser
une hydratation et une séparation “préopératoire” du noyau
et de faciliter son extraction en
réduisant les temps de sculpture ultrasonique ou de clivage
instrumental (chop) nécessaires.
Pratiques en Ophtalmologie • Mars 2012 • vol. 6 • numéro 52
Cette optimisation du temps
opératoire, nécessitant un flux
d’irrigation endoculaire et d’ultrasons, pourrait contribuer à
minimiser les effets secondaires
d’origine thermique, mécanique,
ou hydraulique de la phacoémulsification et ainsi de limiter les
dommages tissulaires associés
dans les cas plus difficiles (lésions endothéliales, hernies ou
abrasion irienne, rupture capsulaire, rupture de la barrière hémato-oculaire, inflammation).
L’application des spots laser est
généralement postéroantérieure
afin d’éviter l’interférence des
premiers impacts avec les suivants et de réduire la transmission d’un éventuel rayonnement
secondaire vers le segment postérieur.
Les différents systèmes n’appliquent cependant pas les phases
de traitement successives dans le
même ordre.
• Le système LenSX fragmente
le noyau en premier puis effectue une nouvelle acquisition du
profil capsulaire antérieur pour
tenir compte de l’expansion cristallinienne induite par l’hydratation du noyau après fragmentation et réalise la capsulotomie,
dans un deuxième temps, sur une
capsule “sous pression”.
• Le système OptiMedica Catalys
effectue la capsulotomie puis la
fragmentation du noyau, grâce
à une focalisation précise sur la
73
à savoir
capsule qui réduit les interférences secondaires. Cela réduit
le risque de lésions capsulaires
secondaires à l’expansion du
cristallin après fragmentation.
Les études cliniques montrent une
réduction de l’énergie délivrée par
les ultrasons de l’ordre de 1/3 ou
plus pour les 3 lasers.
Dans une étude prospective
conduite par Culbertson et al.
comparant chez 29 patients un œil
traité par laser femtoseconde et
l’autre œil en chirurgical conventionnelle, l’utilisation des ultrasons a été réduite de 45 % sur des
cataractes de grade 1 à 3 (excluant
les grades 4).
Dans une autre étude non randomisée, Packer a montré une
réduction des lésions endothéliales par le laser femtoseconde
(absence de perte endothéliale)
comparativement à la chirurgie
conventionnelle (perte endothéliale de 1 à 7 %).
Un coût élevé
Si l’avancée technologique est aujourd’hui indéniable, le modèle
économique du laser femtoseconde pour la chirurgie de la cataracte reste encore très douteux.
Le surcoût entraîné par l’utilisation de la technologie femtoseconde pour la chirurgie de la cataracte paraît encore prohibitif par
rapport à l’amélioration du service
médical rendu suggérée par les
études récentes.
Ce surcoût est en effet de l’ordre
de 400 euros supplémentaires par
procédure pour un centre effectuant un volume important, soit
plus de 40 % du budget GHS actuel
de l’intervention).
Le bénéfice de l’intervention
pour le patient et le chirurgien
semble pour l’instant marginal
(amélioration de la précision de
la capsulotomie et de l’incision
cornéenne, réduction modérée de
l’énergie délivrée par l’économie
de phacofragmentation aux ultrasons permis par les incision nucléaires au laser) en l’absence de
statistiques prospectives solides
permettant d’établir, de façon indiscutable, une éventuelle réduction de la morbidité induite (taux
d’œdème maculaire cystoïde, de
décollement de rétine, d’endophtalmie, d’astigmatisme interne
induit par le déplacement des optiques à long terme) ou une amélioration de la précision réfractive
permises par cette approche.
La technologie laser restera cependant un puissant facteur d’attraction pour les patients, qui
seront probablement facilement
convaincus de la supériorité théorique d’un faisceau lumineux high
tech sur le “bistouri” conventionnel, fût-il ultrasonique. Cette
technologie est déjà, de ce fait, un
moteur efficace de marketing pour
les centres chirurgicaux pionniers
de la méthode outre-Atlantique, et
semble-t-il, de ce côté de la mer du
Nord.
Le tableau 1 résume les caractéristiques techniques de ces lasers. n
Mots-clés :
Laser femtoseconde, Chirurgie
de la cataracte, Capsulotomie
Tableau 1 - Comparatif technique des différents lasers femtoseconde.
OptiMedica
TechnoVision
Lensar
Alcon
Modèle
Catalys
Victus
Lensar
LensX
Interface patient
Optique liquide
(immersion)
Concave
Robocone (immersion)
Concave
Identification des
interfaces oculaires
Automatique,
ajustable
Manuelle
Automatique
Manuelle
Imagerie
OCT spectral
domain 3D
OCT en ligne
(monitoring en
temps réel)
Confocal 3D à balayage (structured
illumination)
OCT 3D
Dimensions
(en pouces)
35 x 65’’
42 x 82’’
78 x 36’’
48 x 62’’
Site web
www.optimedica.com
www.technolaspv.com
www.lensar.com
www.lensxlasers.com
74
Pratiques en Ophtalmologie • Mars 2012 • vol. 6 • numéro 52
Explorations et innovations
Les aberromètres
“nouvelle génération”
Le cas du système KR-1W,
un concentré de fonctionnalités
n
Les aberromètres ont connu, au cours des dix dernières années, un essor considérable.
Certains aberromètres “nouvelle génération” concentrent des mesures réfractives, topographiques et aberrométriques dans un seul dispositif. Ces caractéristiques en font-ils des systèmes diagnostiques incontournables ? A en juger la nouvelle technicité et la sophistication
des nouveaux implants et traitements réfractifs actuels, probablement. L’objectif reste cependant inchangé. Optimiser la qualité de vision de nos patients, qu’ils soient futurs candidats à
une chirurgie réfractive, opérés cornéens, pseudophaques, ou porteurs de lentilles de contact.
Raphaël Amar (1) *,**, Dr Dan Alexandre Lebuisson*,**, Dr Catherine Albou-Ganem *,***
L
e système KR-1W (Topcon)
(Fig. 1) permet de délivrer en
une seule acquisition les
éléments diagnostiques suivants :
• réfraction objective ;
• analyse kératométrique ;
• topographie cornéenne de type
“Placido” avec délivrance du facteur Q d’asphéricité cornéenne ;
• analyse aberrométrique basée
sur une acquisition Wavefront de
type Schack-Hartmann ;
• analyse de la qualité de vision
par la restitution de la PSF (fonction d’étalement du point) et des
courbes MTF (fonction transfert
de modulation) ;
• pupillométrie en ambiance photopique et scotopique.
Ce dispositif rejoint cependant,
par sa polyvalence similaire, le
* Clinique de la Vision
* Hôpital américain de Paris
*** CHNO des Quinze-vingt
(1) Contact : Raphaël Amar, orthoptiste :
[email protected]
Figure 1 - Le topo-aberromètre KR-1W.
système OPD Scan développé par
la société Nidek, qui connaît actuellement la distribution de sa
troisième génération. Plusieurs
caractéristiques techniques distinguent les deux dispositifs en
Pratiques en Ophtalmologie • Mars 2012 • vol. 6 • numéro 52
pratique clinique courante. Nous
aborderons dans notre article les
principes, les caractéristiques et
les spécificités du système KR-1W,
ainsi que son intérêt en pratique
quotidienne (Fig. 1).
75
Explorations et innovations
Figure 2 - Technologie du prisme rotatif utilisée pour l’analyse kérato-réfractométrique permettant d’optimiser la fiabilité des mesures.
Principes et
caractéristiques
techniques du
système
Le système KR-1W associe trois
principales technologies.
Technologie du prisme
rotatif 
La kérato-réfractométrie automatisée, ainsi que l’autoréfractométrie, sont basées sur
la technique du prisme rotatif
propre à la gamme des autoréfractomètres KR de la société Topcon.
Cette technologie vise à optimiser
la qualité de prise de mesures car
favorise l’acquisition sur une plus
large zone et dépasse les limites de
certains appareils en cas de petite
pupille (Fig. 2).
Topographie cornéenne
par projection des mires de
Placido
La topographie cornéenne repose sur la technologie connue
de la projection du disque de
Placido. L’analyse cornéenne est
évaluée sur une surface étendue et
Figure 3 - Image de la surface cornéenne par la visualisation des mires de Placido. Le
dispositif permet de délivrer notamment la carte de puissance axiale cornéenne.
76
délimitée selon un anneau défini
par un rayon minimum de 0,8 mm
et un rayon maximum de 9,2 mm
(Fig. 3).
Technologie d’analyse du
front d’onde de type ShackHartmann
Enfin, les analyses aberrométriques quantitatives et qualitatives sont basées sur la technologie d’analyse de front d’onde
(Wavefront) de type SchackHartmann.
La particularité des aberromètres
de type Shack-Hartmann est une
analyse au niveau du plan pupille
(à la sortie) de la distorsion du
front d’onde.
Les aberromètres de type ShackHartmann sont composés d’une
matrice de microlentilles placée
devant un capteur sensible à la
lumière (caméra CCD). Ces deux
systèmes sont situés dans des
plans parallèles.
A l’arrivée d’un faisceau, chaque
microlentille génère sur le capteur un point de focalisation, dont
la position varie, en fonction de
la déformation locale du front
d’onde, autour de sa position de référence, correspondant à un front
d’onde non déformé (front d’onde
plan) (Fig. 4).
A partir de la matrice résultante, le
système génère la cartographie de
Pratiques en Ophtalmologie • Mars 2012 • vol. 6 • numéro 52
Les aberromètres de “nouvelle génération”
la distorsion du front d’onde avec
les avances (couleurs chaudes)
et retards de front d’onde (couleurs froides) par rapport au front
d’onde plan de référence (couleur
verte).
La particularité du système
KR‑1W est de combiner ces trois
technologies tout en respectant
spécifiquement une condition
essentielle pour permettre une
bonne reproductibilité et fiabilité
des mesures : le système KR-1W
utilise systématiquement le même
axe de référence par chaque nature de relevé. Cette particularité
technique permet d’éviter toute
erreur possible d’alignement
entre les mesures d’aberrométrie
et d’analyse cornéenne et accroît
considérablement la fiabilité de
ses mesures.
D’autre part, cette technologie
combinée permet d’obtenir l’analyse distincte des aberrations totales et cornéennes sur des zones
d’analyses différentes : 4 et 6 mm,
Figure 4 - Principe de recueil de la distorsion du front d’onde par les aberromètres de
type Shack-Hartmann. L’analyse du front d’onde se fait à la sortie de l’œil par une ma-
ainsi que sur le diamètre pupillaire
réel d’acquisition (Fig. 5 et 6).
Un concentré de
fonctionnalités
Le système KR-1W est un dispositif compact, rapide et ergonomique qui s’intègre facilement
dans une unité d’exploration ophtalmologique générale, de contactologie ou de chirurgie réfractive.
Son mode automatique et manuel permet une utilisation facile.
L’acquisition se fait en 20 à 30 secondes pour les deux yeux. Il est
recommandé de faire au moins
trois mesures sur chaque afin de
pouvoir sélectionner la meilleure
acquisition.
Si de très nombreuses informations sont acquises grâce au KR1W, l’utilisation de celles-ci au
quotidien nécessite un tri et une
bonne connaissance des données
topographiques, et surtout aberrométriques. La densité des informations recueillies oblige cependant à déterminer des cartes
de lecture personnalisée sur lesquelles figurent les données que
l’on souhaite y voir figurer. Le système offre cette opportunité en
créant son propre modèle de page
de résultats.
trice de microlentilles qui génère différents points de focalisation sur une caméra CCD.
Réfraction objective :
analyse globale et
reproductible
Figure 5 - Schéma optique du système KR-1W utilisant la technologie du prisme rotatif
et de l’analyse du front d’onde de type Shack-Hartmann.
Pratiques en Ophtalmologie • Mars 2012 • vol. 6 • numéro 52
Tel qu’un autoréfractomètre classique, le système KR-1W délivre
des données de réfraction objective. Le système prend automatiquement trois mesures. Il peut
être également utilisé en mode
manuel.
La reproductibilité des mesures
interindividuelles a fait l’objet
d’une publication, en novembre
2010, dans le Journal of Refractive Surgery (1) par D.P. Pinero,
J.T. Juan, J.L. Alio. Les auteurs ont
77
Explorations et innovations
cependant analysé la reproductibilité de l’évaluation quantitative
des aberrations optiques internes,
notamment sur des zones de 4
et 6 mm. Cet article a mis en évidence une bonne reproductibilité
des mesures aberrométriques sur
26 yeux de 26 patients. Au-delà de
leur conclusion propre à l’étude
des aberrations, les auteurs rapportent, dans la discussion, plusieurs points techniques rendant
ce dispositif reproductible (Fig. 7).
Une fois l’acquisition réalisée, le
système propose plusieurs cartes
de lecture de résultats (Fig. 8 et 9).
La première éditée par le dispositif
est une carte multiple permettant
d’avoir, en une seule lecture, de
nombreuses informations réfractives, topographiques et aberrométriques.
Kératométrie et topographie
cornéenne (Fig. 9)
Grâce au dispositif du prisme rotatif et de la projection des mires
de Placido, le système délivre des
données essentielles pour l’analyse cornéenne :
• valeurs de la kératométrie en
rayon de courbure ou en puissance
dioptrique (sim K) ;
• valeur de l’astigmatisme cornéen ;
• valeur de l’asphéricité cornéenne
et de l’excentricité cornéenne ;
• topographie cornéenne antérieure axiale, et/ou spontanée
(tous les paramètres habituels de
lecture sont modifiables).
Figure 6 - L’une des caractéristiques principales du système KR-1W est d’utiliser le
même axe de référence pour ses trois principales acquisitions, kérato-autoréfractométrie, topographie Placido et aberrométrie. Cette particularité accroît sa fiabilité et évite
tout biais de mesure relatif à un défaut d’alignement d’axe de référence.
Analyse aberrométrique
globale : cornéenne et
interne
Le système a la principale particularité de délivrer des données optiques et aberrométriques globales
et individuellement internes et/
ou cornéennes. Ce concept n’est
cependant pas nouveau. D’autres
systèmes tels que l’OPD Scan III
(Nidek) et le système iTrace
78
Figure 7 - Mesure de la réfraction objective chez une patiente implantée par un IOL AT
Lisa. La topographie supérieure représente le relevé des aberrations totales de l’œil.
Les trois mesures consécutives sont quasi identiques.
Pratiques en Ophtalmologie • Mars 2012 • vol. 6 • numéro 52
Les aberromètres de “nouvelle génération”
(Tracey Technologies) permettent
de distinguer l’analyse des aberrations globales (cornéennes et
internes). Cependant, le KR-1W
présente deux particularités techniques : le cycle (temporel) des
mesures topographiques et aberrométriques est le même, évitant
ainsi tout retard de traitement de
l’analyse optique, et l’axe de référence est identique quelle que soit
l’analyse réfractive, topographique
ou aberrométrique. Ces points
sembleraient éviter des biais de
prises de mesures et permettraient également d’accroître le niveau de fiabilité des mesures. Par
ailleurs, l’analyse aberrométrique
est obtenue par un analyseur de
front d’onde (Shack-Hartmann)
pour le système KR-1W ,alors que
l’OPD Scan utilise le procédé de
skiascopie dynamique (Fig. 10 et 11).
L’analyse optique et aberrométrique différentielle (oculaire, cornéenne, interne) trouve son intérêt dans différentes situations du
quotidien (liste non exhaustive) :
• pour l’étude de la nature des
astigmatismes : en bilan préopératoire de cataracte, cette information est utile pour savoir si un
implant torique est nécessaire.
Une indication d’implant torique
est posée dès que l’astigmatisme
cornéen dépasse les 1 à 1,5 D ;
• pour le suivi des cornées à
risque : le suivi de l’astigmatisme
spécifiquement cornéen (kératocône, ectasie…) (Fig. 12) ;
• dans le cadre du suivi postopératoire de cataracte par implant :
pour vérifier la qualité de vision
et la bonne orientation de l’axe de
l’implant par la lecture de l’astigmatisme interne (Fig. 13) ;
• dans le cadre du suivi postopératoire des chirurgies photoablatives
ou intrastromales par laser femtoseconde : afin d’étudier cliniquement l’efficacité des traitements
Figure 8 - Carte topographique multiple. 1. Relevé de la topographie cornéenne axiale
(échelle normalisée mais modifiable). 2. Relevé des aberrations optiques totales
internes et cornéennes. 3. Réfraction objective. 4. Relevé des aberrations de haut de
degré internes et cornéennes. 5. Kératométrie. 6. Relevé des aberrations exclusivement
cornéennes. 7. Décomposition quantitative des aberrations totales et cornéennes sur différents diamètres pupillaires. 8. Analyse de la matrice résultante du front d’onde sortant.
Figure 9 - Carte topographique cornéenne chez une patiente présentant un kératocône
fruste. 1. Projection de la topographie cornéenne sur la prise de mesure. 2. Indices cornéens : kératométrie (Sim-K) sur les deux méridiens principaux, valeurs de la puissance
et de l’axe du cylindre cornéen, valeur de l’excentricité cornéenne relative à l’asphéricité
cornéenne facteur Q = - ε². 3. Relevé de la topographie cornéenne axiale confirmant
l’asymétrie (ici échelle normalisée). 4. Relevé de la topographie cornéenne instantanée
(échelle normalisée, modifiable). 5. Relevé topographique des aberrations cornéennes
de haut degré, visualisation de la distorsion du front d’onde avec prédominance d’une
coma verticale. 6. Valeurs quantitatives des aberrations de coma et aberrations sphériques (ordres 3, 4, 5, 6) sur 4 et 6 mm ainsi que sur le diamètre réel de mesure.
Pratiques en Ophtalmologie • Mars 2012 • vol. 6 • numéro 52
79
Explorations et innovations
proposés et de pouvoir justifier
certaines gênes potentielles ressenties par le patient (décentrements, imprécision de puissance
ou d’axe d’astigmatisme…) (Fig. 14) ;
• pour l’indication et le suivi des
traitements thérapeutiques cornéens tels que “anneaux intracornéens”, “cross linking”, “incisions
arciformes”… ;
• l’efficacité d’une adaptation en
lentilles de contact ;
• l’analyse de la qualité de vision
en général, et bien d’autres situations…
Analyse aberrométrique
quantitative et qualitative
L’analyse du front d’onde constitue le point clé de ce dispositif. Par
des mécanismes de “soustraction”
des mesures faites sur la cornée, le
système KR-1W délivre des données reproductibles totales, internes et cornéennes. D.P. Pinero
et al. confirment dans leur article
publié récemment la bonne reproductibilité des mesures sur 4 mm
et sur 6 mm. Les résultats rapportés par les auteurs dans cette étude
sont significatifs.
Sur le plan spécifiquement aberrométrique, les principales spécificités du KR-1W sont :
• l’analyse aberrométrique différentielle (cornée + interne) ;
• l’analyse des aberrations sur
une zone de 6 et surtout 4 mm. Ce
point est important car lorsque
nous évaluons nos patients en postopératoire de chirurgie de la presbytie pour laquelle certaines zones
de traitement sont limitées à 2 ou
3 mm, il est intéressant d’obtenir
des valeurs plus spécifiques aux
zones d’analyse souhaitées ;
• la délivrance instantanée des
valeurs de l’aberration sphérique
(Z4,0), oculaire, cornéenne et interne (information devenue intéressante pour le choix plus précis
des implants asphériques).
80
Figure 10 - Cartographie globale permettant de mettre en évidence la nature des défauts optiques, topographiques et aberrométriques. 1. Topographie cornéenne axiale.
2. Relevé des aberrations cornéennes totales. 3. Réfraction objective de l’œil examiné :
ici +0,25 (-2,50 à 178°). 4. Projection et régularité de mires de Placido. 4bis. Diamètre
pupillaire au moment de la mesure (variable selon l’ambiance lumineuse de la pièce).
5. Relevé de la matrice résultante du front d’onde sortant. 6. Cartographie, puissance
et axe de l’astigmatisme évalué (oculaire, interne, cornéen). 7. Cartographie et valeur
de l’aberration sphérique sur une zone de 6 mm (ici non évaluée à tous les niveaux).
8. Cartographie et valeur des aberrations de haut degré (oculaire, interne, cornéen). 9.
Simulations faites par le système de la perception de l’œil examiné, de l’acuité visuelle
et de la qualité de perception des optotypes (anneaux de Landolt). Le descriptif de la
partie inférieure fera l’objet d’une analyse plus spécifique plus bas.
Figure 11 - Cartographie globale permettant de mettre en évidence la nature interne
ou cornéenne de l’astigmatisme d’un patient. Notons que l’astigmatisme global évalué
ici est -2,85 à 179°, astigmatisme cornéen : -4,08 à 179°, astigmatisme interne : -1,22 à
88°. La réfraction subjective de l’œil examiné : +0,25 (-2,50 à 180°).
Pratiques en Ophtalmologie • Mars 2012 • vol. 6 • numéro 52
Les aberromètres de “nouvelle génération”
De très nombreuses données sont
fournies par le système et il est
important d’identifier certains
points clés.
Parmi les données quantitatives
on retiendra notamment :
• la valeur des aberrations totales
RMS (Root Mean Square) correspondant aux aberrations totales
sur une zone d’analyse donnée ;
• la valeur des aberrations de haut
degré (supérieures au 3e degré),
HOA RMS (Higher-Order Aberration RMS) ;
• la valeur des aberrations de
coma de troisième et de cinquième
ordre : S3, S5 ou S3+S5 ;
• la valeur des aberrations sphériques de quatrième et de sixième
ordre : S4, S6 ou S4+S6.
Les valeurs révélées au-delà des
plages de “normalité” s’affichent
en rouge pour faciliter l’interprétation des données.
L’analyse est également possible
avec des cartes plus précises, mettant en évidence une décomposition polynomiale des aberrations
optiques de haut degré totale,
cornéenne et interne : aberration
sphérique, aberration de coma,
aberration de Trefoil (Fig. 15).
Figure 12 - Dépistage de kératocône.
Figure 13 - L’analyse permet de vérifier en postopératoire la bonne implantation d’un
implant torique. Ici le KR-1W a permis de mettre en évidence une erreur de puissance
d’astigmatisme interne induit par la pose d’un implant torique trop fort.
Au-delà des données quantitatives, d’autres éléments qualitatifs
sont fournis par le système (Fig. 16) :
• l’analyse de l’image de Hartmann.
Une bonne qualité de mesure et de
restitution du front d’onde sortant
est caractérisée par la présence de
tous les points de la matrice résultante encore appelée “image de
Hartmann”.
Une carte spécifique et synthétique apporte des éléments précieux de nature qualitative par
l’analyse (Fig. 16) :
• de la PSF - Point Spread Function
(fonction d’étalement du point) ;
• de la courbe MTF - Modulation Transfer Function (fonction
Figure 14 - Vérification de l’aberration sphérique cornéenne induite par un traitement
presbyLasik. La valeur est ici mesurée à 0,084 microns.
Pratiques en Ophtalmologie • Mars 2012 • vol. 6 • numéro 52
81
Explorations et innovations
transfert de modulation) ;
• des simulations des anneaux de
Landolt.
Une des limites du système réside dans le fait que les données
évaluées ne permettent pas de les
exporter sur un laser spécifique
permettant de délivrer des traitements guidés par aberrométrie.
Figure 15 - Décomposition des types d’aberrations totales et de haut degré sur des
Aide à l’indication opératoire
et au choix de l’implant
Le système KR-1W peut participer
à l’aide à l’indication de la chirurgie du cristallin clair ou cataracté,
figure 17.
En 1, le système précise le niveau
d’aberration totale cornéen. En cas
de niveau trop élevé, une indication
d’implant ne serait pas adaptée.
En 2, le KR-1W permet de détecter
des irrégularités cornéennes trop
importantes. Cet indice permet
de mettre en évidence instantanément les cornées opérées et ajoute
un niveau de vigilance.
En 3, on peut lire le niveau d’aberration sphérique cornéenne sur une
zone de 6 mm. Cet indice renseigne
sur la nécessité potentielle d’adapter l’asphéricité de l’implant en cas
d’indication (implant asphérique
avec une aberration sphérique négative ou positive, implant à aberration sphérique nulle). On visera
une aberration sphérique totale
proche de 0,1 en fonction de l’aberration sphérique cornée trouvée.
En 4, le système KR 1W mentionne
l’astigmatisme cornéen. Cette information impacte directement
sur le choix d’un implant torique
ou non. Le seuil est compris entre
1 et 1,5 D. Au-delà, il sera proposé
un implant torique.
Aide au dépistage des yeux
secs par l’analyse des
aberrations de haut niveau
Plusieurs travaux ont mis en évidence une relation entre une
82
diamètres d’analyse de 4 et 6 mm.
Figure 16 - Analyse de la qualité de vision obtenue par le système KR-1W chez une
jeune patiente porteuse d’un implant Restor. 1. Image de Hartman. 2. PSF. 3. Courbe
MTF. 4. Simulation de perception des anneaux de Landolt.
Figure 17 - Carte d’aide à l’indication du choix de l’implant. Les couleurs d’affichage
des chiffres facilitent l’interprétation. En vert, les valeurs sont considérées comme
normales, en orange comme suspectes et en rouge comme anormales.
Pratiques en Ophtalmologie • Mars 2012 • vol. 6 • numéro 52
Les aberromètres de “nouvelle génération”
mauvaise qualité de film lacrymal
ou sécheresse oculaire et une
augmentation des aberrations
de haut degré, se traduisant pour
le patient par une impression de
“flou” malgré une correction optique optimale. Le système permet
d’aborder cette problématique en
permettant la mesure des aberrations de haut degré totales et
cornéennes sur une durée allant
jusqu’à 10 secondes.
En cas d’élévation anormale de ces
aberrations de haut degré (HOA
RMS), on pourra alors suspecter
des problèmes liés à une sécheresse oculaire. Cette fonction
pourra être utile au niveau du diagnostique et du suivi (Fig. 18).
Figure 18 - Le système analyse les HOA RMS totales sur 4 mm pendant 10 s. En cas de
sécheresse oculaire, on trouverait une augmentation significative du niveau des HOA
Analyse de la pupillométrie
L’analyse de la pupillométrie est
essentielle pour deux principales
raisons :
• cette mesure va permettre en
préopératoire de mieux préciser
l’indication chirurgicale et les paramètres optiques tels que la zone
optique de traitement ;
• la pupillométrie va nous renseigner en postopératoire sur la
potentielle explication de gênes
visuelles ressenties par le patient.
Le système adapte automatiquement le niveau d’illumination de
la mire de visualisation et permet
de fournir le diamètre pupillaire
en ambiance scotopique et photopique. Plusieurs données aberro-
RMS à la dixième seconde. Dans le cas du patient évalué ici, le total des HOA RMS passe
de 0,122 microns à 0,108 microns à la dixième seconde. Aucun élément en faveur d’une
suspicion de sécheresse oculaire.
métriques quantitatives complètent l’analyse globale de la qualité
de vision du patient.
Conclusion
Le système KR-1W est un appareil
diagnostique présentant des fonctionnalités intéressantes pour une
pratique réfractive mais également
pour une pratique de contactologie et d’ophtalmologie générale.
Les caractéristiques techniques
propres à ce dispositif précisent les
valeurs des données. L’ergonomie
de réalisation et de lecture offre
un atout majeur à ce dispositif récent. La densité d’informations est
cependant à trier pour optimiser
une lecture rapide des résultats en
fonction des buts recherchés en
préopératoire ou postopératoire. n
Les auteurs ne déclarent n’avoir aucun
conflit d’intérêt.
Mots-clés : Aberromètre,
Topographie ­cornéenne, Aberrations,
Qualité de vision
Pour en savoir plus
• Pinero DP, Juan JT, Alio JL. Intrasubject repaetability of internal aberrometry obtained with a new integrated aberromètre. J Refract Surg 2010 ;
15 : 1-9.
• Mntes-Mico R, Caliz A, Alio JL. Wavefront analysis of higher order aberrations in dry eye patients. J Refract Surg 2004 ; 20 : 243-7.
Pratiques en Ophtalmologie • Mars 2012 • vol. 6 • numéro 52
• Wang Y, Xu J, Sun X et al. Dynamic wavefront aberrations and visual acuity in normal and dry eyes. Clin Exp Optom 2009 ; 92 : 267-73.
• Amar R, Lebuisson DA, Albou-ganem C Nouvel analyseur de front d’onde
KR-1W : des multiples fonctionnalités diagnostiques aux spécificités réfractives. Chirurgies réfractives 2011, Ed spécial CLV, Réalités. Avril 2011.
83
Mise au point
Quelle est la place des
compléments alimentaires dans
la prise en charge de la DMLA ?
L’actualité détaillée
Dr Valérie Le Tien*
Introduction
La modification des habitudes
alimentaires a entraîné, depuis
quelques années, une augmentation de la (l’auto)consommation de
“suppléments” en vitamines, minéraux, ou autres, sur la base des
modèles anglo-saxons. En ophtalmologie, seule la supplémentation
en antioxydants telle que définie
dans l’étude AREDS (Age-Related
Disease Study Research Group), en
prévention du risque de DMLA (Dégérescence Maculaire Liée à l’Âge),
possède une réelle indication démontrée scientifiquement. Le rôle
du médecin ophtalmologiste est
donc primordial afin de guider le
patient dans la prise de ces compléments alimentaires.
Prévenir le risque de
DMLA : ce que l’on sait
Nous savons depuis l’étude
AREDS 1 (1), publiée en 2011,
qu’une supplémentation en antioxydants à haute dose (vitamine
C, E, bêta-carotène, zinc et cuivre)
diminue de 25 % le risque de progression et d’aggravation de la
DMLA néovasculaire pour les patients à risque (stade 3 et 4 de la
* Service d’ophtalmologie, centre hospitalier intercommunal,
Créteil
classification AREDS) et de 27 % la
perte d’acuité visuelle. Le concept
de prévention de la DMLA, c’est-àdire la possibilité de limiter les
risques d’évolution des formes
précoces vers des formes
avancées de la maladie, n’avait
jusqu’alors jamais été aussi
clairement évoqué.
Au-delà des antioxydants qui composaient initialement la formule
de l’étude AREDS, d’autres nutriments ont suscité un intérêt croissant dans la prise en charge des
formes précoces de la maladie.
Le pigment maculaire
Le pigment maculaire, composé notamment de la lutéine, de la zéaxanthine et de la méso-zéaxanthine, est
présent dans les couches axonales
des photorécepteurs. Il protège la
macula via deux modes d’action : un
effet antioxydant direct et un effet
physique de filtration des courtes
longueurs d’onde. Ces nutriments
ne sont pas synthétisés par l’organisme et leur apport est exclusivement alimentaire. Il existe de
nombreux arguments épidémiologiques en faveur du rôle protecteur
de la lutéine et de la zéaxanthine
vis-à-vis du risque de DMLA. Une
récente méta-analyse a montré que
la consommation de lutéine et de
zéaxanthine n’était pas significativement associée à une diminution
Pratiques en Ophtalmologie • Mars 2012 • vol. 6 • numéro 52
du risque de DMLA précoce. Par
contre, elle protège significativement du risque de DMLA néovasculaire (2).
Les acides gras polyinsaturés
Les acides gras polyinsaturés de la
famille des oméga-3 : acide docosahexaénoïque (DHA), acide éicosapentaénoïque (EPA). Le poisson
représente la principale source
alimentaire d’omega 3. Toutefois,
on en trouve également dans les
œufs, et dans certaines huiles végétales telle l’huile de colza, ou
dans les noix.
Plusieurs études ont suggéré
depuis, un effet protecteur des
oméga-3 vis-à-vis du risque de
DMLA, en particulier néovasculaire d’après l’étude ALIENOR
(Antioxydants, Lipides Essentiels,
Nutrition et Maladies Oculaires).
Toutefois, il semble que les différentes classes d’oméga-3
aient des intérêts particuliers.
Le DHA est un composant structurel majeur au sein du système
nerveux central. Les membranes
cellulaires de la rétine contiennent de très fortes concentrations
de DHA. Il régule le fonctionnement de la membrane des photorécepteurs en modifiant la perméabilité, l’épaisseur, la fluidité et
les propriétés physico-chimiques
membranaires. L’EPA possède
des propriétés vasorégulatrices, et
85
Mise au point
anti-inflammatoires. La consommation d’acide linolénique (ALA),
précurseur des oméga-3 à longue
chaîne, est également associée à
une diminution significative du
risque de DMLA néovasculaire.
L’EFSA (Autorité Européenne
de sécurité des Aliments) reconnaît ainsi qu’ « une relation de
cause à effet est établie entre
la consommation de DHA et
le maintien d’une vision normale ». Elle conseille, pour la
population générale, un apport
journalier de 250 mg par jour
pour revendiquer cette action. Les
doses préconisées en prévention
du risque de DMLA sont encore à
déterminer de façon consensuelle.
De nombreuses
interrogations
La consommation de compléments
alimentaires en prévention de la
DMLA entraîne un certain nombre
de questions encore sans réponses
aujourd’hui. L’étude AREDS I demeure à ce jour la seule étude interventionnelle prospective randomisée de référence. Mais la formule
initiale telle qu’utilisée dans l’étude
paraît difficile à appliquer :
• le bêta-carotène a potentiellement un impact négatif sur les fumeurs ou anciens fumeurs qui en
consomment, en favorisant l’apparition du cancer du poumon (3) ;
• comment intégrer les caroténoïdes et les oméga-3 dans la
stratégie de prévention, en sachant qu’ils n’appartenaient pas à
la formule initiale de l’AREDS 1 ?
Il est aujourd’hui impossible de
faire abstraction du rôle protecteur de ces éléments vis-à-vis de
la DMLA au vu du nombre de publications et d’études (épidémiologiques, observationnelles) parues.
86
Tableau 1 - Classification de l’AREDS.
Catégorie 1
- Pas d’anomalie au fond d’œil
- Moins de 5 drusen miliares
- Aux deux yeux
Catégorie 2
- Altérations de l’épithélium pigmentaires et/ou multiples
drusen miliaires, ou quelques drusen intermédiaires
- Aux deux yeux
Catégorie 3
- Drusen séreux
- Nombreux drusen intermédiaires
- Atrophie géographique non centrale
- Absence de DMLA avancée
Catégorie 4
- Présence d’une DMLA avancée à un œil
(atrophie géographique centrale, DMLA néovasculaire)
Figure 1 - Patient présentant une maculopathie liée à l’âge marquée (nombreux drusen séreux) à un œil et une DMLA avancée à l’autre œil (stade 4 de la classification de
l’AREDS). La mise en place d’un traitement préventif chez ce patient afin de limiter le
risque d’évolution du deuxième œil est justifiée.
Néanmoins, les doses à utiliser et
les indications précises ne sont
pas encore déterminées. L’étude
AREDS 2 est la suite logique de
l’étude AREDS 1. L’objectif de
cette nouvelle étude, dont les résultats ne seront pas connus d’ici
plusieurs années, est d’évaluer de
façon plus précise la composition
initiale de l’AREDS 1, mais aussi
l’intérêt d’y associer des oméga-3
et des pigments maculaires dans
la diminution du risque de DMLA.
Elle tente également de préciser le
rôle exact du bêta-carotène, dont
l’association est contre-indiquée
en cas d’antécédents de tabagisme.
1 000 patients chacun, soumis à
une supplémentation soit en pigments maculaires (lutéine 10 mg
et zéaxanthine 2 mg), soit en oméga-3 (DHA et EPA), soit une association de pigments maculaires et
d’oméga-3, soit un placebo ;
Elle est divisée en deux bras principaux :
Il existe un grand nombre de compléments alimentaires à disposition du prescripteur. Leur composition est inégale, tant en termes de
dosage que du type de nutriments.
• une première randomisation
déterminera quatre groupes de
• une deuxième randomisation déterminera l’intérêt de maintenir le
bétacarotène par rapport à la formule initiale.
Compléments
alimentaires et DMLA :
comment prescrire en
attendant AREDS 2 ?
Pratiques en Ophtalmologie • Mars 2012 • vol. 6 • numéro 52
compléments alimentaires et DMLA
Sur le plan qualitatif tant que quantitatif, il paraît aujourd’hui raisonnable de rester près des connaissances scientifiques actuelles. En
l’absence de traitements curatifs,
la mise en place de traitements
préventifs pour les patients à haut
risque (stade 3 et 4 de l’AREDS) est
justifiée (Tab. 1) (Fig. 1). L’information
du patient concernant son traitement préventif est essentielle pour
l’observance, d’autant plus que
ces traitements ne sont pas remboursés par la Sécurité sociale. Les
résultats d’une étude récente ont
montré que plus d’un tiers des patients suivis par un spécialiste en
rétine médicale et candidats à une
supplémentation en antioxydants
ne prenaient aucun traitement
préventif ou prenaient des antioxydants à des doses incorrectes (4). La
posologie doit être expliquée afin
d’éviter par exemple la discordance
possible entre les doses prescrites
sur la notice et celles prescrites par
l’ophtalmologiste.
de favoriser un dépistage précoce
de la maladie. n
Mots-clés :
DMLA, Prévention, AREDS,
Pour conclure
­Compléments alimentaires
En conclusion, la prévention de la
DMLA demeure un point incontournable de la prise en charge de
la maladie. En effet, les seuls traitements disponibles concernent la
DMLA exsudative en assurant essentiellement une stabilisation de
la maladie. Les résultats des études
randomisées interventionnelles
(AREDS 2) seront précieux. En attendant, ceux de l’étude AREDS 1
de 2001 demeurent la seule référence à ce jour même s’ils doivent
être adaptés à nos connaissances
actuelles. Enfin, l’information du
grand public est primordiale afin
Bibliographie
1. Age-Related Eye Disease Study Research
Group. A randomized, placebo-controlled,
clinical trial of high-dose supplementation
with vitamins C and E and beta carotene
for age-related cataract and vision loss:
AREDS report n° 8. Arch Ophthalmol 2001 ;
119 :1417-36.
2. Ma L, Dou HL,Wu YQ et al. Lutein and zeaxanthin intake and the risk of age-related macular
degeneration: a systematic review and metaanalysis. Br J Nutr 2012 ; 107 : 350-9.
3. Tanvetyanon T, Bepler G. Beta-carotene in
multivitamine and the possible risk of lung
cancer among smokers versus former smokers: a meta-analysis and evaluation of national brands. Cancer 2008 ; 113 : 150-7.
4. Charkoudian LD, Gower EW, Solomon SD
et al. Vitamin usage patterns in the prevention of advanced age-related macular degeneration. Ophtalmology 2008 ; 115 : 1032-8.
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Château Roussillon / Mas Llaro / Mas Vermeil /
Mas Saint Pierre : 4 300 pers
Bassin de population rayon 30 minutes : 300 000 pers
Possibilité activité mixte en clinique selon spécialité
Activités médicales et paramédicales présentes dans le centre : Généraliste, Pédiatres, Gynéco, Dentistes, Kiné, Infirmiers, Opticien, Audition,
Pharmacie
Qualité de vie : Mer, Montagne, Espagne
5 minutes de la plage, 20 minutes de l’Espagne, 45’ Barcelone (TGV) et
1h20 des stations de ski
Local récent RDC, accès handicapés , TBE, salle d’attente, salle d’eau,
Grand parking
Bail individuel
Prix selon choix du local
Plan et renseignements complémentaires : 06 84 64 33 96
frédé[email protected]
87
Zoom sur
Baisse d’acuité visuelle
du sujet jeune
Intérêts de l’IRM en urgence
Dr Samuel Bidot*, Dr Frédérique Charbonneau**, Dr Catherine Vignal-Clermont***
jection ou non de produit de
contraste (gadolinium) dépendent étroitement des renseignements cliniques fournis par l’ophtalmologiste. Il est recommandé
de réaliser une pondération T1 et
T2 et au minimum 2 incidences de
coupe. A titre indicatif, les protocoles utilisés à la Fondation Rothschild sont présentés ci-dessous
(IRM 3T Philips Ingenia).
Introduction
L’imagerie des voies visuelles est indispensable dans la prise en charge de
nombreuses pathologies neuro-ophtalmologiques. L’imagerie par résonance
magnétique (IRM) est actuellement l’examen de choix en cas de suspicion de
pathologie rétrobulbaire, mais sa disponibilité dans le cadre de l’urgence n’est
pas toujours aisée. Les demandes d’IRM en urgence devant une baisse d’acuité
visuelle (BAV) aigüe du sujet jeune, de la part de l’ophtalmologiste, doivent donc
être parfaitement ciblées et restreintes à certaines indications pour lesquelles
les autres techniques d’imagerie, notamment le scanner (TDM), restent peu informatives. Dans cet article, les BAV aigües de l’enfant, les autres troubles aigus
de la fonction visuelle sans BAV et les BAV traumatiques n’ont pas été traités.
Principes d’IRM
destinés à
l’ophtalmologiste (1)
Séquences IRM utiles en
neuro-ophtalmologie
Le langage IRM semble complexe,
notamment en raison des multiples séquences disponibles, mais
les indications de certaines d’entre
elles sont importantes à connaître
pour l’ophtalmologiste (Fig. 1 et Tab. 1).
Les différentes séquences dépendent de la façon d’exciter les protons contenus dans les tissus et de
recueillir le signal. En fonction du
contraste tissulaire souhaité, ces
séquences peuvent être pondérées
en fonction des paramètres choi-
❚❚Pathologies des voies visuelles
antérieures : protocole spécifique
L’exploration porte sur l’ensemble
des voies optiques antérieures,
c’est-à-dire de la tête du nerf optique (NO) jusqu’au chiasma. Les
coupes sont jointives, perpendiculaires à l’axe des NO (coupes coronales), complétées, si nécessaire,
par des coupes sagittales obliques
dans l’axe du (des) NO exploré(s).
sis, en T1, T2, T2 écho de gradient
(T2*).
Protocole d’exploration des
voies visuelles
Le choix des séquences, le nombre
et l’incidence des coupes et l’in-
A
B
C
D
Figure 1 - Contrastes IRM des tissus orbitaires et du parenchyme cérébral sur les séquences standard type écho de spin. Coupe orbitaire droite axiale passant par le nerf
optique et le lobe temporal. A. T1. Globe noir, graisse blanche, muscle noir, SG1 gris foncé,
SB2 gris clair. B. T1 avec injection de gadolinium. Idem figure A mais le muscle est blanc. C. T1
* Ophtalmologiste, assistant des hôpitaux, service du Dr VignalClermont, Fondation Rothschild, Paris
** Radiologue, praticien titulaire, service du Dr Héran, Fondation
Rothschild, Paris
*** Ophtalmologiste, chef de service, Fondation Rothschild, Paris
88
Gado3 Fat Sat4. Idem figure B mais graisse noire. D. T2. Globe blanc, graisse blanche SG* gris
clair, SB2 gris foncé.
Substance grise, 2Substance blanche, 3Gadolinium, 4Suppression du signal de la graisse.
1
Pratiques en Ophtalmologie • Mars 2012 • vol. 6 • numéro 52
Baisse d’acuité visuelle du sujet jeune
L’épaisseur des coupes doit être la
plus fine possible, assurant un rapport signal/bruit satisfaisant : des
coupes de 3 mm en T1 et 2 mm en
T2 sont un bon compromis entre
finesse de coupe et qualité du signal. Les séquences non injectées utilisent la graisse orbitaire
comme contraste naturel (Fig. 1A
et D). Ensuite, en T1 après injection
de gadolinium (Fig. 2A), l’utilisation
d’une séquence Fat Sat (Tab. 1) est
indispensable pour qu’une éventuelle prise de contraste visible
en hypersignal T1 ne soit pas masquée par le signal de la graisse (Fig.
2B), également en hypersignal T1
spontané.
L’apex orbitaire est particulièrement délicat à explorer. L’intérêt
majeur d’une pondération T2 est de
visualiser de façon satisfaisante le
NO dans le canal optique, mal vu en
pondération T1. Il est alors souhaitable de ne pas supprimer le signal
de la graisse en pondération T2, car
les artéfacts induits par cette technique ne permettent plus de visualiser de façon satisfaisante le NO dans
sa portion intracanalaire.
❚❚Pathologie des voies visuelles
postérieures : IRM cérébrale
Une acquisition axiale FLAIR avec
une épaisseur de coupe de 3 mm
jointive ou une acquisition volumique 3D FLAIR avec reconstruction dans les 3 plans de l’espace est
initialement réalisée. Les autres
séquences réalisées dépendent de
l’indication clinique, par exemple
des coupes en diffusion et T2* à la
recherche respectivement de lésion ischémique ou hémorragique
récente.
Indications de l’IRM en
urgence devant une BAV
aigüe du sujet jeune
La demande d’IRM ne se conçoit
qu’après un examen clinique soi-
Tableau 1 - Quelques séquences IRM utiles à connaître
en neuro-ophtalmologie.
Séquence
Pondération
Intérêt
Spin écho
T1 ou T2
T1 : imagerie anatomique.
T2 : meilleur contraste lésionnel
que le T1.
Echo de
gradient
T2*
Détection des saignements
Non appropriée à la pathologie
orbitaire (artéfacts).
FLAIR
T2 avec annulation
du signal du LCR
Meilleur contraste lésionnel que le
T2 standard pour l’étude des lésions
périventriculaires et sous-corticales.
Fat Sat
T1 ou T2
Suppression du signal de la graisse.
Injection de
Gadolinium
T1
Recherche d’une rupture de la barrière
hématoencéphalique, combinée à une
séquence Fat Sat pour la pathologie
orbitaire.
Diffusion
T2
Recherche d’une ischémie.
gneux, recherchant des arguments
permettant de localiser l’atteinte
et d’en préciser le mécanisme. Un
champ visuel est systématique lors
du bilan initial.
❚❚Déficit pupillaire afférent relatif
(2)
L’indication la plus fréquente est
l’existence d’un déficit pupillaire
afférent relatif (DPAR) ou pupille de Marcus-Gunn. L’existence
d’un DPAR est l’expression d’une
asymétrie entre les deux yeux
dans la quantité d’informations
visuelles au travers des voies de
la constriction pupillaire à la lumière. La lésion peut donc siéger
tout le long des voies pupillaires,
depuis la rétine jusqu’au toit du
mésencéphale. Cependant, en cas
de lésion rétinienne, seules des
lésions extrêmement étendues
peuvent être responsables d’un
DPAR. Ainsi, lorsque l’examen rétinien est normal, la lésion siège le
plus souvent sur le NO. L’examen
étant comparatif, les atteintes bilatérales ne peuvent pas être mises
en évidence : il n’existe donc pas de
DPAR bilatéral.
Pratiques en Ophtalmologie • Mars 2012 • vol. 6 • numéro 52
A
B
Figure 2 - Intérêt de la séquence Fat Sat
en pondération T1 après injection de
gadolinium. Coupe orbitaire gauche
passant par le nerf optique.
A. Aucune saturation du signal de la
graisse. Mauvais contraste entre la graisse
orbitaire et le nerf optique qui semble
prendre le contraste.
B. Après suppression du signal de la graisse,
la prise de contraste du nerf optique est
évidente.
❚❚Signes neurologiques
centraux (3)
L’atteinte bilatérale des lobes occipitaux est responsable d’une cécité corticale. La normalité du fond
d’œil, l’absence de DPAR et les
signes neurologiques d’accompagnement tels que hallucinations,
anosognosie, troubles mnésiques,
troubles du comportement ou
89
Zoom sur
troubles de la conscience doivent
faire évoquer le diagnostic topographique. L’atteinte d’un seul
lobe occipital n’est pas responsable de BAV mais d’une hémianopsie latérale homonyme.
❚❚Signes d’inflammations
orbitaires (4)
L’existence, à des degrés variables,
de douleurs orbitaires, de diplopie,
d’exophtalmie, de rougeur oculaire et d’œdème palpébral doit
faire évoquer la possibilité d’une
inflammation orbitaire. Dans ce
cadre, la BAV peut être secondaire
soit à une compression du NO ou
du pôle postérieur du globe, soit à
la diffusion de l’inflammation au
NO ou à la sclère.
Pathologies des voies
visuelles antérieures
A
B
Figure 3 - Névrite optique aigüe rétrobulbaire.
A. T2. Hypertrophie et hypersignal spontané du nerf optique (flèche bleue).
Atteintes des voies visuelles
antérieures à IRM anormale
❚❚Neuropathies optiques
inflammatoires aigües (NOI)
Les NOI sont les neuropathies optiques aigües les plus fréquentes
avant 50 ans. Les sujets jeunes
sont davantage concernés et les
femmes sont trois fois plus touchées que les hommes (5).
Le début est en général aigu sur
quelques heures, voire quelques
jours, avec une BAV le plus souvent unilatérale, d’importance variable, de 10/10e à l’absence de perception lumineuse. Cette BAV est
évocatrice quand elle est accompagnée ou précédée d’une douleur
péri- ou rétro-oculaire augmentée
par la mobilisation du globe. Le
fond d’œil est normal dans 2/3 des
cas, le processus inflammatoire
siège alors en arrière de la tête du
NO : c’est la NOI postérieure ou
rétrobulbaire. Dans le tiers des cas
restants, l’existence d’un œdème
90
B. T1. Gado Fat Sat. Prise de contraste évidente du nerf optique (flèche rouge) et de la graisse
périoptique.
papillaire signe une atteinte de la
tête du NO : c’est la papillite (6)
L’IRM est l’examen clé du bilan de
NOI. Dans les formes typiques, elle
permet de rechercher les critères
de dissémination spatiale et temporelle (7) et d’évaluer le risque
d’évolution vers une sclérose
en plaques (8). Dans les formes
atypiques, elle permet en plus
d’étayer le diagnostic en éliminant
une compression et en mettant en
évidence la lésion inflammatoire
siégeant dans le NO (9) sous forme
d’une hypertrophie en hypersignal
T2 (Fig. 3A) rehaussé par le gadolinium en T1 (Fig. 3B).
❚❚Compression des voies visuelles
antérieures
Généralement, les compressions
des voies visuelles antérieures
s’accompagnent d’une BAV progressive mais pouvant parfois être
rapide. La compression peut être
intrinsèque ou extrinsèque et secondaire à une tumeur bénigne ou
maligne, une infiltration, une augmentation non tumorale du volume d’un des tissus adjacents, une
anomalie vasculaire, un processus
osseux ou une mucocèle.
Compression
du nerf optique (10)
Généralement, les compressions
du NO s’accompagnent d’une altération progressive de l’acuité
visuelle (AV), mais la BAV peut
être aigüe, mimant alors une
NOI (11). Dans ce cadre, la suppression du signal de la graisse
orbitaire après injection de gadolinium est indispensable afin que
le signal d’une éventuelle lésion
Pratiques en Ophtalmologie • Mars 2012 • vol. 6 • numéro 52
Baisse d’acuité visuelle du sujet jeune
A
Figure 6 - Posterior Reversible
­Encephalopathy Syndrome. Coupe
axiale FLAIR.
Patiente sous chimiothérapie pour une
hémopathie maligne. Il existe un hypersignal T2 spontané localisé au sein de la
substance blanche des lobes occipitaux
mais également temporaux.
B
Figure 4 - Intérêt de la séquence Fat Sat en pondération T1 après injection
de gadolinium. Coupe orbitaire gauche passant par le nerf optique.
A. En l’absence d’annulation du signal de la graisse il semble exister une masse le long de la
paroi médiale de l’orbite mais le contraste est très insuffisant.
B. Après suppression du signal de la graisse, la masse devient évidente.
Plus rarement, la BAV peut être
aigüe, particulièrement en cas
d’apoplexie pituitaire. L’apoplexie
pituitaire correspond à l’expansion
brutale d’une tumeur sellaire d’origine hémorragique et se rencontre
plus volontiers en cas de tumeurs
pituitaires. Les patients présentent
une BAV aigüe accompagnée de
céphalées intenses, d’une paralysie
oculomotrice, de vomissements et
de raideur nucale. Bien qu’il s’agisse
d’un syndrome rare, l’apoplexie pituitaire doit être connue car il s’agit
d’une urgence en raison de l’hypopituitarisme qui en résulte.
Figure 5 - Compression du nerf optique (flèche bleue) par un anévrysme (flèche rouge).
prenant le contraste ne soit pas
noyé dans le signal de la graisse.
(Fig. 4A et B). Les étiologies les
plus fréquentes sont les méningiomes, les gliomes, la maladie de
Basedow, les anévrysmes (Fig. 5),
les mucocèles et toute extension
antérieure d’une compression
chiasmatique.
Compression du chiasma (12)
De la même façon, la BAV est généralement progressive au cours des
compressions chiasmatiques. Les
causes les plus fréquentes sont les
adénomes hypophysaires, les craniopharyngiomes, les gliomes, les
méningiomes et plus rarement les
anévrysmes.
Pratiques en Ophtalmologie • Mars 2012 • vol. 6 • numéro 52
❚❚Orbitopathies inflammatoires
(4, 10, 13)
Les orbitopathies inflammatoires
sont un ensemble de pathologies
caractérisées par l’inflammation
d’au moins un compartiment orbitaire en dehors du globe oculaire.
L’existence d’une BAV dans un
contexte d’inflammation orbitaire
doit faire rechercher avant tout
une compression du NO. Exception
91
Zoom sur
faite de la maladie de Basedow, ces
inflammations sont le plus souvent
non spécifiques. Les orbitopathies
inflammatoires non spécifiques
peuvent survenir à n’importe quel
âge, mais touchent le plus souvent
le sujet d’âge moyen sans prédilection de sexe. Le début est souvent
aigu ou subaigu et les symptômes
les plus fréquents sont les douleurs orbitaires, l’œdème palpébral,
l’exophtalmie et la diplopie. L’IRM
met en évidence à des degrés variables une infiltration diffuse, une
augmentation de volume et/ou une
prise de contraste d’un ou plusieurs
tissus. Habituellement confinées
aux tissus mous intraorbitaires,
les orbitopathies inflammatoires
peuvent s’accompagner d’une destruction des parois osseuses avec
extension extraorbitaire (1).
Atteintes des voies visuelles
antérieures à IRM normale
Dans ce cadre, l’IRM n’a pour objectif que d’éliminer une inflammation ou une compression des
voies visuelles antérieures.
❚❚Neuropathie optique
ischémique aigüe (NOIAA)
Les NOIAA touchent préférentiellement le sujet âgé sans prédilection de sexe mais l’atteinte
des sujets jeunes n’est pas rare, les
patients de moins de 45 ans représentant 15 % de la population dans
un centre tertiaire de neuro-ophtalmologie (14). A l’exception de la
maladie de Horton, les facteurs de
risque sont globalement superposables à ceux retrouvés chez les sujets âgés. Bien qu’il puisse exister
quelques exceptions, les NOIAA
surviennent généralement sur des
papilles optiques de petite taille
peu ou non excavées (14).
Il s’agit classiquement d’une BAV
unilatérale, brutale et indolore,
habituellement découverte le
matin au réveil. L’AV est variable,
92
pouvant aller de 10/10e à l’absence de perception lumineuse.
L’examen du fond d’œil retrouve
un œdème papillaire modéré ou
marqué, parfois en secteur, bordé
d’une ou plusieurs hémorragies en
flammèches (10).
Le diagnostic de NOIAA est habituellement clinique et aucune
imagerie des voies visuelles n’est
nécessaire. Cependant, compte
tenu du caractère atypique des
NOIAA du sujet jeune, la réalisation d’une IRM reste justifiée.
L’IRM “conventionnelle” reste
peu informative pour le diagnostic
positif en raison de la petite taille
de la tête du NO (9), mais l’utilisation de séquence de diffusion
en IRM de dernière génération
semble donner des résultats encourageants (15).
❚❚Neuropathie optique de Leber
(10)
La neuropathie optique de Leber est l’une des plus fréquentes
causes de neuropathie optique héréditaire. Elle touche préférentiellement l’homme jeune sous forme
d’une BAV aigüe bilatérale et asynchrone. Le fond d’œil met typiquement en évidence une surélévation
papillaire associée à des télangiectasies péripapillaires sans diffusion angiographique. L’IRM est
classiquement normale mais des
hypersignaux en séquence STIR
(Short Time Inversion Recovery),
ainsi qu’une prise de contraste du
NO mais également du chiasma
ont été rapportés (16, 17)
❚❚Neuropathies optiques aigües
toxiques (18)
Les neuropathies optiques aigües
toxiques, le plus souvent liées à la
prise d’éthambutol ou en cas d’ingestion accidentelle de méthanol
sont rares et le contexte est généralement évocateur.
Pathologies des
voies visuelles
postérieures
Les pathologies aigües bilatérales
des lobes occipitaux du sujet jeune
sont rares. Le PRES mérite d’être
connu car l’ophtalmologiste peut se
retrouver en première ligne.
Posterior Reversible
Encephalopathy
Syndrome (PRES) (19)
Le PRES est un syndrome décrit
récemment (20), se développant
sur quelques heures et se présentant pour l’ophtalmologiste
comme une cécité corticale associée à des degrés divers à une
confusion, une comitialité et des
céphalées. L’IRM est l’examen
de choix, le TDM cérébral étant
normal dans 50 % des cas. Elle
met en évidence un œdème prédominant au niveau des lobes
occipitaux, sous forme de lésions
hyperintenses sur les séquences
FLAIR. La diffusion est la séquence fondamentale pour différencier l’œdème vasogénique, retrouvé dans le PRES, d’un œdème
cytotoxique. Le PRES survenant
fréquemment dans un contexte
d’HTA sévère ou de (pré)éclampsie, des signes de rétinopathie
hypertensive peuvent être mis
en évidence au fond d’œil et faire
égarer le diagnostic.
Conclusion
Malgré un accès parfois difficile à
un plateau technique adéquat, certaines causes de BAV aigües du sujet jeune, pour lesquelles les autres
techniques d’imagerie ne seront
que peu informatives, nécessitent
une IRM en urgence. Cependant,
autant pour les pathologies des
voies visuelles postérieures une
IRM cérébrale reste suffisante,
autant les pathologies des voies
visuelles antérieures nécessitent
Pratiques en Ophtalmologie • Mars 2012 • vol. 6 • numéro 52
Baisse d’acuité visuelle du sujet jeune
un protocole spécifique. La qualité du compte rendu radiologique
dépend donc de la qualité de la demande de la part de l’ophtalmologiste.
n
Mots-clés : IRM, Névrite optique aigüe rétrobulbaire,
Orbitopathie inflammatoire, Posterior Reversible
Encephalopathy Syndrome,
Compression des voies visuelles antérieures
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leukoencephalopathy syndrome. N Engl J Med 1996 ; 334 : 494-500.
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