Micro-structuration optique de verres de silice par laser femtoseconde pour des
applications en photonique
Matthieu Lancry et Bertrand Poumellec
Equipe de Physico-Chimie de l'Etat Solide, Institut de Chimie Moléculaire et des Matériaux
d’Orsay, UMR CNRS-UPS 8182, Bât. 410, Université de Paris Sud, 91405 Orsay, France
La silice est un verre souvent utilisé en optique pour élaborer des lentilles qui
permettent de modifier le parcours des rayons lumineux, mais ces objets sont
volumineux et inaptes à l’intégration. Par ailleurs, le verre, de par sa structure amorphe,
est isotrope et n’est pas sensible à la polarisation de la lumière. De ce fait, il n’aurait que
peu d’intérêts dans l’optique de demain. Pourtant, le développement d’un nouvel outil a
renversé cette vision des choses : le laser femtoseconde.
Celui-ci focalisé fortement dans le matériau permet de modifier sa structure avec
une localisation de l’ordre du micromètre et avec seulement quelques impulsions dont
l’énergie est très modeste (<0.5 J). Les transformations sont vraiment très
spectaculaires : l’indice optique isotrope peut-être augmenté jusqu’à quelques 10-3, on
peut obtenir une biréfringence jusqu’à 10-2 contrôlable en orientation par la rotation de
la polarisation du laser. Ces propriétés reposent sur la formation de nanoréseaux
d’indice optique. Les mécanismes en jeu sont inhabituels. En effet, étant donné
l’intensité lumineuse utilisée, on créé un plasma électronique dans le solide, celui-ci se
structure dans l’espace et cette structure s’imprime par piégeage dans le matériau
conduisant ainsi à une décomposition ultrarapide de la silice.
La possibilité d’effectuer ces « écritures » à une vitesse de l’ordre du cm/s permet
déjà la réalisation de guides d’onde pour l’optique intégrée. Le fait que l’action soit
ponctuelle autorise une écriture en 3D. Mais, on peut aussi envisager bien plus. La
première idée est l’intégration d’objets classiques tels que des réseaux ou des guides
d’onde mais aussi des micro-lentilles pour les écrans LCD, mais le contrôle possible de
l’orientation de la biréfringence ouvre la possibilité de produire aisément des lames
d’onde permettant d’obtenir des faisceaux à polarisation radiale (pinces optiques) ou
pour corriger des faisceaux distordus comme dans le cas des lasers de haute puissance
(ces correcteurs s’étendent actuellement sur quelques décimètres).
Outre les processus de base qui conduisent à ces propriétés dont on perçoit
l’utilisation, il y a d’autres effets très intéressants qui nous mènent au delà du simple
dépôt d’énergie ; ce sont des torsions ou des déplacements de matière, des
microtrempes conduisant à de forts changements d’indice, de la micro ou
nanocristallisation en volume. Ils démontrent que le laser a la possibilité de briser la
centro-symétrie du verre efficacement. Nous décrirons quelques résultats dans ce
domaine.