Hélène Hagège – LIRDEF – Université Montpellier II – IREM
« La démarche scientifique » - février 2007 5
céleste. Nicolas Copernic (1473-1543), scientifique polonais, auteur de la théorie
héliocentrique est alors mort. Il publia sa théorie le jour de sa mort afin d’éviter les
représailles de l’église et en la présentant comme une hypothèse accommodante pour ses
calculs, pas comme une assertion véritable (il se présentait donc comme un idéaliste).
Galilée étudie la cycloïde et formule les lois de la chute des corps, montrant que la
trajectoire d’un projectile est une parabole. Il réalise l’un des premiers microscopes et effectue
les premières observations du ciel à la lunette. Il soumet ses hypothèses au verdict de
l’expérience et les choisit selon leur capacité à prédire (et non pas selon évidence). Il introduit
notamment la notion de pesanteur (=accélération constante) et le concept de vitesse
instantanée pour expliquer la chute des corps pesants. Son originalité est de substituer au
fatras de considérations qualitatives de ses prédécesseurs des concepts clairs, univoques –
position, inertie, vitesse instantanée, accélération –, puis de confronter les résultats au
raisonnement, explicité sous forme mathématique, à des données expérimentales bien
définies, et non à des prétendues évidences logiques.
Galilée est considéré comme l’inventeur des sciences modernes, car i) il a appliqué les
mathématiques à des problèmes physiques (« la philosophie est écrite dans ce livre immense
(…) l’univers (…). Ce livre est écrit dans la langue mathématique » G.G.), il considérait que
ii) le rôle de la technique est d’apporter des preuves réfutant ou confirmant des théories, et
que iii) le rôle de la théorie n’est pas seulement d’expliquer, mais également de fournir des
preuves et de prévoir.
Encart - Galilée contre la théorie aristotélicienne : une lutte historique contre un
obstacle épistémologique4.
En 1600, le philosophe et théologien italien Giordano Bruno (1548-1600) est brûlé vif
après huit années de procès par l’inquisition. Il s’était basé sur les travaux de Nicolas
Copernic et Nicolas de Cuse pour montrer, d’un point de vue philosophique, la pertinence
d'un Univers infini, peuplé d'une quantité innombrable de mondes identiques au nôtre.
En 1604, Galilée débute son observation d'une nova grâce à la performante lunette
astronomique qu’il a mise au point. Bien que l'apparition d'une nouvelle étoile, et sa
disparition soudaine, entre en totale contradiction avec la théorie établie de l'inaltérabilité des
cieux, Galilée reste encore aristotélicien en public, mais il est déjà fermement copernicien en
privé. Il attend la preuve irréfutable sur laquelle s'appuyer pour dénoncer l'aristotélisme.
Pendant l'automne 1609, Galilée continue à développer sa
lunette. En novembre, il fabrique un instrument qui grandit une
vingtaine de fois. Il prend le temps de tourner sa lunette vers le ciel.
Très vite, en observant les phases de la Lune, il découvre que cet
astre n'est pas parfait comme le voulait la théorie aristotélicienne.
La physique aristotélicienne, qui faisait autorité à l'époque, distinguait deux mondes :
4 Un obstacle épistémologique est une connaissance, une représentation mentale, qui fait obstacle à une autre
connaissance. Ici le géocentrisme fait obstacle à l’héliocentrisme. Si on envisage les connaissances
contradictoires comme étant en compétition dans un cerveau, la connaissance première est, au début, toujours
plus compétitive que la nouvelle : elle occupe déjà le terrain et elle a déjà fait ses preuves comme ayant une
certaine opérationnalité. Ainsi, changer de représentation, surmonter un obstacle épistémologique, nécessite une
remise en cause de croyances, d’outils intellectuels dont on s’est déjà servi à de nombreuses reprises par le passé.
Cela consiste donc en une déstabilisation, qui n’est, en général, ni agréable ni rassurante.