
Lésions neuromusculaires
Les muscles de la région scapulaire contribuent aussi
à la coaptation dynamique de la tête humérale mais
dans une mesure moindre que les structures précé-
demment citées. Le subscapularis participe à la mise
en tension de la capsule antérieure lors des premiers
degrés d’abduction mais son rôle est essentiellement
proprioceptif car, en position d’armer du bras, il est si-
tué au-dessus de l’équateur de la tête humérale et ne
participe plus à sa coaptation. C’est d’ailleurs dans cet
intervalle laissé vaquant que la tête humérale s’immisce
lors d’une luxation dont le seul frein est alors le LGHI.
Même si le support du système musculaire scapulaire
n’est que contributif, il est démontré que le taux de ré-
cidive est moindre après rééducation correcte dans les
suites d’un premier épisode de luxation. Ils participent
néanmoins au contexte lésionnel, notamment chez les
patients les plus âgés qui ont une rupture transfixiante
de la coiffe des rotateurs associée dans 70 % des luxa-
tions survenant après 60 ans. Pour les patients plus jeu-
nes, des lésions tendineuses partielles (PASTA lesions)
seraient présentes dans près d’un quart des cas (sym-
posium de la SFA). Ces lésions tendineuses associées
sont peut-être des “équivalents d’encoche” où la cor-
ticale de la tête humérale résisterait mieux à l’impact
du rebord glénoïdien que la coiffe elle-même dont les
capacités d’élongation plastique diminuent avec l’âge.
Le rôle stabilisant de la coiffe des rotateurs est plus im-
portant lors des premiers degrés d’abduction, au delà,
elle ne constitue plus probablement qu’un “deuxième
rideau défensif” de résistance précaire. Cette notion a
d’ailleurs été confirmée par plusieurs études expérimen-
tales qui ont montré qu’une lésion tendineuse au moins
partielle de la coiffe des rotateurs devait être associée
à la section de la portion antéro-inférieure de l’appareil
capsulo-ligamentaire pour obtenir une luxation.
Les lésions neurologiques associées sont souvent mé-
connues et des EMG systématiques en démontrent la
relative fréquence. Si la récupération est habituelle, il
peut s’agir de lésions graves, notamment du nerf axil-
laire, qui nécessitent un diagnostic de gravité précoce
et un traitement spécifique adapté. Il arrive encore trop
souvent que les bilans neuro-physiologiques ne soient
faits que secondairement alors que l’examen neuro-
logique et vasculaire doit être systématique dans un
contexte de luxation.
En conclusion, la physiopathologie de l’épaule instable
associe à des degrés divers mais de façon constante :
- une perte de tension du hamac capsulo-ligamentaire
inférieur,
- un défaut de la concavité glénoïdo-labrale antérieure,
ces deux structures constituant le verrou passif de
stabilisation,
- une atteinte du système de rappel dynamique que
constituent la coiffe des rotateurs et son insertion
humérale.
Nous verrons que l’examen clinique et le bilan radiogra-
phique devront s’attacher à préciser l’étendue de ces
lésions et que seul un traitement chirurgical qui prendra
en compte ce double bilan sera à même de garantir une
stabilisation efficace de cette articulation.
Tableaux cliniques de l’instabilité
antérieure, bilan radiographique
Deux contextes cliniques classiques constituent le syn-
drome d’instabilité de l’épaule :
- l’instabilité aiguë lors d’un premier épisode où la perte
de contact articulaire est totale et la réduction pourra
être réalisée par le patient lui-même ou le concours
d’un tiers ;
- le tableau d’instabilité chronique dont on distingue
3 formes (luxations récidivantes, subluxations, épaule
instable et douloureuse). Dans ces deux derniers ta-
bleaux, la tête humérale s’engage dans un mécanisme
de luxation sans pour autant y parvenir, elle empiète
sur le rebord labral antérieur expliquant le phénomène
de dérangement interne et les douleurs caractéristi-
ques du “syndrome du bourrelet”.
L’instabilité aiguë : le premier épisode
Le contexte de survenue est très important pour ju-
ger du caractère traumatique de cet épisode ou de
sa facilitation par un état préalable d’hyperlaxité ou
de lésions micro-traumatiques préexistantes. Parfois,
le premier épisode semble d’origine non traumatique
mais l’interrogatoire retrouve souvent dans le passé un
traumatisme important (accident de moto ou de ski par
exemple) qu’il faut alors prendre en compte. Le méca-
nisme doit être rapporté qu’il soit direct par un impact
scapulaire d’arrière en avant ou indirect, ce qui est le
plus fréquent.
Le diagnostic de luxation est clinique mais doit être
confirmé par une radiographie systématique pratiquée
avant et après réduction, elle permettra notamment de
documenter cet épisode en cas de récidive. C’est à
ce stade qu’il faut aussi s’attarder sur l’examen neu-
rovasculaire simplifié mais systématique. Le délai de
réduction est aussi important à noter de même que
les manœuvres réductionnelles réalisées avec ou sans
sédation. En urgence, l’incidence de face confirme la
vacuité de la glène et la position sous glénoïdienne de
la tête humérale dont on apprécie le contour à la re-
cherche d’une fracture associée. Un complément par
une incidence de profil lève tout doute au moyen d’une
incidence de Lamy ou de Garth.
Après réduction ou au décours d’un épisode d’instabi-
lité, un bilan radiographique standard par des inciden-
ces de face en 3 rotations et des profils de Bernageau