Images cliniques Protocole amélioré pour pontiques temporaires : combinaison d’un traitement prothétique et orthodontique Paul H. Ling, DDS, MDS Ortho, MOrth, FDS, RCS L La rubrique «Images cliniques» est une série d’essais en images qui traite de l’art technique de la dentisterie clinique. Cette rubrique présente étape par étape des cas cliniques tels qu’on les retrouve au cabinet dentaire. Pour soumettre un cas ou recommander un clinicien qui pourrait contribuer à cette rubrique, communiquez avec le rédacteur en chef, le Dr John O’Keefe, à [email protected]. es patients qui ont besoin d’un traitement combinant prosthodontie et orthodontie, y compris les patients adultes devant subir un traitement à la suite d’un traumatisme dentaire, sont souvent pris en charge par un orthodontiste. Or, si la zone édentée se trouve dans la portion antérieure, l’esthétique du traitement revêt alors souvent autant d’importance que son résultat final. Le traitement habituel en orthodontie traditionnelle consiste à utiliser une dent de prothèse provisoire comme pontique; cette dent est habituellement fixée à un boîtier labial pour camoufler tout espace libre durant l’alignement orthodontique. Ce protocole simple qui consiste à fixer un pontique sur boîtier peut convenir aux appareils labiaux classiques dont les attaches et les fils labiaux sont déjà visibles. L’utilisation d’appareils plus esthétiques, comme le modèle Invisalign (Align Technology, Santa Clara, Calif.) et les appareils orthodontiques linguaux, est toutefois plus complexe. Dans l’un ou l’autre cas, d’autres solutions peuvent être envisagées, entre autres, la fixation de facettes en résine sur les dents adjacentes. Cependant, la faible force de liaison du pontique risque alors de provoquer un décollement indésirable. Le cas qui suit présente Ill. 1 : Patient au moment de la première consultation, sans la prothèse partielle amovible tout acrylique. une technique originale qui vise à la fois à corriger les problèmes d’esthétique durant le traitement et à assurer une meilleure rétention du pontique. Un jeune homme en bonne santé de 22 ans, exerçant le métier de mannequin, avait 2 dents manquantes : l’avulsion des dents 11 et 21 avait été causée il y a plusieurs années par un accident d’automobile (ill. 1 à 5) et une prothèse partielle amovible avait été mise en place. L’insertion d’un pont traditionnel avait été envisagée, mais cette option a été écartée car elle était peu esthétique; les incisives latérales et les canines supérieures présentaient une malposition importante et il y avait peu d’espace pour des pontiques bien proportionnés (ill. 6 et 7). Le patient avait eu plusieurs consultations en orthodontie, visant à corriger le manque d’espace pour permettre la mise en place d’implants permanents ainsi qu’à améliorer l’alignement général et l’occlusion interarcades. Le patient avait toutefois refusé le port d’appareils orthodontiques impliquant des fils labiaux – qu’il jugeait peu esthétiques – préférant endurer pendant des années l’inconfort d’une prothèse partielle. Qui plus est, les plaques transparentes de type Invisalign n’auraient Ill. 2 : Vue de face du patient portant la prothèse partielle. JADC • www.cda-adc.ca/jadc • Juillet/Août 2007, Vol. 73, N o 6 •� 487 –––– IIImages cliniques –––– Ill. 3 : Une vue de plus près montre que l’espace était insuffisant pour un traitement prothétique. Ill. 4 : Vue palatine de la prothèse partielle en place. Ill. 5 : Vue de face de la prothèse partielle en place. Ill. 6 : Sans intervention orthodontique, la mise en place d’un pont collé aurait nécessité une hauteur inciso-gingivale excessive, par rapport à l’espace édenté limité qui était disponible. Ill. 7 : Le modèle de diagnostic en cire montre bien qu’un traitement non orthodontique n’aurait pas donné de résultat satisfaisant. Ill. 8 : Des appareils orthodontiques linguaux ont été utilisés pour l’expansion de l’arcade supérieure, ce qui a permis d’améliorer l’alignement et d’accroître l’espace dans la zone des dents 11 et 21. Ill. 9 : L’appareil de Nance procure un bon ancrage. Des microimplants auraient pu être utilisés pour obtenir le même effet. Ill. 10 : Un pontique temporaire modifié a été utilisé, en insérant des ligatures en acier par les fentes verticales des pontiques. Les dimensions mésio-distales des pontiques ont été réduites pour s’ajuster à l’espace disponible. Ill. 11 : Les ligatures en acier ont été fixées aux arcs dentaires sur la face linguale et ont été supportées à l’aide de résine composite appliquée à des endroits stratégiques. pas été suffisantes pour créer une ouverture précise et obtenir une bonne expansion de l’arcade. Cependant, lorsque le patient a appris que son problème pouvait être traité avec des appareils orthodontiques linguaux, son attitude à l’égard du traitement a changé. Les appareils orthodontiques linguaux et les pontiques temporaires ont été fixés dans l’arcade supérieure (ill. 8); un appareil de Nance a été ajouté un mois plus tard pour maintenir l’ancrage (ill. 9) et favoriser une expansion efficace de l’arcade. 488 Plutôt que de fixer les dents prothétiques à des boîtiers – comme cela se fait habituellement – les 2 pontiques ont été taillés pour s’ajuster à l’espace disponible et des fentes verticales ont été pratiquées en laboratoire à l’aide d’une pièce à main à l’air. Les pontiques ont ensuite été fixés aux arcs linguaux à l’aide de ligatures en acier inoxydable, puis une résine composite photopolymérisée a été appliquée pour plus de stabilité (ill. 10 et 11). Grâce à l’usage d’un boîtier lingual à fentes multiples, des arcs dentaires JADC • www.cda-adc.ca/jadc • Juillet/Août 2007, Vol. 73, N o 6 • –––– Images cliniques Ill. 12 : Après plusieurs mois, des améliorations notables ont été observées au niveau de l’alignement et du gain d’espace. Ill. 13 : L’utilisation de ce pontique modifié a offert une solution provisoire acceptable au patient. Aucun espace n’a été apparent à aucun moment durant le traitement. Ill. 14 : L’évaluation radiographique a confirmé l’expansion de l’espace antérieur et un positionnement parallèle acceptable des racines. Ill. 15 : Les bienfaits de l’alignement et de l’expansion apparaissent clairement après l’insertion des couronnes permanentes. Ill. 16 : L’alignement orthodontique a permis d’obtenir une occlusion de classe I présentant une bonne intercuspidation. Ill. 17 : Restaurations fixes finales en tandem ont pu être utilisés, ceci conférant une plus grande stabilité et un contrôle tridimensionnel du couple; plus important encore, cette technique a permis d’assurer une mécanique orthodontique libre, avec un minimum d’interférence. À noter que cette même technique (avec arc labial simple, ligatures en acier inoxydable et résine) pourrait aussi être utilisée avec des boîtiers labiaux. L’expansion de l’arcade et l’alignement se sont poursuivis sans problème, pendant environ 10 mois (ill. 12 et 13). Lorsque les mesures mésio-distales cliniques et l’évaluation radiographique (ill. 14) ont confirmé la création d’un espace suffisant, les appareils linguaux ont été retirés et le patient a été dirigé pour la mise en place immédiate d’implants osséointégrés permanents et de couronnes (ill. 15 à 17). Il était impératif que cette étape se fasse au bon moment pour éviter toute récidive orthodontique. Pendant toute la durée du traitement orthodontique actif, les pontiques temporaires ont été assez solides pour résister aux forces de l’occlusion et seuls quelques ajustements mineurs ont dû être faits pour corriger les fonctions et l’esthétique dans la portion antérieure. Le patient a pu poursuivre ses activités, sans que le traitement nuise à son élocution, à ses –––– fonctions masticatoires ou à sa carrière de mannequin. Bien que la mécanique du traitement et le pontique aient été plus difficiles à réaliser, les ressources et les efforts additionnels ont été bien justifiés, sinon le patient n’aurait pas consenti à un tel traitement à long terme. Notons en terminant qu’il serait possible, avec quelques modifications mineures, d’appliquer une technique de ligature similaire à des arcs dentaires labiaux. a L’AUTEUR Le Dr. Ling est professeur clinicien auxiliaire à l’Université Western Ontario, London (Ontario) et examinateur des épreuves de cycle supérieur au Collège royal des chirurgiens d’Édimbourg, Édimbourg (R.U.). Courriel : [email protected]. L’auteur n’a aucun intérêt financier déclaré dans la ou les sociétés qui fabriquent les produits mentionnés dans cet article. Pour voir une présentation PowerPoint complémentaire en anglais commentée par le Dr Ling, consultez la version électronique du journal à www.cda-adc.ca/jcda/vol-73/issue-6/487.html. JADC • www.cda-adc.ca/jadc • Juillet/Août 2007, Vol. 73, N o 6 •� 489