TELECOM '2007 5th JFMMA REDUCTION DU BRUIT EMIS PAR MICROCONTROLEUR A L’AIDE D’ABSORBANTS FERROMAGNETIQUES L. BOUHOUCH1, E. SICARD2, M. FADEL3 1 Département Génie Electrique, EST d'Agadir, Université Ibn Zohr, B.P. 33/S, 80000 Agadir, Maroc. INSA-DGEI, 135 Avenue de Rangueil, 31077 Cedex - Toulouse - France. 3 Laboratoire d’Electronique, d’Automatique et de Traitement du Signal (LEATS), Faculté des Sciences, Université Ibn Zohr, BP 8106, 80006 Agadir. 2 Résumé : Dans ce papier, après une étude bibliographique, sont exposés la technique et les résultats de mesure concernant la réduction de l’émission de bruit électromagnétique. La méthode proposée ici consiste à plaquer contre le boîtier d’un microcontrôleur, des absorbants ferromagnétiques telles qu’une lame de nickel ou un film d’alliage NiFe (type Permalloy). Il sera alors étudié, dans les deux cas, le taux de réduction de bruit émis. Ce qui pourrait, en partie, résoudre quelques problèmes de compatibilité électromagnétique (CEM) dus aux bruits émis. Mots clés : Réduction d’émission, Absorbant ferromagnétique, Alliage NiFe, CEM, Microcontrôleur. 1. Introduction Un appareil est considéré comme compatible d’un point de vue électromagnétique (compatibilité électromagnétique), s'il continue à fonctionner, dans un environnement électromagnétique perturbé et dans le même temps ne contribue pas à ces perturbations. Cependant le développement en technologie des semiconducteurs (réduction des dimensions des transistors composants un processeur) et les avancées des techniques digitales [1] ont rendu les dispositifs électroniques de plus en plus performants, bruyants et sensibles. Leur structure devenant ainsi plus complexe et le nombre croissant de circuits mis en interconnexion dans un espace étroit grâce à une intégration toujours plus poussée, posent des problèmes sérieux en CEM principalement dus aux bruits de commutation simultanée. Concernant la complexité des circuits intégrés et l’augmentation des fréquences d’horloge, en 1965, Gordon Moore cofondateur d'Intel, publie une vision prospective de l’évolution des circuits intégrés. Se basant sur l’augmentation régulière de la complexité des circuits intégrés, il extrapole la tendance et prévoit une évolution exponentielle de la capacité des mémoires et des performances de calcul des processeurs, avec un doublement tous les ans [2]. Même si cette « Loi de Moore » subit des redressements tous les 18 mois, elle reste encore la référence aujourd’hui (Figure 1). Figure 1. Loi de Moore [2] et l’évolution des processeurs comparés aux données réelles [3]. En outre, le bruit d'émission rayonnée par la majorité des dispositifs électroniques change selon chaque matériel ; ce n'est pas le bruit d’une fréquence particulière, mais le bruit d’une large bande fréquentielle, qui rend réellement difficile de trouver une solution au problème de CEM et en particulier pour les bandes de fréquences qu’il ne faut pas perturber (100 MHz : FM, 430 MHz : Radio locale, 900 MHz-1.9 GHz : Téléphonie mobile, 2,45 GHz-5.8 GHz : Communication sans fil Wifi, Blutooth et Wimax). Des efforts considérables sont déployés par les fondeurs, en collaboration avec des laboratoires afin de résoudre ce problème de bruits lié aux exigences de la CEM. Durant ces dernières années, plusieurs études et recherches aussi bien expérimentales que théoriques concernant la réduction des bruits émis, ont eu lieu au niveau des câbles d'interface et des dispositifs à semiconducteur. 266 TELECOM '2007 5th JFMMA En effet des investigations ont été faites en 1993 [4] sur les phénomènes absorbants de micro-onde par différents types de ferrites, pour la gamme de fréquence 200 MHz-16 GHz. Ces dernières investigations ont montré que l’effet d’absorption de micro-onde, dépend de la perméabilité complexe des ferrites qui dépend des fréquences de résonance des ferrites. D’autres études dans le domaine avionique et militaire [5], ont montré les avantages combinés poids et CEM concernant la distribution électrique à travers des conducteurs d’aluminium recouvert de couches magnétiques spéciales. Durant cette dernière étude, l’auteur confirme des atténuations allant de 10 à 20 dB/m à la fréquence de 1GHz. En outre Fujio Amemiya et al. [6] ont étudié l'effet de réduction d'émission des câbles d'interface en utilisant des films amorphes d’alliage magnétique remplaçant les noyaux de ferrites encombrantes. Ces films d’alliage magnétique sont généralement caractérisés par une perméabilité relativement élevée aux hautes fréquences. Ces auteurs ont effectivement constaté que la réduction de bruits, est similaire à celle obtenue avec des noyaux de ferrite, pour un encombrement moindre. Par ailleurs Hiroshi Ono et al. [7] ont étudié et analysé théoriquement et expérimentalement l'effet d’absorption de bruit, en haute fréquence et en champ proche, par une feuille magnétique placée sur une ligne micro-ruban. Après mesure et calcul des caractéristiques de rayonnement de la ligne micro-ruban, ces auteurs ont confirmé que l'effet de suppression est obtenu principalement par une perte magnétique de la feuille absorbante de bruit. La méthode la plus plausible qui pourrait résoudre le problème d'émission de bruit, étudiée 2000 par SooHyung Kim et al. [8], consiste en l’introduction d’absorbants d’ondes électromagnétiques, au sein de la matrice de la puce à semi-conducteur au moment de sa conception. Mais pour l’exploitation de cette méthode, il y a réellement beaucoup de contraintes technologiques. Selon les auteurs de cette étude, l'évaluation du bruit rayonné d'émission en appliquant un absorbant enduisant le dispositif à semi-conducteur, confirme que le bruit d'émission diminue d’environ de 3 dB jusqu'à 20 dB selon la fréquence. Dans notre cas, nous nous intéressons à la réduction d’émission de bruits en champ proche, par un microcontrôleur 16 bits, de type MC68HC912 de Freescale, cadencé par une horloge interne de 16 MHz. 2. Principe de mesure Dans nos investigations sur la réduction d’émission de bruits nous avons adopté le principe illustré par le schéma de la figure 2. Figure 2. Principe de mesure du bruit émis par microcontrôleur avec absorbant magnétique. La couche absorbante plaquée contre le boîtier du microcontrôleur, est une lame de nickel d’épaisseur 0,2 mm (200 µm) ou bien une fine pellicule d’alliage NiFe (le Permalloy) d’épaisseur 20 µm. La sonde de mesure est une simple sonde d’oscilloscope que l’on fait déplacer à quelques micromètres de la surface du boîtier du HC12. La position de la sonde sur le boîtier est très importante, car l’émission de bruit dépend de la zone active de la puce. Par exemple, nous avons effectué une série de mesures d’abord sans exécution de programme (Reset) par le HC12, ensuite en faisant commuter les entrées-sorties (I/Os) de ce microcontrôleur. Afin d’évaluer la réduction de bruits émis, dans les deux cas, nous procédons à la mesure avec et sans absorbant ferromagnétique. Les spectres types obtenus sont donnés sur les figures 3 et 4. 3. Mesures et discussion La première partie de l’étude consiste en la mesure d’émission de bruit émis par le microcontrôleur HC12 alimenté mais sans programme embarqué (Reset). Les spectres de mesure obtenus sont donnés sur la figure 3. 267 TELECOM '2007 5th JFMMA Figure 3. Spectres d’émission avec et sans absorbant en Ni ou NiFe lors du reset du HC12. Sur ces trois spectres, les raies spectrales les plus intenses (harmoniques de 16 MHz) correspondent à l’activité du circuit d’horloge, intégré dans la puce du microcontrôleur. Cette circuiterie, est en effet implantée du coté des broches appelées XTAL [9], justifiant ainsi le choix de cette position pour la sonde de mesure. Figure 4. Ecarts d’amplitude d’émission donnants la réduction de bruit selon l’absorbant Ni ou NiFe lors du reset du HC12. En comparant, par calcul les écarts entre les amplitudes de l’émission avec et sans absorbant (Figure 4), on peu conclure qu’une réduction de bruit appréciable est enregistrée sur une grande gamme de fréquence ; un peu plus que 5 dBµV de 0 à 250 MHz. Cette réduction du bruit émis, s’approche de 15 dBµV, au alentour des fréquences 32 MHz et 48 MHz respectivement pour l’absorbant en Ni et en NiFe. Cette atténuation de bruit, enregistrée dans le cas du HC12 au « Reset », est tout de même légèrement inférieure aux valeurs données par ailleurs [8]. La deuxième partie de l’étude consiste en la mesure d’émission de bruits lorsque l’on fait commuter les buffers de sorties (I/Os) du microcontrôleur HC12. Les spectres de mesure sont donnés sur la figure 5 ci-après. Les spectres de cette figure, sont obtenus en plaçant la sonde de mesure au-dessus de la circuiterie correspondant au port B du HC12. Ceci se justifie par le fait que cette circuiterie entre en activité lorsque nous procédons à la commutation des I/Os du port B. Nous constatons que les harmoniques de 16 MHz, correspondants à la fréquence d’horloge, sont noyées dans d’autres raies spectrales. Ceci est dû au fait que la mesure est effectuée loin des rails menant cette fréquence d’horloge. Ces mesures montrent que les raies sont plus intenses aux faibles fréquences et s’atténuent de plus en plus vers les hautes fréquences. Les raies observées correspondent en majorité aux harmoniques de 2 MHz. Cette fréquence correspond à la fréquence de commutation des I/Os du HC12. Figure 5. Spectres d’émission avec et sans absorbant en Ni ou NiFe lors de la commutation des I/Os du HC12. 268 TELECOM '2007 5th JFMMA La comparaison est faite sur les écarts, entre les amplitudes de l’émission avec et sans absorbant données sur la figure 6. On peu en conclure, qu’une réduction de bruit significative est relevée sur une bonne gamme de fréquences ; un peu plus que 10 dBµV de 0 à 250 MHz. La réduction du bruit émis, s’approche de 20 dBµV, au alentour des fréquences 16-48 MHz et 80 MHz respectivement pour l’absorbant en Ni et en NiFe. Dans le cas de la commutation du port B du HC12, l’atténuation de bruit enregistrée est en accord avec les valeurs annoncées par ailleurs [8]. Figure 6. Ecarts d’amplitude d’émission donnants la réduction de bruit selon l’absorbant Ni ou NiFe lors de la commutation des I/Os du HC12. On remarque, dans les deux cas de mesure, que la position des raies atténuées dépend de l’absorbant utilisé. En effet chaque matériau ferromagnétique possède une certaine perméabilité magnétique µ, plus ou moins importante qui dépend de la fréquence du champ magnétique externe [4, 6]. 4. Conclusion Dans cet article, nous avons montré l’intérêt de l’utilisation d’une couche absorbante ferromagnétique, afin de satisfaire certaines exigences de la CEM en atténuant l’émission de bruit générée par un microcontrôleur. Dans notre cas nous avons mis en évidence, que malgré la faible épaisseur du film de Permalloy, il joue un rôle important en tant qu’absorbeur d’ondes électromagnétiques. L’effet d’atténuation d’émission, allant de 5 dBµV à 20 dBµV, fonction de la gamme fréquentielle allant de 0 MHz à plus que 400 MHz, est sans doute lié au fait que cet alliage possède une grande perméabilité magnétique µ selon la littérature. En outre, la technique proposée est beaucoup moins onéreuse et ne pose aucune contrainte technologique, par opposition à la technique utilisée par ailleurs et qui demande à enduire le semi-conducteur d’un absorbant au sein de la matrice de la puce. Afin d’améliorer la réduction de bruit dans de bonnes proportions, nous proposons d’enrober presque la totalité du boîtier du composant source de bruit, par un dépôt de couche d’alliage type Permalloy. Cependant, la tenue en température du matériau et la conservation de ses qualités de filtrage restent à prouver dans les conditions extrêmes d’utilisation du composant et pour sa durée de vie. Référence [1] ITRS SIA Roadmap, http://public.itrs.net/ [2] G. E. Moore, "Cramming more components onto integrated circuits", Electronics, Vol. 38, N° 8, (1965). [3] Guy Champiot, "La CEM : Technologie, réglementation, normes", Dunod, Collection Les Référentiels Dunod CEM, (2005). [4] J.Y. Shin and J.H. Oh, "The microwave absorbing phenomena of ferrite microwave absorbers", IEEE Transactions on Magnetics, Vol. 29, no.6, (Nov. 1993), 3437-3439. [5] F. Mayer, "Electrical power and signal distribution in modern aircrafts, combines weight advantages and EMC compatibility", IEEE International Symposium on Electromagnetic Compatibility, Vol. 1, (1998), 281-283. [6] F. Amemiya, K. Takagi, T. Mori, N. Kuwabara, S. Hamada, Y. Iwamoto, "Investigation of emission reduction effect from interface cables using amorphous magnetic-alloy film", IEEE International Symposium on Electromagnetic Compatibility, Vol. 1, (2002), 155-160. [7] H. Ono, Y. Takase, S. Yoshida, O. Hashimoto, "Analysis on noise suppression effect of the composite magnetic sheet for the use in near field", EMC '03. IEEE International Symposium on Electromagnetic Compatibility, Vol. 2, (2003), 938-941. [8] Soo-Hyung Kim, Seung-bae Lee, Kyung-Il Ouh, Chae-Bog Rim, Kyoung-Sik Moon, Ho-Gyu Yoon, Tak-Jin Moon, "Reduction of radiated emissions from semiconductor by using absorbent materials", IEEE International Symposium on Electromagnetic Compatibility, Vol. 1, (2000), 153-156. [9] 68HC912D60 and 68HC12D60, Advance Information, Rev 2.0, by Motorola, (July 27, 2000). 269