COURS PREMIERE ES – LVH – STRATAKIS – 2012/2013 Partie 3 regards croisés Chapitre 1 : Action publique et régulation REGARDS CROISES / Thème 1 : ACTION PUBLIQUE ET REGULATION Chapitre 1 : Comment l’Etat providence contribue-t-il à la cohésion sociale ? ★Questions centrales du chapitre 1 : Qu’est-ce que la cohésion sociale ? Qu’est-ce qui la remet en cause dans une Société ? Comment l’Etat intervient-il pour favoriser cette cohésion sociale ? Objectifs du chapitre 4 : - Acquérir des savoirs : Savoir définir les notions essentielles du programme de première : solidarité, désaffiliation, disqualification sociale et savoir définir d’autres notions : cohésion sociale, Etat-providence (ou Etat social) Il faut savoir : Montrer comment l’Etat contribue à favoriser la cohésion sociale à travers la définition de droits sociaux et la mobilisation de divers instruments Expliquer les différents modèles d’Etat-providence et leur évolution contemporaine Acquérir des savoir-faire : savoir extraire les idées principales d’un texte savoir analyser un document iconographique savoir lire et interpréter des tableaux à double entrée et différents types de représentations graphiques (diagrammes, représentations de séries chronologiques) savoir lire et interpréter, utiliser les taux de répartition, taux de croissance, taux de croissance moyen, indice simple (de base 100), pour établir des comparaisons dans le temps et l’espace. Plan du cours : I Qu’est-ce que la cohésion sociale ? II Comment les pouvoirs publics peuvent-ils contribuer à la cohésion sociale ? III A quels défis l’Etat social fait-il face aujourd’hui ? I Qu’est-ce que la cohésion sociale ? Document 1 : la solidarité n’est pas la charité Belin doc 1 p 376 Q1. Que désigne la solidarité en sociologie (cf Emile Durkheim) ? Q2. Pourquoi la montée de l’individualisme aujourd’hui apparaît-elle comme paradoxale ? Q3. Illustrez l’interdépendance qui unit les individus d’aujourd’hui avec des exemples concrets. V Point vocabulaire : l’individualisme est une conception politique, sociale et morale qui tend à privilégier les droits, les intérêts et la valeur de l'individu par rapport à ceux du groupe et de la communauté. Dans cette conception, l’individu s’autonomise par rapport aux diverses institutions sociales et politiques (la famille, le clan, la corporation, la caste...) qui exercent sur lui certaines règles. 1 COURS PREMIERE ES – LVH – STRATAKIS – 2012/2013 Partie 3 regards croisés Chapitre 1 : Action publique et régulation On parle de cohésion sociale lorsque les individus dans une société entretiennent des liens sociaux réguliers (liens marchands, liens politiques, sociabilité), qu’ils partagent des valeurs et des normes fondamentales pour les décisions de la vie en société et qu’ils développent un sentiment d’appartenance à cette même société. Lorsque ces relations existent, on peut parler de société intégrée, ou de « société de semblables » (expression de Léon Bourgeois, penseur et homme politique de la IIIèmeRépublique). A quels signes voit-on la fragilisation de la cohésion sociale ? A l’augmentation des inégalités, de la pauvreté, du taux de criminalité, du sentiment d’insécurité par exemple. Emile Durkheim parle de situation anomique pour désigner une société où des individus perdent leurs repères, ne partagent plus les normes et valeurs de la société (voir ci-dessous). Pour aller plus loin :lien social et montée de l’individualisme dans les sociétés modernes selon Emile Durkheim Emile Durkheim, sociologue français (1858-1917), a étudié les sociétés traditionnelles et les sociétés « modernes » (augmentation de la densité sociale et de la division du travail). Il a montré à la fin du 19ème siècle que le lien social change avec le passage de la société traditionnelle à la société moderne. Dans la société traditionnelle, ce qui fait la cohésion sociale, c’est la similitude des individus, la similitude de leurs normes, valeurs, modes de vie. La conscience collective est forte, l’individualisme est peu développé. La solidarité est dite mécanique, par Emile Durkheim. Avec l’augmentation du volume (démographie) et de la densité de la population (augmentation des échanges), le travail est de plus en plus divisé, les individus se spécialisent et se différencient de plus en plus. Le lien social ne tient plus par la similitude mais par l’interdépendance des uns par rapport aux autres. Emile Durkheim appelle cette solidarité « organique », en référence aux organes d’un corps qui sont interdépendants les uns des autres. En conséquence l’individualisme augmente. Durkheim le perçoit comme une émancipation de l’individu par rapport aux institutions de la société (famille, Eglise etc…) mais il s’interroge sur la possibilité d’un excès d’individualisme, qui mènerait à la fragilisation de la cohésion sociale, si les individus ne partagent plus suffisamment de règles sociales et sont indifférents les uns aux autres. La montée de l’individualisme dans les sociétés modernes faisait craindre à Emile Durkheim que dans certaines situations (crise économique par exemple), la perte des normes et valeurs communes puisse aboutir à une situation anomique. Le mot anomie (a-nomos : absence de norme) désigne un dérèglement social qui s’explique par l’affaiblissement de l’influence des règles sociales, normes et valeurs, sur les individus. Les forces intégratives ne jouant plus leur rôle, les individus ne connaissent plus de limites à leurs désirs, qui deviennent disproportionnés par rapport à leur situation objective. L’anomie peut alors conduire à des comportements déviants. L’analyse de Durkheim Société traditionnelle Société moderne Fondement du lien social entre les individus Similarité (faible division du travail) et proximité Complémentarité, interdépendance (forte division du travail) Conscience collective Forte Faible Autonomie des individus Faible Forte Type de solidarité Anomie Mécanique Organique Risque faible Risque plus élevé Document 2 : Les taux de pauvreté et les inégalités dans quelques pays de l’OCDE Belin Doc 2 p 377 Q1. Faites une phrase avec les données concernant la France : Q2. Quels sont les pays les plus inégalitaires en termes de revenus ? Et ceux où le taux de pauvreté est le plus important ? 2 COURS PREMIERE ES – LVH – STRATAKIS – 2012/2013 Partie 3 regards croisés Chapitre 1 : Action publique et régulation Document 3 : La pauvreté en France en quelques chiffres : Q1. Ecrivez un court paragraphe incluant au moins un chiffre de chacun des documents et résumant la situation de la pauvreté en France : Document 4 : La disqualification sociale Belin doc 3 p 377 Q1. Comment se caractérise le processus de disqualification sociale ? Q2. Quelles tendances générales semblent aujourd’hui le favoriser ? L’augmentation du chômage et de la précarité (augmentation de l’intérim, des CDD, du travail partiel subi)fragilise la situation des individus touchés par ces phénomènes. On parle de désaffiliation pour désigner cet éloignement des individus de la norme de travail (travail stable, en CDI, à temps complet permettant d’avoir à la fois des revenus stables et une protection sociale). On parle de disqualification sociale pour désigner le processus par lequel les individus s’appauvrissent et deviennent de plus en plus dépendants de dispositifs publics d’assistance et stigmatisés comme « pauvres » et « assistés ». 3 COURS PREMIERE ES – LVH – STRATAKIS – 2012/2013 Partie 3 regards croisés Chapitre 1 : Action publique et régulation II Comment les pouvoirs publics peuvent-ils contribuer à la cohésion sociale ? Document 5 : une intervention à plusieurs dimensions Belin doc 1 p 378 Q1. Quels sont les principaux moyens pour l’Etat d’assurer la cohésion sociale ? (voir synthèse cidessous) Q2. Rappelez ce que sont les effets externes et donnez un exemple en matière de protection sociale. L’Etat-providence s’oppose à l’Etat gendarme, qui lui n’assure que les fonctions régaliennes (sécurité intérieure, extérieure et justice), conception libérale de l’Etat, même si les libéraux comme Smith ont admis la nécessité d’intervenir dans de domaines essentiels et/où il n’y a pas de possibilité de rentabilité. L’Etat-providence (ou Etat social) peut être défini au sens large comme un Etat qui intervient dans la vie économique et sociale, assurant la régulation économique et la protection sociale. Au sens plus strict, l’Etat-providence désigne l’ensemble des interventions de l’Etat dans le domaine social. Ce terme est alors la traduction du Welfare State de la Grande Bretagne. Remarque : on oppose aujourd’hui le terme Workfare State à celui de Welfare State : cela montre l’évolution vers une exigence accrue d’une partie de la population d’une activité des allocataires de minima sociaux (Prime pour l’emploi, Revenu Minimum d’Insertion transformé en Revenu minimum d’Activité puis en Revenu de solidarité active etc…). . L’Etat agit sur le revenu disponible par la fiscalité, c’est-à-dire un système d’imposition (impôt progressif sur le revenu et autres impôts et taxes) et de redistribution(revenus secondaires appelés aussi revenus de transfert ou encore prestations sociales), selon une logique d’assurance (reposant sur les cotisations sociales – remboursements des soins médicaux, revenus de remplacement en cas d’accident du travail, allocations chômage…) mais aussi une logique d’assistance (reposant sur les impôts et les cotisations sociales – allocations logement, RSA, aide aux handicapés, l’enfance, aux personnes âgées). . L’Etat agit sur lerevenu disponible élargi (revenu disponible auquel on ajoute une estimation de la consommation de services publics) en fournissant des services publics (ou services collectifs) gratuits et donc ouverts à tous : routes, sécurité, justice, école, santé. . Enfin l’Etat agit également par des mesures incitatives à l’embauche des moins qualifiés (emplois aidés, allègements ou suppression de cotisations patronales etc…), par des mesures de discrimination positive dans l’éducation, ou encore dans son recrutement de fonctionnaires. Il agit aussi en légiférant : loi sur la parité, les handicapés (voir plus haut), loi sur l’égalité salariale. Remarque : d’autres acteurs que l’Etat prennent ce type de mesure pour lutter contre les inégalités : c’est l’exemple de Science Po Paris qui a ouvert ses portes aux élèves issus des zones scolaires défavorisées. Remarque : l’Etat en France agit aussi sur les revenus primaires : par la législation du travail, par exemple avec la fixation d’un salaire minimum interprofessionnel de croissance (SMIC). On peut estimer aussi que la législation du travail permet de « protéger » ceux qui ont le moins de pouvoir de négociation sur le marché du travail (les moins qualifiés), et donc lutter contre les inégalités (limitation des CDD sur un même poste par exemple, législation sur le temps de travail, sur le travail de nuit etc…). Genèse de l’Etat-providence : jusqu’au XIXème siècle en Europe, la solidarité familiale ou encore celle des Eglises est presque le seul moyen de se protéger contre les risques sociaux (maladie, perte de revenus, vieillesse…). A partir du milieu du XIXème siècle, se mettent en place des solidarités à la fois privées et étatiques : des caisses privées d’assurance mutuelles voient le jour 4 COURS PREMIERE ES – LVH – STRATAKIS – 2012/2013 Partie 3 regards croisés Chapitre 1 : Action publique et régulation dans des entreprises, au sein des communautés ouvrières, et des aides de l’Etat pour les plus pauvres (Poor’sLaws en Angleterre, Assistance publique en France). Les débuts de l’Etat Providence en Europe sont marqués par deux modèles : le modèle bismarckien et le modèle beveridgien. Le premier fait référence au système de protection sociale basé sur une logique d’assurance et organisé par le chancelier Bismarck en Allemagne à la fin du 19ème siècle, et le deuxième à un système davantage basé sur une logique d’assistance, mis en place après la seconde guerre mondiale par Lord Beveridge en Angleterre. Dans la logique d’assurance, sont protégés ceux qui ont préalablement cotisé (à une caisse mutuelle de sécurité sociale). Dans une logique d’assistance, sont protégés tous les individus, tous les risques sont couverts, sous condition de ressources, on parle d’universalisme. Le système est financé par l’impôt. En France après 1945 est mis en place un système proche du modèle bismarckien, avec les cotisations sociales des salariés et des employeurs qui permettent de financer les prestations sociales. Il s’agit d’une redistribution horizontale : les actifs occupés paient pour les inactifs et les chômeurs, les valides pour les malades etc… Mais le modèle français s’inspire également du modèle béveridgien dans la mesure où une partie des prestations sociales sont universelles (ouvertes à tous- sous conditions de ressources, comme le RSA) et financées par l’impôt (CSG* et CRDS** notamment). Il s’agit d’une redistribution verticale : des plus riches vers les plus pauvres. Les cotisations sociales représentaient les 2/3 du financement de la protection sociale dans les années 60 et aujourd’hui 4/5ème.L’Etat-providence en France couvre ainsi la plupart des risques sociaux en France, c’est-à-dire les évènements qui surviennent au cours de la vie et qui ont pour conséquences soit une augmentation de dépenses (maladie par exemple), soit une baisse du revenu (chômage par exemple). On compte quatre grandes catégories de risques sociaux : risques de chômage, de maladie, de vieillesse, et « risques » liés à la famille. *CSG : contribution sociale généralisée, est imposée à tous les revenus, dont le revenu du patrimoine et les allocations familiales. **CRDS : Contribution au remboursement de la dette sociale, imposée à tous les revenus. Autres impôts pour la protection sociale : taxes sur le tabac ou l’alcool, sur les publicités pharmaceutiques. Définitions : Cotisation sociales (ou charges sociales) :prélèvements obligatoires assis sur les revenus du travail, qui permettent de financer les prestations sociales. On distingue les cotisations salariales, déduites du salaire brut (salaire net = salaire brut – cotisations salariales), des cotisations patronales, versées par l’employeur. La Sécurité sociale et les Assedic gèrent ces cotisations. Prestations sociales (ou revenus de transfert) : ensemble des revenus versés aux individus par l’Etat (Sécurité sociale ou autres organismes de protection sociale) pour compenser une perte de revenu (chômage, retraite) ou une augmentation des dépenses (maladie, enfants ..). Services collectifs (ou services publics) : services financés par les prélèvements obligatoires et bénéficiant à l’ensemble de la population. Ils répondent à des besoins jugés essentiels au développement et à la cohésion sociale et sont donc fournis gratuitement ou quasi-gratuitement (prix inférieur à 50 % du coût de production) : école, santé, transports collectifs, réseaux de communication, eau potable…). On parle de redistribution pour désigner le système qui permet à l’Etat de corriger les inégalités de revenus primaires en prélevant sur ces revenus (impôts et cotisations sociales) et en versant des prestations sociales ainsi qu’en finançant des services collectifs bénéficiant à tous. Cette redistribution est faite au nom de la justice sociale, elle ne vise pas l’égalité des situations. 5 COURS PREMIERE ES – LVH – STRATAKIS – 2012/2013 Partie 3 regards croisés Chapitre 1 : Action publique et régulation En complément des deux exercices sur les différents types d’Etat-providence : Trois grands modèles d’Etat-providence Modèle corporatiste Modèle universaliste Modèle libéral ou résiduel Caractéristiques de l’Etat-providence Assurances sociales obligatoires Prestations sociales forfaitaires offertes à tous Etat-Providence minimal + Assurances privées Population couverte Ceux qui ont un emploi et leur famille Tous les résidents Les pauvres et les cotisants Mode de financement Cotisations sociales Impôts Impôts et cotisations Organismes de gestion Caisses de Sécurité sociale gérées par les syndicats de salariés et patronaux Etat Etat et assurances privées Philosophie de la protection sociale Couvrir les risques sociaux Solidarité et réduction des inégalités Assistance et responsabilité individuelle Limites du système de protection Seuls sont qui ont suffisamment cotisés sont couverts Désincitation au travail Non couverture de ceux qui sont légèrement au-dessus du seuil Exemples de pays Allemagne, France Pays Nordiques Etats-Unis Les sociologues GøstaEsping-Andersen et Bruno Palier dans "Trois leçons sur l'Etat-Providence" (2008) remarquent que les objectifs des systèmes de protection sociale ne sont pas identiques : . Le modèle scandinave a pour objectif de réduire les inégalités et d'accorder universellement des revenus importants afin de rendre les individus autonomes et responsables. Le critère d'attribution est la citoyenneté et les prestations sont distribuées par des institutions décentralisées. . Le modèle corporatiste s'attache à protéger les salariés et leur famille par un mécanisme de cotisations sociales assises sur le travail salarié. Il privilégie la prise en charge des personnes âgées pour leurs dépenses de santé et les retraites. . Le modèle libéral anglo-saxon est favorable à une marchandisation de la protection sociale. Les prestations sociales, financées par l'impôt, sont faibles et concentrées sur les pauvres. Le reste de la population confie sa protection à des institutions privées. III A quels défis l’Etat social fait-il face aujourd’hui ? Document 6 le déficit de la Sécurité sociale se rétracte Le régime général de la Sécurité sociale a vu son déficit diminuer, passant de 17,4 milliards en 2011 à 13,3 milliards d'euros en 2012. 6 COURS PREMIERE ES – LVH – STRATAKIS – 2012/2013 Partie 3 regards croisés Chapitre 1 : Action publique et régulation Le déficit de l'assurance maladie a diminué en 2012. © Florence Durand / sipaLe Point.fr (avec AFP) Le déficit du régime général (salariés du privé) de la Sécurité sociale s'est amélioré en 2012, à 13,3 milliards d'euros contre 17,4 milliards d'euros en 2011, ont indiqué mardi les ministères du Budget et des Affaires sociales. Dans le détail, le solde de la branche maladie reste le plus déficitaire à - 5,9 milliards d'euros (- 8,6 milliards en 2011), celui de la branche retraite s'établit à 4,8 milliards (- 6 milliards en 2011). Les déficits des branches famille (2,5 milliards contre 2,6 en 2011) et accidents du travail (0,2 milliard comme en 2011) se stabilisent. (…) L'amélioration de la situation de la branche maladie "traduit notamment une meilleure maîtrise des dépenses d'assurance maladie", soulignent-ils. Les dépenses maladie prévues par l'Ondam (objectif national des dépenses d'assurance maladie, fixé à + 2,5 % en 2012) ont été "inférieures de 0,9 milliard d'euros". Baisse des recettes en raison du chômage Toutefois, le déficit de la branche maladie est supérieur à ce qui avait été prévu à l'automne en raison d'une masse salariale moins importante due au chômage, ce qui entraîne une baisse des recettes (cotisations), a indiqué le ministère du Budget.(…) Le Point.fr - Publié le 09/04/2013 Q1. Quelle est la branche la plus déficitaire de la Sécurité sociale ? Q2. Donnez des exemples concrets de facteurs possibles de la hausse des dépenses pour la branche maladie et la branche retraite. Q3. Quels sont les facteurs ayant permis une amélioration de la situation d’un côté, et quels sont les facteurs ayant empêché une réelle amélioration ? Document 7 : L’intervention des pouvoirs publics est-elle efficace ? Les inégalités et la pauvreté en hausse continue Depuis plus de dix ans, année après année, les statistiques sur les revenus font apparaître une montée des inégalités et de la pauvreté*. Il ne s’agit pas seulement d’une « explosion » des revenus d’une poignée de millionnaires, mais d’un mouvement de fond, qui fait que les riches s’octroient une part toujours plus grande du gâteau. Entre 1999 et 2009, la masse globale des revnus distribués a progressé de 231 milliards d’euros, après inflation. Les 10% les plus riches en ont capté 63 milliards, soit plus du quart. Les 10% les plus pauvres n’ont perçu que 6 milliards, soit dix fois moins. Plus on s’élève dans la hiérarchie des revenus, plus le phénomène est accentué. Tout en haut de l’échelle, la hausse des revenus a été colossale, accompagnée par des baisses d’impôts d’importance. Au bas de l’échelle, le nombre de pauvres s’accroît. Entre 2002 et 2010, le taux de pauvreté au seuil de 50 % du niveau de vie médian est passé de 6.5% à 7.8%, et de 12.9 % à 14.1 % en fixant le seuil à 60 % du niveau de vie médian. Soit une augmentation de plus de un million de personnes. (…) Ces pauvres sont d’abord des personnes peu qualifiées, des étrangers et des chômeurs. (…) L’argent manque dans les caisses de la collectivité pour venir en aide aux moins favorisés, par exemple pour accroître les minima sociaux ou les allocations chômage. Doit-on attendre le retour de la croissance ? (…) Louis Maurin, les chiffres de l’économie 2013, Alternatives Economiques, hors-série n°94 7 COURS PREMIERE ES – LVH – STRATAKIS – 2012/2013 Partie 3 regards croisés Chapitre 1 : Action publique et régulation Q1. Quelle(s) conclusion(s) pouvez-vous tirer à la lecture de ce document sur la protection sociale en France ? Document 8 : La redistribution a-t-elle un effet désincitatif ? L'éligibilité au revenu de solidarité active (RSA) est soumise à plusieurs critères. La condition d'âge est notamment restrictive : très peu de personnes de moins de 25 ans sont éligibles au RSA. Avant la mise en place de ce dispositif, en juin 2009, la même condition existait pour le revenu minimum d'insertion (RMI). Cette restriction s'appuie notamment sur la crainte que l'accès au revenu minimum décourage certains jeunes de poursuivre leurs études ou de rechercher un emploi. On peut évaluer l'ampleur de cette désincitation au travail autour du seuil d'âge ainsi créé. Si elle existe, cette désincitation devrait se traduire par un fléchissement du taux d'emploi des jeunes justeaprès 25 ans, puisque le gain à l'emploi de certains jeunes serait plus faible à partir de cet âge. Or, aucune rupture dans les taux d'emploi à 25 ans n'est repérable pour les jeunes célibataires sans enfant ayant au moins un CAP ou un BEP. Le RMI et le RSA n'auraient donc pas d'effet désincitatif marqué sur l'emploi de ces jeunes. [...] Au total, sur la période 2004-2009, entre 1,7 % et 2,9 % de ces jeunes très peu qualifiés auraient été découragés de travailler en raison du RMI. [...] Les raisons pour lesquelles la désincitationpeut être faible sont bien connues. Ainsi, l'accès à l'emploi peut être perçu comme une norme sociale à atteindre, même si les gains financiers qu'il procure sont faibles. C'est aussi le moyen de se construire des droits à la retraite. De surcroît, la plupart des chômeurs recherchent un emploi à temps plein, alors que le RMI ou le RSA jouent surtout sur l'arbitrage entre emploi à temps partiel et inactivité. Enfin, de faibles gains au travail à court terme peuvent être compensés par des gains àplus long terme, avec une amélioration des conditions futures d'emploi procurée par l'expérience professionnelle accumulée. O. Bargain et A. Vicard, "Le RMI et son successeur le RSA décourage-t-il certains jeunes de travailler ?" Q1. A partir de ce texte, expliquez ce que signifie la « trappe à pauvreté » ou la « trappe à inactivité » : Q2. Pourquoi le RSA n’a-t-il pas d’effets désincitatifs au travail ? A l’aide de ces documents et du Belin doc 1 p 380, résumez ci-dessous les trois grandes crises de l’Etat –providence : 8 COURS PREMIERE ES – LVH – STRATAKIS – 2012/2013 Partie 3 regards croisés Chapitre 1 : Action publique et régulation 9