Déplacement visqueux de fluides miscibles dans des tubes

Déplacement visqueux de fluides miscibles dans des tubes capillaires
Ce travail, qui est le fruit d'une collaboration avec T. Maxworthy et E. Meiburg sur des problèmes
"d'interface" entre fluides miscibles, est décrit en détail dans l'article [Miscible displacements in
capillary tubes - Part 1: Experiments, P. Petitjeans, T. Maxworthy, J. Fluid Mech., 326, 37-56, 1996].
Une expérience de déplacement visqueux a été montée (Fig. 53) où un tube capillaire de diamètre d
de 1, 2, 3, ou 4 mm de diamètre et de 1 m de long est rempli d'un fluide visqueux (2) (glycérine). Un
fluide moins visqueux (1) (mélange eau-glycérine) pousse le fluide précédent, les deux fluides étant
miscibles en toute proportion. La situation est instable est on observe un doigt se développer, similaire
à ce que l'on observe lorsque les deux fluides ne sont pas miscibles. La diffusion moléculaire rempli le
rôle stabilisant occupé habituellement par la tension de surface, et le paramètre de contrôle est
maintenant le nombre de Péclet Pe au lieu du nombre capillaire Ca. Nous avons mesuré la quantité m
de fluide visqueux restant dans le tube après le passage du doigt de fluide le moins visqueux en
fonction du rapport de viscosité (Atwood, At = (
µ
2-
µ
1)/(
µ
2+
µ
1) ), du nombre de Péclet Pe, et de
l'influence de la gravité représenté par un autre nombre sans dimension: F = g (
ρ
1-
ρ
2) d2/
η
2Vmax
Vmax est la vitesse maximum du profil de Poiseuille en amont du doigt. La valeur asymptotique de
cette quantité m pour des grands Pe a été déterminée en fonction du nombre d'Atwood. Dans le cas où
At = 1, la valeur asymptotique est la même que celle que l'on obtient dans le cas non-miscible (Fig.
54). Le comportement de m en fonction de At a été trouvé en très bon accord avec des résultats
numériques menés en parallèle par E. Meiburg. Pour des nombres de Péclet supérieur à 1000,
l'interface est fine et suffisamment bien définie pour nous permettre de comparer ces résultats avec le
cas non miscible, et ainsi évaluer une tension de surface effective entre les deux fluides miscibles (Fig.
55).
L'effet de la gravité sur la quantité m de fluide visqueux restant accrochée à la paroi a aussi été
étudiée. Lors de cette étude, le coefficient de diffusion D entre de la glycérine pure et un mélange eau-
glycérine a été mesuré par une méthode optique (effet mirage). Cette technique permet de remonter au
gradient d'indice de réfraction, qui est relié au gradient de concentration. Son évolution au cours du
temps nous donne accès au coefficient de diffusion moléculaire D (Fig. 56).
Sortie d'air
Mélange
eau-glycérine
Vanne de
contrôle
Sortie d'air
Glycérine
Réceptacle
pour la
glycérine
Balance
Tube carré rempli d'un fluide de même
indice de réfraction que le verre
Tube cylindrique
Réservoirs à pression constante
Glycérine
Mélange
eau-glycérine
Fluide iso-indice
Uµ2
µ1
Figure 53: Montage expérimental
0.62
0.60
0.58
0.56
0.54
0.52
0.50
0.48
mmax
1.0
0.9
0.8
0.7
0.6
0.5
0.4
0.3
0.2
0.1
0.0
At
Experimental
Numerical
Figure 54: Valeur asymptotique de mmax dans la limite
des grands Pe en fonction du nombre d'Atwood
1.0
0.8
0.6
0.4
0.2
0.0
m
16000
12000
8000
4000
0
Pe
1.0
0.8
0.6
0.4
0.2
0.0
m
6
5
4
3
2
1
0
Ca
Cas miscible
Cas immiscible (expérience de Taylor)
Cox (1962)
F
igure 55: Comparaison entre l'évolution de m
fonction de Pe (cas miscible) et en fonction de
(cas non miscible)
Figure 56: Mesure du coef. de diffusion
moléculaire entre de la glycérine pure
et un mélange eau-glycérine. Un
faisceau laser entrant en Xin est dévié
verticalement dans un gradient de
concentration et sort en Xout.
L'intégrale de Xout-Xin est reliée au
profil de concentration.
La quantité m peut aussi s'écrire en fonction de la vitesse du doigt (Vtip) et de la vitesse moyenne
dans le tube (Vm=Vmax/2) comme m = 1 – Vm/Vtip. On voit de suite que la valeur m = 0.5 est particulière
dans le sens où, lorsque m est supérieur à 0.5, alors Vtip est supérieur à Vmax, ce qui signifie que le doigt
se propage plus vite que l'écoulement; et réciproquement. Deux types d'écoulement sont alors observés
et mesurés. Lorsque m<0.5, on observe un petit filet (spike) sortir du bout du doigt central et se
propager plus vite. Ceci se comprend très bien lorsque l'on regarde les lignes de courant qui ont été
déterminées par PIV (Fig. 57).
Figure 57-a: m>0.5
Figure 57-b: m<0.5
Une version modifiée devrait être installée dans la station spatiale internationale en 2004 ou 2005.
Nous pensons que les effets liés à la contrainte de Korteweg (tension de surface effective) ne sont pas
visibles à grand Pe (les effets convectifs dominent), ni à bas Pe à cause de la gravité qui déforme trop
l'interface et la structure de l'écoulement pour permettre de les voir. L'intérêt d'une expérimentation en
micro-gravité est donc d'éliminer les déformations liées à la gravité pour observer uniquement les
effets de la contrainte de Korteweg. Parallèlement, des simulations numériques seront entreprises par
E. Meiburg et son équipe. L'objectif est donc de vérifier la formulation des contrainte de Korteweg (ou
de proposer quelque chose de mieux adapté), et de déduire les coefficients numériques par
comparaison entre les mesures et les simulations. Cette expérience devrait être installé dans
l'instrument français DECLIC (CNES). Ce projet est donc une collaboration entre la NASA et le
CNES, et entre T. Maxworthy et E. Meiburg du côté américain et P. Petitjeans du côté français.
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