La meunerie est alors florissante car les conditions climatiques au Xe siècle, sont
exceptionnelles, et des méthodes innovantes, sont les causes des hauts rendements céréaliers
de l’époque. C’est la meunerie qui va générer les premières urbanisations. Puis les moulins à
eau, dont plus d’un tiers sont édifiés au bord des canaux de dérivation, vont gagner
progressivement l’espace rural. On comptait alors en Europe, un moulin pour quatre-cent
habitants. Au XIIe siècle, s’épanouissent tous les métiers de la rivière. C’est la draperie, la
teinturerie, la tannerie, la mégisserie, la vannerie qui toutes ont besoin d’une eau en
abondance et en permanence pour transformer la laine, tanner le cuir, rouir le lin ou le
chanvre, plus les cités se développent plus elles ont besoin d’eau. C’est la conquête des eaux
mortes.
Les bourgs entreprennent de conquérir toutes les zones humides avoisinantes et l’économie
urbaine du Moyen-Âge finissant et de la renaissance sera fondée plutôt sur l’eau stagnante.
Débute alors un gigantesque travail d’organisation des paysages fluviaux qui durera des
siècles. Le paysage urbain médiéval était tissé de canaux ; un tiers des villes, si ce n’est plus,
s’organisaient comme autant de petites Venise. La fontaine y occupait une place de choix. A
défaut d’aqueducs, les citadins font creuser des puits dans leur arrière- cour. La densité du
réseau hydraulique témoignait de la puissance d’une cité dont la richesse dépendait
essentiellement du drap et du cuir. Les tissus tiraient leur réputation notamment de leur
teinture qui dépendait de l’emploi judicieux des colorants et des qualités minéralogiques de
l’eau. Les teinturiers implantaient leurs ateliers sur un canal différent de celui des tanneurs.
Par contre pelletiers et corroyeurs se plaçaient souvent en contrebas des teinturiers pour
profiter des restes d’alun dissous dans le jus de teinture. Les tueries, elles, se situaient en
amont des tanneries, car si l’abattage du bétail exige de l’eau claire en abondance, la
préparation des peaux n’a besoin que d’un peu d’eau, éventuellement polluée.
Il n’en reste pas moins que c’était une époque de grande pollution chimique et surtout
microbienne des eaux courantes, qui les mêmes eaux pourvoyaient tout à la fois à la soif et à
l’évacuation des déchets et eaux usées !
Les cours d’eau d’une certaine taille deviennent des voies navigables où les bateaux assurent
des trafics commerciaux à longue distance entre villes et trafic côtier. Cette activité de
navigation génère toute une architecture de barrage, d’écluses, de canaux et de ports avec
leur quai, et, l’émergence d’un nouveau métier, les bateliers.
C’est à l’époque de la renaissance que l’on doit l’invention des écluses qui permettent aussi
bien la navigation descendante qu’ascendante. Par la suite seront creusés des canaux qui
relient entre eux deux fleuves par-delà les lignes de partage des eaux. Celui qui reliera la
Loire à la Seine sera achevé en 1642 ; le canal du midi en 1682 ; celui de la Loire à la Saône
en 1793.
C’est alors l’épanouissement de cette civilisation des gens de l’eau, nautes et bateliers,
charretiers de rivière et cochers d’eau, mariniers et passeurs, éclusiers et dragueurs, marins
et capitaines qui, dès l’époque romaine , avaient appris à composer avec les caprices et les
eaux tumultueuses et difficilement navigable de certains fleuves, les gabariers utilisant