Conférence de presse de l’Association suisse des banquiers, 3.9.2013 Exposé de Claude-Alain Margelisch 1
Le texte prononcé fait foi.
Conférence de presse du 3 septembre 2013
Claude-Alain Margelisch, CEO, Association suisse des banquiers
L’accès au marché: un pilier important de la stratégie de
croissance
Mesdames, Messieurs,
Outre la résolution des problèmes hérités du passé, que Patrick Odier a évoquée en détail
dans son intervention, la croissance constitue également un objectif stratégique important
pour la place financière suisse. Je voudrais consacrer les minutes qui viennent à vous
exposer quelques éléments clés en relation avec l’accès bilatéral au marché, qui est
nécessaire à la croissance, avant d’aborder la question de la protection des investisseurs.
En dernier lieu, je vous présenterai les principales conclusions de notre Baromètre
bancaire 2013, une publication annuelle désormais traditionnelle qui synthétise en
quelques chiffres la situation dans le secteur bancaire.
La MiFID II entrave l’accès au marché intérieur de l’UE
Les activités transfrontalières de gestion de fortune, qui représentent environ un tiers des
recettes des banques en Suisse, sont et demeurent pour ces dernières un pilier important.
L’accès au marché intérieur européen est un facteur essentiel dans le cadre de leur
stratégie de croissance. A cet égard, les pays tiers comme la Suisse sont confrontés à des
défis considérables, dont notamment la révision de la Directive de l’UE concernant les
marchés d’instruments financiers (Market in Financial Instruments Directive), en abrégé
MiFID II. Je suis toujours étonné de voir combien le public, mais aussi certains politiques,
ont peu conscience du problème lié à la MiFID II, alors que ce dispositif pourrait entraîner
une nouvelle discrimination des Etats tiers et donc des banques en Suisse en ce qui
concerne l’accès au marché de l’UE. Sur le principe, le fait que la MiFID II vise à améliorer
la protection des clients mérite d’être salué. Mais c’est au niveau de la mise en œuvre que
le bât blesse: outre l’équivalence de la surveillance et de la réglementation, la MiFID II
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exige en effet que les établissements financiers d’un pays tiers disposent obligatoirement
d’une succursale dans l’UE et ne proposent leurs prestations à des clients de l’UE que par
l’intermédiaire de cette dernière. Au bout du compte, pour les banques suisses ayant des
activités transfrontalières de gestion de fortune, il en résulte une nouvelle détérioration du
statu quo, puisqu’elles ne pourraient plus suivre les clients et leurs placements qu’au sein
de l’UE. Outre un reflux des actifs sous gestion, cela entraînerait une délocalisation
significative des emplois de la Suisse vers l’UE.
Mesdames et Messieurs: nous ne pouvons pas arrêter la MiFID II. Mais nous devons nous
efforcer de trouver une solution satisfaisante pour sa mise en œuvre. L’objectif est qu’à
l’avenir, les banques suisses conservent un accès au marché de l’UE au minimum
identique à celui qu’elles ont actuellement, et qu’elles ne soient pas discriminées encore
davantage. La FINMA a par exemple négocié avec l’autorité de surveillance européenne,
l’AEMF, des accords de coopération concernant les fonds d’investissement alternatifs:
c’est un premier pas dans la bonne direction, mais il n’y a pas pour autant de quoi sauter
de joie! Pour nous assurer un accès au marché intérieur de l’UE à moyen ou long terme,
nous devrons éventuellement aller jusqu’à négocier un accord sur les services. Or cela
suppose de régler au préalable les questions institutionnelles entre l’UE et la Suisse. Cette
dernière bénéficie d’un secteur financier fort. Il appartient dès lors aux autorités et aux
politiques d’assumer leurs responsabilités envers la Suisse et de poser en temps utile des
jalons bilatéraux adéquats, afin de conserver la prospérité en Suisse.
Loi sur les services financiers: des investisseurs informés et responsables
Mesdames et Messieurs, l’Europe n’est pas la seule à vouloir améliorer la protection des
investisseurs. Avec la loi sur les services financiers, en abrégé LSFin, le législateur suisse
va dans le même sens. Le projet correspondant devrait être mis en consultation fin 2013
ou début 2014. Permettez-moi de préciser ici quelques points figurant dans ce projet:
le cercle des assujettis à la surveillance de la FINMA sera élargi puisqu’il intègrera,
outre les banques, les gérants de fortune indépendants;
les banques seront soumises à des obligations de documentation accrues. Par
exemple, elles seront tenues de présenter plus précisément les caractéristiques
des produits dans des prospectus destinés aux clients, et elles devront établir un
profil client rigoureux;
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outre ces obligations de conseil et de documentation, les conflits d’intérêts ainsi
que les rémunérations de tiers dont les rétrocessions devront être
communiqués au client;
enfin, le projet de LSFin vise une harmonisation avec la MiFID II en ce qui
concerne les activités transfrontalières en Suisse.
Fondamentalement, le fait d’uniformiser et de compléter avec mesure le droit suisse de la
surveillance des marchés financiers ne suscite aucune objection. Là encore, la question
de la responsabilité entre en jeu. Les banques doivent assumer clairement leurs
responsabilités et fournir à l’investisseur les informations et les conseils appropriés qui
l’aideront dans sa décision de placement.
Je m’empresse toutefois de souligner qu’il doit s’agir d’un investisseur responsable, qui
prend lui-même ses décisions et en assume les conséquences. Il n’est pas possible
qu’une banque doive endosser la responsabilité des décisions de placement prises par le
client. La protection des investisseurs peut être assurée en améliorant de manière
appropriée l’information et la transparence, ainsi qu’en contrôlant le bien-fondé et
l’adéquation des recommandations de placement au cas par cas pour autant que le
besoin s’en fasse réellement sentir. Cette approche est plus pérenne que les interdits
stricts.
Conclusions essentielles du Baromètre bancaire 2013
Le contexte économique demeure difficile
Avant de vous présenter quelques-unes des conclusions du Baromètre bancaire de cette
année, permettez-moi de décrire brièvement le contexte économique dans lequel les
banques opèrent actuellement:
la crise de la dette publique restant sans solution, la zone euro est en récession,
tandis que les Etats-Unis connaissent depuis deux ans une évolution plus positive.
Les derniers chiffres permettent toutefois de rester optimistes;
la dynamique s’est ralentie en Chine et au Brésil, mais elle s’est accélérée dans
d’autres pays émergents;
au Japon, la politique budgétaire et monétaire expansionniste a produit début 2013
les effets escomptés et fortement dynamisé l’économie du pays;
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portée par la conjoncture intérieure, l’économie suisse reste comparativement
solide, même si elle a enregistré un léger ralentissement au cours des derniers
mois.
Stagnation du résultat des banques
Comme en 2011, le résultat consolidé des banques en Suisse a stagné en 2012. Malgré
une hausse du résultat des opérations d’intérêts et des autres résultats, les banques ne
sont pas tout à fait parvenues à compenser la baisse des revenus issus des opérations de
négoce. Le résultat des opérations de commissions et prestations de services est
néanmoins resté la composante majeure du résultat des banques en Suisse, à environ
40%.
Volume de crédit national en hausse
Les limites de crédit octroyées ont progressé de 4,7% en 2012 à CHF 1105 milliards, alors
que les crédits utilisés s’inscrivaient en hausse de 5,7%. Les limites de crédit n’ont donc
été utilisées qu’à 86,2%. Les créances hypothécaires suisses se sont inscrites en hausse
de 5,8% et sont restées la composante principale de la demande de crédit nationale, à
83,7%.
Comme je l’ai fait déjà par le passé, j’aimerais attirer votre attention sur les points suivants.
Premièrement, on ne peut guère dire qu’une bulle s’est formée sur le marché immobilier.
Une étude récente de l’EPF Zurich montre par exemple que le marché suisse du logement
en propriété présente des signes d’accalmie. De plus, des mesures ont été prises: à
travers le réajustement de l’autoréglementation, les banques ont renforcé l’octroi des
crédits hypothécaires et la Banque nationale suisse a ordonné d’activer ce mois-ci le
volant de fonds propres anticyclique, qui oblige les banques à détenir des fonds propres
supplémentaires pour couvrir les hypothèques liées à des immeubles d’habitation. Si à
présent, comme certains continuent de l’affirmer, il devait y avoir des excès dans l’octroi
de crédit de la part des banques, je rappelle que la FINMA a la possibilité d’intervenir
directement auprès d’elles et d’ordonner des mesures.
Ainsi, avant d’exiger de nouvelles mesures, il convient pour commencer de laisser aux
mesures existantes le temps nécessaire pour produire l’effet souhaité sur le marché
immobilier.
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Augmentation des actifs sous gestion
Au total, les actifs sous gestion dans les banques en Suisse s’établissaient fin 2012 à
CHF 5565 milliards. Cela correspond à une augmentation de CHF 320 milliards par
rapport à 2011. Une partie de cette augmentation provient de la progression des dépôts de
titres ainsi que de la hausse des cours de Bourse. Les actifs étrangers représentent
toujours un peu plus de la moitié de l’ensemble des actifs sous gestion. Aucune sortie
notable de capitaux étrangers vers d’autres pays n’est donc à déplorer.
Léger recul des effectifs
Après avoir légèrement augmenté leurs effectifs en 2011 (+0,14%), les banques en Suisse
les ont réduits en 2012 (-2,7%). A fin 2012, elles employaient 105 166 collaborateurs au
niveau national. Seules les banques Raiffeisen ainsi que les banques régionales et les
caisses d’épargne ont augmenté leurs effectifs l’an passé.
Conclusion
Comme vous l’aurez compris en entendant mes propos et ceux de Patrick Odier, les
conditions-cadres dans lesquelles les banques doivent aujourd’hui évoluer sont loin d’être
simples. Néanmoins, j’envisage l’avenir avec confiance. Malgré les turbulences de l’année
dernière, le secteur financier suisse a poursuivi ses efforts d’adaptation au nouveau
contexte en privilégiant une double stratégie: avoirs de la clientèle conformes fiscalement
et application de normes internationales. Si nous poursuivons cette stratégie de manière
systématique, mesurée et responsable, nous pourrons encore compter à l’avenir sur une
place financière solide et performante pour notre économie et pour nos clients.
Nous attendons à présent avec intérêt les questions que vous voudrez bien nous poser
sur les différents thèmes abordés.
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