
La  fibrillation  auriculaire  se  complique  souvent 
d’insuffisance cardiaque et d’accidents emboliques artériels. 
Si  la  réduction  de  l’arythmie  n’a  pas  montré  d’efficacité 
supérieure  à  un  ralentissement  du  rythme  cardiaque,  le 
niveau souhaitable de ce ralentissement n’est pas bien connu 
aujourd’hui.  En  particulier,  un  ralentissement  important  de 
ce  rythme  cardiaque  s’accompagne  d’une  fréquence  élevée 
d’effets  indésirables  des  médicaments  utilisés.  Les  auteurs 
ont  donc  mené  un  essai  thérapeutique  randomisé  contrôlé, 
multicentrique pour comparer une stratégie de contrôle strict 
de la fréquence cardiaque versus un contrôle modéré. 
Trente trois centres néerlandais ont recruté des patients âgés 
de  moins  de  80  ans,  avec  une  fibrillation  auriculaire 
chronique,  soit  depuis  au  moins  12  mois,  une  fréquence 
cardiaque d’au moins 80 bat/min par minute et un traitement 
anticoagulant selon les recommandations. 
Chaque patient était assigné de façon non aveugle à l’un des 
2 groupes. Les médicaments utilisés, en association ou non, 
pour  réduire  la  fréquence  cardiaque  étaient  les  béta-
bloquants,  les  inhibiteurs  calciques  et  les  digitaliques. 
L’objectif de  fréquence cardiaque était de  110 bat/min pour 
le  groupe  « contrôle  modéré »,  et  de  80  bat/min  pour  le 
groupe « contrôle strict ». Cette fréquence était contrôlée par 
un  ECG,  et  un  holter  cardiaque  de  24  heures  était  réalisé 
pour  le  groupe  « contrôle  strict »  afin  de  dépister  des 
épisodes de brady-arythmie. 
L’objectif primaire était  composé des évènements  suivants : 
décès  d’origine  cardio-vasculaire,  hospitalisation  pour 
insuffisance cardiaque, accident vasculaire cérébral, embolie 
artérielle  systémique,  accident  hémorragique  grave  et 
complications  rythmiques  de  type  tachycardie  ventriculaire, 
syncopes,  effets  indésirables  graves  des  médicaments  et 
implantation  d’un  pace-maker.  Les  points  de  contrôles 
secondaires incluaient les points de contrôle primaires, ainsi 
que  les  décès  de  toutes  causes,  les  symptômes  et  le  statut 
fonctionnel. Au total, 614 patients ont été inclus dans l’étude 
avec une moyenne d’âge de 688 ans. 
Les résultats montraient dans le groupe  « contrôle modéré » 
une moyenne de fréquence cardiaque de 93  3 bat/minute et 
de  76   12  bat/min  pour  le  groupe  « contrôle 
strict »  (p<0,001).  Durant  le  suivi,  dans  les  groupes 
« contrôle  strict »  et  « modéré »  respectivement,  22  et  18 
patients  avaient  un  rythme  sinusal  (p=0,6).  Respectivement 
dans les groupe « contrôle strict » et « contrôle modéré », 43 
vs 38  patients  avaient  un  critère  répondant  à  l’objectif 
primaire,  avec  une  différence  non  significative  entre  les  2 
groupes.  Concernant  la  prévention  de  l’objectif  primaire,  il 
n’y avait  pas de différence  significative  entre les  2 groupes 
(p=0,001). Il n’y avait pas non plus de différence en termes 
de nombre de décès (5,6% à 3 ans dans le groupe « contrôle 
modéré » vs 6,6% dans le groupe « contrôle strict »). 
Au  total,  cette  étude  montre  une  « non  infériorité »  d’une 
stratégie  « contrôle  modéré  de  la  fréquence  cardiaque »  par 
rapport  à  une  stratégie  « contrôle  strict  de  la  fréquence 
cardiaque ». Il s’agit de l’une des premières études de grande 
ampleur mettant en évidence une telle conclusion. Ce travail 
suggère qu’un rythme cardiaque contrôlé jusque 110 bat/min 
peut  être  suffisant  pour  réduire  le  risque  d’insuffisance 
cardiaque par fibrillation auriculaire. D’autre part, près de la 
moitié des décès observés dans cette étude étaient dus à une 
autre cause que l’arythmie ou l’insuffisance cardiaque. Dans 
le groupe « contrôle strict » il est à noter que seulement 67% 
des patients avaient atteint l’objectif de fréquence cardiaque, 
alors  que  dans  l’autre  groupe  au  contraire,  la  très  grande 
majorité  des  patients  avaient  atteint  l’objectif  d’une 
fréquence  cardiaque  inférieure  à  110  bat/min.  Ceci  pouvait 
contribuer  à  l’absence  de  différence  observée  en  termes  de 
bénéfice entre les 2 groupes. 
Les résultats de  cette étude devraient conduire  à établir des 
recommandations  concernant  le  traitement  médicamenteux 
des  patients  porteurs  d’une  fibrillation  auriculaire,  avec 
vraisemblablement  la  possibilité  d’un  contrôle  du  rythme 
cardiaque  moins  strict  que  ce  qui  est  réalisé  en  pratique 
aujourd’hui. 
Y  a  t-il  un  bénéfice  à  ralentir  fortement  la  fréquence  cardiaque  des 
patients en cas de fibrillation auriculaire ? 
Laurent Lechowski, 
Hôpital Sainte Périne, Paris 
Af 622-2010 ©2010 Successful Aging SA 
Van Gelder IC, Groenveld HF, Crijns HJ, Tuininga YS, Tijssen JGP, Alings AM, et al. Lenient versus strict rate control in 
patients with atrial fibrillation. N Engl J Med. 2010;362:1363-73. 
Comparaison des événements à 3 ans de suivi entre les groupes « contrôle modéré » et « contrôle strict » du rythme cardia-
que. 
   Contrôle modéré du 
rythme cardiaque 
(n=311) 
Contrôle strict du ryth-
me cardiaque (n=303) 
Hasard Ratio (intervalle 
de confiance à 90%) 
Objectif primaire  38 (12,9%)  43 (14,9%)  0,84 (0,58-1,21) 
Décès d’origine cardio-
vasculaire 
9 (2,9%)  11 (3,9%)  0,79 (0,38-1,65) 
Insuffisance cardiaque  11 (3,8%)  11 (4,1%)  0,97 (0,48-1,96) 
Accident vasculaire céré-
bral 
4 (1,6%)  11 (3,9%)  0,35 (0,13-0,92) 
Hémorragie  15 (5,3%)  13 (4,5%)  1,12 (0,60-2,08) 
Syncope  3 (1,0%)  3 (1,0%)  - 
Implantation d’un pace-
maker 
2 (0,8%)  4 (1,4%)  -