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pas de récuser les bienfaits, s’il y en a, de la thérapie, psycho- ou autre, mais de ne pas la
confondre avec la psychanalyse, même dite «appliquée», même considérée quant aux
effets de soulagement ou de résolution qu’elle peut apporter à qui s’en sert. La
psychanalyse appliquée l’est d’abord au symptôme, lequel est le cadre, le commencement
et la fin du traitement psychanalytique. Il n’est en psychanalyse de traitement que
symptomatique, le symptôme y incluant la cause, qui n’est pas-toute, le symptôme qui est
le partenaire du sujet.
Car le sujet ne saurait pas ne pas avoir de partenaire, du début à la fin de l’expérience
analytique, terme que Lacan préfère à celui de traitement. Ce qui peut s’y produire
d’imprévu ou même d’inédit est à considérer, plutôt que l’établissement a priori de fins
thérapeutiques — ou de fins didactiques, pas moins impossibles à anticiper, puisque
dépendantes de l’expérience, sans automatisme. Cela ne veut pas dire qu’il n’y a pas
d’effets thérapeutiques mais qu’ils se produisent « de surcroît » comme Freud et Lacan
l’ont avancé. Voilà une thèse, eu égard à la structure de l’expérience, qui n’est pas de
surcroît, elle en est partie intégrante — même si elle désintègre sa totalisation avec le
symptôme. Nous retrouvons ici ce dernier, avec sa place, sa fonction et sa structure, dans
le contexte d’une expérience visant le réel, au-delà des limites du sens, et même au-delà
du sens bien connu du symptôme considéré comme une formation de l’inconscient.
Sur le symptôme
Le malentendu sur le symptôme en psychanalyse, structure passant pour Une et
néanmoins hétéroclite par le réel qu’elle véhicule, est souvent repéré. Il n’en est pas
moins souvent rencontré, encore et encore. La répétition s’y déploie en acte. Le
symptôme vu comme signe de dysfonctionnement, et la recherche des symptômes (au
pluriel) pour aider au bon diagnostic, ou permettre de déchiffrer la possible dimension de
sens, est facilement vu comme au premier plan commun des préoccupations du sujet et de
l’analyste, supposés travailler ensemble dans la même direction, celle de la recherche du
mieux-être. Déchiffrer, apprendre à lire les formations de l’inconscient, et parmi elles le
symptôme, cela se voudrait produire un soulagement automatique.
Freud s’est pourtant lui-même heurté à ce qu’il a étrangement nommé « la réaction
thérapeutique négative », soit l’absence d’effet là où il était attendu au nom de cet
automatisme du traitement par le sens. La raison de ce heurt est que l’expérience
analytique n’est pas une simple affaire de sens, que tout ne peut pas se dissoudre dans le
symbolique. Il y a un reste qui correspond à ce que Lacan nomme abusivement,
mensongèrement, puisqu’il s’agit d’un impossible à dire, le réel. Ce pas-tout symbolique
est d’abord le pas-tout symbolique du symptôme analytique.
Il y a deux pôles dans le symptôme, celui du message qui peut être traduit
symboliquement, et celui du réel, de la jouissance du symptôme que Lacan dans son
dernier enseignement a appelé «sinthome» — un mot de vieux français dont il a fait un
vrai néologisme, soit une invention symbolique visant à démarquer un réel. Pour le sujet
qui y est impliqué, le symptôme est don le sien propre, une invention qui suit sa propre
route. Il a sa propre voie de connexion avec le réel.