Conférence : De l'observation aux processus et aux modèles en sciences de la Terre : l'exemple
des évolutions climatiques récentes, 14/09/2009, IPGS/EOST, Université de Strasbourg, Vincent
Courtillot (1h39')
mms://vod-dun.u-strasbg.fr/vod/2009/0914_eost_courtillot/ipgs_140909_courtillot.wmv
http://130.79.200.36/vod/2009/0914_eost_courtillot/ipgs_140909_courtillot.wmv?MSWMExt=.asf
Commentaires G. Delaygue, LGGE/UJF/CNRS, version 7 avril 2010
00:21:21 "...ensuite on a rajouté les gaz à effet de serre et le gaz carbonique,..., et vous voyez les
courbes roses..."
Affirmations faussses (dans le commentaire et sur le graphe) : d'une part le principal gaz à
effet de serre est la vapeur d'eau, elle est intégrée dans les modèles puisque ne constitue pas un
forçage (donc elle est présente à la fois dans les simulations à l'origine des courbes bleues et roses);
d'autre part ce qui a été ajouté pour aboutir aux courbes roses est l'augmentation d'origine
anthropique des gaz à effet de serre à longue durée de vie (CO2, CH4, N2O, etc); enfin les forçages
anthropiques au pluriel pris en compte dans les simulations comportent aussi les aérosols, ce qui
semble très important pour discuter les modalités du réchauffement sur le XXie siècle (cf.
http://www.ipcc.ch/publications_and_data/ar4/wg1/en/ch9s9-4-1-4.html).
00:22:50 "Alors on a recommencé, et puisque l'on ne nous permettait pas d'avoir accès à la base de
données [de température], on a commencé à la reconstruire. ... Nous avons refait la courbe
européenne et la courbe Amérique du nord."
Affirmations injustifiées : d'une part ces mesures sur lesquelles sont basées les moyennes
de température doivent être corrigées de multiples erreurs et biais dont M. Courtillot et ses
collègues n'ont apparemment aucune idée (il suffit pour s'en convaincre de constater que les courbes
produites ne sont accompagnées d'aucune incertitude, comme toutes les autres d'ailleurs, et comme
celles de leurs articles); d'autre part les courbes labellisées 'européenne' et 'nord-américaine' du
graphe du Giec (http://www.ipcc.ch/publications_and_data/ar4/wg1/en/faq-9-2-figure-1.html) ont
été calculées à partir de centaines de stations couvrant des régions beaucoup plus grandes que celles
représentées par ces deux courbes (par exemple de 30 à 75ºN pour l'Europe, cf.
http://www.ipcc.ch/pdf/assessment-report/ar4/wg1/ar4-wg1-chapter9-supp-material.pdf), donc la
courbe produite par M. Courtillot et ses collègues n'est pas "la courbe européenne" mais une courbe
européenne, idem pour l'Amérique du nord.
00:23:30 "...et on a beaucoup plus de données que le centre mondial de données, qui lui, je vous le
rappelle, dans un carré de 550 Km met tout en moyenne sur un mois."
Erreur grossière : les centres de recherche qui réalisent des moyennes de température
reçoivent des données journalières provenant de plus de 4000 stations météorologiques via
notamment l'organisation météorologique mondiale (Brohan et al., 2006). Par ailleurs, le fait de
moyenner ces données sur une grille de 5ºx5º et par mois n'a pas d'incidence si l'on s'intéresse aux
variations climatiques à l'échelle globale et même continentale.
00:24:32 "...donc en Europe, il n'y a pas de changement climatique de 1930 à 1985, il y a un
changement brusque...donc l'évolution du climat en Europe c'est une marche d'escalier."
Affirmation injustifiée : c'est le traitement mathématique appliqué aux données journalières
par les collègues de M. Courtillot qui retient les changements de tendance de la température et
donne aux courbes cet aspect haché, très différent des courbes en moyenne annuelle publiées par les
centres météorologiques (cf. pour la France les données de MétéoFrance sur le site de l'ONERC :
http://onerc.org/dataweb/indicateurs/indic_21/spec_21/impl_21/pictures/TM_graph2_Evolution_Fr
ance_1900-2007.png). Le changement climatique est défini, lui, par la tendance sur plusieurs
décennies. On ne voit donc pas pourquoi le changement climatique serait "en marche d'escalier sur
quelques années".
00:26:35 "... c'est l'année 1930 qui a été la plus chaude des Etats Unis et ça a été corrigé par la
météo américaine..."
Affirmation erronée : c'est l'année 1998 qui reste la plus chaude dans les enregistrements
des Etats Unis 'contigus', suivie de 2006, puis 1934 et 1921 (cf. par exemple
http://data.giss.nasa.gov/gistemp/graphs/Fig.D.lrg.gif)
00:27:48 "J'accuse le Giec d'avoir fait un mauvais travail, je considère que la courbe extrêmement
soigneuse que nous avons refaite pour l'Amérique du nord et pour l'Europe ne ressemble que de très
loin aux courbes moyennes sous-échantillonnées, et qu'en tout cas l'augmentation légèrement
exponentielle des modèles roses liée au CO2 ne colle ni avec l'une ni avec l'autre de ces courbes."
00:28:11 "Voilà le premier des nombreux exemples que je vous donnerai, où l'on met en défaut les
observations qui ont été données, elles n'ont pas été assez soigneusement calculées, leurs
incertitudes n'ont pas été bien calculées, et les modèles en tout cas ne les prédisent pas bien, donc le
test des modèles -c'est bien de tester des modèles- est négatif."
Affirmations infondées : Encore une fois les courbes présentées ont été calculées par les
collègues de M. Courtillot de façon différente de celles publiées dans le rapport du Giec (moyenne
décennale, comme décrit ici : http://www.ipcc.ch/pdf/assessment-report/ar4/wg1/ar4-wg1-chapter9-
supp-material.pdf , page SM-9.6, moyenne appliquée aux mesures ainsi qu'aux résultats des
modèles). Il n'est donc pas possible d'affirmer que l'absence de ressemblance entre ces courbes
invalide les courbes de température mesurée publiées par le Giec. Par ailleurs, l'enveloppe rose des
simulations de température (dont l'évolution n'est pas exponentielle) correspond assez bien (sauf
pour le réchauffement des océans entre 1930 et 1940) avec les mesures de température, comme le
montre la figure du Giec ( http://www.ipcc.ch/publications_and_data/ar4/wg1/en/faq-9-2-figure-
1.html). Il est donc tout à fait injustifié de dire que l'augmentation des modèles "ne colle pas" avec
les courbes.
00:39:02 "Donc oui, il y a un réchauffement climatique -mais il est irrégulier-, et il a déjà été atteint
voire même dépassé à plusieurs reprises au cours des deux milles dernières années. Voilà une autre
affirmation un peu trop rapide, qui est encore dans le rapport du Giec de 2007, qui s'avère inexacte."
Affirmation infondée : les variations climatiques sont régionales et peuvent être très
différentes, comme cela a été montré entre l'Europe et l'Amérique du nord sur le dernier siècle
(comparer les courbes vers 00:24:00 et 00:26:00, et cf. aussi le rapport du Giec :
http://www.ipcc.ch/publications_and_data/ar4/wg1/en/faq-9-2-figure-1.html). L'étude citée de
Grudd estime des variations pour le nord de la Suède, il n'y a donc aucune raison que ces variations
soient comparables avec la moyenne de l'hémisphère nord publiée dans le rapport du Giec.
00:48:52 "Oui il y a eu une accélération de la montée du niveau des mers : en 1900 ! Personne ne
sait pouquoi, je n'ai pas d'interprétation, le niveau des mers était relativement plat et puis il s'est mis
à augmenter régulièrement. ... Y'a pas un poil de courbure ! Donc si le gaz carbonique accélère
l'augmentation du niveau des mers, ça ne se voit pas. Alors ça va peut-être venir plus tard, mais dire
que ça a commencé est faux !"
Affirmation infondée : le graphe montré par M. Courtillot provient du site Internet
Wikipedia.org, accompagné de la référence à un étude de Douglas (1997), publication qui ne
contient pas de graphe. La fiabilité d'une telle courbe reste donc à vérifier. L'une des courbes sur le
niveau de la mer publiées par le Giec commence en 1870
(http://www.ipcc.ch/publications_and_data/ar4/wg1/en/figure-5-13.html), elle provient d'une étude
bien identifiée (Church & White, 2006, mise à jour), étude qui montre l'exitence une accélération de
la montée du niveau marin au cours du XXie siècle.
00:52:55 "A l'époque il se trouve que nous n'avions cette courbe rose [irradiance solaire] dans les
papiers que nous avions consultés, n'étant pas spécialistes, que depuis 1950, c'est pour cela que vous
ne voyez cette courbe rose que depuis 1950."
Affirmation incomplète : comme expliqué dans le commentaire à cet article publié par M.
Courtillot et ses collègues (http://dx.doi.org/10.1016/j.epsl.2007.09.046), ceux-ci ont utilisé pour
cette courbe rose des estimations de flux UV horaire disponibles seulement depuis 1950, mais en
faisant passer ces valeurs pour le flux énergétique total du soleil (irradiance totale) et en les
référençant à une étude portant sur plus de 150 ans. Donc cette courbe rose publiée n'est pas
l'irradiance solaire totale, contrairement à ce qui est affirmé, et refaire ce graphe avec une courbe
d'irradiance totale sur 150 ans affecte beaucoup les corrélations proposées par M. Courtillot (cf.
commentaire cité).
00:59:46 "...or il se trouve que 1998, si ces données sont justes, est la plus chaude du siècle, des 150
années dernières, et quand vous enlevez les 10 dernières années, vous avez vraiment l'impression
que pendant 30 ans ça décolle. Manque de chance, depuis 10 ans, et ça là encore quelque chose que
je ne vois pas beaucoup dans les journaux, ça fait 10 ans que la température décroit, et vous voyez :
le maximum décroit, le minimum décroit, la moyenne décroit..."
Affirmation fausse : selon les estimations des deux centres du CRU
(http://www.cru.uea.ac.uk/cru/data/temperature/nhshgl.gif) et du GISS
(http://data.giss.nasa.gov/gistemp/graphs/Fig.A2.lrg.gif), la température moyenne annuelle a
continué à augmenter à partir de 2000 jusqu'en 2006, année qui fût légèrement plus chaude que
1998.
01:00:05 "Il y a 10 ans que nous sommes passés dans un nouveau mode, je ne sais pas combien de
temps il durera, mais personne n'en parle, il n'est absolument pas prévu par les modèles numériques,
qui tous accrochés en 98 démarrent exponentiellement. Donc déjà le [sic] modèle du Giec, 2 ans
après sa publication, il est faux d'au moins 0,4ºC c'est-à-dire la quasi totalité de l'augmentation de
température depuis 60 ans.
Affirmation fausse : les courbes en rose montrées précédemment, à l'évolution soit-disant
'exponentielle', représentent les moyennes d'une vingtaine de simulations, dont les évolutions
individuelles sur quelques années peuvent être très différentes. Ce comportement individuel est
illustré sur cette figure du rapport du Giec :
http://www.ipcc.ch/publications_and_data/ar4/wg1/en/figure-10-5.html .
01:07:22 "Et une fois que c'est corrigé, si vous refaites la tendance, vous avez une jolie parabole,
qui monte au début, qui descend à la fin, depuis 10 ans, comme par hasard, que le soleil descend la
température descend, et l'amplitude c'est UN watt par m2. Ils se sont trompés d'un facteur 10. Aucun
modèle numérique actuel n'a cette valeur, ils ont tous la valeur de 0,1. Il suffit d'aller changer une
carte dans le programme et de mettre 1, et déjà, ben comme ils disent que le gaz carbonique c'est 2,
au lieu d'être 1/20 ça deviendra la moitié, ça devient sérieux."
Affirmation fausse et malhonnête : la variation du flux solaire (irradiance totale), qu'elle
soit de 0.1 ou 1 W/m2, doit être divisée par environ 6 (divisée par un facteur géométrique de 4 et
multipliée par l'albédo global de 0.3) pour être comparée avec le forçage des gaz à effet de serre. M.
Courtillot a déjà fait cette erreur dans son papier de 2007 paru dans EPSL, et l'a reconnue dans sa
réponse à notre commentaire (http://dx.doi.org/10.1016/j.epsl.2007.09.046). Il est donc tout à fait
malhonnête de sa part de continuer à propager cette idée fausse que le forçage solaire direct serait
de l'ordre du W/m2.
01:09:20 "Toute la partie droite, c'est la modélisation numérique en chaleur de l'effet de serre."
Affirmation erronée : V. Courtillot semble ne pas connaître les mesures du bilan radiatif par
satellites (programme ERBE depuis 1984)
01:09:27 "Vous voyez les chiffres dont je viens de vous parler. Bon le soleil, il bouge de 1 W/m2, Le
gaz carbonique, si ils se trompent pas, en doublant il bouge de 2 W/m2."
Affirmation doublement fausse et malhonnête : le forçage dû à la variabilité solaire est de
1 W/m2 divisé par un facteur géométrique de 4 et réduit de l'albédo global (multiplié par 0.7), soit
~0.18 W/m2 , comme expliqué par V. Courtillot quelques minutes auparavant en décrivant le bilan
énergétique global de l'atmosphère. Un doublement de la teneur en CO2 est responsable d'un forçage
de l'ordre de 4 W/m2 et non 2 (cf. http://www.ipcc.ch/publications_and_data/ar4/wg1/en/ch2s2-
3.html).
01:16:59 "Maintenant on divise le gaz carbonique par 6 et on multiplie le soleil par 10, et donc ces
deux valeurs avec lesquelles j'ai commencées qui étaient en gros de 1 et 1/20, sont devenues en gros
de 2/3 et 1/3."
Affirmations erronées : si on suit les explications de M. Courtillot, les forçages respectifs
du CO2 et du soleil seraient de 1/6 et 1/2 de W/m2, et pas 2/3-1/3, mais c'est "oublier" de diviser
l'impact du soleil par ce facteur 6 (prise en compte de la géométrie de la Terre et de son albédo), ce
qui donne 1/6 et 1/12 de W/m2. De plus M. Courtillot s'est mal renseigné puisque le forçage du CO2
est de 1,5 W/m2 sur le dernier siècle et pas de 1, et même de 3 W/m2 en ajoutant les autres gaz a
effet de serre (CH4, N2O, etc; cf. http://www.ipcc.ch/publications_and_data/ar4/wg1/en/figure-2-
20.html). Enfin, M. Courtillot a reconnu dans son séminaire à l'IPGP en janvier 2010 que l'étude
qu'il présente ici suggérant un forçage solaire de 1 W/m2 a été réfutée. On en revient donc à la
conclusion du Giec : forçage des gaz à effet de serre de 3 W/m2 et du soleil de 0,1 W/m2 (cf. lien ci-
dessus). Même en divisant le forçage des gaz à effet de serre par 6, ce qui reste à montrer, on
resterait avec 0,5 W/m2 pour ces gaz contre 0,1 W/m2 pour le soleil.
01:22:40 "Et bien vous serez surpris de savoir que dans la plupart des modèles, y'a pas l'eau, parce
que c'est trop difficile, on ne sait pas encore modéliser les nuages, et si vous lisez le rapport du Giec
ils le disent ! Alors comment dans le résumé conclusif, peuvent-ils dire qu'ils sont si sûrs d'eux ?"
Affirmations fausses : tous les modèles de circulation générale prennent en compte la
vapeur d'eau, qui est l'une des composantes les plus importantes de la physique du climat. De plus,
le résumé "conclusif" du rapport du Giec est on ne peut plus précis sur les incertitudes qui
accompagnent les conclusions (avec des termes qui font références à des seuils statistiques :
http://www.ipcc.ch/publications_and_data/ar4/wg1/fr/spmsspm-2.html#fnr6), notamment en
soulignant que "La principale source d’incertitudes [sur la sensibilité climatique] provient de la
rétroaction liée aux nuages." (http://www.ipcc.ch/publications_and_data/ar4/wg1/fr/spmsspm-
5.html).
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