R.
Arellano,
Y.
Gasse, G. Verna
Définition de la notion de secteur informel
La notion d'informalité est une notion relative variant selon l'environnement culturel et
légal et, par conséquent, il serait imprudent de vouloir la préciser sans évoquer un cadre cul-
turel particulier
[25].
Tenant compte de cet avertissement, on peut quand même risquer une
définition de ces entreprises que l'on trouve en marge des économies formalisées du Tiers-
Monde et de l'Occident.
La dualité secteur formel/secteur informel ou encore économie enregistrée/souterraine,
officielle/non officielle, structurée/non structurée, pour nommer quelques variantes, s'ex-
prime d'abord à travers une distinction de nature juridique concernant le pouvoir régula-
teur de
l'État
sur le marché du travail, les impôts et la vie urbaine
:
formelles sont les
activités obéissant aux règles établies, normales, usuelles et fondées sur une division du
travail où domine le salariat ; informelles, celles qui ne présentent pas cette régulation, qui
sont anormales, inusuelles ou qui n'utilisent pas le salariat [15].
Ensuite, on peut faire une distinction en ce qui concerne la nature de la production et
ainsi caractériser les secteurs en fonction de la logique du calcul économique. L'économie
est dite informelle lorsqu'elle n'est pas monétarisée, lorsque le profit n'est pas la base des
décisions des producteurs, comparativement au secteur moderne qui
l'est
parce qu'on y
pratique à la fois les lois de rentabilité et de productivité [7].
Dans son acception la plus vaste, l'économie non officielle, occulte, cachée, parallèle,
souterraine, recouvre tant les activités illégales (contrebande et trafic de drogues, crime
organisé, prostitution, jeux) que les activités légales qui, pour une raison ou une autre, ne
sont pas déclarées. Parmi ces dernières, Gasse, se référant aux pays développés, signale
les activités payées "sous la table", celles qui fonctionnent sans permis ou licence, qui sont
basées sur le troc ou l'échange, le gonflement des comptes de dépenses, l'utilisation
d'équipements de l'entreprise à des fins personnelles, l'emploi d'étrangers sans permis ou
sans couverture sociale, la vente de produits fabriqués maison ou la vente de services
payés comptant.
C'est
à ce deuxième type d'activités que nous nous intéressons.
Les raisons d'apparition du secteur informel
À certains égards, l'économie dite informelle se développe au Nord et au Sud pour des rai-
sons inverses : dans les pays industrialisés, les prix des services sont très élevés compara-
tivement à ceux des équipements ménagers ; la stagnation démographique et urbaine, les
progrès de productivité, le poids croissant des impôts, la saturation
d'une
industrie avancée,
l'apparition d'un temps libre toujours plus grand joints à la tertiarisation de l'économie sus-
citent le développement d'activités domestiques ou associatives.
Dans les pays moins développés, il y a au contraire explosions démographiques et
urbaines, des progrès très limités de productivité, et une grande part de la population ne
bénéficie pas d'un système de garanties sociales. De ce fait, de nombreuses activités qui
seraient domestiques ou publiques dans les pays industrialisés sont au contraire marchan-
des dans les villes du Tiers-Monde. Faute de biens d'équipements ménagers, les individus
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