
CancéroDigest 0.6 - mai 2005 - Supplément àla Lettre du CREGG 3
–Traitement néoadjuvant du cancer
du rectum:résultats de l’essaiFFCD 9203
Si la radiothérapie (RT)adjuvante possède une place
incontestable dans le traitement néoadjuvant des can-
cers du rectum,y compris en cas d’intervention de type
TME, laplace de la radiochimiothérapie (RCT) néo-
adjuvante dans cette indication est restée,jusqu’àpré-
sent,incertaine. Deux grands essais de phaseIII qui
seront complètement présentés àl’ASCO 2005
(Orlando,mai 2005) coordonnés:l’un par la FFCD,
l’autre par l’EORTC, vont cependant permettre de sta-
tuer sur cette importante question. Nous rapportons ici
les résultats du premier essai,déjàdévoilés en grande
partie aux JFPD 2005.
Patients et méthodes:Les patients de moins de
80ans présentant unadénocarcinome rectal prouvé,
accessible au TR, classéT3 ou T4 et résécable,étaient
randomisés,après stratification,entreRT et RCT
néoadjuvantes.L’objectif principalétait de démontrer
un gain de survie à5ans de 10% (52%aveclaRT ver-
sus 62 %avecla RCT). La RT délivrait 45 Gy en 25
fractions et 5 semaines; la RCT ajoutait au même
schémade RT,une chimiothérapie (CT) par FUFOL
(acide folinique:20 mg/m2et 5FU 350mg/m2IV bolus
de J1à J5) aux première et cinquième semaines de RT.
La chirurgie était réalisée 3 à4 semaines plus tard.Tous
les patients étaient censés recevoir 4cycles de FUFOL
adjuvant en postopératoire.
Résultats :Entre 1993 et 2003,762 patients ont été
inclus dont 723 patients évaluables.Un suivi médian de
69 mois aété observé. Plus de 50% des patients pré-
sentaient des tumeurs du 1/3 inférieur,avec une pro-
portion de uN+ de 65%chez les patients ayant bénéfi-
cié d’une échoendoscopie préalable (50% de l’effectif).
La toxicité du traitement RCT a été plus importante
avec15 % de grades 3-4 versus 3% (p <0.05) mais sans
augmentation de lamortalité postopératoire précoce
(< 60 jours):1%versus 2% (NS). Le taux de réponse
complète histologique était significativement augmenté
dans le bras RCT :12%versus 4% (p <0.05). En
revanche,il n’existait pas de gain de conservation
sphinctérienne dans le bras RCT :53%vs 52% (NS).
Les résultats de survie ont étécommuniqués sans test
statistique,selon les recommandations d’uncomité
indépendant de monitorage (end-point,mai 2005),
mais il ne semble pas exister de différence en survie glo-
bale et survie sans rechuteà5ans entre les bras RCT et
RT :respectivement 68% vs 67 %,et 59 % vs 56%.
Cependant,on observeà5ans un taux de rechute locale
inférieur de moitié dans le bras RCT :8% versus
16.5 %.
QUOI DE NEUF EN
COLORECTAL ?
P.ARTRU,G.LLEDO
(Lyon)
Loin des fastes de l’an
passé,où les résultats
d’études internationales
ayant changé notre pra-
tique quotidienne avaient
été présentés,la sélec-
tion de ces JFPD 2005
afait bien triste figure!
Voicicependant notre
sélection :
–Cancer colorectalavecmétastases hépatiques
synchrones:faut-il réséquer le primitif ?
L’une des communications les plus originales de ces
Journées fut celle de l’équipe de l’IGR sur l’intérêt de la
résection de la tumeur primitive dans le traitement du
CCR métastatique. Apartir des données de l’essai
FFCD 9601,les 216 patients (73 % de l’effectif total)
avecmétastases synchrones ont été étudiés.Parmi ceux-
ci,60 avaient bénéficié avant l’inclusion de la résection
de la tumeur primitive,alors qu’elle restait en placechez
156 (73 %) d’entre eux.Les deux groupes de patients
étaient comparables entre eux saufce quiconcernait le
site tumoral (plus de rectum dans le groupe avec
tumeur en place:35%versus 14 %;p = 0.0006) et le
taux d’ACE(tendance en faveur d’un excès de patients
avecACE>30 dans le groupe tumeur en place;p=
0.06). Defaçon étonnante,il existait,en analyse univa-
riée,de meilleurs taux de survie globale et sans progres-
sion à 2 ans dans le groupe aveclésion primitive opérée
que dans le groupe avec tumeur en place:respective-
ment 24%versus 10% (p <0.0001) et 4%versus 0%
(p = 0.001). Enanalyse multivariée,lanon résection de
la tumeur primitive était bien retrouvée comme unfac-
teur de mauvais pronostic, àlafois en terme de survie
globale (RR de décès 2.3;p>0.0001) que de survie
sans progression (RR = 1.9 ;p = 0.0002). Les autres
variables retrouvées comme facteurs indépendants de
mauvais pronosticétaient,de façon classique,unOMS
2 et un nombre de sites métastatiques supérieur à1.
Cette étude rétrospectivenon randomisée semble
bien critiquable sur le plan méthodologique. Les
paramètres du bilan de baseline pris en compte sem-
blent trop restreints et on ne peut,en aucuncas,
exclure que le groupe opéré de la tumeur primitive
regroupait,en fait,des malades de meilleur pronos-
tic.Ilaurait été intéressant,par exemple,de vérifier
que les populations étaient égales en termes de
phosphatases alcalines ou d’autres critères biolo-
giques de mauvais pronostic, ainsiqued’avoir une
notion scanographique volumétrique de lamasse
tumorale hépatique déterminante pour le pronostic.
D’autrepart,sur le plan théorique,ces résultats sem-
Rapport de congrès
Journées Francophones de PathologieDigestive 2005
blent paradoxaux àl’heure où de très nombreuses
études font état d’une progression accélérée des
lésions métastatiques lors des actes chirurgicaux via
la sécrétion accrue de facteurs de croissance et d’an-
giogenèse. La question soulevée reste doncnon réso-
lue en l’absence d’étude randomisée (LouafiA6).