leur être, entraînant une certaine torpeur, une lassitude, voire le dégoût de la vie. Cependant, le
romantique aime son mal, il s'y complait, et le cultive par la réflexion.
Ce mouvement a d'abord trouvé sa place dans les récits autobiographiques, et le roman
personnel. En 1848, Chateaubriand publie ses Mémoires d'outre-tombe. Le roman
autobiographique à la première personne marque ce début de siècle avec un goût prononcé pour la
confession intime, un lyrisme et un narcissisme profonds, pour explorer le mal de vivre ce cette
génération de romantiques : Chateaubriand : René 1802, Madame de Staël ; Corinne 1807,
Benjamin Constant : Adolphe 1816, Musset : La Confession d'un enfant du siècle 1836.
Dans le roman historique, les écrivains cultivent nostalgie et pittoresque, mêlant un souci
de documentation et des faits imaginés à des personnages ou actions historiques. Balzac : Les
Chouans 1829, Vigny : Cinq-Mars 1828, Hugo : Notre-Dame de Paris 1831, Dumas père : Les
Trois Mousquetaires 1844, Féval : Le Bossu 1858.
Mais le romantisme trouve rapidement dans la poésie lyrique la forme par excellence des
thèmes romantiques que sont la fuite du temps, l'amour de la partie, l'inquiétude passionnelle ou
religieuse (Lamartine Méditations poétiques, Vigny Les Destinées, Hugo Les feuilles d'automne,
Musset Les Nuits) : la poésie devient l'expression de ce qu'il y a de plus intime dans l'âme et du
même coup, dans l'univers qui n'est que l'expression de l'âme créative et divine que le poète sent en
lui comme une force.
Enfin, ce mouvement fait du drame romantique le cheval de bataille de son opposition à la
tradition classique. Prenant Shakespeare comme modèle, les écrivains trouvent dans le drame le
moyen d'exalter leurs passions. Ce genre va s'imposer face aux tragédies classiques dans la célèbre
« bataille d'Hernani » (première représentation le 25 février 1830) qui marque le début de
l'opposition entre classiques et romantiques. Le romantisme rejette les règles de la tragédie
classique et revendique une nouvelle esthétique de la sensibilité, de la liberté et de la vérité : tout
devient sujet pour la poésie qui peut désormais s'exprimer en prose ou en vers. Dans la préface de
Cromwell, Hugo codifie en quelque sorte le théâtre, et s'oppose à la tragédie classique du XVII° en
proposant l'abandon de la règle des trois unités, le choix de l'écriture en prose ou en vers, l'abandon
des bienséances (désormais on peut choquer), le mélange des registres comiques ou tragiques : c'est
la naissance du drame romantique. Au nom de la vérité, on refuse les restrictions de vocabulaire, on
assouplit la métrique et la syntaxe, on rejette la distinction traditionnelle des genres (comiques et
tragiques), on recherche la couleur locale avec des sujets empruntés à l'histoire des XVI° et XVII° :
Hugo : Ruy Blas, Hernani, Cromwell ; Musset : On ne badine pas avec l'amour, Lorenzaccio,
Vigny : Chatterton.
Des liens étroits unissent les écrivains et les poètes aux artistes inspirés du même idéal.
3° La peinture romantique
En 1846, Charles Baudelaire, écrivain mais aussi critique d'art, écrivait : « Le romantisme
n'est précisément ni dans le choix des sujets ni dans la vérité exacte, mais dans la manière de sentir.
Pour moi, le romantisme est l'expression la plus récente, la plus actuelle du beau. Qui dit
romantisme, dit art moderne, c'est-à-dire intimité, spiritualité, couleur, aspiration vers l'infini,
exprimés par tous les moyens que contiennent les arts », et donc aussi par la peinture.
En France, la peinture romantique prend son essor face à Ingres et aux autres néoclassiques.
Le romantisme se marque par un goût prononcé pour la nature et pour tout ce qui crée et attire
la mélancolie. Il se caractérise par le contraste entre les lignes fines et épaisses, un grand jeu de
clair-obscur, beaucoup de désordre dans la composition, une sorte de tourbillon sensuel de couleurs
et de lumière autour d'un personnage qu'on ne saurait identifier sans le titre. La peinture romantique
c'est avant tout l'art de sentir, et se sentir personnellement : le peintre Delacroix dira que c'est « la
libre manifestation de ses impressions personnelles ».
Dans ce domaine artistique, l'Angleterre et l'Allemagne ne sont plus les pays les plus
puissants, et ils doivent céder la place à la France :
- Théodore Géricault (1791-1824) présente en 1819 Le Radeau de la Méduse, un véritable