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Audio infos n° 179 l Janvier 2013
Recherche RobOtol
ne le ressent pas. « Ne pas ressentir un retour lors du
contact avec le robot avec une structure opérée n’est
pas obligatoirement un handicap car les efforts mis en
jeu sont tellement faibles que l’opération repose davan-
tage sur la vision que sur la sensation du toucher »,
explique le chercheur. Mais une telle option est en cours
d’étude. Pour ne pas retarder l’entrée de RobOtol au
bloc opératoire, elle sera ajoutée dans un second temps
au modèle actuel.
De grandes évolutions possibles à terme
RobOtol n’est pas encore couplé à un système de
navigation assistée. Actuellement, le contrôle vi-
suel du chirurgien est direct, mais « l’idée est que
le robot puisse porter des optiques ; dans certains
services, le microscope est déjà remplacé par des
optiques angulés pour mieux observer l’oreille
moyenne et ses recoins, explique Yann Nguyen.
Pour l’heure, ces outils restent difficiles à utiliser,
et le robot, avec sa précision, garantirait un avan-
tage certain. » Pour améliorer ce nouvel outil et
augmenter sa précision, l’équipe fourmille d’idées :
elle envisage notamment de modifier le facteur
d’échelle existant entre la commande et le robot.
« La chirurgie de l’oreille moyenne nécessite des
gestes millimétriques, mais il est évidemment plus
simple de travailler à l’échelle du centimètre, pré-
cise le Dr Nguyen. Grâce à une interface homme-
machine, on peut choisir le gain des déplacements
entre la commande et le robot : un mouvement de
commande d’un centimètre pourrait être converti
en un mouvement d’un millimètre dans le robot. »
L’imagerie du patient pourra également être uti-
lisée pour concevoir une représentation virtuelle
complète de la structure à opérer et des séances
très courtes pourront être automatisées. « RobO-
tol va devenir un outil indispensable à l’otologiste,
particulièrement utile dans les moments critiques
de l’intervention. Son utilisation permettra de li-
miter les risques chirugicaux », s’enthousiasme le
chirurgien.
Florence Bozec
un assemblage innovant. Le système est conçu pour être
utilisé avec deux bras – comme les deux mains du chirur-
gien – qui porteront différents instruments : des outils
simples, passifs (mécaniques, sans degré de liberté),
des outils actifs (comme des pinces), voire une nouvelle
génération d’outils intelligents à développer qui seraient
dotés de capteurs électroniques et de systèmes de navi-
gation. « Pour le moment, nous nous concentrons sur un
set complet d’outils passifs utilisés au bloc, développe
Yann Nguyen. Nous aimerions que les spécialistes ap-
prennent à utiliser le robot avec ces premiers outils pour
les améliorer par la suite, en fonction de leur utilisation
et de leurs besoins. » L’équipe est en train de dévelop-
per un système de pinces qui
sera utilisé prochainement. Par
la suite, les chercheurs envisa-
geront de nouveaux outils et
de nouveaux mouvements qui
pourront être couplés au robot
afin de faciliter le travail des
chirurgiens, en leur donnant
par exemple des informations
supplémentaires.
Une communication entre les
deux bras doit également être
mise au point afin d’éviter
les collisions. L’une des prin-
cipales limites actuelles est
que RobOtol n’est pas doté
de retour d’effort tactile. En
d’autres termes, lorsque le
robot touche quelque chose,
le chirurgien qui le manipule
>> MMS 2.0, un robot allemand dédié
à l’oreille, déjà testé sur des patients
Si RobOtol est une grande avancée dans le domaine de la chirurgie
de l’oreille moyenne, il est le deuxième robot du genre en Europe. Une
équipe allemande a mis au point MMS 2.0*, une technologie dédiée aux opé-
rations de l’oreille, déjà testée et validée avec succès sur des patients. Récem-
ment, vingt patients ont subi une tympanoplastie de type III avec une pose de
prothèse de remplacement ossiculaire. Si les chirurgiens l’ayant expérimenté
attendent encore des améliorations techniques du robot, cet essai clinique
fait ressortir les potentiels d’un tel outil. « Je suis satisfaite de voir que l’idée
de développer un outil semblable existe dans d’autres pays. Cela montre que
l’objectif n’est pas complètement “loufoque”, et qu’il répond à un réel besoin »,
commente Evelyne Ferrary. S’ils se destinent aux mêmes objectifs de chirurgie
de l’oreille moyenne, RobOtol et MMS 2.0 ne disposent pas des mêmes carac-
téristiques techniques. Le robot allemand, par exemple, est dénué de mou-
vements de rotation, ce qui lui offre moins de degrés de liberté que RobOtol.
*Strauss G et al. Clinical use of a micromanipulator system: Preliminary clini-
cal experience in middle ear surgery. HNO. 2012.
Le robot peut
fonctionner
actuellement avec
deux systèmes de
commande, une souris
tridimensionnelle
(à gauche) ou une
interface haptique
munie d’un stylet
(à droite).
En manipulant le
robot, les doigts de
l’opérateur ne sont plus
dans son champ de
vision, et le chirurgien
bénéficie d’un meilleur
accès aux structures
à opérer. L’opération
est plus confortable et
le positionnement des
prothèses amélioré.
F.B.
F.B.