Creux de tension : comment se protéger contre l`inévitable

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Creux de tension :
comment se protéger contre l’inévitable ?
Synergrid, la fédération des gestionnaires de réseaux électricité et gaz en Belgique
1. Introduction
L’électricité est omniprésente dans notre vie, tant au niveau
privé qu’au niveau professionnel. Rien de tel pour s’en rendre compte que de vivre une coupure d’alimentation!
Dans l’industrie, vu la modernisation des processus – avec la
prolifération des automates et de l’électronique de manière
générale – les perturbations électriques ont des conséquences de plus en plus nombreuses. Non seulement la présence
d’alimentation électrique est essentielle, mais la qualité de
l’énergie devient un élément critique.
Un creux de tension, même relativement faible, peut engendrer des problèmes très importants. Pour les industriels et
les chefs d’entreprise, cela se traduit par des arrêts de production, la mise au rebut de produits ou de matières premières, voire la prestation éventuelle d’heures supplémentaires
nécessaires au redémarrage des processus. Pour estimer
précisément les coûts d’une perturbation électrique, il faut
aussi prendre en compte d’autres aspects : l’insatisfaction
des clients (à cause des retards de livraison, par exemple),
les risques pour la sécurité du personnel et des outils de
production, la perte de données, etc. Mais globalement, des
solutions existent pour limiter les dégâts dus aux creux de
tension; toutefois, leur acceptabilité au plan technico-financier ne pourra être établie qu’après une estimation aussi
correcte que possible des coûts induits.
Creux de tension : comment se protéger contre l’inévitable ? | 2
Les gestionnaires de réseaux électriques (transport et distribution) sont bien conscients de l’impact croissant des perturbations de l’alimentation électrique chez les utilisateurs.
Dans leurs missions quotidiennes, ils s’attachent à garantir
une qualité maximale à la fourniture électrique via leurs réseaux. Mais ils ne sont pas maîtres de tout… Le phénomène
des creux de tension relève en fait de la responsabilité de
toutes les parties intéressées : les gestionnaires de réseaux,
mais aussi les fabricants d’équipements, les bureaux d’études, les utilisateurs du réseau, etc.
En publiant cette brochure, Synergrid – la fédération des
gestionnaires de réseaux – entend aider les utilisateurs à
mieux appréhender la problématique des creux de tension.
Après avoir défini le phénomène, nous en aborderons les
causes avant d’étudier les conséquences possibles des
creux de tension sur des équipements industriels types. Enfin, nous proposerons quelques pistes de solutions permettant de réduire la sensibilité des processus.
2. Le phénomène du « creux de tension »
Définition
à 90 % de sa valeur de référence et se termine dès que la
Avant toute chose, il est bon de définir ce que l’on entend
par creux de tension. Il s’agit en fait d’une chute brutale
de l’amplitude de la tension. La norme EN 501601 fixe la
diminution de la tension à une valeur résiduelle située entre
5 % et 90 % de la tension de référence2. La durée d’un creux
peut varier de 10 ms à plusieurs secondes.
les phases.
tension est revenue au-dessus de cette valeur pour toutes
De cette définition, on déduit aisément les trois paramètres
principaux caractérisant les creux de tension : leur durée,
leur profondeur et le nombre de phases touchées4. Les creux
de tension sont généralement représentés dans des graphiques durée / tension résiduelle5 (voir Figure 3 - Somme des
La figure ci-après montre un exemple d’évolution de la forme
d’onde de la tension U(t) lors d’un creux de tension, ainsi que
l’évolution de sa valeur efficace Urms3.
U(t)
t
Urms
creux enregistrés sur 39 sites durant l’année 2007, répartis
par type).
Creux de tension ou coupure :
quelle différence ?
On distingue généralement les creux de tension, les coupures
Uref
Uref - 10%
de courte durée et les coupures de longue durée. Généralement, tous ces phénomènes sont provoqués par les mêmes
∆U
∆t
incidents : les courts-circuits. La localisation sur le réseau
t
Figure 1 | Exemple de creux de tension
La profondeur du creux correspond à la chute maximale de
la valeur efficace de la tension (exprimée en %). La durée du
creux de tension est mesurée par le temps entre le passage
de la valeur efficace sous la limite de 90 % (Uref –10 %) et le
retour au-dessus de cette même limite.
électrique par rapport à l’endroit du court-circuit détermine
les conséquences sur l’alimentation électrique au point de
raccordement. Lors d’un court-circuit, la partie du réseau
incriminée est isolée par le fonctionnement de protections.
Un point de raccordement sera uniquement affecté par une
coupure s’il fait partie du tronçon isolé6. Typiquement, cela
intervient lorsque le court-circuit se produit sur le câble ou la
ligne d’alimentation du point de raccordement concerné ou
sur une installation du voisinage.
Par convention, en cas de creux polyphasé, le creux commence dès que la tension sur une des phases est inférieure
1 | EN 50160: Caractéristiques de la tension fournie par les réseaux publics de distribution
2 | Tension de référence: on parlera de tension nominale en basse tension et de tension déclarée pour les niveaux de tension supérieurs.
3 | Valeur efficace: la valeur efficace (aussi dite RMS ou Root Mean Square) d’un courant ou d’une tension, variable au cours du temps, correspond à
la valeur du courant continu ou de la tension continue produisant un échauffement identique dans une résistance.
4 | Il existe d’autres caractéristiques (citons par exemple le saut de phase).
5 | Une tension résiduelle de 70 % correspond à une profondeur de 30 %.
6 | Le maillage dans les réseaux de tension de 30 kV à 380 kV permet d’éviter une grande partie des interruptions de l’alimentation de la clientèle.
Creux de tension : comment se protéger contre l’inévitable ? | 3
Deux cas de figure sont possibles :
 La tension ne peut pas être rétablie immédiatement :
dans ce cas, les équipes du gestionnaire de réseau
doivent se rendre sur place afin de réalimenter au
plus vite les clients concernés, après isolation automatique du tronçon défectueux (la réalimentation peut
nécessiter un temps assez long – plusieurs dizaines
de minutes, voire plusieurs heures). On parle dans ce
cas d’une coupure de longue durée. Le court-circuit
se produit généralement, sur un réseau câblé (souterrain) ou aérien, lorsque le défaut est toujours présent
lors des éventuelles tentatives de réenclenchement
automatique7.
 La tension est rétablie rapidement via un automatisme. C’est le cas lors du réenclenchement automatique7 des protections, ce qui permet de réalimenter
les clients après un défaut transitoire; dans ce cas,
la durée de la coupure est limitée et liée à la combinaison du temps nécessaire à la disparition du courtcircuit et des délais de réenclenchement successifs
(typiquement 500 ms, 3 s, 30 s pour les réseaux de
6 kV à 15 kV8).
Dès lors, quand est-on confronté à un creux de tension ?
En fonction d’un certain nombre de paramètres, un courtcircuit entraîne, dans un rayon d’action électrique donné – en dehors du tronçon isolé –, un creux de tension
d’amplitude variable (voir ci-après). Par conséquent, il est
logique également que le réenclenchement automatique
puisse entraîner des creux successifs rapprochés (avec
des intervalles types de 300 ms, 3 s et 30 s).
La protection contre les coupures, qui entraînent la disparition complète de la tension et ont une durée généralement longue, exige des moyens plus importants que la
protection contre les conséquences des creux de tension.
Fort heureusement, les coupures sont beaucoup moins
fréquentes. Seule la problématique des creux de tension
sera abordée dans la suite de cette brochure.
Caractéristiques des creux de
tension
Comme expliqué ci-avant, les creux de tensions présentent
des durées et des profondeurs très variables et peuvent
concerner une ou plusieurs phases. À des fins d’illustration,
39 points de mesures représentatifs ont été sélectionnés sur
les réseaux de 6 kV à 15 kV ; les creux de tension enregistrés au cours de l’année 2007 ont été analysés.
On distingue trois catégories de creux en fonction du nombre
de phases concernées (voir aussi Figure 2) :
Type I : Chute principalement d’une des tensions
phase-neutre
Type II : Chute principalement d’une tension
phase-phase
Type III : Les tensions sur les trois phases sont
touchées de manière équivalente
Les types I et II sont typiquement causés par des courtscircuits mono- ou biphasés. Le type III est la conséquence de
courts-circuits triphasés.
7 | Afin de limiter la durée de l’interruption, l’automatisme de la protection tente de refermer le circuit d’alimentation. Cette technique est uniquement
utilisée dans des réseaux aériens; des causes fugitives y sont à l’origine d’une bonne partie des courts-circuits.
8 | Sur les lignes 70 kV à 380 kV, il n’y a qu’une seule tentative de réenclenchement automatique.
Creux de tension : comment se protéger contre l’inévitable ? | 4
Type 1
Type II
Type III
Figure 2 | Les trois principaux types de creux de tension
La durée de la plupart des creux de tension est directement liée au temps de réaction de la protection qui isole
le court-circuit : dans les réseaux de 30 kV à 380 kV, elle
est généralement de 100 à 600 ms mais dans certains
cas, elle peut dépasser 1 s; dans les réseaux de 6 kV à
15 kV, l’ordre de grandeur type est de 300 ms à 1 s. La
grande majorité des creux de tension mesurés a donc
une durée inférieure à une seconde. Il faut noter que les
temps de réaction des protections sont fixés sur base de
règles de sélectivité.
Durée du creux (s)
Creux de type III
Tension résiduelle (% Unom)
Creux de type II
Tension résiduelle (% Unom)
Tension résiduelle (% Unom)
Creux de type 1
Les graphiques de la Figure 3 montrent, pour l’ensemble
des sites sélectionnés et pour chaque type de creux, la
durée (en abscisse) et la profondeur (en ordonnée) des
creux de tension enregistrés. À titre d’exemple, les courbes de sensibilité types des contacteurs sont aussi mentionnées (courbes bleues). La courbe de gauche caractérise les contacteurs les plus sensibles ; celle de droite,
les moins sensibles (voir aussi le paragraphe concernant
les contacteurs au Chapitre 3). Si le creux se situe dans
la partie inférieure droite d’une de ces courbes, il provoquera l’ouverture du contacteur concerné et donc perturbera l’installation.
Durée du creux (s)
Durée du creux (s)
Figure 3 | Somme des creux enregistrés sur 39 sites pour l’année 2007, répartis par type
On remarque que la durée de la très grande majorité des
creux est inférieure à 1 seconde.
On constate aussi directement que le choix d’un matériel
moins sensible peut fortement améliorer la situation.
Les creux de type I (chute de tension entre une phase et
le neutre) sont les plus fréquents, tandis que les creux de
type III sont les plus sévères.
Creux de tension : comment se protéger contre l’inévitable ? | 5
Causes et propagation
Contrairement à bien des idées reçues, les creux de tension
ne sont pas tous provoqués par le réseau électrique. Ce
type de perturbations fait inévitablement partie intégrante
de la vie d’un réseau et il est évident que sa bonne gestion
et son entretien régulier diminuent les risques de perturbation. Cependant, un réseau parfait et insensible aux facteurs
externes n’existe pas et il serait totalement illusoire de promettre à un utilisateur du réseau qu’il ne subira jamais de
creux de tension.
Le phénomène est rarement local. En effet, lorsqu’un creux
de tension se produit dans le réseau électrique, on note les
phénomènes suivants : peu ou pas d’affaiblissement dans
la direction aval, mais bien en amont (vers les niveaux de
tension supérieurs). Lors de la transition vers un autre niveau de tension, le creux changera également de type (à
l’exception du type III). La façon dont un creux de tension
se propage sur un niveau de tension donné dépend de la
position par rapport à la source et de la structure du réseau
(radial ou maillé), qui est déterminée dans une grande mesure par la fonction qu’il remplit.
En tant qu’industriel ou chef d’entreprise, il faut être bien
conscient que l’on peut être touché par un creux de tension
à la suite d’un court-circuit provoqué dans une entreprise
voisine.
La figure ci-contre montre, pour un point donné d’un réseau, les différentes zones dans lesquelles un court-circuit
provoquera un creux de tension plus ou moins profond. La
zone rouge est la plus critique. Ces zones peuvent s’étendre
sur des dizaines (voire parfois des centaines) de kilomètres
à la ronde.
Creux de tension : comment se protéger contre l’inévitable ? | 6
Figure 4 | Étendue des creux
La plupart des creux de tension proviennent de courts-circuits provoqués par des phénomènes météorologiques (impacts de foudre, arrachement de lignes lors de tempêtes…),
par l’endommagement de câbles électriques lors de travaux
de voirie, par la présence d’animaux ou encore par des défaillances de matériel. Les causes des creux de tension sont
donc diverses et multiples.
Un utilisateur peut également perturber son propre réseau,
sans qu’il ne soit question de court-circuit! L’enclenchement
d’un important transformateur ou le démarrage d’un gros
moteur peut, dans certaines circonstances, générer une
chute de tension supérieure à 10 % dans une installation.
Le nombre de creux peut évoluer fortement, non seulement
d’une semaine à l’autre, mais également d’une année sur
l’autre. La figure 5 ci-dessous compare l’évolution en 2005,
2006 et 2007 du nombre de creux par semaine (exprimé
en % du nombre total) pour une sélection de sites identique
à celle des paragraphes précédents.
Nombre
de creux
total)
Number
of dips(%
(% du
of total)
Sélection
demeasurement
points de mesure
Selection of
points
16
14
12
10
8
6
4
2
0
2005
16
14
12
10
8
6
4
2
0
2006
16
14
12
10
8
6
4
2
0
2007
1
3
5
7
9 11 13 15 17 19 21 23 25 27 29 31 33 35 37 39 41 43 45 47 49 51
Weeks
Semaines
Figure 5 | Répartition dans le temps des creux enregistrés sur 39 sites pour les années 2005 à 2007
Il est impossible de prédire le nombre de perturbations ou
leur moment d’apparition. On peut toutefois constater que
certaines périodes de l’année connaissent plus de pertur-
bations que d’autres, notamment les périodes d’orages. Cet
effet saisonnier est particulièrement notable sur les réseaux
aériens pour les tensions de 30 kV à 380 kV.
3. Impact des creux de tension
sur les installations
Immunité des appareils aux
creux de tension
Chaque appareil alimenté par une source électrique est immunisé, dans une certaine mesure, contre les creux de tension. Cette immunité, fonction de la durée et de la profondeur
des creux de tension, est habituellement exprimée selon un
système de gradation, comme indiqué au Tableau 1.
Les exigences d’immunité ne sont évidemment pas identiques pour tous les types d’appareils. La criticité de l’application pour laquelle un appareil est utilisé constitue un
paramètre important. C’est le cas, par exemple, pour les
équipements utilisés en milieu hospitalier. Il existe aussi,
pour certains appareils, des normes spécifiques9 qui définissent les exigences d’immunité contre les creux de tension. Le comportement de ces appareils est généralement
évalué sur base de la gradation suivante :
Creux de tension : comment se protéger contre l’inévitable ? | 7
a) À l’intérieur des limites fixées par le fabricant ou déterminées par l’acheteur,
le fonctionnement de l’appareil peut être considéré comme normal.
b) L’appareil ne remplit plus sa fonction provisoirement ou subit une perte de puissance temporaire,
mais reprend ensuite son fonctionnement normal sans intervention d’un opérateur.
c) L’appareil ne remplit plus sa fonction provisoirement ou subit une perte de puissance temporaire ;
l’intervention d’un opérateur est nécessaire pour rétablir le fonctionnement normal.
d) L’appareil est endommagé au niveau hardware ou software, ou subit une perte de données,
entraînant un déficit irrémédiable de fonction ou de puissance.
Tableau 1 | Aperçu des critères d’évaluation de l’immunité d’un appareil aux creux de tension
Il peut s’avérer nécessaire d’évaluer l’immunité au cas
par cas dans la mesure où de nombreux types d’appareils
(les régulateurs de vitesse par exemple) sont utilisés aussi
bien dans des applications critiques que non-critiques. Si
la question du critère d’immunité n’est pas explicitement
évoquée, il est fort probable, dans un marché concurrentiel,
que les produits proposés soient des produits standard ne
satisfaisant qu’aux exigences minimales (critère c), alors
que des alternatives intéressantes sont disponibles moyennant un surcoût limité. Dans le cas d’un processus critique,
il est essentiel de prendre en compte l’impact potentiel des
creux de tension dès la phase de projet. Dans la mesure où
les normes internationales en font aussi mention, les critères d’évaluation du Tableau 1 peuvent être repris dans le
cahier des charges de tout équipement ou installation. Pour
le critère a, les exigences d’immunité en termes de profondeur et de durée de creux doivent être spécifiées.
La normalisation internationale reconnaît donc que, sous
l’effet de creux de tension et en fonction de leur sévérité
(profondeur et/ou durée), le bon fonctionnement des appareils peut être perturbé. Dans de nombreux cas, une immu-
Contrôleurs
A
B
nité totale (100 %) n’est pas envisageable, pour des raisons
technico-économiques. Il s’avère généralement nécessaire
de prendre des mesures complémentaires afin de gérer les
creux de tension. Les paragraphes suivants traitent plus
abondamment de ces aspects et peuvent servir de point de
départ pour l’évaluation de toute installation.
Améliorer l’immunité
d’une installation
Des mesures correctives peuvent être prises pour limiter
l’impact des creux de tension sur une installation ; c’est
ce qu’on nomme l’immunisation. À ce stade, il convient
d’opérer une distinction entre les mesures spécifiques (ou
« locales ») au niveau de l’appareil et les mesures globales qui protègent toute l’installation (Figure 6). Il existe des
solutions techniques permettant de protéger globalement
chaque processus mais, pour la plupart des installations, un
investissement dans une solution d’immunisation globale
n’est pas justifié économiquement.
C
Réseau
Actuateurs
PQ Monitor Client BT
PQ Monitor BT
A Adaptation au niveau de l'appareil
B Adaptation pour tout le processus
C Protection globale de l'entreprise
Figure 6 | Mesures locales et globales pour l’immunisation contre les creux de tension
9 | S’il n’existe pas de norme spécifique, la norme générale est d’application (EN61000-6-1 et EN61000-6-2).
Creux de tension : comment se protéger contre l’inévitable ? | 8
La Figure 7 explique comment évaluer le coût d’investissement nécessaire pour renforcer l’immunité d’une installation par rapport aux économies futures (coûts évités par
la réduction du nombre d’interruptions du processus). Il
convient tout d’abord de définir les processus les plus critiques de l’installation. Le niveau de criticité d’un processus
peut être évalué de différentes manières : sécurité, durée de
remise en service et perte de matières premières coûteuses
ne sont que certains des aspects à prendre en compte.
Ensuite, les appareils ou composants les plus sensibles utilisés dans ces processus critiques doivent être localisés.
Comme le montre la Figure 9, chaque processus peut être
scindé en une partie ‘puissance’ et une partie ‘contrôle’. La
question fondamentale est de savoir si l’on peut se contenter d’une immunisation au niveau du contrôle/commande.
Selon certains auteurs, jusqu’à 70% des arrêts de processus sont dus à un problème lié à l’appareillage de contrôle.
De plus, immuniser la partie ‘contrôle’ nécessite généralement des investissements limités par rapport aux méthodes
d’immunisation du circuit de puissance.
Si le problème ne se situe pas au niveau du système de
contrôle/commande, il convient de vérifier quelles adaptations du circuit de puissance peuvent accroître la fiabilité
de l’installation.
Déterminer les processus critiques dans l’entreprise
Détecter les appareils les plus sensibles dans chaque processus critique
oui
Suffit-il de protéger
la partie
contrôle/commande ?
Définir la stratégie d’immunisation
de la partie ‘contrôle/commande’
non
Définir la stratégie d’immunisation
dans le circuit de puissance
Analyser le coût d’investissement p/r
aux coûts évités par la réduction du nombre d'arrêts
Nombre et nature des creux de tension
(mesurés par l’entreprise ou via le gestionnaire de réseau)
Figure 7 | Plan d’actions
pour l’immunisation des processus
Enfin, il faut quantifier les adaptations et investissements
nécessaires par rapport aux coûts évités grâce à l’amélioration de la fiabilité. À ce stade, il est essentiel de disposer
d’informations sur la nature et le nombre de creux auxquels
on peut statistiquement s’attendre. Pour obtenir ces informations, il est recommandé d’effectuer des mesures au
point de raccordement de l’installation. Ces mesures peuvent éventuellement être réalisées par le client lui-même
ou par un prestataire de services spécialisés. Si cela n’est
pas possible, l’utilisateur pourra se référer aux données de
mesures à caractère plus général disponibles auprès du
gestionnaire de réseau. Celles-ci proviennent de différents
points de mesure.
450
400
350
300
250
200
150
100
50
0
Coûts de protection
Coûts de PQ
0
A
B
C
D
E
Figure 8 | Analyse technico-économique
des techniques de protection (A à E).
Lorsque le résultat de cette analyse technico-économique
est positif, l’adaptation du processus pourra être envisagée. La Figure 8 présente l’exemple d’une telle analyse.
Par rapport à la situation actuelle (‘0’), les coûts totaux des
différentes solutions envisagées (de A à E) montrent que la
solution A est de loin la meilleure : les coûts d’investissement sont les plus faibles, de même que les coûts résiduels
de ‘Power Quality’ (qualité de l’énergie électrique). Bien entendu, le choix ne s’avère pas toujours aussi évident.
La réalisation d’une analyse détaillée est souvent une tâche
assez ardue. Il faut parvenir à identifier les appareils ou installations qui sont à l’origine de l’interruption du processus. Il est
donc fondamental de considérer chaque partie du processus
et de disposer des connaissances suffisantes pour pouvoir
proposer une solution appropriée. L’expérience joue ici un rôle
primordial. En plus des experts du processus proprement dit,
le support de spécialistes externes est souvent requis.
Creux de tension : comment se protéger contre l’inévitable ? | 9
La Figure 9 donne la structure schématique d’une partie
d’installation. Une distinction est faite entre le circuit de
puissance et la partie ‘contrôle’ (ou contrôle/commande).
Le processus est géré au moyen d’actuateurs (ou actionneurs) comme des moteurs ou des régulateurs de vitesse.
Les actuateurs sont reliés au réseau électrique via des
contacteurs et des systèmes de protection. Dans la partie
‘contrôle’, on trouve notamment l’automate programmable
(PLC en anglais). Les paramètres du processus sont mesurés par des sondes et interprétés par le processeur de
l’automate, qui commande ensuite les actuateurs et/ou la
connexion des contacteurs.
Les problèmes d’immunisation et les solutions possibles
sont analysés succinctement ci-après, tout d’abord en ce
qui concerne la partie ‘contrôle’ et ensuite pour ce qui touche aux actuateurs qui sont très sensibles aux creux de
tension.
Appareillage de contrôle
L’appareillage de contrôle comprend notamment les automates programmables (PLC), des processeurs, des modules de communication des données (‘bus’), un appareillage
de visualisation, des relais et des sondes de mesure. Ce
sont généralement des appareils alimentés en monophasé,
avec une puissance limitée par rapport aux actuateurs. La
perte d’un seul des éléments de la partie ‘contrôle’ à cause
d’un creux de tension peut avoir des conséquences extrêmes. La déperdition de l’information provenant d’une sonde
peut, par exemple, être interprétée par un automate de manière telle que les actuateurs soient mis à l’arrêt alors qu’ils
auraient peut-être pu supporter le creux de tension sans
difficulté. Dans d’autres situations, l’interruption volontaire
de certains actuateurs peut se justifier lors de la détection
d’un creux, avec remise en service de façon contrôlée après
le rétablissement de la tension. En d’autres termes, le maintien en service, à tout moment, de l’appareillage de contrôle
est essentiel, de même que la mise en place réfléchie d’un
système de réglage. L’aperçu ci-après propose quelques
techniques permettant de bien protéger la partie ‘contrôle’.
EVgi^Zej^hhVcXZ
Réseau
Contacteur
Actuateur
Processus
Alimentation
PLC
Sondes
Programmation
EVgi^ZXdcigaZ
Figure 9 | Schéma type d’une installation, avec distinction entre la partie ‘contrôle’ et la partie ‘puissance’.
Creux de tension : comment se protéger contre l’inévitable ? | 10
Suggestions de protection de l’appareillage de contrôle
Utiliser des alimentations en courant continu plutôt qu’en alternatif :
les alimentations CC disposent par définition d’une réserve d’énergie. Elles sont donc typiquement moins sensibles
aux creux (p.ex. les contacteurs avec enroulement d’excitation à cc).
Prévoir des alimentations conditionnées pour l’appareillage de contrôle :
la puissance installée d’un appareillage de contrôle monophasé est généralement faible. Le coût de la protection à
prévoir est donc souvent justifiable. Pour ce faire, on utilise généralement des systèmes de type UPS (ou ASI, pour
alimentation sans interruption). Il convient de noter que la fiabilité d’une unité UPS dépend en grande partie de la
situation des batteries. Un bon entretien et le remplacement de ces batteries en temps opportun revêt donc un
caractère essentiel. C’est également vrai pour les automates programmables : il est capital de remplacer la batterie
de secours à temps de manière à ne pas perdre le programme.
Utiliser des techniques de programmation adaptées :
pour les processus basés sur des actions séquentielles, il est préférable de ne pas utiliser la mémoire vive pour les
variables d’action. De cette manière, si le contrôleur doit être redémarré, l’étape à laquelle se trouvait le processus
avant le creux est connu et le processus peut être redémarré rapidement.
Dans les installations existantes, les circuits de puissance et
de contrôle ne sont pas toujours strictement séparés. Il n’est
donc pas toujours évident d’alimenter tout l’appareillage de
contrôle à partir d’une unité de type UPS.
Actuateurs
Les actuateurs (appelés aussi actionneurs) constituent le
cœur de la partie opérative de toute installation. Parmi ceuxci, on trouve les moteurs couplés au réseau, les entraînements à vitesse variable et les contacteurs. Des éléments
supplémentaires peuvent y être ajoutés en fonction de la
nature du processus, comme par exemple des redresseurs
pour électrolyse.
Le comportement des appareils les plus courants est abordé ci-après, de même que les mesures qui peuvent être
prises pour diminuer la sensibilité aux creux de tension de
leurs composants. Il est important de signaler que, pour un
même type d’appareil, il existe parfois des différences de
comportement notables selon les marques. Dans le cas
d’installations très sensibles, il peut donc s’avérer très utile
de déterminer la sensibilité exacte des actionneurs via des
tests ou de donner au fournisseur toutes les indications requises quant au comportement souhaité de l’appareil10.
Moteurs à induction
couplés au réseau
Les moteurs à induction couplés au réseau sont parmi les
plus gros consommateurs d’énergie électrique dans l’industrie. Dans la plupart des cas, ils sont peu sensibles aux
creux de tension. Ils ne se déconnectent pas immédiatement lors de la survenue d’un creux, mais leur point de
fonctionnement change (Figure 10) ; la tension plus basse
entraîne une diminution du couple maximal (proportionnelle
au carré de la tension) et l’abaissement de la vitesse de
rotation du moteur à induction (wdip au lieu de wnom). La vitesse à laquelle le nouveau point de fonctionnement est atteint dépend du couple de charge et de la lenteur ou inertie
10 |IEC 61000-34, IEC 61800
Creux de tension : comment se protéger contre l’inévitable ? | 11
de l’entraînement. Si le ralentissement qui en résulte n’entraîne pas de conséquence néfaste sur le fonctionnement
normal du processus, il peut être toléré. Des creux avec une
tension résiduelle de 70 % ne posent généralement aucun
problème. Si le ralentissement n’est pas envisageable, il est
alors préférable d’arrêter l’entraînement.
T
Couple moteur avant le creux
Point de fonctionnement
normal
Couple moteur pendant le creux
Couple de charge
Nouveau point de
fonctionnement
Moteurs à induction couplés au réseau
Conséquences d’un creux
Mesures correctives à
prendre
Ralentissement du moteur
Couple maximal plus faible
Courants élevés lors du
rétablissement de la tension
d’alimentation : nouvelle
chute de tension
Déconnecter les moteurs non
critiques. Développer une
procédure de redémarrage
séquentielle
Activation de la protection du
moteur (courants élevés)
Retarder le déclenchement
lors de la détection d’un
creux
Tableau 2 | Conséquences et mesures en cas
de creux pour les moteurs à induction
Wdip Wnom W
couplés au réseau
Figure 10 | Impact d’un creux
sur la caractéristique couple (T)-vitesse de
rotation (w) d’un moteur à induction
Lors du rétablissement de la tension d’alimentation à la fin
du creux, le moteur est soumis à une réaccélération jusqu’à
son point de fonctionnement initial. Au cours de cette accélération, des courants élevés circulent dans le moteur, comparables au courant de démarrage. Dans beaucoup d’applications, des mesures sont prises pour éviter les courants
de démarrage élevés. En effet, ceux-ci créent une charge
thermique pour le moteur et entraînent en outre des chutes
de tension en amont.
Dans le cas de moteurs très puissants, cela peut entraîner
un creux de tension. Les démarrages très lourds se font
souvent sans charge (p.ex un compresseur) ou s’effectuent
via un démarrage en étoile-triangle ou une alimentation
électronique de puissance. Lors d’un creux de tension de
courte durée, ces techniques de démarrage ne sont pas actives. Par conséquent, des courants très importants circulent et peuvent être erronément interprétés par la protection
du moteur (détection locked-rotor). Celle-ci se déconnecte
alors du réseau et stoppe l’entraînement avec, dans le pire
des cas, l’arrêt de l’application toute entière.
Creux de tension : comment se protéger contre l’inévitable ? | 12
Moteurs à vitesse variable
Les onduleurs électroniques de puissance sont utilisés lorsque la vitesse de l’entraînement doit pouvoir varier de façon
souple ou pour économiser de l’énergie. Lors de l’apparition d’un creux, les onduleurs électroniques de puissance
sont le maillon faible du système d’entraînement. Un onduleur standard pour moteur à courant alternatif utilise un
redresseur à diodes, un bus continu avec stockage limité
d’énergie dans un condensateur, et un inverseur qui délivre
la tension alternative adaptée au moteur (Figure 11). Lors
d’un creux, il n’y a pas d’énergie transmise du réseau vers
le bus continu. La tension de ce circuit chute et la protection
de l’onduleur déconnecte l’appareil. À la figure 12, la ligne
pointillée reproduit la forme typique d’une courbe de tolérance. Le système d’entraînement doit alors être à nouveau
redémarré, soit manuellement, soit automatiquement.
De nombreux régulateurs de vitesse disposent d’options
pour limiter les conséquences de creux. Elles sont succinctement présentées ci-après.
Démarrage « en vol » : il s’agit du redémarrage rapide
de l’entraînement après un déclenchement consécutif à un
creux; la vitesse du moteur, que celui-ci soit encore en rotation ou non, est déterminée de manière à éviter les courants
de moteur élevés.
seur actif (Figure 12). Cela permet de maintenir à niveau la
tension du bus continu lors de chutes de la tension d’alimentation. L’application ne subit alors aucune nuisance liée
au creux. Pour pouvoir transmettre la même puissance dans
une telle situation, un courant plus élevé doit être extrait,
ce qui peut entraîner une chute de tension supplémentaire.
Un redresseur actif permet généralement de soutenir des
creux ayant une tension résiduelle de 60 %. Un redresseur
actif surdimensionné permet même de supporter des creux
plus profonds.
Réserve cinétique : si la vitesse de rotation de l’application peut être réduite et s’il y a suffisamment d’énergie
cinétique disponible dans les parties tournantes, cette énergie peut être extraite des parties tournantes lors de l’apparition d’un creux en freinant le moteur (Figure 12 - Réserve
cinétique). De cette manière, l’onduleur reste actif et est
capable de faire à nouveau accélérer le moteur de façon
contrôlée après le rétablissement de la tension.
Les entraînements à courant continu sont aussi sensibles
aux creux de tension. Un pont à thyristors à l’entrée d’un tel
entraînement doit être commandé en synchronisation avec le
réseau. Le synchronisme peut être perdu lors d’un creux de
tension. De tels systèmes sont particulièrement sensibles lors
de la réinjection d’énergie (fonctionnement en onduleur).
Redresseur actif : des développements récents permettent
le remplacement d’un redresseur à diodes par un redres-
L dc
Rcharge
R
S
T
T1
T2
T3
ac
moteur
C
Réseau
redresseur
Bus continu
inverseur
Figure 11 | Schéma d’un onduleur pour réglage de vitesse
Figure 12 | Impact de la réserve
cinétique ou de l’utilisation d’un
redresseur actif sur la courbe
de tolérance d’un entraînement
à vitesse variable
Creux de tension : comment se protéger contre l’inévitable ? | 13
Entraînements à courant alternatif à vitesse variable
Conséquences d’un creux
Mesures correctives à prendre
Activation de la protection de sous-tension entraînant le
déclenchement (surtout les creux de Type III)
Redémarrer l’onduleur:
• Sur moteur tournant
• Sur moteur à l’arrêt
Abaisser la limite de sous-tension et placer des inductances
Utiliser un onduleur avec une plus grande capacité du bus continu
Utiliser un redresseur actif
Freiner la charge entraînée (réserve cinétique)
Ralentissement du moteur
Utiliser un onduleur avec rétroaction de la vitesse ou des variateurs
à contrôle vectoriel de flux
Déclenchement par détection de perte de phase
(Creux de Type I et II)
Retarder la détection de perte de phase > 500 ms si possible
Déclenchement suite à des courants de moteurs élevés après
rétablissement de la tension d’alimentation (Onduleurs U/f)
Utiliser des variateurs à contrôle vectoriel de flux
Perte du système de réglage de l’onduleur
Alimenter séparément le système de réglage via une unité UPS
Oscillations de la tension du bus continu lors du rétablissement de
la tension avec rupture des diodes du bus continu
Placer judicieusement des inductances de lissage
Tableau 3 | Conséquences et mesures correctives pour des entraînements à vitesse réglable
Contacteurs
Tension (pu)
1.0
Des contacteurs sont utilisés pour connecter les actuateurs
au système d’alimentation. Les contacteurs classiques comprennent un enroulement d’excitation alimenté en courant
alternatif ou continu. Le contact mécanique du contacteur
se ferme lors de l’excitation. Les contacteurs sont alimentés
en monophasé.
Suite à un creux de tension, les contacteurs peuvent s’ouvrir
de façon incontrôlée, ce qui peut mener à l’arrêt du processus
et à des situations dangereuses. Pour éviter ce type de problème, deux solutions sont possibles: maintenir les contacteurs continuellement en position fermée, ou bien ouvrir les
contacteurs de façon contrôlée en cas de détection d’un
creux. Cette dernière solution est notamment mise en œuvre pour le redémarrage sous contrôle de puissants moteurs
connectés au réseau. Si les contacteurs ne peuvent pas être
ouverts, il est préférable d’opter pour une excitation en courant continu, voire pour une solution plus drastique, à savoir le
recours à une unité UPS pour garantir l’alimentation.
Creux de tension : comment se protéger contre l’inévitable ? | 14
Passe
0.8
0.6
L'immunité du contacteur
varie d'un fournisseur à l'autre
0.4
0.2
Echec
0.0
0
20
40
60
80
100 120 140 160 180 200
Temps
Tim,(ms)
(ms)
Figure 13 | Courbe de tolérance pour des
contacteurs disponibles sur le marché
La Figure 13 présente des courbes de tolérance pour des
contacteurs avec bobinage à courant alternatif. La zone
grise est délimitée d’une part, par les meilleurs contacteurs,
et d’autre part, par les contacteurs de qualité médiocre.
On observe une grande dispersion du comportement d’un
contacteur à l’autre. Il est donc indiqué, pour des processus
critiques, d’interroger les fournisseurs sur le comportement
de leurs appareils lors de creux de tension.
Les relais de sous-tension appartiennent aussi au groupe
des contacteurs. Ils remplissent une fonction de sécurité
lorsque la tension d’alimentation est trop basse. Ils peuvent déconnecter une machine lors d’un creux de tension
de courte durée, alors que ce creux ne pose pas forcément
de problème pour d’autres appareils.
pe, les actions à prendre ainsi que les différents intervenants.
Ainsi, il ne serait pas opportun de vouloir faire redémarrer
une machine qui requiert de l’air comprimé, sans remise en
service préalable de l’installation qui comprime l’air.
Solution d’immunisation globale
Procédure de redémarrage
Dans de nombreux cas, une protection complète ne se justifie
pas d’un point de vue financier. Les méthodes qui ont été
évoquées ci-avant doivent permettre de réduire le nombre
d’arrêts des installations. Quoi qu’il en soit, des arrêts interviennent irrémédiablement en cas de creux profonds et longs.
Afin de relancer l’installation après un tel arrêt, il est nécessaire de disposer d’une procédure identifiant, étape par éta-
Si des parties importantes d’une installation sont sensibles
aux creux, un dispositif d’immunisation peut être installé. La
plage de puissance d’un tel appareillage peut facilement atteindre 1 MW. Il faut établir une distinction entre les systèmes
UPS statiques et les systèmes UPS rotatifs. La capacité de
cet appareillage à compenser des creux dépend en grande
mesure de la quantité d’énergie présente dans le dispositif
d’immunisation. Les systèmes statiques sont plutôt utilisés
pour les petites plages de puissance.
4. Mesurer les creux de tension
Comme indiqué à plusieurs reprises dans cette brochure, il
est important de mesurer les creux de tension. Les gestionnaires de réseau procèdent au suivi de la qualité de la tension
de leurs réseaux. Cela leur permet notamment de disposer
d’informations globales sur les creux de tension, informations
qui ont par exemple servi à rédiger cette brochure.
Vu la manière dont ces creux de tension se propagent (voir
aussi le paragraphe ‘Causes et propagation’ au Chapitre 2),
les mesures de creux ne donnent pas toujours une image
précise de ce qui se produit exactement chez un utilisateur
du réseau. Pour évaluer correctement l’impact des creux de
tension et l’efficacité des mesures d’immunisation, il est fortement recommandé aux utilisateurs de mesurer les creux de
tension au niveau de leur installation. En cas de conséquences néfastes sur un processus, le coût de ces évaluations est
généralement tout à fait négligeable par rapport à la contribu-
tion qu’elles peuvent apporter dans le processus d’immunisation, y compris lorsqu’elles sont confiées en sous-traitance
à des prestataires de service externes. En outre, ces mesures
apportent aussi une information sur les éventuels creux de
tension dont l’origine se situe en interne.
Afin de pouvoir comparer et interpréter correctement les
résultats de mesure, il est recommandé d’utiliser un appareillage conforme à la norme européenne EN 61000-4-3011
(Classe A ou S). Les paramètres de mesure les plus adéquats
sont basés sur la norme européenne EN 50160. Et pour disposer d’une analyse détaillée, ces mesures peuvent évidemment être complétées par d’autres, comme par
exemple des mesures de fluctuation de la tension (comme
indiqué à la Figure 1) ou l’évaluation de la qualité de l’énergie
électrique.
11 | EN 61000-4-30 : 2009 = IEC 61000-4-30 : 2009
Creux de tension : comment se protéger contre l’inévitable ? | 15
Les creux de tension enregistrés peuvent être analysés
individuellement, et plus spécifiquement en fonction des
conséquences (ou de l’absence de conséquence) qu’ils ont
sur le processus concerné. Même l’absence d’impact sur
le processus peut fournir une information intéressante pour
préciser le niveau d’immunité des installations.
Vu le caractère stochastique de ces perturbations, il convient
d’effectuer ce type de mesures sur une longue période afin
de disposer de statistiques de creux de tension fiables. Le
tableau ci-dessous montre par exemple que, pour pouvoir
limiter l’incertitude statistique à 20 %, il faut réaliser des
mesures durant 20 ans si le nombre de creux s’élève en
moyenne à cinq par an. L’incertitude sera évidemment plus
élevée si la période de mesure est plus courte.
e = 50 %
e = 20 %
e = 10 %
µ = 2 creux/an
8 ans
50 ans
200 ans
µ = 5 creux/an
3,2 ans
20 ans
80 ans
µ = 10 creux/an
1,6 ans
10 ans
40 ans
Tableau 4 | Période de mesure statistique (avec e = incertitude et µ= fréquence moyenne de creux)
Creux de tension : comment se protéger contre l’inévitable ? | 16
5. Conclusion
Même lorsque les réseaux sont correctement exploités et
entretenus, des creux de tension d’origines très diverses
peuvent se produire ; leurs conséquences sur les processus
sont aussi de nature très variable : risque pour le personnel,
coûts de matériel, coûts de redémarrage, risque de perte
d’image… Etant donné le caractère inévitable et l’influence
potentiellement néfaste des creux de tension, il est essentiel
de prendre cette problématique au sérieux et la contribution
de tous les acteurs est essentielle.
Le gestionnaire de réseau doit naturellement développer,
équiper et entretenir ses réseaux de manière adéquate et
mettre à disposition des informations générales sur les creux
de tension.
L’utilisateur du réseau, quant à lui, est le mieux placé pour estimer la criticité de ses processus et il doit prendre en compte
l’impact potentiel des creux de tension lors du développement de ses installations ou lorsqu’il établit un cahier des
charges et des spécifications techniques.
Les fabricants/fournisseurs connaissent leurs produits et
ont dès lors la responsabilité d’informer correctement leurs
clients, notamment sur le comportement de ces produits en
cas de creux de tension. En outre, leurs appareils standard
peuvent souvent être équipés d’options permettant d’améliorer leur immunité moyennant un surcoût limité. Ces options
constituent autant d’alternatives utiles qu’il convient donc de
proposer aux clients.
Les bureaux d’études doivent pour leur part prendre en
compte, dès la phase de conception d’un processus, l’impact
néfaste potentiel des creux de tension sur son bon fonctionnement. Ils peuvent préciser les critères d’immunité dans le
cahier des charges, prendre des mesures complémentaires
d’immunisation pour les systèmes de réglage ou de contrôle/
commande, ou encore prévoir des procédures de redémarrage, etc.
En raison de la nature même des creux de tension et de la
diversité des installations, il n’existe pas de solutions « clé en
main ». Mais en la matière, une règle d’or s’impose : mieux
vaut prévenir que guérir. Une approche préventive, prenant
en compte l’impact des creux de tension dès la phase de
conception, est préférable à une approche curative. Bien entendu, les mesures d’immunisation à caractère curatif peuvent aussi avoir un effet très favorable.
Que l’on opte pour une approche préventive ou curative, il
est fondamental d’opérer de manière structurée. Une évaluation personnalisée, tant de la nécessité que de la méthode
d’immunisation des installations, s’impose. Le responsable
du processus doit procéder à une évaluation précise de
l’impact des creux de tension sur le fonctionnement de son
installation. Une information sur la nature des creux pouvant
se produire est également requise afin de pouvoir dégager
une analyse financière correcte. Les gestionnaires peuvent
mettre à disposition des informations globales sur les creux
se produisant sur leurs réseaux. Idéalement, l’utilisateur du
réseau complétera ces informations par des mesures réalisées à son niveau.
Les informations et conseils communiqués dans cette brochure permettent une première estimation des mesures permettant d’assurer ou d’améliorer la fiabilité des processus.
Pour une analyse plus détaillée de la problématique, nous
renvoyons le lecteur intéressé vers la brochure détaillée éditée par le CIGRE (le Conseil International des Grands Réseaux
Électriques). Des prestataires de services spécialisés peuvent
également apporter leur aide dans ce domaine.
Creux de tension : comment se protéger contre l’inévitable ? | 17
La présente brochure est une initiative de Synergrid
et a été réalisée en collaboration avec Laborelec et Howest (Hogeschool West-Vlaanderen).
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