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rence avec le laser grâce au feedback. Le laser
est alors verrouillé sur cette longueur d’onde
déterminée.
Où veut-on en venir ? Les lasers DFB présen-
tent les propriétés fondamentales suivantes.
Ils travaillent à une longueur d’onde centrale
de 1 530 nm à une température de +50 °C,
par exemple. Suivant la température appli-
quée de part et d’autre de +50 °C, on décale
la longueur d’onde à droite ou à gauche
d’une valeur : une variation de 1 °C corres-
pond à un décalage de 0,1 nm. En plus de
ce premier réglage grossier, un second est
obtenu lorsque l’on fait varier le courant
d’alimentation des diodes laser DFB. Ce ré-
glage est beaucoup plus fin, de l’ordre de
0,002 nm/mA. En combinant les deux ap-
proches, il est possible de sélectionner la
longueur d’onde pour un gaz donné via la
température du laser (réglage grossier des
longueurs d’onde) puis de mesurer le gaz
en jouant sur le courant du laser au travers
d’une rampe (réglage fin ;
voir shéma ci-des-
sous
). On réalise alors un balayage sur 0,2 nm
d’une manière continue, sur une période de
100 ms (soit une fréquence de 10 Hz), et
on reproduit l’opération avec une tempéra-
ture différente.
En termes de résolution optique, pour un
spectre total de 0,22 nm, 200 points sont
acquis pendant chaque période de 100 ms,
ce qui représente un peigne de raies équi-
distantes de 0,00112 nm, ou 1,12 pm, soit
environ 0,005 cm-1. Si l’on compare cette
résolution spectrale à celle d’un spectroscope
FTIR, qui est de l’ordre de 2 nm ou 4 cm-1,
la technique OFCEAS est au microscope, ce
que le FTIR est à la loupe… A des niveaux
de résolution spectrale si faibles, la réduction
de moitié de l’épaisseur de la cuve n’est plus
un problème. Même divisée par deux (dans
le cas d’épaisseur de cuve deux fois plus pe-
tite), la résolution spectrale en OFCEAS reste
encore bien supérieure à celle des autres
techniques. Autre avantage : comme chaque
point de mesure est équidistant l’un de
l’autre et que cette distance est toujours la
même, l’exploitation des spectres (discréti-
sation et analyse des spectres) devient bien
plus simple.
Il existe une autre grande différence entre les
techniques FTIR et OFCEAS : la première
fournit des mesures relatives et la seconde,
des mesures absolues, directes et en temps
réel. Le spectre d’absorption obtenu en
OFCEAS (
voir shéma ci-dessous),
contient en
effet à la fois la référence (I0) et l’intensité du
faisceau absorbé par le gaz (I), ce qui permet
d’accéder d’une manière simple aux deux
informations I0 et I. Autres avantages, aucun
étalonnage régulier n’est requis, un auto-zéro
étant réalisable, il est possible de s’affranchir
d’éventuelles dérives qui sont un point faible
des méthodes infrarouges non-dispersives
(Non-Dispersive Infrared ou NDIR).
Les avantages
d’une basse pression
Une autre originalité est rendue possible
avec la technologie OFCEAS : la mise en basse
pression de la cuve et de l’ensemble de la
chaîne de prélèvement. Le fait de travailler à
des pressions plus faibles qu’habituellement
permet en effet d’affiner un peu plus, s’il y
en avait encore besoin, les raies spectrales du
gaz mesuré (
voir shéma ci-contre)
. Si les raies
ont plutôt une forme patatoïde à une pres-
sion de 800 mbar (proche de la pression
atmosphérique), ce sont des pics bien étroits
à 100 mbar et on accroît d’autant la résolu-
tion spectrale grâce, toujours, à la loi de con-
servation.
pour en faire passer plusieurs dans une
fibre optique –, et un coût réduit (ce sont des
composants fabriqués en grand volume, par
milliers d’unités).
Deux réglages
pour un balayage continu
En récupérant à l’entrée de la cuve le faisceau
laser réfléchi et en le réinjectant dans le laser,
on réussit à accorder ensembles cuve et laser.
En rendant ainsi les deux systèmes solidaires,
on parvient à affiner encore un peu plus la
bande passante des longueurs d’onde. La
réduction de la largeur spectrale s’accompa-
gne en parallèle d’une augmentation de
l’intensité des pics, selon la loi de conserva-
tion(3). En plus de l’augmentation de la réso-
lution optique et de l’intensité du signal, on
obtient également une résonance autostable.
On peut prendre comme analogie électro-
nique la boucle à verrouillage de phase
(Phase-Lock Loop ou PLL) utilisée en mo-
dulation de fréquence. Une fois le laser in-
jecté dans la cuve, celle-ci se met à résonner
à une longueur d’onde précise et en cohé-
Dans le cas des techniques traditionnelles
FTIR, la chute de pression entraîne une ré-
duction de la sensibilité du même facteur
selon la loi des gaz parfaits (4) : une réduction
de 1 bar à 100 mbar, par exemple, s’accom-
pagne d’une diminution d’un facteur 10 de
la sensibilité. La méthode OFCEAS permet
ainsi de s’affranchir des éventuels problèmes
de chevauchement de pics (
overlapping
) et des
difficultés liées à la présence d’interférents,
quelle que soit la matrice de gaz. La techni-
que spectroscopique est même trop sensible
(partie par milliards, ou ppb, au lieu de
20 %) dans certaines applications et il faut
travailler vers une zone moins absorbante.
Au-delà de l’analyse proprement dite, l’uti-
lisation de la basse pression apporte des
gains significatifs aux niveaux du prélève-
ment et de l’échantillonnage (par exemple,
l’insensibilité aux variations externes de
pression) qui sont tout autant critiques que
l’analyse, surtout lorsque l’on doit mesurer
des traces à des concentrations de l’ordre du
ppb. L’un des phénomènes générés par la
basse pression est l’effet de buse sonique :
par l’intermédiaire un orifice d’un diamètre
de 0,2 mm, situé au plus près du prélève-
ment, le débit de gaz se régule de lui-même
à partir d’une certaine différence de pression
de part et d’autre de l’orifice. A cela s’ajoute
la vitesse accrue du gaz dans la canalisation,
de l’ordre d’un facteur 10 à 20, et de la ré-
duction relative des volumes, d’un facteur
20 à une pression de 50 mbar.
Ce phénomène a une incidence sur le point
de rosée dans le gaz analysé : si l’échantillon
contient 10 % d’eau à une pression de 1 bar,
il n’en contient plus que vingt fois moins à
50 bar. La réduction du point de rosée joue
un rôle capital au niveau de l’appareillage
associé à un analyseur reposant sur la techni-
que OFCEAS. Il est en effet possible de s’af-
franchir du chauffage de la ligne d’échan-
tillonnage et de la cellule de mesure. Les
autres techniques imposent la mise en œuvre
d’un système de chauffage afin d’enlever
l’eau éventuellement présente dans les échan-
tillons de gaz ; il faut éviter sa condensation
dans les canalisations en raison de la diffé-
rence de température entre le point de pré-
lèvement et le lieu où se trouve l’analyseur.
Au niveau du prélèvement, cette fois, comme
le débit à l’intérieur de la ligne d’échan-
tillonnage est de l’ordre de 3 à 6 l/h, au lieu
de 120 l/h maximum pour une solution
extractive, la cinétique des poussières se
trouvant dans l’environnement à contrôler
est différente et une filtration tangentielle
peut ainsi se créer. Le débit n’est en effet pas
suffisamment puissant pour aspirer les pous-
sières. Les risques d’encrassement ne sont
alors plus un souci. Pour l’industriel, il s’agit
de réduire significativement le coût de la
ligne d’échantillonnage (100 euros par
mètre environ au lieu de 300 pour une ligne
chauffée) et de garantir des conditions de
sécurité conformes aux exigences des envi-
ronnements explosifs.
Cédric Lardière
Avec la collaboration de Lucien Lonigro,
directeur R&D d’AP2E
(1) La technologie OFCEAS fait l’objet du brevet
WO03031949.
(2) Avec la technologie CRDS, le cheminement
du faisceau laser ressemble plus à un anneau et non
à des réflexions comme en spectroscopie traditionnelle.
(3) « Rien ne se perd, rien ne se crée, tout
se transforme », selon Antoine Lavoisier.
(4) La loi des gaz parfaits est : PV = nRT,
où P est la pression du gaz, V le volume occupé
par le gaz, n la quantité de matière, N le nombre
de particules, R la constante universelle des gaz parfaits
et T la température absolue.
➜
Les analyseurs LaserCEM (suivi continu des émissions de gaz) et ProCeas
(pour les procédés industriels) développés par AP2E bénéficient des atouts
de la technologie OFCEAS.
En plus de la sélection de la longueur d’onde pour un gaz donné, via la température T du laser
(réglage grossier), un réglage fin permet de jouer sur le courant du laser pour mesurer le gaz,
et de générer un balayage continu via une rampe de courant à différentes températures.
Les spectres d’absorption obtenus avec la méthode OFCEAS contiennent à la fois
la référence (I0) et l’intensité du faisceau absorbé par le gaz (I), ce qui permet un accès simple
et simultané aux deux informations.
En travaillant à de basses pressions, les raies spectrales du gaz mesuré s’affinent, passant d’une forme plutôt patatoïde
à 800 mbar à des pics étroits à 100 mbar, ce qui accroît la résolution spectrale.
AP2E
Réglages grossier et fin Des mesures absolues
Effet de la basse pression sur les raies
λ (nm)
UA