aux militants du groupe bolchévik - ARS

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Paris, le 27 décembre 2011
AUX MILITANTS DU GROUPE BOLCHÉVIK
Camarades du Groupe Bolchévik,
Nous faisons suite à votre lettre du 12 juillet qui nous oblige à un bien laborieux travail de rectification.
Mais notre réponse à vos accusations mensongères et outrageantes à l’encontre de notre organisation et de nos
membres témoignera de notre volonté très ferme d’épuiser absolument toute les possibilités pour coordonner les
différents groupes révolutionnaires de France et de l’étranger, pour construire le nouveau cadre qui peut permettre
l’intervention des révolutionnaires en front, dans le mouvement de la lutte des classes.
NOTRE POINT DE DÉPART ET LA QUESTION DE LA FUSION
Camarades,
Quel a été le point de départ de notre prise de contact ?
Le point de départ a été l’ “Appel à l’organisation” que nous vous avons envoyé en introduction au Programme
d’Action adopté par notre congrès extraordinaire des 6 et 7 septembre 2009.
Vous avez répondu à cet appel par votre réponse du 18 avril de l’année suivante qui nous proposait “de partir non
d’un texte franco-français, mais des documents internationaux de l’organisation communiste Collectif révolution
permanente...”.
Le 5 juin, notre nouvelle lettre signée du CC de l’ARS-COMBAT vous faisait part de notre satisfaction à la réception
de votre courrier. Cette dernière lettre valait acceptation pour juger les positions du Collectif révolution permanente
sur la base des trois textes présentées par vous , “Le Manifeste pour les États-Unis socialistes d’Europe de 2005”,
“l’adresse du 1er mai 2009”, “la résolution Palestine”. Et par notre lettre, nous vous demandions également de juger
nos positions “sur la base du programme adopté en septembre dernier à notre dernier congrès et des brochures qui
se trouvent à votre disposition”.
Car lorsque plusieurs organisations engagent la discussion ensemble, il coule sous le sens que chacune des
parties s’intéresse au matériel, orientations et interventions des autres parties et que le matériel pris pour base de la
discussion n’est pas limité au matériel de l’une des parties seulement.
Camarades, la méthode pour conduire la discussion était déjà très mauvaise quand vous vouliez écarter d’office du
débat commun, nos textes, au nom de la dimension internationale de vos documents. Nous jugions que les
documents des deux organisations méritaient d’être discutés.
De là sans doute votre sentiment que l’ARS “n’a pas répondu véritablement” à votre proposition. Notre réponse
était pourtant on ne peut plus claire; 1/ nous étudions vos documents, 2/vous étudiez les nôtres, 3/ “dans l’attente
de nous réunir, donc, à la rentrée prochaine”.
Camarades,
il faut restituer avec exactitude le sens de nos engagements. Dans notre lettre du 5 juin 2010 -il aurait été de votre
part plus honnête de la placer à votre annexe- nous nous engagions d’abord seulement à mener la discussion avec
vous. Concernant la nature de nos rapports futurs, nous avons laissé la voie ouverte. Soit nous fusionnons nos
organisations, soit “si nous ne considérons pouvoir tolérer au sein d’une organisation commune les divergences que
nous accusons, alors nous devons répondre aux questions suivantes; pouvons-nous tirer partie de nos accords
pour faire avancer le mouvement de la lutte des classes ? Que pouvons-nous entreprendre en commun ? Quel
cadre serait le plus adéquat à la réalisation des objectifs que nous nous sommes fixés ? ”
Donc la fusion était -et reste- pour nous une possibilité, la plus grande d’intérêt, un objectif qui guide la ligne de
conduite dans les rapports de groupes révolutionnaires séparées, mais la fusion de nos organisations n’a rien d’un
passage obligé. Et nous qui suivons la vie de votre groupe depuis plus de 10 ans n’avons pas le moindre intérêt à
entretenir vous concernant, de vaine illusions auprès de notre milieu sympathisant.
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D’UN RENDEZ-VOUS MANQUÉS À LA RÉUNION DU 3 AVRIL
Comme bien compris, nous devions nous retrouver en réunion à la rentrée d’octobre-novembre 2010. La lettre du
GB du 21 novembre demandait une réunion des militants des deux groupes.
Mais pour nous, il était inconcevable de faire monter de province l’ensemble de nos camarades pour un premier
rendez-vous avec le GB. Et c’est la raison pour laquelle nous avons rappelé aux militants du GB, par téléphone,
qu’il serait plus approprié d’organiser une première rencontre avec un ou deux délégués pour chacun des groupes.
Et il nous semblait effectivement facile d’organiser une première rencontre de ce type sur la région parisienne. Car
l’une et l’autre organisation comptent en région parisienne des militants qualifiés.
Le projet d’une réunion de l’ensemble des militants a été écarté, mais le GB à décliné nos propositions d’un premier
rendez-vous, à brève échéance, avec un ou deux de leurs militants mandatés. Dont acte. C’est donc seulement
début janvier qu’une première date de rendez-vous a été fixé par vous. Un camarade a été délégué par son
organisation pour cette première rencontre. Mais retenu au travail, notre délégué est arrivé avec presque une demiheure de retard sur l’heure dite. Car le “révolutionnaire” de militant ne rime pas toujours avec “fonctionnaire” de
l’éducation nationale qui travaille à heure fixe. Et nous nous serions passé de ce jeu de mot si nous n’avions pas à
nous défendre des doutes que vous exprimez sur le “caractère prolétarien” de notre groupe, au regard de notre
“désinvolture” !
“Personne n’est venu de l’ARS, sans prévenir” ? Non, le camarade est venu, bien qu’avec du retard. Le camarade a
téléphoné à l’un et à l’autre qui s’étaient déplacé pour le GB. La femme du premier a répondu sur un numéro de fixe
sans pouvoir indiquer au camarade comment joindre le mari alors que le second n’avait pas entendu son portable
sonné. Quand notre délégué a pu joindre finalement ce dernier, les deux camarades GB étaient déjà en transport.
Mais dira t’on qu’il faut juger la motivation des militants du GB à l’aune de la patience dont sa délégation a su faire
preuve ?
Si vous devez juger la motivation de notre organisation en faveur du front unique ouvrier et du front des
révolutionnaires, si vous voulez juger la motivation de nos camarades à vous sortir de votre trou, vous le pouvez
faire en jugeant l’incroyable fair-play de nos deux délégués à la réunion du 3 avril.
Car avec une idée moins haute de leur engagement partisan et de leur devoir envers la cause du socialisme, les
propos, en introduction, d’un de vos membres auraient entièrement justifié que nos délégués quittent sur le
champ la table de réunion.
Car si effectivement, notre “organisation ne vaut rien”, “ce que nous faisons, c’est nul”, “c’est de la merde” et si
“nous ne sommes pas communistes”, à quoi bon mener la discussion, à quoi bon chercher un terrain d’entente
ensemble ?! A quoi bon toute la simagrée autour de la fusion ?! Et à quoi bon votre trotskysme ?! A quoi bon votre
si chère politique de front unique ouvrier ?!
Car nous voulons croire que vos capacités de discernement ne vous font pas complètement défaut. Nous voulons
croire aussi que votre attitude à notre égard est à mettre sur le compte d’un lourd héritage, celui de vieilles
organisations et partis au sein desquelles vous militiez, où le trotskysme n’était plus qu’un dogme mort mais où la
praxis de leurs membres était toute dominée par le monolithisme, l’esprit de secte, les procédés bureaucratiques, et
la violence dans les rapports militants.
BASSE MANŒUVRE ET QUESTION DE MÉTHODE
Nos chers camarades, comme les vulgaires manœuvres que vous dirigez contre nous sont cohérentes avec le côté
faible de vos orientations !
Comme à notre connaissance tous les groupes issus du lambertisme, vous êtes obnubilés par la trahison des
directions des organisations ouvrières, par la trahison des réformistes, des staliniens, des pablistes, et des multiples
têtes syndicales. Comme si la crise subjective du mouvement ouvrier à la fin du XXème siècle et en ce début de
XXI siècle se résumait aux seuls complots des directions traîtres contre la classe ouvrière ! Et comme si les
directions politiques des partis et des syndicats étaient radicalement coupés de leurs bases militantes et sociales.
Quand vous expliquez l’ensemble des échecs des luttes passées et présentes par les seules trahisons des
directions, des staliniens, réformistes et bureaucraties, vous ne rejetez pas la “responsabilité des défaites“ sur le
prolétariat, soit, mais vous troquez l’analyse marxiste, matérialiste, dialectique, pluridimensionnelle, dynamique par
la manie complotiste, une conception policière de l’histoire.
Ce défaut est très grave pour une organisation communiste, puisque, inapte à livrer à l’avant garde les armes
conceptuelles pour une intervention efficace, elle se prive mécaniquement de tout rôle possible dans la direction du
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mouvement des exploités. Ainsi le travail autour du projet politique de transformation socialiste, le travail pour une
intervention politique vers les masses par exemple, est troqué par la répétition, dans des cercles fermés, d’une
même rengaine hystérique contre des directions fétiches.
Mais quand vous calquez votre grille d’analyse erronée à notre propre groupe, alors la vulgarité de vos sentiments
surpasse la bêtise ! Pensez-vous vraiment isoler Kléber des autres camarades de notre organisation, en le
chargeant nommément des différents textes, lettres, articles et communiqués signés de l’ARS-COMBAT, de son
Comité Central ou non signés et qui sont l’objet de vos attaques ridicules ? Pensez-vous vraiment rallier les
militants de l’ARS-COMBAT contre notre CC, “une direction qui fait des phrases sur la révolution mais protège en
pratique les appareils contre-révolutionnaires du mouvement ouvrier”, “tend inéluctablement au réformisme” (...), et
“court le risque de passer au fascisme” ?!
Vous allez vraiment loin, vraiment très loin, trop trop loin.
Vous êtes particulièrement intéressé à réunir en commun nos militants. Comprenez d’abord que notre organisation
ne compte pas d’un côté des “nigauds sans cervelle” et “adeptes “du culte du chef” et de l’autre, votre « gourou » !
Nous sommes une organisation centralisée et démocratique, avec sa direction élue et responsable devant les
membres militants de l’ARS-COMBAT. La ligne que nous développons est le fruit d’une expérience de lutte
collective, le fruit de l’activité et de la réflexion de l’ensemble des membres de notre organisation. Comprenez
ensuite que les délégués qui sont vos interlocuteurs sont les représentants pour vous de l’ARS-COMBAT.
Camarades, vous vous étonnez que votre projet de déclaration internationale pour le 1er mai soit resté sans suite.
Un peu de sérieux! Vous nous avez communiqué ce projet la veille pour le lendemain. Comment aurions-nous pu
trouver le temps de seulement en discuter?!
Car voyez-vous, les militants de notre “secte” dirigée par un “mégalomane” aux “révélations en dehors du domaine
de la réalité” prennent encore le temps de la discussion pour trancher les questions par la voie démocratique !
Notre lettre du 14 janvier trouve une réponse le 12 juillet, vous vous réservez donc 7 mois pour répondre à notre
contribution sur la question tunisienne ! Mais vous ne nous donnez par 24 heures pour décider de signer et
amender votre texte du 1er mai !
Mais en dehors de ce fait. Quand bien même vous nous auriez communiqué le projet un peu plus en avance et que
le projet nous était paru conforme, pourquoi auriez-vous voulu que nous l’eussions signé avant d’avoir pris le temps
d’une véritable discussion de fond autour de notre projet commun et alors même que notre premier rendez-vous
nous avait laissé, excusez-nous du peu, perplexe ?
Le travail de rapprochement entre des groupes révolutionnaires n’est pas pour nous un principe abstrait auquel
nous devrions nous conformer à la lettre. Une déclaration signée en commun ne vaut rien avant que nous ne nous
soyons entendu sur l’esprit de notre travail commun.
Une telle déclaration signé du nom de nos deux organisations trouve son véritable sens dans le cadre d’une
dynamique globale, comme manifestation publique particulière d’un travail ensemble et authentique. D’abord la
discussion, la création de rapports de confiance mutuels et ensuite, dans un second temps, l’action. Il faut procéder
par ordre.
Et nous disons bien ! Car quelle valeur aurait eu, autant pour vous que pour nous, cette déclaration signée en
commun au regard des insanités que vous nous professez dans votre lettre du 12 juillet ?!
Comment auriez-vous pu justifier la signature d’une déclaration commune avec notre organisation qui à vous croire,
n’est pas sorti “de la secte, du sous-stalinisme et du national socialisme” ?!
Donc notre “silence” du 1er mai ne confirme en rien notre lettre du 14 janvier qui avait, contrairement à vos dires,
pour exacte fonction de relever les divergences et imprécisions dans le cadre de l’élaboration d’une position
commune sur la Tunisie. Mais à contrario, avec la faiblesse dont souffrent nos rapports, cette lettre du 12 juillet
confirme que nous avons bien fait de ne pas nous précipiter et de ne rien signer avec vous autres.
DOUBLE LANGAGE ?
Au sujet de la question tunisienne, vous nous accusez de tenir un double langage, avec d’un côté une critique sur la
gauche de votre proposition de déclaration commune autour des événements tunisiens et algériens et de l’autre
d’épouser “une formule proche de celles des parti ouvriers bourgeois (PCF, PG, PS)”, autour d’un “vrai régime de
liberté”.
L’accusation est risible. Car en s’en tenant strictement à cette courte brève du 18 janvier, notre “vrai régime de
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liberté” est lié très clairement à la perspective pour “la classe ouvrière tunisienne, alliée aux autres couches du
peuple”, de “saisir le moment pour constituer son propre gouvernement, débarrasser définitivement le pays du
pillage des millionnaires…”.
Pour celui qui veut bien comprendre ce qu’il lit, notre “vrai régime de liberté” est donc le régime d’un gouvernement
de la classe ouvrière qui se débarrasse de ses millionnaires et qui engage naturellement le pays dans la voie du
socialisme. Quel est le moindre rapport entre nos orientations et celles défendues par le Parti Socialiste ?
Dans votre proposition de déclaration commune, vous posiez la question de la “défense de la jeunesse” et de la
“dissolution des corps de répression”. Nous vous répondions qu’il était nécessaire, puisque la question de la
défense du mouvement est traité dans la déclaration, de préciser évidemment quels corps de répression nous
voulions dissoudre et d’annoncer la nécessité “ de l’organisation de milices ou comités de défense armés”. Car
poser la question de la dissolution des corps de répression, en général, ou des corps de répression de l’Etat
bourgeois sans poser en même temps la question de l’armement des travailleurs, c’est prêter le flanc aux idéologies
pacifistes.
Mais camarades, nous ne sommes pas de ces monomaniaques du trotskysme qui considèrent qu’on touche la
trahison dès lors que les mots magiques du rituel transitoire ne sont pas prononcés, dans chaque article, chaque
tract, chaque communiqué, chaque intervention publique. Ne vous étonnez donc pas si vous ne trouvez pas
systématiquement les mots d’ordre d’armement des travailleurs et de milices ouvrières dans nos textes! Ce choix
ne tient pas du double langage camarades ! Seulement, surenchérir avec les sectaires en répétant hors propos les
mots d’ordre révolutionnaires, cela n’est pour nous d’un quelconque intérêt.
À l’article du n°55 de COMBAT titré “Ben Ali a dégagé, pas les 40 voleurs. Rien n’est gagné. Pain, Liberté, Dignité !”
nous faisions le choix de rappeler les faits qui valent parfois autant qu’une démonstration; “Les tunisiens se sont
déjà organisés en comité de quartiers et en comités de défense contre la police et les pilleurs” et de défendre l’idée
que “l’ensemble des richesses, tout le pouvoir doit revenir au peuple travailleur tunisien” en substituant “à la gestion
étatique actuelle la gestion du pays par leurs propres organisations, qui sont nées de la lutte elles-mêmes”.
Pour finir l’article, nous écrivions; “Quand toutes les couches du peuple sont mobilisées, que les dominants ne
peuvent plus diriger comme avant, l’heure est à la préparation de l’insurrection. C’est le prix à payer pour être libre”.
Camarades, nos critiques et orientations sont cohérentes. Vous ne trouverez pas trace d’un “double langage”. Par
contre, oui, des incurables peuvent nous accuser de varier notre registre dans la traduction et l’explication de notre
politique. Et dans ce cas, nous nous déclarons coupable.
LE PARTI EN CONSTRUCTION
“Comment un petit groupe” vous demandez-vous à notre propos, “déconnecté du réel, sans aucun lien
international, incapable d’analyser les développements mondiaux et nationaux, dont le journal a des titres
intemporels et interchangeables, va pouvoir contribuer à édifier un parti qui aura gagné la confiance de l’avant
garde du prolétariat, qui saura analyser les rapports entre les classe, qui développera la théorie, qui dialoguera
avec la classe ouvrière, qui gagnera la majorité quand éclatera une révolution et qui conduira l’insurrection au
moment décisif?” .
Vraiment, si notre organisation est la “grenouille qui se prend pour un bœuf”, alors le Groupe Bolchévik est « l’âne
vêtu de la peau du lion » ! Mais d’où parlez-vous messieurs madame du Groupe Bolchévik ?!
Nous sommes une équipe militante encore bien réduite alors que les tâches des révolutionnaires sont immenses et
que les conditions du moment nous pressent de renforcer une avant garde révolutionnaire éprouvée.
Mais si vous portez un jugement si détestable sur notre organisation qui “joue au parti”, c’est bien moins en vertu
des “ordres” que nous donnerions “en permanence à la classe ouvrière”, bien moins en vertu notre exaltation “en
dehors de la réalité” ou de notre “délire” et autres divagations qu’en vertu de l’orientation qui est la nôtre et qui
contraste radicalement avec votre propre praxis militante.
L’ARS-COMBAT est une petite organisation. Mais contrairement à toutes les sectes qui réduisent leur activité
publique à quelques ambassades dans les manifestations et les meetings des partis adverses, nous nous
construisons comme parti, sur une ligne de masse.
Pour nous, la condition à la survie d’une fraction trotskyste dans le mouvement ouvrier est inexorablement liée à
notre capacité d’intervention dans le mouvement réel. Prendre l’initiative dans les luttes, partielles ou générales,
sans subordonner notre action au desiderata des directions “traîtres” , suivre notre propre ligne d’action en
cohérence avec notre stratégie générale, compter sur nos propres ressources et celles qui se dégagent de l’action
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ouvrière dans le cadre des mobilisations, prendre l’initiative à chaque fois que possible pour présenter une direction
réelle et vivante aux travailleurs, voilà notre politique.
Cette intervention dans le cadre syndical ou en dehors du cadre syndical, pour former des doubles pouvoir via des
assemblées générales et des comités d’action et de défense, avec notre travail d’agitation “en permanence” et notre
travail de propagande “en permanence” représentent pour nous la seule façon de passer de la petite organisation
que nous sommes au parti d’influence que nous devons devenir.
Afin de gagner de nouveaux éléments à la politique révolutionnaire, accroître l’influence de nos idées sur une
fraction significative de la population, former nos nouveaux membres, éveillés et engagés au service de leur
classe, nous disons; le groupe des révolutionnaires, aussi faible soit-il doit diriger son intervention, en priorité, vers
le prolétariat.
C’est aussi dans ce sens que nous partageons la conception de Lénine sur la construction du parti révolutionnaire,
d’abord vers le prolétariat, ensuite vers les autres couches du peuple.
Donc l’organisation doit s’outiller pour ce type d’intervention, avec le matériel approprié, avec le discours et les mots
d’ordre appropriés. Et c’est le retour sur ces interventions et expériences qui nous font grandir et nous aident à agir
avec une meilleure efficacité et à encore affiner notre ligne.
Voilà la manière dont nous nous connectons au réel, voilà sur quelle base, avec les acquis de notre expérience et
des démonstrations concrètes, nous pouvons lier de nouveaux rapports avec des organisations révolutionnaires
étrangères. Voilà comment nous pouvons édifier le parti qui ne peut pas ressembler à un vieux cercle
internationaliste critique isolé internationalement de la classe ouvrière. Voilà comment nous approprier le terrain sur
lequel nous élargissons notre culture théorique. Voilà comment nous pouvons former ce parti nécessaire à la
conduite de l’insurrection.
Le Groupe Bolchévik avec bien d’autres groupes issus du lambertisme ont opté pour cette haute politique faite de
déclarations papiers contre les directions traîtres, à l’attention des militants d’extrême-gauche des secteurs du
public et des syndicats de professeurs.
Mais la politique des révolutionnaires est faite d’abord et avant tout d’une intervention des militants en entreprise et
dans les quartiers populaires où ils diffusent leurs tracts et journaux, placardent leurs affiches, organisent des
réunions publiques, constituent de nouvelles sections syndicales là où elles n’existent pas, forment des cellules
“rouge” pour avancer des perspectives alternatives aux directions libérales du mouvement syndicale, participent en
leaders à la guérilla syndicale, dirigent les grèves et les différentes actions de défense ouvrière.
Non camarades, il ne s’agit pas là de jouer au parti. Il s’agit d’agir en parti, d’assumer son rôle politique dans le
mouvement d’ensemble, il s’agit de prendre ses responsabilités, non comme le flanc gauche critique et impuissant
des appareils syndicaux, mais comme fraction révolutionnaire dans le mouvement. Notre ambition camarades, ne
se confond pas avec la fonction de l’âne porteur des reliques cramoisies des dogmes du Lambert enterré.
Camarades, nous sommes une organisation militante. Et c’est notre travail militant, notre travail de terrain, notre
travail auprès de nos pairs, de nos collègues, nos frères et sœurs de classe en souffrance et en recherche
d’arguments et de perspectives positives que nous avons appris à dialoguer. C’est cette méthode de travail qui
justifie pour nous la rédaction de notre premier programme d’action en 2002 puis de notre deuxième et nouveau
programme d’action en 2009 que vous n’avez pas jugé utile d’étudier sérieusement .
Notre programme représente pourtant une mémoire et une expérience concentrée, de notre propre activité qui
s’ajoute à celle de nos prédécesseurs du mouvement communiste en général et du mouvement trotskyste en
particulier. Il reflète notre engagement dans la lutte des classes comme représentant de la perspective communiste.
Et dans ce sens, camarades, nous ne jouons pas au parti, nous sommes déjà un parti !
LA FRACTION SYNDICALE ROUGE
“Où est la fraction syndicale rouge de l’ARS ?” vous demandez-vous. La fraction syndicale rouge, comme
organisation structurée au niveau national et international reste à construire. Et dans les circonstances présentes,
nous en sommes très loin. Mais l’engagement pour une fraction syndicale rouge est dès maintenant une exigence
pour les révolutionnaires qui veulent intervenir avec succès dans leurs syndicats afin, justement, de marginaliser
les représentants loyaux à notre République bourgeoise. Nul n’est besoin de disposer de ce formidable instrument
organisationnel, dans le mouvement syndical, pour, dès à présent, travailler à la construction de cette fraction, pour
faire de la propagande autour de cette perspective, pour diriger notre travail syndical, avec nos forces et selon les
circonstances présentes, selon une orientation combative, lutte de classe, socialiste, révolutionnaire.
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Cette Fraction rouge dans le mouvement syndical, nous la représentons déjà dans nos syndicats, et auprès de nos
collègues de travail. Car les mots d’ordre de notre programme, nos mots d’ordre de contrôle salarié sur les
embauches, l’organisation du travail et la production, le mot d’ordre stratégique d’un pouvoir travailleur, d’une prise
de possession commune des moyens de production et d’échange, nous les traduisons déjà dans le langage de
l’action immédiate. Nous ne repoussons pas à plus tard la bataille politique dans nos syndicats en faveur du projet
de transformation socialiste. Nous faisons de notre projet politique une actualité syndicale. Notre politique syndicale
est une application de notre stratégie révolutionnaire. Les mots d’ordre que nous défendons dans notre agitation
syndicale quotidienne ne se confondent pas exactement avec les mots d’ordre propagandiste de notre programme
général. Mais les mots d’ordre de “gouvernement travailleur”, “gestion démocratique de la production”, “réduction
des écarts de revenu”, “embauche des chômeurs” se déclinent à une échelle réduite, compte tenu de la limitation du
cadre imposé par le niveau de développement de la lutte des classes dans le groupe, le secteur d’activité, le pays.
Mais quand par notre action, nous gagnons de nouvelles embauches dans notre entreprise, nous anticipons
localement sur le plan national d’embauche d’un gouvernement révolutionnaire. Quand nous obtenons la révocation
d’un cadre protégé qui impose à ses subalternes le soin de faire son propre travail, nous anticipons sur un nouveau
modèle de gestion ouvrière, dans l’entreprise, un modèle de gestion démocratique. Quand nous refusons
l’utilisation d’un produit toxique dans notre entreprise, nous anticipons encore sur le contrôle général et central des
travailleurs sur les processus de production. Et ainsi de suite.
Et dans les circonstances actuelles, lorsque nous organisons une campagne de syndicalisation en direction des
salariés d’un groupe d’entreprises, en nous appuyant sur nos camarades et nos sympathisants, nous faisons vivre
cette politique de fraction syndicale rouge contre la frilosité ou l’hostilité des bureaucrates flippés ou pourris.
Lorsque nous rappelons au souvenir de ses membres syndiqués, les statuts de leurs organisations afin de tenir des
congrès où seront voté des motions et élus les secrétaires, là aussi nous faisons la politique d’une fraction rouge
contre les pratiques bureaucratiques et autocratiques.
Toute notre intervention pour que nos organisations syndicales vivent, augmentent leur influence, grossissent leurs
sections, forment leurs adhérents, toute notre intervention pour remettre de l’ordre démocratique dans nos
syndicats contre les manipulations des corrompus et des bureaucrates, toute notre intervention pour former une
véritable conscience de classe chez les travailleurs, la conscience d’appartenir à un collectif solidaire, à une
communauté de vie et de destin dont les membres doivent s’organiser et batailler jusqu’à leur plus complète
libération, par le renversement des rapports d’exploitation, c’est cela la politique de fraction rouge que nous suivons.
Et dans le bouillonnement des luttes d’ensemble, la politique syndicale rouge, c’est encore l’utilisation de l’arme du
parti dans le syndicat et l’arme syndicale en dehors du syndicat, pour associer l’ensemble des collègues en
assemblées générales souveraines, coordonnées sur le plan sectoriel et national, et rendus capables d’adopter une
politique, de nommer et contrôler leurs propres représentants élus, mandatés et révocables, d’expérimenter in fine,
les règles de la démocratie socialiste.
En suivant la politique syndicale rouge, nous engageons ces multiples batailles dont chaque partie se grave dans le
vécu des participants et marquent les potentiels d’une révolution socialiste possible et victorieuse.
“Où est la “fraction rouge” syndicale” de l’ARS ?
Camarades, toutes nos actions, dans chaque lutte partielle, dans chaque mouvement d’ensemble, est une
application de notre politique syndicale rouge contre les appareils bureaucratiques des syndicats et leurs alliés
fidèles, dans l’extrême-gauche et contre nombre des gauchistes qui justifient leur attentisme par les futures
“trahisons des directions traîtres”.
La fraction syndicale rouge, c’est nous camarades ! Dès maintenant, la fraction syndicale rouge est formée de ces
camarades qui travaillent en soldat dans leurs entreprises et dans leurs syndicats, et qui savent suivre le fil
révolutionnaire.
LES TRACES DE NOTRE COMBAT CONTRE LES DIRECTIONS DE COLLABORATION DE
CLASSE
Camarades, c’est toute notre existence depuis 2001 qui témoigne de notre combat “contre les directions de
collaboration de classe” et contre leurs sbires. C’est toute notre orientation politique, c’est toute notre ligne
interventionniste dans la lutte des classes, par nos campagnes d’agitation et d’extension des luttes, pour la
constitution de comités d’action et de groupes de défense, pour l’organisation centralisée démocratique des
travailleurs mobilisés qui a signifié la lutte et la confrontation contre les décideurs gestionnaires des appareils
syndicaux, leurs services d’ordre et leurs multiples obligés.
“Il n’y a aucun exemple dans la presse de l’ARS du moindre combat contre les directions de collaboration de
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classe” affirmez-vous ?! Vraiment ? Mais avez-vous seulement pris la peine de lire COMBAT ? Car en limitant
votre recherche aux COMBAT publiés après notre congrès de 2008, sur quelles articles auriez-vous pu tomber ?
Vous auriez pu tomber sur un de nos articles du numéros 43 de l’été 2008, dans le n°43, titré “A bas la casse des
35 heures” où il était question des “appareils bureaucratiques des syndicats “ qui “voudront encore et toujours
éviter la résistance globale, en isolant les thèmes de mobilisation, en isolant les uns des autres les différents
secteurs en lutte. “ et qui annonçait que “avec ou sans les discutailleurs de nos syndicats, nous préparerons la
grève générale, le blocage de toute l’économie, le blocage de toute la machine à faire du profit !”
Vous auriez pu tomber sur un de nos articles du numéro 45 de l’hiver 2008-2009 titré “Syndicalisme de classe !”.
Nous y expliquions qu’il était “imparfait de mener la lutte contre les directions syndicales en restant sur le terrain de
l’économique et du syndicalisme d’entreprise” , qu’il était nécessaire de “faire de la politique dans le syndicat”, qu’il
ne pouvait exister “un syndicalisme de masse et de classe sans intervention des militants révolutionnaires,
organisés à part, pour dresser les perspectives générales du mouvement et prendre la direction des luttes
économiques”; Nous y affirmions encore que “les communistes doivent s’organiser en organisation syndicale rouge
au sein des syndicats afin d’y faire triompher leurs vues contre le syndicalisme des perdants, des libéraux et des
jaunes !”
Vous auriez pu tomber sur l’article titré “Après le 29 janvier” du numéro suivant, celui du n°46 de février-mars 2009.
Nous y attaquions les “slogans des syndicats libéraux”, nous appelions à refuser la “fonction de masse manipulée
pour le compte du PS et de ses acolytes” tout en rappelant que les manifestations pacifiques ne pouvaient inspirer
“la crainte au gouvernement et au chef de l’État”. Dans le même numéro du journal, vous auriez encore pu lire
l’article titré “Grève du 19 mars, mobilisons en masse” où nous appelions à faire la démonstration que la journée du
19 mars amorce un grand mouvement des travailleurs “qui se fiche bien des conventions et du dialogue social et
démocratique entre les directions syndicales et le gouvernement”.
Au numéro 47 d’avril-mai 2009, vous auriez pu tomber sur notre article “Après la journée du 19 mars, rien est
terminé”. Nous y expliquions que les “directions syndicales ne sont pas pressées par la crise capitaliste, les plans
de licenciement en cascade, les salaires au lance-pierres”. Nous y expliquions qu’il était nécessaire d’organiser
“une suite rapide à la journée du 19 mars”, et que la classe salariée démontre qu’elle n’était pas “rassemblée
derrière des conciliateurs, derrière ses chefs syndicaux actuels qui travaillent à émousser la révolte, à détourner la
mobilisation de la lutte politique contre le gouvernement, et contre la société d’exploitation toute entière.” Nous
appelions toujours à ce que les “grandes manifestations unitaires” deviennent des premiers points de ralliement
pour annoncer a perspective d’une grève générale “.
Vous auriez pu lire encore “Notre tâche à nous ! ” de ce numéro 47. “Sur quelles forces pouvons-nous compter pour
développer un mouvement de grève générale ?” commencions-nous par demander. “Sur les porte-paroles
syndicaux, les grandes centrales syndicales réformistes? NON ! Les Chérèque, Mailly et les Thibaut ? NON !”. Et de
répondre : “Les bureaucraties sont conservatrices ! Elles jettent un œil mauvais sur la radicalisation du mouvement.
Elles craignent de perdre leur rôle d’interlocuteur privilégié entre le gouvernement patronal et les salariés. Les
directions bureaucratiques de nos syndicats ne veulent pas être trop dérangées dans leurs activités routinières.
Elles veulent la paix !”
Si vous considériez trop incomplètes ces références qui expliquent notre politique syndicale, alors camarades,
nous vous invitons à vous reporter à l’article “49ème Congrès CGT” du n°49 d’automne 2009, à l’article “Syndicat,
pour une indépendance de classe” du n°50 de l’hiver 2009-2010, aux articles “De la défaite à la victoire” et “Tous au
syndicat” du n°54 de novembre-décembre 2010, à l’article “Pour une stratégie syndicale rouge” du n°55 de février
2011 et encore à notre article “Mardi 11 octobre, mobilisation nationale” de notre dernier numéros de rentrée, le
n°57.
C’en est assez.
POINTS DE PASSAGE
Quand nous traitons de la question de la défense du mouvement en Tunisie, notre lettre “délire”.
Mais si vous n’avez pas bien compris le passage traitant la question de la grève générale et de l’insurrection dans
notre réponse à votre proposition de déclaration commune, reprenons.
Pour nous, le mot d’ordre de “grève générale” n’est pas approprié quand nous devons répondre à la question;
défendre la jeunesse et les travailleurs mobilisés contre les forces de répression bourgeoise. Car nous ne pensons
effectivement pas “qu’en répétant des formules magiques”, nous pouvons arriver à “ensorceler” l’ennemi et lui faire
perde les moyens humains et matériels pour réprimer la population révoltée.
La défense du mouvement appelle l’organisation militaire du mouvement. Quand la question de la défense du
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mouvement est posée dans la lutte, elle était posé en Tunisie, comme en Égypte, en Syrie et en Libye, les
révolutionnaires ne répondent pas par l’appel à la grève générale ! Les révolutionnaires appellent à l’armement des
travailleurs. C’est dans ces circonstances que les révolutionnaires troquent la propagande pour la révolution par
l’agitation et l’organisation autour des mots d’ordre d’armement, de milice et comités de défense.
Il n’y a aucun “délire” dans nos propos mais seulement notre souci d’apporter une réponse appropriée à une
nécessité objective. Et nous avons tellement raison qu’en Tunisie, la population n’a attendu aucun des ordres de
ses organisations d’avant garde pour constituer ses premiers comités de défense et tenter de se protéger de la
répression et des pillages. La nécessité fait loi.
Si le parti reste à construire, le parti n’est pas un objectif placé en dehors de la réalité ! Nous ne sommes pas dans
le néant organisationnel avant de passer, par nous ne savons quelle grâce divine, au parti ! Le grand parti mondial
de la révolution n’a pas encore d’existence en tant que tel. Mais les embryons de ce parti existent, camarades, des
révolutionnaires à la conscience plus ou moins aiguisés se battent. Les réseaux et les cellules clandestines dont
nous parlons et qui sont nécessaires à la bonne conduite de l’insurrection révolutionnaire ne sont pas seulement
imaginées en véritables mégalomanes, par les militants révolutionnaires. Les révolutionnaires de tous les pays
multiplient déjà les tentatives encore peut-être maladroites, dans le sens de leur développement.
Camarades, votre réflexion est comme prisonnière d’un cadre où les points de passage entre le présent et le futur
sont absents. Camarades, nous devons penser la dynamique de l’action, croire dans le potentiel de notre
intervention dans la lutte des classes, quel que soit notre nombre. Quelles que soient les circonstances nous
devons prendre notre place. Nous sommes des militants, et avec Trotsky contre les étapistes, les sceptiques et les
sectaires.
Là il n’est pas question d’une grenouille qui se prend pour un bœuf, là il est question de militants qui ont la ferme
volonté de faire grandir l’organisation du prolétariat révolutionnaire et de trouver les réponses appropriées à la
situation. Si compte tenu du rapport de force, les chances de succès sont encore maigres, au moins les
révolutionnaires auront tracé, dans le vif de l’action, la voie à suivre pour les étapes ultérieures. Au moins les
révolutionnaires ne seront pas restés spectateurs critiques du mouvement en cours. Les révolutionnaires seront
intervenus en révolutionnaires. L’écarlate de leur drapeau sera resté vif pour devenir le signe de ralliement du futur.
LA CONSTRUCTION DU PARTI
Camarades, vous partagez, avec beaucoup d’autres groupes lambertistes et ultragauche une conception
parfaitement erronée de la construction du parti et des tâches des révolutionnaires. Nous lisons dans votre texte
qu’il suffirait que les groupes communistes constituent “un centre international qui permette la discussion et la
collaboration internationale pour résoudre la crise de direction du prolétariat”.
Vraiment, nous aimerions que votre théorie de la construction du parti soit fondée. Quelques voyages d’été pour
discuter entre internationalistes, quelques échanges de courrier pour rédiger un “programme marxiste”, quelques
déclarations signées en commun contre les “directions qui dupent les masses” et roule la musique !
Mais non. Cette conception de notre tâche centrale est erronée, radicalement erronée. Votre conception du parti et
de ses tâches est à la notre ce que peut être la conception idéaliste à une compréhension matérialiste et dialectique
des phénomènes.
Comment pouvez-vous concevoir la construction d’un centre international, la discussion et la collaboration
internationale et la crise de direction du prolétariat résolu en faisant l’économie du travail pour construire des
organisations révolutionnaires nationales sur une ligne d’ intervention de masse. Comment pensez-vous pouvoir
faire l’économie d’une intervention en parti dans la classe ouvrière, en menant la propagande et l’agitation dans le
prolétariat, en prenant l’initiative de l’organisation, en prenant la direction de la lutte, “jouer au parti” dites-vous ?!
Vous déconnectez la construction de l’organisation internationale de la construction de l’organisation nationale. De
notre côté, nous ne comprenons pas l’une sans l’autre.
La nation reste une cadre essentiel au développement de la lutte des classes. En France, nous ne parlons pas
l’américain ou le chinois à nos patrons, au Président de la République et à ses ministres. En France, la classe
ouvrière parle le français et en Allemagne l’allemand et en Grèce le grec. Et jusqu’à preuve du contraire, et quand
bien même les bourgeoisies nationales dominantes se sont dotées de puissantes institutions internationales, c’est
toujours les bourgeoisies nationales qui dirigent leur nation démocratique avec un gouvernement national, des
députés à des parlements nationaux et qui votent des lois qui sont exécutées dans le cadre national. Et chaque
clique politicienne nationale ponctionne dans le budget national de quoi subventionner les entreprises nationales
des copains, et chaque groupe financier a ses racines et protections nationales parmi les hauts fonctionnaires
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nationaux des États nationaux.
Ce n’est pas la négation du fait national qui fonde notre internationalisme. Intervenir en internationaliste prolétarien,
c’est intervenir dans le prolétariat. Et l’intervention dans le prolétariat oblige le militant sans patrie ni frontière à
parler un langage commun, acquérir une connaissance pointue de l’histoire, des valeurs, préjugés et psychologies
des différentes fractions nationales du prolétariat considéré comme classe mondiale, dans la défense de ses
intérêts. Il est nécessaire de reconnaître les faits !
Le capitalisme mondial contredit jusqu’à un certain point les identités nationales en intégrant les chaînes de
production nationale dans un procès socialisé à l’échelle internationale. Et c’est ainsi qu’aussitôt formées, les
identités nationales nous apparaissent déjà si rapidement dans leurs dimensions artificielles. Et c’est dans ce sens
que la cadre national des économies modernes est définitivement dépassé et que les puissances impérialistes,
protégées derrière leurs frontières d’argent, tendent à éclater les cadres nationaux et soumettre les peuples du
monde à leur “justice sans limite”.
Mais tant que les États nationaux n’ont pas laissé place à des formes supérieures d’organisation politique, le cadre
de la domination capitaliste reste toujours national. Et donc, le cadre du développement de la lutte des classes
s’inscrit toujours principalement dans le cadre des nations. L’échelle nationale est à l’échelle monde ce que la
chaîne de production est à l’usine, l’usine à l’entreprises et l’entreprise au groupe et le quartier à la commune, la
commune à la ville, la ville à la région, la région au pays...
Le parti se construit par le haut. Dans quel sens ? Dans le sens où l’organisation du prolétariat révolutionnaire tire
partie de l’expérience historique mondiale du prolétariat révolutionnaire, dans le sens où le programme marxiste
n’est pas le produit spontané de la lutte de chaque génération successive de travailleurs mais la mémoire et le
condensé de l’expérience de toute l’histoire de notre mouvement, dans le sens où notre organisation ne se borne
pas à la défense des intérêts particuliers de tel ou tel couche de travailleurs mais mène le combat au nom de la
défense des intérêts généraux du prolétariat, dans le sens où nous cherchons à lier par l’organisation et la lutte ses
différentes fractions, dans le sens où le parti se construit avec des militants professionnels ou semi-professionnels,
avec des camarades qui ne sont pas front contre terre, qui dispose du temps nécessaire pour mener à bien les
multiples et lourdes tâches quotidiennes qu’imposent la construction du parti. Voilà dans quel sens le parti se
construit par le haut.
Mais vous semblez l’ignorer tout à fait. Le parti se construit par le bas. Pour développer nos capacités
organisationnelles, les militants révolutionnaires doivent accroître leur influence, l’organisation doit accroître son
influence par un travail de terrain. Les rythmes de la construction du parti ne sont pas isolés du développement de
la lutte des classes lui-même, de l’avancement de la conscience socialiste parmi l’avant garde large du prolétariat,
de la puissance d’attraction du prolétariat révolutionnaire sur les autres couches opprimées et exploitées du peuple.
Et qui peut contribuer le mieux au développement de la lutte des classes, à l’avancement de la conscience
socialiste parmi l’avant garde large...si ce n’est les militants révolutionnaires justement ?! Et comment l’organisation
révolutionnaire pourrait-elle faire évoluer ses membres, augmenter ses effectifs, élargir son milieu sympathisant,
acquérir les compétences d’une véritable direction pour toute la classe du prolétariat national et mondial si elle ne
se résout pas à accroître son influence sur les larges couches travailleuses par son intervention de masse, si elle
ne concentre pas son intervention concrète sur les luttes d’entreprises et les luttes nationales de la population
salariée ?!
Déconnecté d’une intervention concrète, de l’intervention nationale, d’une ligne de masse, votre “construction d’un
centre international “ pour résoudre la crise de direction du prolétariat est un plan sur la comète. Avec ce type de
conception non dialectique de la construction du parti et des tâches des révolutionnaires, c’est le rôle de la direction
révolutionnaire actuelle dans le mouvement réel de la lutte des classes dont vous vous faites les négateurs.
Sur la base de cette conception fausse, votre “centre international” ne résoudrait en rien la crise de direction du
prolétariat. Nous aurions au contraire le regret d’intégrer votre “centre international” comme élément de la crise de
direction du prolétariat.
LA RESPONSABILITÉ DES APPAREILS RÉFORMISTES
Selon votre lettre, nous ferions “comme si les partis issus de la classe ouvrière, comme le PS et le PCF, n’existaient
pas, ne jouaient aucun rôle dans la vie politique du pays, dans les syndicats, les élections, les grèves, les
manifestations...” .
Sur quoi fondez-vous cette affirmation ? Nous l’ignorons. Notre analyse est pourtant diamétralement à l’opposé du
jugement que vous nous prêtez. Car la crise de direction du prolétariat se manifeste aujourd’hui justement dans la
mesure où le vieux PCF, les appareils réformistes et libéraux de nos syndicats et, plus marginalement, notre
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extrême-gauche bornée à une contestation négative « des patrons et du gouvernement », sont identifiés presque
seuls au mouvement ouvrier dans son ensemble, au communisme et à la révolution.
Et nous devons nous résoudre si résolument à reconnaître le rôle des directions libérales et réformistes dans le
mouvement salarié, que sans jouer aucunement au parti, nous avons, militants de l’ARS-COMBAT, la faiblesse de
participer aux journées d’action organisés par les syndicats existants, non “contre la grève générale”, mais
considérant ces journées d’action comme une étape transitoire possible vers un mouvement plus large et sur des
objectifs aboutis.
Effectivement, nous avons suffisamment conscience du rapport de force entre les syndicats et les partis pour ne
pas bouder les initiatives des “directions traîtresses” qui savent encore rallier derrière leurs revendications creuses
la masse des travailleurs organisés. Notre ligne d’action n’est donc pas d’aller “contre” les journées d’action au nom
de la grève générale et de nous marginaliser de l’écrasante majorité des syndiqués. Notre ligne d’action, c’est
d’aller avec les syndiqués, d’entraîner le maximum de collègues dans la bataille autour de nos propres mots d’ordre
transitoires et socialistes, en s’appuyant sur nos propres organisations autonomes, comités, assemblées, sections
syndicales et d’organisation et en annonçant les retournements possibles des appareils syndicaux avec leur
politique de négociation responsable. Notre ligne d’action, c’est de nous appuyer sur les journées d’action
auxquelles appellent les grandes centrales syndicales pour développer la lutte, jusqu’à une prise de contrôle salarié
de leur entreprise, et jusqu’à l’insurrection révolutionnaire. Notre ligne d’action, c’est toujours d’épuiser les
possibilités offertes par la situation suivant notre orientation stratégique.
“Le parti révolutionnaire doit être construit contre les directions traîtresses” nous dites-vous. C’est partiellement
faux.
Pourquoi ? Parce que cette idée fixe résonne encore chez vous comme l’illusion de regrouper derrière vous les
travailleurs sur la seule base d’une lutte d’en haut, contre les directions des appareils conservateurs, en faisant
l’économie de l’incontournable travail de masse.
Nous disons plutôt que le parti révolutionnaire doit être construit sur la base d’un travail de propagande
systématique en direction du prolétariat et des autres couches du peuple et qu’il doit développer ses capacités sur
la base d’un large travail d’agitation et d’organisation autour des mots d’ordre de son programme.
Engagé à défendre les intérêts du prolétariat jusqu’au bout, jusqu’à sa libération complète, le prolétariat
révolutionnaire est inévitablement condamné à batailler dans tous les domaines de la lutte contre les bureaucraties
syndicales et les politiciens réformistes. Et nous préparons nos rangs, à la fois aux confrontations ordinaires des
temps de paix qu’à celles des temps de guerre, pendant lesquels les révolutionnaires peuvent mener l’offensive, les
armes à la main, contre les faux amis du prolétariat, les corrompus et les lâches bureaucraties conservatrices qui
tenterons de retarder au maximum l’issu victorieuse de la révolution socialiste internationale.
Avec toujours la même rengaine idéaliste, vous fétichisez le rôle des directions et des appareils. Dans la
construction de votre organisation et la formation de votre direction internationale, vous faites abstraction du
mouvement de la lutte des classes et de vos capacités organisationnelles qui lui seraient liées si vous deviez vous
résoudre à une intervention de masse, et quand vous jugez encore le rôle des “directions traîtresses” des syndicats,
c’est en dehors de toute réalité, en dehors du niveau de conscience générale des couches syndiquées et de la
majorité inorganisée, c’est en dehors de la manière dont les syndiqués jugent leurs directions syndicales, les
travailleurs leurs délégués de boîte, les salariés des petites entreprises, les travailleurs isolés et indépendants le
mouvement syndical en général, en dehors de la manière dont les travailleurs et l’avant garde large jugent les idées
socialistes et communistes.
Mais camarades, une direction libérale d’un parti libéral qui prend des mesures libérales ne trahit en rien le
libéralisme de ses membres. Une direction réformatrice d’un syndicat réformateur qui soumet des propositions
réformatrices ne trahit en rien l’esprit réformateur de ses membres. Et ainsi quand Bernard Thibault exprime son
point de vu démocrate keynésien trahit-il peut-être la représentation que vous vous faisiez de la CGT, trahit-il
sûrement beaucoup de tendances qui veulent conserver l’instrument lutte des classes, combatif et socialiste, trahit-il
assurément les intérêts généraux du prolétariat. Mais en quoi trahit-il l’opinion politique de la majorité des membres
de la CGT qui sont encore les électeurs du Parti Socialiste de Dominique Strauss-Kahn et Martine Aubry ?
En rien du tout.
Camarades, la responsabilité des directions et des appareils s’arrête exactement là où la responsabilité des
travailleurs commence. En France, comme en Tunisie. Les travailleurs sont des gens tout à fait responsables et
notre tâche est de les responsabiliser du point de vue politique, du point de vue de leurs intérêts de classe, du point
de vu des intérêts de l’humanité toute entière. Ce n’est pas une mince affaire. Et la responsabilité des travailleurs
s’arrêtent encore là où débute la responsabilité des révolutionnaires et de leurs organisations.
Comme militants marxistes, nous pensons que la révolution socialiste est un objectif que le prolétariat atteint
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consciemment. Nous pensons que l’émancipation des travailleurs sera l’oeuvre des travailleurs eux-mêmes. Mais si
vous n’en êtes pas sûr, posez-vous la question autrement : si les travailleurs ne sont pas responsables de leur
défaite, à quoi peuvent bien ressembler les responsables de leur victoire ?
NOTRE RESPONSABILITÉ
Ce que nous savons, une autre chose dont nous sommes absolument certains, c’est que les militants
révolutionnaires portent une responsabilité, leur responsabilité individuelle et collective dans le développement et
l’issue de la lutte des classes.
D’expérience, les révolutions ont été bien plus souvent trahies par des révolutionnaires, et le socialisme par des
socialistes, le communisme par des communistes et le trotskysme par des trotskystes, et les militants par d’autres
militants que par aucune “direction traîtresse” !
Camarades, ne trahissez pas l’esprit de votre engagement ! Nous sommes fidèles au nôtre propre en élargissant et
en perfectionnant notre propagande socialiste, en armant le prolétariat de son programme de classe, en aidant nos
collègues à s’organiser et à mener les batailles victorieuses qui accroissent leurs capacités politiques, augmentent
leur pouvoir autonome dans la société d’exploitation et de subordination capitaliste.
Notre responsabilité comme organisation révolutionnaire, c’est de faire tout notre possible, d’exploiter le maximum
des ressources matérielles, physiques et intellectuelles dont nous disposons , d’utiliser le meilleur de nos qualités
humaines pour l’avancement du mouvement, le renversement du rapport de force politique entre les classes, le
changement dans les conditions objectives de la lutte.
Car s’il est vrai, que pour reprendre les mots de Léon Trotsky dans “Pourquoi Staline a vaincu l’opposition”, “le rôle
de la direction est très important”, que “sans direction juste, le prolétariat ne saurait vaincre”, “même la meilleure
des directions est incapable de provoquer la révolution si les conditions objectives ne sont pas réunies.” Et nous
jugeons après Trotsky l’excellence de la direction du prolétariat à sa capacité, compte tenu des moyens dont elle
dispose et des circonstances historiques particulières de l’époque, à peser justement sur ces conditions objectives,
à “réunir” les conditions objectives.
Après l’effondrement du bloc soviétique, la restauration capitaliste dans les premiers États dégénérés et autres
États déformés à la naissance, et avant cela après l’expérience des orientations politiques et économiques
catastrophiques et criminelles des bureaucraties staliniennes d’Europe, d’Asie et d’Afrique, le mouvement
communiste est sorti exsangue. Et quand nous parlons de mouvement communiste, nous intégrons l’ensemble des
tendances du communisme, de gauche, de droite, resté stalinien ou maoïste, trotskyste et libertaire et qui tous sont
bien incapables de clarifier leurs positions sur tant de points fondamentaux du programme !
Quels sont les partis qui savent donner les réponses convaincantes aux questions relatives à la prise du pouvoir
par les travailleurs, au problème de la bureaucratie, à celui de l’inégal développement de la révolution à
l’internationale et de ses conséquences pour les premiers États ouvriers. Quelle direction d’avant garde sait définir
les rythmes et les conditions de la socialisation de la propriété ou de la socialisation des coûts de satisfaction des
besoins... Et nous ne parlons pas de la manière dont les contradictions sociales et politiques peuvent être résolues
dans la période de transition socialiste, nous ne parlons pas des rapports entre les syndicats et les partis, le modèle
institutionnel d’une République socialiste, des différentes formes de propriété collectives et leur combinaison, nous
parlons encore moins des garanties au droit de propriété et d’usage pour les individus et les familles, de l’étendu
des libertés individuelles et démocratiques, au rôle économique de l’initiative privée et de la petite propriété dans la
société de transition, ou à la place des luttes revendicatives dans la formation des prix et des salaires...
La responsabilité première d’une direction communiste n’est rien d’autre que de restaurer la perspective socialiste
dans l’idéal du peuple exploité, d’enrayer au plus vite la crise de subjectivité de la classe ouvrière. Mais cette
possibilité exige que les groupes révolutionnaires comblent leur manque et corrigent leurs défauts sur les questions
théoriques qui sont les plus directement liées aux questions relatives à la politique du gouvernement révolutionnaire
dans la période de transition, au caractère de notre orientation socialiste, au sens de notre projet et à la définition
de “la possibilité”, de “la forme”, et du “contenu de ce que serait présentement un pouvoir politique des travailleurs”
pour reprendre les mots d’André Gorz.
Pour nous, ce sont bien ces réponses qui conditionnent pour une très large part notre succès à venir, qui
conditionne même, de façon obligatoire, notre succès dans les pays, les plus nombreux, qui ont assuré leur
transition industrielle. Les directions révolutionnaires doivent anticiper sur la prise du pouvoir pour apparaître
crédibles et rallier une fraction conséquente de la classe salariée. Sans les réponses les plus claires, le prolétariat
“ne sera pas encore assez mûr pour se libérer lui-même” et “considérera dans sa majorité le régime social existant
comme le seul possible”, ou bien considérera “le régime social existant”, après les premières tentatives avortées
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dans la douleur, comme le moins mauvais des systèmes, rajouterions-nous après la citation de Marx.
Pour que, “politiquement parlant”, le prolétariat forme autre chose que “ la queue de la classe capitaliste, son aile
gauche extrême” , il est incontournable que l’avant garde révolutionnaire et sa direction soit capable de formuler
dans toute sa clarté un véritable programme de transformation socialiste, et de formuler en même temps, ses
principes politiques, concernant la gestion économique et le règlement des conflits dans la société nouvelle pour
que les socialismes bureaucratiques et policiers ne puissent renaître des suites des erreurs commises ou des
conditions objectives difficiles.
Contre les caricaturistes, la direction du prolétariat n’a pas grand chose à voire avec une obscure cellule de
dirigeants éclairée à laquelle le prolétariat crédule remettrait le pouvoir sur sa destinée et celle de toute l’Humanité.
Par contre, ceux qui pourraient incarner une direction politique du prolétariat doivent sortir de leurs ombres pour
éclairer tant qu’ils le peuvent l’action des camarades et des collègues. Les militants doivent faire vivre le projet
socialiste dans la conscience des masses en défendant les idées et en traduisant ces idées en autant d’objectifs
intermédiaires qui engagent les travailleurs comme transformateurs de la société naissante.
Là est notre plus grande responsabilité qui s’oppose à toutes les variantes d’économisme et d’attentisme
dogmatique ou gauchiste !
JEUNESSE ET PEUPLE
Dans notre texte du 14 janvier qui faisait suite à votre proposition de déclaration commune, nous avions relevé avec
quel insistance vous vous référiez à la “jeunesse” et aux “jeunes”.
En haut de la déclaration, vous titriez “Les organisations ouvrières doivent appeler à la grève générale pour
protéger la jeunesse”. En titre de première partie, nous lisions “la révolte de la jeunesse et des travailleurs en
Tunisie et en Algérie” puis en titre de la deuxième partie “Pour la solidarité internationale avec la jeunesse de
Tunisie et d’Algérie”, puis encore dans le corps de la troisième partie de votre déclaration ; “les jeunes du Maroc”,
“manifester en défense de la jeunesse”, “le prolétariat et la jeunesse d’Algérie et de Tunisie”, “le prolétariat, les
femmes et la jeunesse”, “la liberté sexuelle des jeunes”...
Loin de nous l’idée de déprécier le rôle des nouvelles générations dans la lutte politique. Mais, clairement, il est
dangereux pour les révolutionnaires de confondre les différentes fractions sociales de la jeunesse. Les rôles des
jeunesses bourgeoises, petite-bourgeoises, ouvrières et sous-prolétarisées sont aussi différenciés que pour
n’importe quelle autre classe d’âge. A côté de la jeunesse révoltée contre l’autocratie de Ben Ali, la Tunisie comme
dans l’ensemble du monde capitaliste, compte une jeunesse dorée, dont les fonctions à la tête des entreprises et
des administrations sont réservées et qui ont eu le loisir de faire leurs études à l’étranger dans les écoles les plus
prestigieuses. Et à côté de la jeunesse engagée dans la lutte démocratique et ouvrière contre l’élite dirigeante
existe bien d’autres couches de “jeunes” qui agissent pour le compte de la réaction, dans le cadre des forces de
répression officielles du régime ou au sein de bandes chargées de piller et de semer le chaos.
Nous ne nous interdirons pas de nous adresser à l’ensemble de la jeunesse, comme à l’ensemble de la population,
car notre programme socialiste et le projet de société communiste qui nous guide représente une perspective
d’émancipation pour l’humanité toute entière. Et bien qu’avec une satisfaction très supérieure, la bourgeoisie vit
l’aliénation du règne de la marchandise comme les autres classes exploitées de la société.
Mais les phrases sur “protéger la jeunesse” et la solidarité “avec la jeunesse” sonnent trop creux pour ne pas
entretenir la confusion sur les alliés véritables du mouvement d’émancipation démocratique et socialiste, alors que
nous sommes dans l’épreuve de force et que la jeunesse est divisée, que les tâches de défense du mouvement
signifient aussi la défense armée contre les “jeunes” policiers et voyous dressés contre le mouvement populaire.
Donc il n’y a pas de jeunesse unie. Et ne nous faites pas dire ce que nous ne nous autorisons pas. Jamais nous
n’avons affirmé l'existence d’un “peuple unie” dans notre société divisée en classe.
En Tunisie, en Égypte ou en Libye, nous opposons les intérêts du peuple à des régimes qui oppriment l’ensemble
des libertés démocratiques, les libertés d’expression, d’organisation, de réunion, de culte, qui achètent les voix des
électeurs, truquent les élections, répriment et torturent les opposants politiques. Le peuple mobilisé pour les
libertés démocratiques porte non pas les aspirations d’une classe en particulier, mais les aspirations de l’ensemble
de la population opprimée par ces régimes policiers, y compris des fractions entières de la bourgeoisie. Et tant que
le mouvement porte les revendications démocratiques, le caractère dominant du mouvement est bourgeois. Car la
répression des libertés individuelles et démocratiques ne fait pas les bonnes affaires des couches de la bourgeoisie
qui ne sont pas directement liées au clan Ben Ali en Tunisie ou au clan Kadhafi en Libye. Pour que les oligarchies
prospèrent et assurent leurs positions dominantes, elles doivent se ménager des appuis sûrs dans la bourgeoisie et
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garantir un climat favorable aux affaires. Mais quand le business est monopole d’une famille et que les
contradictions dans la bourgeoisie elle-même sont étouffées, le mouvement démocratique se confond avec les
intérêts du peuple entier, avec les intérêts d’une fraction de la bourgeoisie compris.
Nous nous autorisons à employer “peuple” chaque fois que nécessaire, chaque fois que “peuple” fait sens avec nos
propositions. En Tunisie, la tâche des révolutionnaires est d’entraîner le peuple tout entier dans la lutte pour les
libertés démocratiques, pour des élections libres ou la convocation d’une assemblée constituante. Et dans le cadre
de la mobilisation du prolétariat, nous constituons les premiers comités et conseils ouvriers qui forment les
organisations de démocratie et de combat en vu de l’insurrection du peuple classe, l’insurrection des masses
populaires alliée et dirigée par le prolétariat révolutionnaire en vu de réaliser son programme de transformation
socialiste.
Et si en langue française le mot “jeunesse” n’a aucune connotation sociale, si “jeunesse” vise une catégorie d’âge
indistinctement du milieu social d’appartenance, ce n’est pas exactement le cas du terme “peuple”. Celui-ci peut
être employé comme synonyme de nation et communauté des citoyens. “Peuple” est par exemple utilisé dans ce
sens dans notre constitution qui, en rusant avec la signification populaire du mot “peuple », définit la République
par “le gouvernement du peuple, par le peuple et pour le peuple”.
Car “peuple” peut indiquer également les couches sociales inférieures de la société en opposition à ses couches
supérieures, aux plus fortunés. Voltaire définissait ainsi le mot peuple comme “la populace qui n’a que ses bras
pour vivre”, soit le synonyme exacte de notre “prolétariat”. En France, le mot “peuple” est très rarement compris,
dans le peuple, comme le synonyme de nation et jamais comme celui de “peuple race” , à l’image de certains
groupuscules d’extrême-droite.
Pour cette raison, l’utilisation de “peuple” peut trouver un intérêt pour nous, celui d’inclure, dans certains contextes,
les couches périphériques inférieures et supérieures au prolétariat dans le mouvement d’opposition à la bourgeoisie
et dans la lutte pour l’émancipation sociale des couches exploitées et opprimées de la société. Et pour nous bien
faire comprendre des couches auxquelles nous nous adressons, notre intervention de propagande et d’agitation
non seulement autorise mais exige de notre part, jusque dans certaines limites, des écarts par rapport au langage
rigoureusement scientifique que nous savons employer.
Ainsi, en fonction de nos interlocuteurs et des circonstances, nous combinerons les appels au peuple, aux
opprimés, au peuple travailleur et aux travailleurs, à la classe salariée, aux exploités, à la classe exploitée, au
prolétariat, aux prolétaires et au peuple prolétaire, à la classe des ouvriers et des employés, à la classe ouvrière...
Et nous utiliserons pour populariser la nécessité d’une “dictature du prolétariat” , suivant le contexte et le rapport
des différentes classes de la société entre elles, le mot d’ordre de “gouvernement ouvrier et paysan” qui est aussi le
vôtre, ou de pouvoir travailleur, d’Etat révolutionnaire, d’État socialiste, de République des conseils, de République
rouge, de gouvernement des travailleurs, de gouvernement salarié ou gouvernement révolutionnaire des
travailleurs, de gouvernement révolutionnaire socialiste.
Mais si camarades, vous nous aviez proposé de signer une déclaration où nous comptions une dizaine d’appel au
“peuple” et au “populaire” pour réaliser les différentes et successives tâches de la révolution, il ne faut pas douter
que nous aurions relevé la sérieuse faiblesse de votre déclaration...
MAIS OUI, REPARLONS DE LA GREVE GÉNÉRALE !
Inanité de vos attaques ! Surréalisme ! Où avez-vous bien pu trouvé l’ombre d’un fondement à ces déclamations
contre Kléber qui d’après vous aurait “décrété”, “que la classe ouvrière ne devait pas faire grève” et ne “devait pas
jeter toute sa force dans la bataille contre le régime” en Tunisie. Vos attaques sont pures et ridicules calomnies.
En guise d’illustration, vous êtes seulement capable de citer deux passages de notre lettre du 14 janvier. Mais là, il
est question du mot d’ordre de grève générale en rapport avec l’objectif précis de défense du mouvement et de ses
participants. Nous vous interrogions ; “ En quoi la grève générale peut protéger la jeunesse ?”. Puis nous
répondions : “ La grève générale, la paralysie de la production n’aidera en rien la protection du mouvement.” Sur la
base de ces deux citations, comment imaginez-vous nous convaincre de ces incroyables décrets de Kléber contre
la grève, contre la mobilisation de toutes les forces de la classe ouvrière contre le régime de Ben Ali ?!! Vous
imaginez-vous sérieusement nous convaincre de la trahison et du social-patriotisme de notre organisation en
assimilant notre critique de vos mots d’ordre à une “hostilité à la grève générale” qui est, expliquez-vous “depuis
1914, un signe sûr de la trahison et du social-patriotisme” !
Face aux offensives du pouvoir contre les acquis ouvriers, nous n’avons jamais hésité à mettre en avant, quand les
circonstances l’ont justifié, le mot d’ordre de grève générale, le mot d’ordre de ralliement de toute la classe salariée
au mouvement et à la lutte.
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Contre la réforme Fillon de 2003 qui préparait la nouvelle offensive de l’année dernière sur les retraites, nous avons
fait nôtre le mot d’ordre de grève générale, pendant le mouvement anti-CPE, nous avons fait encore l’agitation
autour du mot d’ordre de grève générale. Nous avons formé des délégations étudiantes et salariés en directions
des sièges des syndicats pour mettre au pied du mur les représentants syndicaux et nous avons appelé les
organisations syndicales et en particulier la CGT à “organiser la grève générale”. Et comme nous l’écrivions dans
un tract rédigé pour nos comités d’action de Jussieu et Montpellier que nous adressions aux directions syndicales;
“la grève générale ne se décrète pas, non, elle s’organise ! Messieurs, au travail!”.
Dans notre article du COMBAT 47 d’avril-mai 2009 “Après la journée du 19 mars” , nous opposions, sur un mode
propagandiste, aux manifestations “exutoires” la nécessité de faire de ces manifestations des points de ralliement
“pour annoncer la perspective d’une grève générale...”.
L’année dernière, alors que le mouvement contre la nouvelle réforme Fillon s’était bien préparé pendant tous les
mois d’été, nous rappelions la nécessité d’un mouvement de grève “soutenu jusqu’à la défaite complète du
gouvernement et de son Président”, nous rappelions la nécessité d’un “mouvement de grève général et total”. Mais
surtout, le contenu de l’article central de notre numéro de rentrée qui titrait “Faisons sauter le gouvernement !
Embauche des chômeurs, augmentation des salaires, expropriation des milliardaires” entendait donner un sens
révolutionnaire au mouvement de grève général en préparation. Pourquoi? Parce que nous avions parié avec
justesse sur le développement du mouvement de grève, sur des journées de “grève générale”, sur l’appel de
certaines centrales à la “grève générale”. L’enjeu était donc d’abord de donner des perspectives politiques à ce
mouvement revendicatif et défensif, de faire porter par le mouvement une alternative aux solutions du
gouvernement pour combler les déficits de nos caisses de retraite, alternative seule capable de convaincre les
salariés restés en arrière de s’engager à leur tour. A l’opposé des réformistes syndicalistes de gauche, nous avons
expliqué la nécessité et la potentialité révolutionnaire de notre mobilisation générale. Pour que notre mouvement ne
s’essouffle pas, pour que ses fractions les plus avancées ne se démobilisent pas avant d’avoir entraîné une
majorité dans l’épreuve de force, la répétition incantatoire de “grève générale” ne suffisait pas.
Et c’est la raison pour laquelle nous avons insisté pendant toute la durée du conflit sur la nécessité, non seulement
d’élargir la mobilisation aux secteurs restés en retrait, mais aussi, pour les travailleurs déjà engagés, de se
mobiliser dans leurs entreprises de façon permanente, et pas seulement en manifestation, pour réaliser euxmêmes, dans le cadre de leurs organisations d’entreprise, leurs assemblées générales et interprofessionnelles,
embryons d’un nouveau pouvoir travailleur, les mesures telles l’embauche des chômeurs et l’augmentation des
salaires qui sont nos réponses, “la solution” au problème de financement des retraites. Nous avons expliqué que
c’était à nous d’élargir “l’assiette” des cotisations en opposition aux directions patronales de chaque entreprise et de
l’État avec leur politique de chômage et de blocage des salaires.
L’ARS ne cultive aucune “hostilité à la grève générale” qui trouverait sa “racine chez les sociaux-patriotes de tout
poil”. L’ARS affiche son hostilité au mot d’ordre fétiche de grève général, quand elle devient la panacée, “un objectif
en soi”, effectivement, quand le mot d’ordre de grève générale se substitue à une véritable politique révolutionnaire,
une stratégie de prise de pouvoir par les salariés qui s’appui sur leur mobilisation autour d’objectifs transitoires.
Nous ne sommes pas de ces réformistes de gauche, pour qui la grève générale formerait l’ultime instrument de
pression sur le patronat et le gouvernement. Pour nous la grève générale, quand nous la défendons, s’inscrit dans
notre stratégie révolutionnaire, elle est un objectif de mobilisation, intermédiaire qui signifie l’élargissement de la
lutte à l’ensemble des secteurs du salariat. Le mot d’ordre de grève générale ne se suffit pas à lui même. Si nous
mettons en avant le mot d’ordre de grève générale, c’est pour le combiner avec ceux qui permettent d’approfondir la
lutte, de changer la qualité du mouvement revendicatif, à changer les luttes défensives, économiques, orientées par
les directions syndicales libérales et leurs alliés réformistes et économistes autour d’une politique de pression sur le
gouvernement et le patronat en une lutte offensive, politique, centrée vers la constitution d’un contre-pouvoir salarié
qui doit accomplir les premiers pas de la transition révolutionnaire et afficher l’ambition de prendre la direction du
pays, par la révolution socialiste.
“La grève doit être un élément important du calcul stratégique, mais non une panacée dans laquelle se noie toute
stratégie” rappelait Trotsky dans “La révolution allemande et la bureaucratie stalinienne”.
La grève générale n’est pas un mot d’ordre fétiche, et pas plus que “ la grève” nous en faisons le dogme de notre
intervention ouvrière. “Les grèves ne sont pas le “meilleur” moyen, mais seulement un moyen de lutte, et pas
forcément toujours l’un des meilleurs. Il faut reconnaître la valeur des grèves, et toujours y avoir recours et les
diriger, mais les surestimer est d’autant plus dangereux que c’est ce sur quoi insistait le plus “l’économisme” »
écrivait Lénine dans sa “Lettre à “l’union du Nord du PSODR”.
La grève générale n’est pas un dogme ! Et le refus de la grève générale ne relève pas toujours de “l’ex-stalinisme”
ou du “sous-stalinisme” dont vous nous affublez !
“Si, dans certaines conditions -nous explique toujours Trotsky dans son ouvrage précédemment cité, les bolchéviks
déclenchaient hardiment des grèves dans l’intérêt de la révolution, dans d’autres conditions, toujours dans l’intérêt
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de la révolution, ils retenaient les ouvriers d’entrer en grève. Dans ce domaine comme dans tous les autres, il n’y a
pas de recette toute prête. La tactique de grèves pour chaque période s’intégrait toujours dans une stratégie globale
et le lien entre la partie et le tout était clair pour les travailleurs d’avant garde”. Et pour donner un exemple précis,
“lors de la marche de Kornilov sur Pétrograd, ni les bolchéviks ni les Soviets dans leur ensemble ne songeaient à
déclencher une grève générale. Dans les chemins de fer les ouvriers luttaient pour transporter les troupes
révolutionnaires et retenir les convois de Kornilov. Les usines ne s’arrêtaient pas dans la mesure où les ouvriers
devaient partir au front. Les entreprises qui travaillaient pour le front révolutionnaire redoublaient d’activité (...).”
Camarades, dans la situation précise où il est nécessaire de défendre les participants au mouvement tunisien, de
défendre des manifestants en chair et en os face à la répression, les réformistes de gauche et les sectaires “à leur
remorque” peuvent appeler à la grève générale et en faire leur “panacée”, les révolutionnaires appellent quant à
eux, à la formation de groupes de défense et organisent l’armement de milices prolétariennes, sans attendre l’appel
des direction réformatrice à la “grève générale” .
À LA REMORQUE DES BUREAUCRATIES SYNDICALES ?
Notre organisation se placerait “à la remorque des bureaucraties syndicales” nous accusez-vous ! Nous relaierions “
chaque décision des bureaucraties syndicales”. Encore une de vos calomnies sans fondement !
Comment la défense de nos orientations stratégiques propres, comment les mots d’ordre du programme que nous
défendons dans notre journal, nos tracts, l’ensemble de notre matériel, l’ensemble de nos interventions, comment
nos méthodes d’intervention dans les luttes, nos méthodes d’organisation des salariés en mouvement peuvent faire
de nous des relais de “chaque décision des bureaucraties syndicales” ? La défense de la perspective socialiste est
t’elle une orientation partagée par les bureaucraties de la CGT, de FO, de la CFDT, de Sud et tutti quanti? La
nécessité de construire le syndicalisme sur la base du principe “un pour tous et tous pour un” avec contrôle salarié
sur les embauches, l’organisation du travail, la production, la formation et l’évolution professionnelle au sein de
l’entreprise sont-ils des orientations partagées par nos bureaucraties syndicales ? Notre volonté de substituer à la
politique de pression sur le patronat et le gouvernement avec ses manifestations institutionnelles une stratégie de
prise de pouvoir des travailleurs par la formation de comités ouvriers, de conseils révolutionnaires, d’assemblées de
travailleurs, d’un gouvernement révolutionnaire, est-elle encore partagée par nos bureaucraties syndicales ? Dans
les luttes partielles ou les mouvements d’ensemble, quand nous organisons des assemblées générales par
entreprise ou des assemblées interprofessionnelles, quand nous bataillons pour faire élire des délégués mandatés
et révocables par la base dans le cadre des coordinations de lutte, quand nous formons des comités d’action
chargées de développer la lutte, élargir à de nouvelles entreprises le conflit, quand nous formons des comités de
défense pour protéger les participants au mouvement, nous retrouvons-nous vraiment avec les bureaucrates de nos
syndicats, nous faisons-nous les relais des décisions des bureaucraties syndicales ?
Notre politique est évidemment en radicale opposition avec la politique des bureaucraties syndicales, il suffit pour
s’en convaincre, de lire n’importe quel numéro de COMBAT, de prendre en considération n’importe quelle grève et
lutte que nous avons organisé ou développé, pendant la lutte des salariés de Danone à Calais, celle de Mac
Donald à Strasbourg St Denis à Paris, de H&M au Bourget, de Téléperformance à Paris, pendant le mouvement
lycéen de 2005, le mouvement anti-CPE-CNE de 2006, lors des nombreuses grèves à Monoprix, pendant le conflit
avec les employés d’Alternative Post, lors des différents mouvements de défense de nos retraites...
Mais si votre accusation porte sur le seul fait de participer aux manifestations syndicales et de relayer les appels
des directions syndicales à des journées d’action, alors, effectivement, nous nous déclarons coupables. Mais que
de contradictions ! Vous nous reprochez au début de votre lettre de “faire comme si les partis issus de la classe
ouvrière n’existait pas, comme le PS et le PCF, n’existaient pas, ne jouaient aucun rôle dans la vie politique du
pays...”, mais vous trouveriez le “stalinisme”, la “collaboration de classe, la contre-révolution, la défense de la
nation, le culte du chef...” !!! là où nous participons au mouvement, car initié par les “bureaucraties syndicales” !
Mais pensez un peu camarades ! Les organisations CGT, CFDT, FO, CFTC, SUD, UNSA, CGC, avec leurs
appareils bureaucratiques, avec leurs “directions traîtres”, avec leurs directions libérales réformatrices, sont les
organisations syndicales majoritaires, les seules existantes en dehors de la CNT anarcho-syndicaliste et qui,
marginale en tant qu’organisation syndicale, est aussi partie prenante, “pour la grève générale”, des journées
d’action et des manifestations communes.
Camarades, tant que les révolutionnaires ne sont pas dominants dans le mouvement syndical, ce sont les
tendances réformistes et libérales qui tiennent les syndicats. Telle est la très réelle réalité. Et peut-être les
révolutionnaires ne seront-ils dominants dans leurs syndicats de masse que peu avant la prise d’arme et peut-être
ne le seront-ils pas encore à ce moment là ! Peut-être les révolutionnaires prendront-ils la direction du prolétariat et
mèneront le prolétariat à la révolution sans avoir, au préalable, gagné l’influence décisive dans le mouvement
syndical. Toujours est-il que dans la période, en France, ce sont les syndicats et leurs directions qui ont l’influence
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sur le mouvement salarié dans son ensemble, ce sont ces organisations syndicales qui ont la puissance de
mobilisation. Les travailleurs organisés et combatifs sont encartés CGT, FO, CFDT, CFTC, SUD, UNSA, CGC..., et
c’est sur les réseaux des délégués syndicaux et des différents élus de chaque entreprise que s’appuient les
“directions traîtres” des syndicats. Et tant que les révolutionnaires ne font pas la démonstration qu’ils sont capables
d’entraîner derrière eux, derrière leurs leaders ouvriers, autour de leurs mots d’ordre, dans le cadre des sections
syndicales contrôlées par eux, ou bien en dehors du cadre syndical, dans le cadre de cellules de parti ou de
comités ouvriers, des fractions entières de la classe, alors le mouvement syndical tel qu’il est, tel qu’il existe sous
nos yeux, affaibli, légaliste, républicain, bureaucratique, trahissant les intérêts généraux du prolétariat, se
compromettant avec les élus de la bourgeoisie, est le cadre organisateur du mouvement salarié dans sa quasi
totalité. Et le rythme des journées d’action, de manifestations et de grèves, le rythme des grèves reconductibles
représente; jusqu’à un certain point, le rythme du mouvement de la lutte des classes lui-même, réellement existant,
dans toute sa faiblesse, dans toutes ses illusions démocratiques et bourgeoises.
Vous les bolchéviks du Groupe bolchéviks devriez connaître le B-A BA de la politique ouvrière; participer au
mouvement des ouvriers, avec les ouvriers, participer à la lutte, même quand les travailleurs s’illusionnent encore,
même quand ils font fausse route, même quand ils sont dirigés par des traîtres en puissance et des corrompus.
Nous sommes avec eux, toujours, pour partager leurs expériences, pour faire avancer leur compréhension, pour les
encourager à aller de l’avant, jusqu’au bout. C’est dans l’action que les travailleurs mobilisés font l’expérience
véritable de la trahison de leur “directions traîtres”, si les travailleurs mobilisés leur en laissent l’occasion toutefois,
c’est à dire si la politique de compromission des appareils contredit la dynamique de la lutte, la combativité ouvrière
et si elle heurte le sentiment des masses. Donc nous participons aux journées d’action appelées par les directions
syndicales et auxquelles participent les principaux secteurs organisés du travail avec de nombreux autres salariés.
En nous appuyant sur ces initiatives, nous cherchons à pousser plus loin la mobilisation, l’approfondir, la politiser
dans un sens révolutionnaire en faisant face aux bureaucrates et aux différentes tendances réformistes et
opportunistes.
Dans certaines circonstances, les journées d’action, les appels à la grève par secteurs peuvent répondre à une
politique de séparation et de démoralisation des travailleurs. Mais elles peuvent aussi aider dans d’autres
circonstances à la mobilisation et renforcer la confiance des travailleurs en leurs propres capacités. Elles peuvent
représenter autant d’objectifs de mobilisation intermédiaires et nécessaires à l’élargissement d’une mobilisation. Car
nous ne pensons pas qu’il suffirait que les chefs des principaux syndicats appellent à la grève générale pour que les
membres des syndicats suivent le mot d’ordre et derrière eux, toute la classe salariée en révolte. Vous partagez ce
dernier préjugé. Comme si un prolétariat conscient attendait la parole sainte d’une direction illuminée avant de
s’élancer sans retenue à la conquête du pouvoir et constituer son État-commune. Camarades, votre imaginaire est
vraiment trop loin du terrain. Les marxistes ne peuvent séparer arbitrairement le problème des actuelles directions
syndicales avec la crise du mouvement ouvrier dans son ensemble.
LE MOUVEMENT OUVRIER À LA TRAÎNE
Camarades ! Si les directions des organisations ouvrières sont en arrière, il n’est pas moins vrai que les travailleurs
eux-mêmes et leurs avant gardes politiques sont en arrière. Et vos positions ne sont qu’une confirmation de votre
marginalité, comme élément agissant, bien sûr, mais aussi comme observateur de la classe et de ses différentes
composantes. Vous êtes en arrière. Si vous aviez des yeux pour voir et des oreilles pour entendre et une langue
pour dialoguer avec différents idéaux-type des différentes couches de salariées, vous sauriez qu’un Bernard
Thibault n’est pas en arrière sur la conscience des larges masses, mais qu’au contraire, les idées réformatrices de
nos directions syndicales collent assez bien avec l’opinion des majorités, qui renouvellent leur confiance passive
aux exploiteurs politiques du PS ou de l’UMP.
Les travailleurs sont aujourd’hui sans perspective politique qui justifieraient leur engagement dans une grève
générale, politique et insurrectionnelle, leur lutte jusqu’au bout en risquant la vie pour la vie. Ce n’est pas que les
directions “trotskystes” font défaut- à moins que nous ayons à considérer le Groupe Bolchévik à l’égal de notre
propre organisation, comme un groupe stalinien fidèle à une politique de collaboration de classe- mais c’est que les
capacités politiques suffisantes de l’avant garde révolutionnaire font défaut, qu’un travail systématique des
trotskystes autour d’un programme trotskyste, d’une intervention en révolutionnaire des trotskystes dans le
prolétariat et les différentes couches du peuple font défaut. Et si nos capacités politiques font défaut, ce n’est pas le
fait de notre trahison et de notre stalinisme, mais le fait que le mouvement ouvrier dans son ensemble est en crise,
et c’est la crise du mouvement ouvrier qui explique pour bonne partie encore, les trahisons des “directions traîtres”
et l’opportunisme des principales organisations d’extrême-gauche par rapport à l’idéologie petite-bourgeoise, et
c’est cette crise du mouvement ouvrier qui explique en même temps encore, votre propre sectarisme, à vous
camarades du Groupe Bolchévik.
Et nous ne sommes pas encore tout à fait sortis de cette crise subjective du mouvement ouvrier. Un certain temps
est encore nécessaire avant d’essuyer l’impact des trahisons, crimes et défaites du passé. Et les premières
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expériences révolutionnaires socialistes avortées sont des facteurs incroyablement plus décisifs sur le moral de la
classe “pour elle-même” que toutes les trahisons de toutes les directions syndicales réunies de ces 20 dernières
années.
C’est en vertu de la lecture de la période que nous faisons et de la compréhension matérialiste dialectique entre la
classe et son avant garde syndicale et politique que nous définissons les tâches qui sont celles des révolutionnaires
: lutte idéologique autour du projet de transformation socialiste de la société, agitation dans la classe salariée
suivant notre orientation stratégique, par un travail de masse à même de renforcer notre influence et notre
organisation, à même de gagner la direction du mouvement contre les appareils conservateurs des syndicats et
leurs représentants, contre tous ceux qui entraveront l’action des travailleurs dans la voie de leur libération.
Si les révolutionnaires peuvent sous certaines conditions lancer des appels aux directions syndicales “traîtres”,
envers lesquelles des collègues entretiennent encore de méchantes illusions, nous les comprenons comme des
tactiques démonstratives. Nous ne plaçons pas ces démonstrations au centre de notre intervention, ni dans le
syndicat, ni en dehors de celui-ci. Les révolutionnaires se battent pour la direction du mouvement, en prenant les
initiatives qui s’imposent et qui sont rendus possibles par les situations objectives. Et dont le caractère et l’évolution
ne sont pas étrangers à leur propre travail politique.
C’est en vertu de notre intervention révolutionnaire que nous nous trouvons confrontés aux bureaucrates des
syndicats et à leurs directions. Ce n’est pas en cherchant l’opposition aux bureaucrates des syndicats et de leurs
directions sur la base d’une surestimation systématiques des capacités du mouvement existant que la preuve est
faite de notre révolutionnarisme. Notre lutte contre les directions réformatrices n’a rien à voire avec les manœuvres
bureaucratiques de nos opportunistes économistes lambertistes au sein de FO ou de nos anciens militants de la
LCR et des JCR dans les assemblées générales. Notre rôle leader est fonction naturelle de l’influence politique que
nous savons gagner, des initiatives que nous savons prendre avec les éléments les plus actifs de la lutte, de nos
organisations de base que nous pouvons renforcer. La meilleure démonstration que nous puissions faire contre les
orientations des appareils réformateurs, c’est de devenir capable d’entraîner derrière nous les travailleurs suivant
nos orientations propres, avec nos principes d’action syndicale, nos méthodes de construction, d’engager les
batailles sous notre responsabilité, et autant que possible, gagner ces batailles ou tout au moins faire en sorte
qu’elles affermissent la confiance des travailleurs, développent leur conscience et motivent leur organisation.
L’ANTI-IMPÉRIALISME DES SECTAIRES
Au sujet de l’intervention française en Libye, l’ARS, “fasciné” pour la “suprématie militaire de l’impérialisme” n’aurait
pas passé “le test”, sa direction convergerait “une fois de plus, avec les différents partis sociaux-démocrates de
son pays” en refusant “de condamner l’intervention de son propre impérialisme”, l’ARS “s’alignerait sur les sociauxpatriotes”.
Sur la question libyenne, vous opposez une fois encore à nos positions la calomnie en faisant la démonstration d’un
dogmatisme et d’un sectarisme à toute épreuve.
Mais d’abord, dites-nous où vous avez bien pu trouver ces sociaux-démocrates et ces sociaux-patriotes qui
expliquent comme nous le faisons dans notre article du n°56 de COMBAT d’avril-mai 2011 que si “les insurgés
essaient de tirer le meilleur parti de l’intervention(...), l’intervention militaire étrangère offre une aide inespérée aux
propagandistes du régime de Kadhafi contre l’insurrection”, qu’ “elle encourage une partie de la population à faire
bloc derrière Kadhafi contre les forces étrangères”, et que “les opérations militaires qui passent sous la direction de
l’OTAN représentent une menace bien plus directe pour le mouvement insurgé aux prochaines étapes de la lutte”.
Quels sociaux-démocrates et sociaux-patriotes ont expliqué que l’impérialisme peut jouer la carte du CNT, mais que
si cette équipe “n’est pas capable d’asseoir son autorité, sa “légitimité”, ou si elle avait quelques réticences à suivre
une orientation conforme aux intérêts stratégiques du trio impérialiste, alors les bombardements des forces de
Kadhafi ouvriraient rapidement la perspective d’une intervention des troupes au sol, d’une véritable occupation
militaire étrangère“.
Quels sociaux-démocrates et sociaux-patriotes ont expliqué que “pour s’émanciper, le peuple libyen, ses ouvriers et
ses paysans, ses soldats et ses petits fonctionnaires ne peut compter que sur ses propres forces”, que le peuple
libyen ne peut attendre une issue positive de l’épreuve engagée que de la permanence de sa mobilisation, de son
organisation autonome, nationale et centralisée, d’une direction formée de représentants élus, mandatés et
révocables, pour diriger le combat et engager, sans attendre, les réformes qui satisferont les revendications
populaires.“
Quels sociaux-démocrates et quels sociaux-patriotes se sont engagés “pour la révolution socialiste” en Libye, et
pour que le mouvement se garde bien “de lier ses intérêts avec ceux de l’OTAN ou des bourgeois du Conseil de
Benghazi”.
Quels sont les sociaux-démocrates et les sociaux -patriotes qui ont expliqué que “pour réveiller les ardeurs
combatives des centaines de milliers de manifestants de février, les insurgés doivent donner la garantie que les
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richesses de la nation ne seront pas confisquées par les actionnaires des trusts étrangers ou par quelques
nouvelles familles usurpatrices”, que le peuple libyen ” ne se soulèvera pas contre son vieux guide pour se faire
complice des armées d’occupation étrangères”, qu’au “mouvement des insurgés, au mouvement de lutte contre la
tyrannie de Kadhafi, il faut une direction démocratique, nationale, révolutionnaire socialiste, prolétarienne et
internationaliste” que “si la victoire du mouvement insurgé doit ouvrir la voie à l’expropriation des nouveaux
milliardaires et affairistes, au maintien de la propriété nationale sur les ressources du sous-sol, à la socialisation des
secteurs clés de l’économie, à une répartition égalitaire des revenus, entre régions et entre citoyens, à un contrôle
implacable de la population sur tous les rouages de l’Etat, alors les insurgés peuvent gagner la confiance des larges
masses”.
Quels sont les sociaux-démocrates et les sociaux -patriotes qui ont expliqué que les “comités révolutionnaires qui
ont émergé dans la lutte peuvent se multiplier et appuyer la formation d’un Etat des travailleurs, véritable cadre de
coordination aux conseils industriels, outils d’administration de la production et la distribution, dans l’intérêt du plus
grand nombre et de chacun.”
Dites-nous camarades ! Vous ne nous direz rien du tout.
La différence entre les orientations que nous avons défendu et les vôtres, c’est que nous ne faisons pas abstraction
du mouvement réel, que nous n’avons pas fait abstraction des besoins propres et circonstanciés de l’insurrection.
Quand les force insurgés se repliaient sur Benghazi et étaient menacées par la puissance de feu de l’armée
loyaliste, si nous sommes avec les insurgés, pour la victoire de l’insurrection, alors nous ne choisissons pas ce
moment exact pour faire une campagne d’agitation au sein des forces armées françaises en vu de saboter
l’opération militaire ! Du point de vu du mouvement insurgé, cette position dogmatique équivaudrait à une pure
trahison, et du point de vu, dans notre propre pays, des travailleurs conscients et solidaires du mouvement insurgé
en Libye, cette position ne peut être comprise que comme le pacifisme le plus abscons.
Notre combat contre l’impérialisme, comme stade suprême du capitalisme, avec les rapports de dominations entre
bourgeoisies qu’il implique, ne nous interdit pas de faire de la politique. Ce qui nous semblait central et prioritaire au
début de l’insurrection libyenne n’était pas une campagne pour empêcher les opérations militaires des puissances
impérialistes venues en appui des forces insurgées. Si nous avions jugé nécessaire une telle campagne, nous
aurions tenté d’initier une telle campagne, comme en 2003 lors de la deuxième agression impérialiste contre l’Irak.
L’essentiel était pour nous de témoigner notre solidarité avec le mouvement, quelles que fussent ses contradictions,
de défendre l’indépendance du mouvement insurgé par rapport à l’impérialisme, de défendre une perspective
socialiste révolutionnaire pour le mouvement, contre la direction bourgeoise du CNT. Ce qui nous paraissait encore
essentiel, c’était d’établir la juste analyse des raisons de l’intervention impérialiste, de dénoncer effectivement
l’objectif que visent les forces impérialistes en intervenant en Libye, mais aussi de distinguer l’objectif de la coalition
du rôle pratique de ses armées, du point de vu de l’insurrection, à un premier stade, comme appui militaire au
mouvement. Et il nous paraissait encore essentiel d’expliquer le rôle que les armées de la coalition devaient
inévitablement jouer, en cohérence avec l’objectif de contrôle impérialiste, à un deuxième stade, si la dynamique du
mouvement révolutionnaire contredisait les calculs du CNT et de ses parrains.
Nous avions défini dans notre article “Libye : avec les insurgés, pour le socialisme !” une claire ligne de soutien au
mouvement insurgé, fondé sur les ressources autonomes du mouvement ouvrier et révolutionnaire, et que nous
pouvons aussi baser sur l’expérience de camarades partis au Kosovo en 1999 à la tête de convois humanitaires et
en soutien aux mineurs de Mitrovica et à leurs familles. “Au mouvement salarié de disputer aux associations
humanitaires satellites de l’impérialisme et aux armées impérialistes elles-mêmes leur soutien sur le front militaire.
A l’arrière, Il faut au mouvement insurgé des médecins, des infirmiers ainsi que des médicaments et du matériel de
soin. Pour le front, il faut aux partisans des instruments optiques et de communication, des vêtements de protection.
Les insurgés ont besoin d’armes pour contrer les forces de Kadhafi et pour conserver leur indépendance face aux
armées de la coalition impérialiste qui entend les placer sous son joug”.
Aussi, nous annoncions dans le même article la poursuite du mouvement de solidarité avec l’insurrection aux
stades ultérieurs de son développement, au cas où la contradiction entre le mouvement insurgé et les forces
impérialistes éclateraient: “L’ensemble du mouvement ouvrier, avec ses organisations politiques et syndicales, doit
se tenir prêt à mobiliser les travailleurs et leurs familles, en France, en Allemagne, en Italie ou en Espagne pour
enrayer le dispositif de guerre impérialiste. Car si le mouvement des insurgés n’offre pas les gages que les
Cameron, Sarkozy et Obama attendent de lui, toute la machine de guerre de la coalition sera retournée contre les
insurgés. Alors les militants révolutionnaires d’Occident et tous ceux qui veulent s’opposer à une nouvelle guerre de
pillage impérialiste s’engageront pour saboter les opérations militaires, occuper les centres de commandement et
les bases de l’armée de l’air, bloquer les convois d’armement, empêcher les navires d’appareiller. “
Notre ligne anti-impérialiste est une ligne révolutionnaire qui lie l’avancement des perspectives communistes au
mouvement révolutionnaire dans son ensemble, qui lie l’avancement de la révolution avec le mouvement de la lutte
des classes, concrètement et elle est étrangère aux postures incantatoires, à la politique déconnectée de chaque
terrain d’intervention. Nous refusons de transformer des principes vivants en phrases desséchées privées de tout
leur sens pour la lutte des classes. Nous faisons de la politique révolutionnaire. Celle-ci nous rend capable de nous
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appuyer jusqu’à un certain point sur des alliés hésitants, de faire front avec des adversaires contre un ennemi
commun, y compris de jouer sur les contradictions au sein de la classe ennemie en tirant partie de son soutien
intéressé.
Ce n’était donc pas notre rôle d’interdire au mouvement insurgé libyen la possibilité de tirer un certain bénéfice du
soutien militaire de la coalition. Par contre, notre rôle est de prévenir les dangers d’un appui militaire impérialiste à
l’insurrection, dirigée et représentée par son élite bourgeoise. Notre rôle est de préparer la fraction révolutionnaire
prolétarienne du mouvement insurgé à son entrée en conflit avec les tendances bourgeoises “républicaines” ou
islamistes, “nationalistes” ou subordonnées aux intérêts du Capital étranger. Notre rôle est de préparer le
mouvement insurgé à défendre ses positions contre la coalition impérialiste qui cherche à mettre la main sur les
ressources du pays. Notre rôle est d’imposer le mouvement du prolétariat révolutionnaire international comme le sûr
appui au mouvement démocratique révolutionnaire et socialiste libyen, de préparer la mobilisation dans les pays de
la coalition afin de faire face au retournement de la coalition contre le mouvement insurrectionnel. Notre rôle est de
prévenir le peuple révolutionnaire libyen contre tout désarmement de ses organisations militaires.
Si Lénine, pour rejoindre la Russie en ébullition, a su traverser la ligne de front dans un train blindé commandé par
l’état-major impérialiste allemand, pourquoi diable devrions-nous refuser à un mouvement démocratique
révolutionnaire le soutien militaire d’une puissance étrangère, fusse t’elle impérialiste ? Comment justifier auprès du
mouvement insurgé, dans les conditions bien précises dont nous avons fait état, une campagne de blocage à leurs
soutiens militaires étrangers ? Faire de la politique révolutionnaire ne se résume pas à répéter des positions de
principe contre l’impérialisme, faire de la politique révolutionnaire, c’est savoir saisir le moment opportun, au vu
d’une situation concrète, pour lancer notre campagne d’agitation.
Pour déterminer une politique juste dans la lutte des classes, il faut partir de la lutte des classes, et non de la
politique des États, fussent t’ils ceux d’une bourgeoisie relativement faible. Il faut partir des besoins du mouvement
réel et non de principes érigés en dogmes abstraits. Notre anti-impérialisme est prolétarien, il n’est pas l’antiimpérialisme des bourgeoisies nationalistes et de leurs bureaucraties militaires. Nous ne plaçons pas la défense
des nations, d’aucune nation, au dessus du mouvement révolutionnaire démocratique et socialiste de ces nations
elles-mêmes. Nous ne
raisonnons pas comme les anciennes directions staliniennes mais comme des
révolutionnaires prolétariens, au service du mouvement. Et comme nous prenons l’habitude d’intervenir en parti et
non en secte, nous avançons nos différents mots d’ordre d’action en suivant le développement de la lutte. La
politique anti-impérialiste prolétarienne peut autoriser le mouvement révolutionnaire libyen a s’appuyer sur les
forces de la coalition pour en finir avec l’ancien régime autocratique, à une certaine étape de la lutte, avant de
passer à une deuxième étape de la lutte, pour une démocratie révolutionnaire, pour un pouvoir travailleur, pour le
socialisme en faisant face cette fois-ci, aux forces bourgeoises nationales et aux impérialistes. Pour gagner le
combat de classe, les révolutionnaires doivent pouvoir distinguer les différentes étapes d’une même dynamique
révolutionnaire, et adapter leur mot d’ordre d’action à chacune de ces étapes. Et tant que nos orientations
stratégiques ne sont pas contredites, il est aussi permis aux révolutionnaires de ruser avec l’adversaire et de jouer
avec les armes des forces ennemies, en toute connaissance de cause.
La victoire de la révolution bolchévik rendait nécessaire le retour de Lénine en Russie. Il est revenu par un train
blindé allemand. Pour la victoire de l’insurrection libyenne, notre coalition impérialiste “démocratique” a apporté son
aide militaire. L’insurrection a demandé cette aide, et peu nous importe les manigances de ses dirigeants.
Aujourd’hui, le mouvement insurgé a remporté une victoire contre le régime de Kadhaffi. La lutte révolutionnaire
continue en Libye comme a continué la lutte des communistes contre l’impérialisme allemand, complice du retour
de Lénine au pays des soviets.
LA QUESTION DES TRAVAILLEURS ÉTRANGERS EN FRANCE
Votre malhonnêteté dans la polémique atteint son point culminant où il est question d’immigration. Vos
accusations politiques sont graves. Par vos propos diffamatoires, vous mêlez vos voix à celle de la meute
réformiste adepte des méthodes de lynchage staliniennes. Vous nous prêtez la volonté de “réserver la politique aux
nationaux”, car nous accuserions “ la composante immigrée de la classe ouvrière”, et nous nous rangerions, “dans
les faits, aux côtés de la bourgeoisie qui affaiblit la classe ouvrière toute entière en désignant comme boucs
émissaires les étrangers”!
Très chers camarades, nous avons été très heureusement vaccinés, par plusieurs décennies d’opposition aux
partis staliniens, à ses bureaucraties et à ses polices, contre les campagnes calomnieuses de votre type. Pas plus
que le mouvement de la Quatrième internationale et ses militants qualifiés par la propagande stalinienne d’
« Hitléro-trotskyste” et d’agents à la solde d’Hitler ou de Mussolini, nous pouvons accepter de voir qualifier nos
orientations comme du “sous stalinisme”, ou du “national socialisme”, nous pouvons vous laisser dire que nous
menacerions “de passer au fascisme” ! Comme nous sommes dans un échange sérieux, que notre correspondance
n’a pas la valeur d’invectives verbales à la fin d’une soirée alcoolisée, vos accusations sont graves. Mais prenons
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la chose avec philosophie. Votre manière de mener la discussion a au moins le mérite, et qui a une valeur
inestimable pour tous nos lecteurs, de démontrer qu’aucune organisation “trotskyste” qui considère le stalinisme
comme la “contre-révolution” n’est jamais complètement immunisée contre les procédés politiques du stalinisme
avec ses méthodes de “gangsters”.
Depuis le début de notre construction, les militants de l’ARS-COMBAT mènent la bataille idéologique, participent à
de nombreuses luttes, engagent différentes actions, pour la régularisation des travailleurs sans-papiers. Dans notre
premier programme d’action publié en 2002, nous défendions la naturalisation automatique de tous ceux qui
travaillent et vivent sur le territoire national. Dans notre second et dernier programme d’action, nous rappelons à
nouveau cet objectif démocratique; l’ “accès automatique à la citoyenneté française de tous ceux qui vivent et
travaillent sur le territoire national”.
Nous considérons en effet, de l’intérêt commun des travailleurs indigènes et des travailleurs immigrés de pouvoir se
défendre à égalité face à leurs exploiteurs. Comme militants, pour les intérêts des travailleurs étrangers en France,
nous luttons pour la régularisation des travailleurs sans papiers, leur droit de se syndiquer et de s’organiser
politiquement aux côtés de leurs camarades nationaux. Nous luttons pour l’accès automatique à la citoyenneté, car
l’engagement politique des travailleurs immigrés est l’exact prolongement de l’exercice de leurs droits syndicaux, de
la lutte contre leurs exploiteurs directs à la lutte contre la bourgeoise dans son ensemble.
Comme défenseurs des travailleurs indigènes, nous sommes encore partisans de l’égalité des droits et de l’accès
automatique à la citoyenneté du pays d’accueil des travailleurs immigrés. En effet, le tort qui est fait à un seul est un
tort fait à tous. Très loin de profiter de la surexploitation d’une main d’oeuvre étrangère sans droit, le prolétariat
indigène, et parmi lui ses couches de travailleurs les moins qualifiés, subit de plein fouet la concurrence de la main
d’oeuvre étrangère. Ce n’est pas être social-chauvin, ce n’est pas désigner les étrangers “comme boucsémissaires” que de reconnaître que le patronat français est directement intéressé par une politique d’immigration
illégale, pour tirer les salaires et les conditions de travail vers le bas, et que les ouvriers étrangers sans droits sont
utilisés comme “jaunes” sur le marché du travail. Et c’est parce que la main d’oeuvre étrangère est utilisée comme
“jaune” qu’il est impératif pour les travailleurs nationaux d’intégrer à leurs luttes et à leurs organisations syndicales
les travailleurs sans-papiers. Les communistes n’accusent pas la main d’oeuvre étrangère, les communistes
accusent les exploiteurs et la politique d’immigration du pouvoir bourgeois qui entretient, en refusant la
régularisation des travailleurs sans-papiers, des poches de misère qui tirent toute la classe vers le bas !
En guise de réponse au patronat, le mouvement ouvrier associe l’ensemble des travailleurs exploités par entreprise
et par secteur d’activité, quel que soient leur nationalité d’origine. Nous formons le grand trust du travail, au niveau
national et international. De cette manière, le mouvement ouvrier contrecarre les plans patronaux qui consistent à
nous mettre en concurrence les uns les autres avant d’exploiter politiquement notre division. Seule notre
organisation commune selon les principes du syndicalisme révolutionnaire nous interdit de jouer les uns pour les
autres le rôle de “jaune” et nous permet de raffermir les liens de solidarité entre prolétaires de toutes origines.
L’ARS n’a évidemment jamais pris partie “pour le départ des étrangers” et “contre l’immigration en France”. Vos
accusations sont grotesques. Et nous affichons une volonté exactement inverse à celle “d’écarter les travailleurs
étrangers” ! Dans “Notre organisation”, dont vous avez su extraire quelques lignes pour illustrer vos attaques
calomnieuses, nous rappelons justement la “tâche des communistes” : “réaliser l’unité dans les entreprises, l’unité
de toute la classe ouvrière dans le combat contre les capitalistes et leur système d’exploitation”. Nous réaffirmons
dans le passage consacré à “l’unité du prolétariat” la nécessité pour les ouvriers de “se débarrasser au plus vite
des nombreux préjugés et traditions qui font obstacles à l’unité de leur classe, à la construction de rapports
solidaires et fraternels” car “nous devons opposer au patronat un bloc de classe, dans les entreprises, dans chaque
pays et à l’internationale”. Nous y affirmons la nécessité de “mener un travail systématique pour la politisation et
l’organisation des travailleurs venus de l’étranger, les informer de leurs droits et de leurs devoirs vis à vis de toute la
classe salariée”. Si nous reconnaissons dans cette brochure que dans le “contexte des restructurations et
liquidations industrielles des années 80, de l’explosion du taux de chômage et de la délinquance juvénile, de la
crise de subjectivité du prolétariat qui a accompagné la dégénérescence bureaucratique des premiers États
ouvriers, les dernières vagues d’immigration ont été un facteur d’aggravation de la dépolitisation de la classe
ouvrière et de montée des tensions communautaires”, nous expliquons aussi que “les mouvements de migration de
la main d’oeuvre peuvent devenir assez rapidement un facteur de renforcement des capacités politiques du
prolétariat à l’international” car “le mouvement prolétarien peut retourner toute l’énergie des travailleurs de
l’émigration contre la bourgeoisie des pays impérialistes et contre les classes dominantes de leurs propres pays
d’origine”. Nous continuons en expliquant que c’est “aux communistes que revient la tâche essentielle de
développer leurs organisations dans toutes les diasporas ouvrières”, que “ nous devons y faire pénétrer les idées du
marxisme, y constituer les réseaux de soutien à la révolution socialiste internationale, y affermir les liens de
solidarité entre tous les travailleurs du monde”. Et si notre ferme volonté d’intégration des travailleurs étrangers
n’était pas assez claire pour certains lecteurs retors, dans “Notre organisation”, nous défendons encore la
nécessité, “au sein des populations immigrées qui affluent vers les pôles impérialistes”, de “puiser toutes les forces
humaines nécessaires à la construction d’un grand parti mondial, arme révolutionnaire indispensable et redoutable
pour nous libérer des chaînes de l’impérialisme et de la bourgeoisie internationale”.
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Et si, les extraits de notre programme et de la brochure de présentation de notre organisation ne vous suffisaient
pas à juger notre volonté d’intégrer les travailleurs étrangers au mouvement ouvrier dans son ensemble et au
mouvement révolutionnaire socialiste en particulier, nous vous dirigeons vers notre journal dont certains articles
témoignent des “orientations inquiétantes” de notre “socialisme national” ! Dans le n°43 de l’été 2008 par exemple
où nous présentons un article titré “Vive la lutte des sans-papiers !” : “Que tous les travailleurs sans-papiers
refusent l’angoisse des lendemains précaires ! Que tous se joignent aux coordinations des sans-papiers, que tous
se joignent aux organisations syndicales ! Nous devons imposer la régularisation de tous les travailleurs sanspapiers aux préfectures ! Même devoirs, même droits! Il faut développer le mouvement de grève à toutes les
entreprises qui profitent de la main d’oeuvre étrangère ! Tous les travailleurs de ces entreprises doivent soutenir et
rallier le mouvement de grève de leurs collègues sans-papiers ! Soyons tous solidaires ! Popularisons la lutte de
nos frères ! Apportons notre soutien à leurs caisses de grève !
Régularisation de tous les travailleurs sans-papiers ! Nous ne laisserons pas le patronat nous diviser ! Nous ne
laisserons pas nos exploiteurs attiser les concurrences de salaires et de conditions de travail entre ceux qui ont le
droit de se défendre et ceux qui ne le peuvent pas. En agissant aux côtés des travailleurs étrangers en France,
nous agissons pour tous les travailleurs de France !
Opposons à la pression patronale un front uni de toute la classe salariée!
Forgeons les liens solidaires entre nous ! Nous appartenons à la seule et même communauté d’intérêt! Un pour
tous et tous pour un !”
Dans l’article “Aux ouvriers sans-papiers” du n°44 de COMBAT, nous engageons les participants à la lutte pour les
régularisations à épouser les perspectives militantes communistes : “Que tous les travailleurs immigrés profitent de
leur venu pour se mêler au mouvement ouvrier français, à ses syndicats et à son mouvement révolutionnaire.” Dans
l’article du Combat n°46 de février-mars 2009 titré “Un pour tous et tous pour un” : nous expliquons qu’un “Martin
Bouygues est opposé à une politique de régularisation massive”, que “tous les capitalistes du bâtiment et de la
restauration rapide veulent continuer à tirer de nos camarades étrangers ces profits extra interdits par la législation”
et que “dans le même temps, ils voudraient continuer à imposer à tous les travailleurs nationaux la concurrence des
ouvriers maintenus dans la clandestinité.” Nous concluons l’article par : “La lutte pour la régularisation des sans
papiers, c’est donc notre affaire à tous ! Nous devons mener une lutte implacable contre les entreprises qui
contournent les droits acquis en embauchant les sans papiers. Tous les travailleurs du pays ont intérêt à la
régularisation des sans papiers! Tous les syndiqués et salariés doivent s’impliquer dans le conflit pour généraliser le
mouvement et imposer la régularisation. La vigilance doit être de mise ! Pas une embauche au rabais, pas un
travailleur sans droit ! C’est le rapport de force entre toute la classe salariée et le patronat qui dépend de notre
capacité à imposer l’égalité des droits de tous les travailleurs du pays. Face au Capital, nous devons être associés
et combatifs. Imposons nos règles ! Régularisation de tous les sans papiers ! Faisons nôtre la devise des Knights of
Labor, le grand syndicat américain : “Tout préjudice causé à un seul fait du tort à tous” !”.
Et nous nous sommes encore une fois expliqué dans le n°50 de COMBAT de l’hiver 2010-2011 intitulé “Sanspapiers : notre ligne de soutien”: “Imposer aux employeurs et au gouvernement, par la grève et les occupations, la
régularisation des ouvriers sans-papiers, c’est remplir son devoir de militant ouvrier vis-à-vis des travailleurs sanspapiers, c’est remplir son devoir de militant ouvrier vis-à-vis des travailleurs nationaux. En remportant victoire sur la
régularisation des sans-papiers, nous augmentons les capacités de défense des travailleurs immigrés face à leurs
patrons qui leur imposent des conditions d’embauche et de travail inférieures. Et par ce fait même, nous
augmentons les capacités de résistance des travailleurs nationaux car ils sont les premiers à pâtir de la
concurrence à bas prix de la main d’oeuvre étrangère irrégulière.
S’engager dans la lutte pour la régularisation des sans-papiers, c’est donc défendre les salaires et les droits sociaux
des travailleurs de France en enrayant la politique patronale de mise en concurrence des travailleurs entre eux. Les
travailleurs nationaux sont les premiers intéressés à la lutte des sans-papiers, ils doivent être en avant dans cette
bataille, faire cause commune avec leurs collègues sans-papiers, arrêter le travail et participer aux piquets de grève
jusqu’à satisfaction. La solidarité ouvrière se fonde sur la nécessité, elle trouve sa fondation sur un terrain objectif.
Notre ligne est une ligne de classe.”
LA QUESTION DE LA LIBRE CIRCULATION DES TRAVAILLEURS
Dans la déclaration que vous soumettiez à notre signature au sujet du mouvement tunisien, vous présentiez aux
travailleurs la tâche de “s’organiser pour imposer aux partis et syndicats ouvriers d’appeler à manifester en défense
de la jeunesse de Tunisie et d’Algérie, empêcher les exportations d’armes et mettre fin aux politiques qui
restreignent l’entrée des travailleurs et des étudiants en provenance d’Algérie ou de Tunisie”.
Faire campagne d’agitation pour mettre fin aux politiques “qui restreignent l’entrée des travailleurs et des étudiants
en provenance d’Algérie ou de Tunisie” participaient donc pour vous des trois devoirs de “solidarité internationale
avec la jeunesse de Tunisie ” au moment de la révolution.
Nous nous inscrivions par conséquent en faux par rapport à ce dernier axe d’agitation auprès des travailleurs et de
la jeunesse en France. Quand nous vous répondions que “ni en Algérie, ni encore moins en Tunisie, l’heure est à
l’émigration des forces vives”, que “mobiliser en plein mouvement ascendant des masses, contre les restrictions
françaises à “l’entrée des travailleurs et des étudiants en provenance d’Algérie et de Tunisie”, c’est envoyer le plus
21
mauvais message au peuple en éveil”, cela nous semble aussi évident que de ne pas appeler à cesser le travail
dans les transports quand la révolution a besoin de déplacer de nombreuses troupes sur une nouvelle ligne de
front.
Le mouvement de masse en Tunisie était attendu depuis de très nombreuses et longues années, depuis plusieurs
générations. Enfin, le peuple se lève, le peuple reprend espoir d’en finir avec un régime d’oppression politique et de
corruption, la révolution est en marche. Elle exige que soit concentrée toutes les forces démocratiques et
socialistes, elle exige l’implication du plus grand nombre, de toute la jeunesse opprimée, de toutes les couches
exploitées et exclues de la vie politique. Et à ce moment précis, vous du Groupe bolchévik, vous imaginiez faire une
campagne d’agitation en France qui ne pouvait bien sûr être comprise autrement que comme invitation au départ,
invitation à la fuite. “Travailleurs et jeunesse de Tunisie, désertez le combat !”, “quittez le navire !”, “fuyez la lutte !”.
Voilà le message que vous auriez fait passer largement en choisissant le mouvement tunisien comme l’occasion de
mener votre campagne.
Quand un peuple opprimé se réveille, le rôle des révolutionnaires n’est pas de l’inviter à traverser la Méditerranée
pour pousser les parpaings des habitations promises à la destruction du 93. Le rôle des révolutionnaires est
d’encourager tous les travailleurs tunisiens, à continuer la lutte, jusqu’à la victoire, pour que les enfants de la
Tunisie ne soient plus contraints par le chômage et le sous-développement à s’exiler du pays. Le mouvement des
masses tunisiennes est une chance à saisir. Et dans les prochaines années, une vague massive d’émigration de
travailleurs tunisiens en France ne peut signifier autre chose que l’échec de la révolution tunisienne, son échec à
résoudre les problèmes du sous développement et de la pauvreté.
Le choix des mots d’ordre que vous proposiez pour une campagne de solidarité internationale avec le peuple
tunisien n’avait encore une fois rien d’approprié aux circonstances. Mais notre divergence ne peut strictement en
rien justifier l’affirmation que l’ARS est “contre l’immigration en France”. Pas plus en France qu’ailleurs dans le
monde, nous sommes “contre l’immigration”. Mais il nous semble effectivement important d’opposer à l’actuel model
de migration qui est celui de la pauvreté et des inégalités de notre société marchande le model migratoire des
Hommes libres de la société communiste de demain.
L’ARS n’est pas “contre l’immigration en France”. Mais l’ARS ne fait pas non plus de l’immigration des régions et
pays périphériques vers les centres économiques mondiaux une religion. Car les causes des migrations modernes
s’inscrivent très exactement dans le cadre des rapports de domination impérialiste et des inégalités de
développement entre nations et entre régions d’une même nation. Nous intégrons les données migratoires comme
une base de travail, nous menons la lutte des classes sur le terrain de la société capitaliste et de ses centres les
plus avancées, de ses mégalopoles cosmopolites, de ses zones franches, de ses pôles industriels et logistiques qui
rassemblent des millions et des dizaines de millions de travailleurs venus de différentes périphéries rurales et
étrangères. Mais nous entendons aussi mener la lutte de classe contre cette division du monde justement, entre
ses centres superindustrialisés et ses périphéries appauvries où un milliard d’humains survivent au bord de la
famine. Nous opposons au mode de développement économique inégal du monde capitaliste, un mode de
développement socialiste qui signifie une harmonisation du niveau de développement économique par une
coopération socialiste étroite entre les nations et leurs fédérations. Ancun pays du monde n’est condamné par
l’histoire humaine au sous développement.
Nous ne pouvons pas reconnaître les caractères progressistes des migrations modernes sans reconnaître en
même temps leurs caractères régressifs, du point de vue de la lutte des classes et du point de vue du
développement économique des pays périphériques. Car souvent, l’émigration des forces vives d’une nation joue la
fonction de soupape de sécurité pour des régimes incapables de diriger le développement industriel de leurs
propres pays. Les anciennes colonies françaises d’Afrique en sont les caricatures. Et le prolétariat révolutionnaire et
l’ensemble de ses organisations n’ont pas pour rôle de sanctionner cette division et cette inégalité de
développement entre nations par un soutien aveugle aux politiques d’émigration et d’immigration des bourgeoisies
et de leurs États. C’est comme défenseurs des intérêts internationaux du prolétariat que nous nous opposons
radicalement aux entreprises idéologiques d’une partie de la gauche bourgeoise et de son extrême-gauche qui
reconnaissent l’émigration des anciennes colonies vers les pays des anciens colonisateurs comme un “juste retour
des choses” et le seul moyen pour des peuples entiers d’échapper à leurs conditions d’oppression. En pratique, ces
nouvelles migrations jouent bien souvent comme facteur aggravant pour la situation économique et politique de ces
anciennes colonies, qui se privent ainsi de leurs éléments les plus dynamiques.
Nous pouvons affirmer que l’intensité des flux migratoires s’accélère aujourd’hui en raison d’une disproportion
aggravée entre croissance démographique exponentielle d’un côté avec pénurie des ressources naturelles
disponibles, stagnation économique à un très bas niveau d’industrialisation dans les pays d’émigration, et ensuite
en raison d’une différenciation qui persiste et parfois s’aggrave entre les centres économiques mondiaux et leurs
périphéries. Et nous refusons justement la hiérarchisation entre les nations qui, dominées par une bourgeoisie aux
ordres des trusts impérialistes, se spécialiseraient dans l’exportation de ressources naturelles, de matières
premières et d’une main d’oeuvre bon marché et de l’autre, des nations où se concentreraient la plupart des
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activités de transformation industrielle et de service à forte valeur ajoutée, avec leurs réseaux d’infrastructures
tentaculaires et ses lieux d’accueil urbains dégradés pour des millions de nouveaux déracinés.
Pour qu’une stratégie de développement industriel triomphe dans les pays pauvres d’Afrique, d’Asie, d’Europe et
d’Amérique latine, il faut y mener la lutte politique, une lutte révolutionnaire pour des gouvernements socialistes
capables de centraliser les capitaux, nationaliser les secteurs clés de l’économie, rapatrier les travailleurs qualifiés
de la diaspora, de mobiliser la population désœuvrée sur le front du travail, et construire les infrastructures
manquantes, moderniser l’agriculture, développer les industries et les services publics indispensables. Pour
atteindre ces objectifs, les révolutionnaires encouragent les travailleurs à mener la lutte dans leur pays même, à
assumer leur responsabilité historique, d’autant plus importante que les bourgeoisies nationales subordonnées aux
intérêts des grandes puissances ont été incapables d’assumer les leurs. L’ARS est pour développer la lutte
révolutionnaire dans les pays d’émigration, nous rappelons le prolétariat à la nécessité d’affronter l’ennemi de
classe qui est devenu d’abord national, à l’issue des luttes de libération nationale. Aux stratégies de fuite et aux
pistes de réussite individuelle nous opposons l’alternative de la lutte collective des travailleurs et peuples opprimés.
Le prolétariat ne peut échapper à la nécessité qui fait de lui, dans le cadre national et à l’échelle de tous les pays du
monde, la classe révolutionnaire, la direction et la force de jonction pour toutes les couches défavorisées du peuple.
Les révolutionnaires ne sont pas “contre l’immigration”, mais les organisations marxistes n’ont rien à voire avec des
publicitaires pour les agences de recrutement des esclavagistes des centres impérialistes !
Vous nous accusez gravement de ne pas nous “prononcer” en faveur de la “liberté de circulation et d’installation”,
en pratique de mettre en avant dans notre propagande et notre agitation la revendication de “liberté de circulation et
d’installation”. Et cela vous suffit à nous classer parmi les “sociaux-chauvins”.
Mais la société qui offre la possibilité à chaque travailleur et à chaque individu de circuler et de s’installer en liberté
ne peut être la société de pénurie et d’inégalité capitaliste. C’est la société communiste, le stade le plus avancé du
développement révolutionnaire et socialiste qui offre à tous et à chacun la possibilité de circuler et de s’installer
dans le monde en pleine liberté. La liberté de circulation et d’installation est pour nous une perspective à moyen et
long terme, inexorablement liée aux capacités de transformation économique et sociale de la société par le
prolétariat victorieux. Il n’est pas un objectif de lutte immédiat. Nous ne pouvons pas en faire un levier pour des
mobilisations de masse. Dans la situation présente, un tel objectif de lutte contredirait même clairement les
capacités immédiates de résistance du prolétariat, dans les pays d’accueil comme dans les pays de départ.
Si la société divisée en classes justifie l’État, avec son armée, sa police et sa justice de classe, les inégalités de
développement entre nations et régions du monde, et les contradictions politiques entre États impliquent
nécessairement l’existence de frontières et de “douaniers” censés juguler les flux de marchandises et de
populations. Et contrairement à ceux qui pensent le marxisme comme une caution humanitaire au libéralisme, nous
n’inscrivons pas plus à notre programme d’action transitoire la libre circulation des marchandises et des capitaux à
travers le monde que celle des populations elles-mêmes. Et notre refus de nous battre pour la liberté de circulation
des travailleurs et des marchandises ne signifie pas, faut-il le rappeler, que nous soyons les partisans de l’autarcie
économique et de la consanguinité des populations, ni que nous suivions les politiques protectionnistes de
certaines fractions de la bourgeoisie.
Bien sûr, les frontières nationales et les frontières entre les différentes fédérations de nations révèlent chaque jour
un peu plus leur caractère réactionnaire du point de vu de l’évolution de l’histoire humaine. Le développement des
forces productives se heurte aux cadres nationaux, aux cadres des frontières, des États et de leurs gouvernements,
de leurs entreprises et de leurs groupes capitalistes nationaux qui se font concurrence, épuisent les ressources
naturelles dans leur course au profit et menacent nos pays d’un nouveau conflit militaire inter-impérialiste aux
conséquences dramatiques. Et seule la société communiste peut permettre à l’Humanité de gérer la production et
les ressources à l’échelle du monde tout entier, de façon rationnelle, pour le plus grand bien être de l’ensemble de
la population mondiale. Notre république universelle abolira aussi sûrement les vieilles frontières économiques et
politiques des nations bourgeoises que ces dernières nations avaient, dans leur jeunesse aboli les frontières des
provinces royales.
En harmonisant le niveau de développement économique à l’échelle mondiale, en assurant les conditions de bienêtre qui satisferont l’ensemble des populations sur leur territoire, les Hommes pourront circuler plus librement que
jamais dans l’histoire car ils n’y seront plus poussés ni par la faim, ni par la guerre, ni par la maladie, ni par les
répressions politiques. C’est la curiosité naturelle, l’intérêt professionnel, la sympathie pour autrui, le goût des
différents paysages, villes et climats qui motiveront l’Homme accomplis de la société communiste à voyager et à
s’établir dans les régions de son choix.
Mais nous n’intervenons pas aujourd’hui en politique, dans la période qui sépare les dernières victoires de la
révolution mondiale et l’entrée de l’Humanité dans le règne de la Liberté ! Notre programme d’action n’est pas le
programme de transition du socialisme au communisme. Il est le programme de la transition de la société capitaliste
à la première étape de transition socialiste. Il est notre programme d’intervention dans la lutte des classes et qui
inscrit chacun de ses mots d’ordres comme autant de solutions transitoires aux problèmes du prolétariat et des
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différentes couches opprimées du peuple. En quoi la “liberté de circulation et d’installation” reconnue à la fois par
les États d’émigration et les États d’immigration vaudrait comme solution aux problèmes des différentes fractions du
prolétariat mondial ? L’émigration “libre”, par vagues massives donc, des parties du monde les plus arriérées vers
les nations plus avancées auraient plus de chance de tirer vers l’arrière l’ensemble du mouvement organisé de la
classe ouvrière, de jouer comme facteur politique et social régressif dans un contexte de montée du chômage et de
divisions communautaires raciales et religieuses. Pour combien de décennies ces flux “libres” condamneraient le
développement de la lutte des classes et le renforcement des capacités politiques de la classe ouvrière dans les
différentes parties du monde ?
Fait de la plus haute importance, les mots d’ordre de notre programme d’action sont cohérents avec la politique
souhaitable et possible d’un premier gouvernement révolutionnaire ou d’une série de premières républiques
socialistes fédérées. Et sauf à considérer que la dictature du prolétariat devrait garantir à notre élite patronale et à
notre petite bourgeoisie qualifiée le loisir de s’exiler dans le camp impérialiste, sauf à considérer que l’Etat socialiste
pourrait accueillir rapidement des vagues de centaines de milliers de nouveaux migrants où que nous pourrions
diriger une planification socialiste efficace sans pouvoir anticiper notre croissance démographique et l’évolution des
flux de population, nos premières Républiques ouvrières ne pourraient garantir “la liberté de circulation et
d’installation” des travailleurs du monde sur leurs territoires. Ainsi la revendication de “liberté de circulation et
d’installation” pour l’ensemble des travailleurs du monde sur toute la surface du globe est clairement en
contradiction avec la politique des premiers gouvernements socialistes.
Et comme nous nous refusons à défendre une telle mesure immédiate qui se place en contradiction avec notre
future politique de gouvernement, nous classons la revendication immédiate “de la liberté de circulation et
installation” des travailleurs dans la catégorie des revendications anarchistes, dans la catégorie des utopies
individualistes et petites-bourgeoises.
Les inégalités marquées de développement entre pays, y compris entre pays socialistes, supposent l’existence de
frontières et des États, pas moins que la permanence des inégalités sociales dans la société bourgeoise et dans la
société de transition socialiste. Et tant que l’État n’est pas éteint, les frontières conservent leurs fonctions
nécessaires. La souveraineté nationale, qui après la révolution signifie souveraineté ouvrière dans l’espace
national, se traduit par le monopole d’État sur le commerce extérieure, un des trois piliers de la dictature
prolétarienne, et se traduit encore par la possibilité de contrôler les flux de population à ses frontières.
L’organisation marxiste n’est pas la Ligue des droits de l’Homme qui place au dessus de toute nécessité historique,
politique, écologique, de classe, au dessus de la nécessité de la révolution socialiste nationale et internationale ellemême, les “libertés de circuler et de s’installer”.
Après la prise du pouvoir par les travailleurs, les frontières seront ouvertes dans la mesure où le départ des
populations émigrés ne contredit pas la politique de développement économique des pays frères, et dans la mesure
où comme pays d’accueil, nous pouvons assurer aux nouveaux arrivants, le travail, le logement, la formation
qualifiante, l’enseignement de la langue et l’intégration politique, comme nouveau citoyen. Si ces conditions ne sont
pas réunies au minimum, l’État ouvrier et les premières fédérations de Républiques socialistes ne devraient pas
déclarer la circulation et l’installation des travailleurs “libre” ! Ainsi les mots d’ordre de notre programme d’action
doivent s’accorder à notre politique future et transitoire de contrôle par les États socialistes des flux migratoires,
contrôle de l’immigration, contrôle de l’émigration.
Le mouvement ouvrier international s’intéresse au développement de la révolution socialiste internationale, dans les
centres impérialistes comme dans ses périphéries. Il encourage par conséquent la lutte révolutionnaire contre
chaque fraction nationale de la bourgeoisie mondiale par la mobilisation de chacune des fractions nationales du
prolétariat mondial. Plutôt que faire leur la revendication immédiate de la liberté de circulation et d’installation, les
syndicats ouvriers et les organisations révolutionnaires devraient plutôt chercher à peser pour limiter les départs,
puis pour déterminer le choix de destination des candidats à l’émigration en fonction de la conjoncture économique
et des capacités d’accueil des pays de destination. Dans les pays de départ comme dans les pays d’accueil, les
candidats à l’émigration devraient être la cible de campagne de syndicalisation et les révolutionnaires devraient
lutter pour que l’embauche des immigrés soit conditionnée, comme pour les travailleurs nationaux, par leur
appartenance au syndicat. Et tant que le mouvement ouvrier, ses organisations de lutte syndicale et politique, tant
que les États de la classe exploitée ont à gérer une situation de pénurie d’emplois, de logements, de terres, et sont
en lutte prolongée contre le sous développement et de profonds déséquilibres économiques mondiaux, les flux de
migration ne peuvent être subordonnés à l’intérêt des travailleurs isolés et de leur famille, il resteront prisonniers de
la nécessité et les flux migratoires devront donc être soumis à l’intérêt supérieur des collectivités ouvrières et à leurs
associations. La lutte pour le contrôle salarié sur les flux migratoires anticipe la politique de l’État ouvrier qui exerce
son contrôle effectif sur les flux de main-d’oeuvre et qui peut seul ouvrir la voie au développement socialiste
mondial, c’est à dire à la possibilité d’une circulation et l’installation véritablement libre pour chacun.
Mais si enfin, en vertus de notre réticence à défendre la revendication immédiate de “liberté de circulation et
d’installation”, nous sommes des sociaux-chauvins, pourquoi ne vous priveriez-vous pas pour classer la Troisième
Internationale puis la Quatrième Internationale parmi les courants politiques de la “réaction” et Léon Trotsky lui-
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même dans la case des renégats de l’internationalisme prolétarien?! Car quelle motion adopté par les Troisième et
Quatrième internationales du vivant de Lénine et de Trotsky, quel passage des quatre premiers congrès de la
IIIème Internationale, quel passage du Programme de Transition de 1938 ou du “Manifeste sur la guerre
impérialiste et la révolution prolétarienne mondiale” de mai 1940, appui la revendication démocratique et immédiate
de “liberté de circulation et d’installation” ?! Vous n’en trouverez pas la moindre trace.
L’ORIGINE DE NOTRE ORGANISATION
Pour disqualifier nos orientations, tenter de semer le trouble parmi vos lecteurs, et rajouter un élément
supplémentaire à votre propagande mensongère, vous ciblez “l’origine de notre organisation”, “obscure” dites-vous,
en opposition à l’origine “claire” du Groupe Bolchévik ! Vous auriez pu nous insulter de “bâtards” ou d’ “enfants de
putains”, la qualité de votre polémique n’en aurait pas moins gagné en valeur ! Lorsqu’on “préfère Lénine et Trotsky
à Soral”, il faut opposer des arguments aux arguments de l’adversaire. Dans la polémique, les militants trotskystes
n’adoptent pas la méthode stalinienne des calomnies, des mensonges et des extrapolations pour disqualifier les
autres militants ouvriers et leurs organisations. Et les trotskystes devraient juger la méthode non moins dangereuse
et malhonnête contre les courants bourgeois et petit-bourgeois, fussent-ils parfaitement réactionnaires. Seule la
vérité est révolutionnaire.
Quand vous écrivez que notre “socialisme national a débouché sur (...) une réunion publique avec Alain Soral (le
chef de l’organisation fasciste “Égalité et réconciliation”)”, vous faites exactement le plus bel honneur à la méthode
de propagande stalinienne qui cherchait à assimiler Trotsky et les trotskystes après guerre, à des agents de la CIA
au prétexte que Trotsky avait été exilé politique aux États-Unis ou parce que nombre de militants trotskystes étaient
actifs dans le syndicat Force Ouvrière, “agence de la CIA” ! Si c’est pour vous rassurer, nous n’avons jusqu’à
présent nullement projeté l’organisation d’une quelconque “réunion publique avec Alain Soral”. Depuis le début de
notre construction, les seules réunions publiques communes auxquelles les membres de l’ARS-COMBAT aient
participé comme organisateurs, furent celles de notre campagne de 2005 pour un “non communiste révolutionnaire
au projet de constitution européenne” avec le Groupe Communiste Révolutionnaire Internationaliste et les Amis de
l’Égalité, puis celles initiés à l’occasion des révolutions arabes cette année, avec les militants de la Voix des
travailleurs, du CCI et de “Controverse” .
Mais ne vous en déplaise, et n’en déplaise à ceux dont l’objectif n’est pas de gagner le prolétariat à la perspective
socialiste ni de gagner l’influence nécessaire sur les différentes couches du peuple pour gagner, n’en déplaise aux
militants en chambre et à ceux qui se trouvent inconfortés par la confrontation avec les couches retardataires du
peuple et leurs préjugés, l’ARS-COMBAT n’interdit pas à ses membres d’intervenir dans les réunions des
“fascistes” pour tenter d’y rallier la partie des éléments hésitants - par l’argumentation politique- ni de mener la
polémique publique contre tel ou tel dirigeant populiste, ni d’adopter toutes les mesures nécessaires pour
neutraliser des courants politiques réactionnaires.
Notre origine est claire, camarades du GB, nos principes le sont tout autant. C’est parce que nous avons un
programme qui définit très clairement nos orientations générales et qui ne souffre d’aucune confusion possible, ni
avec le fascisme, ni avec le réformisme, ni avec le stalinisme et toutes les sortes de “sous stalinismes” que nous
avons l’assurance de pouvoir intervenir dans le réel, sans nous trahir, sans la crainte “de tendre inéluctablement au
réformisme” et sans la crainte non plus de nous affoler d’attaques honteuses dont vous vous faites l’écho.
L’ARS-COMBAT a été fondé en mars 2001. A l’origine, nous étions des militants issus de Lutte Ouvrière, de l’Union
des Ouvriers Communistes (léniniste-trotskyste), de Voix des Travailleurs, de la Gauche Révolutionnaire, de cercles
influencés par la fraction de Lutte Ouvrière ainsi que du groupe “Notre parole” issu d’une scission de la tendance de
Stéphane Just.
C’est le refus de la dissolution de VDT dans le marais de la LCR, le refus de la fusion sans principe de la section
française du Comité pour une internationale ouvrière, la Gauche Révolutionnaire de l’époque avec les droitiers de
“La commune” lambertiste, le refus de nous soumettre à la discipline aveugle et attentiste de Lutte Ouvrière et la
volonté pour nous tous d’assurer l’existence d’une alternative socialiste révolutionnaire interventionniste à l’extrême
gauche, qui a justifié notre initiative.
A l’origine de l’ARS donc, de jeunes militants trotskystes convaincus que les salariés ne pourraient être gagnés au
socialisme sans une intervention socialiste large et systématique, qu’il serait bien impossible d’amener le prolétariat
à la révolution sans préparer la masse des travailleurs à la perspective de la révolution, et que pour repopulariser la
perspective socialiste, il était indispensable d’inscrire la nouvelle avant garde dans la tradition de la lutte de
l’opposition de gauche et de la Quatrième Internationale de Léon Trotsky, de marquer la différence et l’opposition
aux modèles de transition socialiste bureaucratique.. vers le capitalisme.
Nous avons engagé notre construction autour d’un projet socialiste et interventionniste, en nous plaçant au service
du mouvement de la lutte des classes, et en choisissant de prendre les initiatives essentielles dans les luttes. Et
après un an d’existence, nous avons défini un premier programme d’action qui résumait les mots d’ordre autour
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desquels nous intervenions, pour que nos perspectives générales prennent tout leur sens dans la lutte. En
opposition radicale avec le réformisme nationaliste du Parti des travailleurs de Lambert, avec l’opportunisme droitier
de la LCR, avec l’économisme ouvriériste et sectaire de Lutte Ouvrière, nous avons précisé nos orientations en
combinant notre travail de terrain, quotidien, sur une “ligne de masse” avec l’étude du mouvement révolutionnaire
international, de ses textes fondamentaux et avec notre réflexion pour un bilan critique des expériences historiques
passées.
En dix ans, comme parti en construction et non comme secte repliée sur elle-même, nous avons avancé notre
travail politique. Et comme toute organisation vivante, notre développement n’a pas été linéaire. Ce n’est pas sans
mal, sans commettre des erreurs, sans correction de notre trajectoire initiale que nous avons pu poursuivre notre
construction et progresser.
A contre courant, dans un contexte de dépérissement des vieilles organisations ouvrières, réformistes ou issues du
trotskysme, notre organisation a tenu bon, notre programme déployé, popularisé, travaillé et redéveloppé. Si devant
l’immensité de la tâche, six mois seulement après notre fondation, la majorité de nos militants nous quittaient,
certains pour abandonner le travail militant, d’autres pour rediriger leur intervention vers le PCF ou la CNT, notre
organisation a passéde nombreux “tests”. Appuyé par un réseau sympathisant actif, le petit noyau militant a
continué ses efforts de construction. Finalement, nous avons réussi à former de nouveaux camarades. Beaucoup
ont abandonné le combat en cours de route. Nous avons aussi des camarades qui ont rompu avec les perspectives
trotskystes que nous défendions et ont scissionné. Mais ceux qui tiennent bon et animent nos sections savent
intervenir avec succès dans leurs entreprises et au sein de leurs syndicats. Ce sont eux qui incarnent le mieux la
possibilité du renouveau du mouvement révolutionnaire pour l’avenir.
L’ARS ne “papillonne “ pas d’un groupe à l’autre, l’ARS mène la discussion franche et fraternelle avec les autres
organisations communistes intéressées à raffermir les rapports de solidarité dans le mouvement ouvrier, sur la base
d’une intervention “lutte des classes”, dans la lutte des classes. Depuis notre fondation, nous avons eu, entre
autres, des discussions prolongées avec la fraction de Lutte Ouvrière, avec la Gauche Révolutionnaire, avec le
Groupe CRI, avec le Nouveau Parti Communiste Italien maoïste, avec le CCI-t, avec VDT, issue de la Fraction de
Lutte Ouvrière. Vous avez répondu à notre appel qui vous invitait à discuter autour de notre dernier programme et
c’est dans ce cadre que notre polémique présente s’inscrit. Notre ligne de conduite avec les autres organisations
communistes n’est pas étrangère, depuis le début de notre construction, à la politique de front unique et à notre
conviction que les discussions entre organisations et militants d’organisations différentes aident nos efforts de
clarification et de délimitation mutuels qui sont une condition pour intervenir en commun, avec efficacité, dans la
lutte contre le Capital.
L’ARS n’est pas le résultat d’une scission de tel ou tel courant de la Quatrième Internationale. Contrairement à
vous, du Groupe Bolchévik, nous ne nous réclamons pas de l’OCI-PCI dirigée par feu P.B Lambert et de ses
politiques opportunistes et parasyndicalistes. La Quatrième Internationale de Lambert ne valait pour nous pas
beaucoup mieux que celle d’Ernest Mandel, Alain Krivine et Bensaïd. Et ce n’est pas le soutien actif du PCI, dès le
premier tour, à la campagne de Mitterrand en 1981, ni les orientations du PT autour de “la défense de la nation”, de
“la défense de la République” et de ses communes qui pourraient marquer une quelconque continuité du
lambertisme et du trotskysme par rapport au « pablisme » de l’ancienne Ligue!
Nous avons choisi de construire l’ARS parce que nous pensons qu’en ce début de 21ème siècle, alors que les
principales organisations issues de la Quatrième Internationale sont atteintes d’une sclérose opportuniste et
sectaire qui interdit l’action en leur sein d’une fraction révolutionnaire régénérée, les révolutionnaires trotskystes
n’ont pas lieu de s’affilier arbitrairement à un courant historique du trotskysme opportuniste plutôt qu’à un autre.
Nous sommes aussi éloignés de ceux qui ont dirigé leur intervention opportuniste en direction des appareils
sociaux-démocrates que de ceux qui ont dirigé leur intervention opportuniste en direction des appareils staliniens.
Et nous sommes d’accord avec Pablo contre la politique de la section française qui faisait l’agitation au sortir de la
guerre pour un “gouvernement PS-PC-CGT”. Nous n’avons pas plus à voir avec la politique des soutiens aveugles
au FLN qu’avec la politique de soutien non moins aveugle au Mouvement National Algérien de Messali Hadj. Nous
sommes aussi bien étrangers aux analyses des uns qui refusaient de saisir la signification révolutionnaire et
socialiste de la révolution cubaine que de ceux qui pensaient jouer les conseils trotskystes de Castro. Le caractère
de notre intervention est aussi éloigné du minimalisme borné des tendances syndicales que des interventions de
propagande large autour des problèmes de théorie internationale par les tendances universitaires à la sauce
Krivine. Nous ne sommes pas plus les partisans de l’économisme parasyndical de l’OCI-PCI que du guevarisme de
la LCR et de son radicalisme étudiant. Et nous sommes encore aussi éloignés du corpus théorique d’une
organisation comme Lutte Ouvrière qui ne partage avec la Quatrième Internationale de Trotsky, ni la conception
marxiste de l’État, ni le point de vue léniniste sur la question national, ni le point de vue communiste sur
l’intervention syndicale, ni la conception léniniste du parti et de l’importance de son programme, ni évidemment rien
de la conception marxiste-léniniste-trotskyste de la défense du programme socialiste qui combine revendications
économiques, démocratiques et nationales, transitoires, socialistes et révolutionnaires.
Sur toutes les grandes questions du programme, nous travaillons à développer des analyses et des orientations
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cohérentes et qui sont des outils conceptuels pour agir, comme révolutionnaires, au service du mouvement de
libération des exploités. Nous n’avons évidemment pas épuisé l’ensemble des sujets de réflexion, comment une
équipe réduite comme la nôtre le pourrait ?! - Mais en renforçant nos capacités politiques, en ralliant de nouveaux
camarades, nous pourrons travailler plus, plus vite et mieux , nous pourrons multiplier et perfectionner nos
expériences partagées avec les différentes parties du salariat, approfondir l’ensemble de nos recherches, enrichir
notre programme pour taper toujours plus juste et ouvrir les perspectives qui enthousiasmeront et impliqueront la
grande majorité.
POUR UN FRONT DE NOS ORGANISATIONS, AVEC VOUS ?
Nous ne repoussons pas l’accomplissement de nos tâches à plus tard, chacun peut nous juger au grand jour. Nous
avons depuis notre fondation, suivi cette orientation essentielle, défendre le projet socialiste dans notre
propagande, intervenir dans les luttes autour d’objectifs intermédiaires dont le sens révolutionnaire peut être
reconnu clairement par tous ceux qui participent avec nous à la lutte et par tous nos observateurs.
Bien que nous accusons de nombreuses divergences avec d’autres groupes communistes, nous tenons à
distinguer le principal du secondaire, car nous savons que si nous sommes capables d’engager l’action sur les
éléments principaux du programme, nous réussirons alors à faire avancer la lutte. Mais que si nous nous figeons
sur des positions sectaires, si nous accordons à des questions secondaires une importance démesurée, si nous
prenons prétexte de certains désaccords pour refuser d’aller de l’avant, alors nous ne pourrons pas combiner nos
énergies pour faire avancer plus rapidement, et il y a urgence, le mouvement de la lutte des classes.
Le Groupe Bolchévik partage une analyse tout à fait erronée quant à la caractérisation de classe des partis, ce qui
amène votre groupe à apporter son soutien électoral au Parti Socialiste et à méconnaître la différence de caractère
entre le PS et le PCF ainsi qu’à exclure de votre champ de réflexion tactique l’extrême-gauche. Doit-on penser que
vous vous êtes déjà rangés du côté de la bourgeoisie “de gauche”?
Votre conception de la tactique de front unique en direction des anciens partis réformistes ouvriers ou des directions
syndicales est droitière car vous décharge de toute responsabilité dans la lutte pour acquérir la direction du
mouvement, comme organisation indépendante contre les directions libérales et sur votre propre ligne de masse.
Doit-on vous situer à la remorque des bureaucraties syndicales et vous juger complice de la libéralisation de leurs
organisations ?
Votre position sur la question palestinienne, qui nie le droit de la nation israélienne à disposer d’elle-même interdit
dans les circonstances, toute convergence entre la lutte révolutionnaire national palestinienne et la lutte du
prolétariat israélien pour son émancipation. Votre perspective d’un seul État Palestinien, “du fleuve à la mer” fait
l’impasse sur 70 années d’histoire du peuple juif et sa constitution en nation. Doit-on craindre un rapprochement
entre vous et Égalité et Réconciliation sur la base de “l’anti-sionisme”?
Mais non, les procès calomnieux nous sont étrangers, nous ne vous classons ni parmi les agences de la gauche
bourgeoise, ni parmi les courants antisémites qui se cachent derrière l’ “anti-sionisme”. Les positions que vous
défendez autour des mots d’ordre de “grève générale” ne font pas encore de vous des syndicalistes pures même si
elles expriment une tendance syndicaliste. Vos positions sur la question de la libre circulation et de l’abolition des
frontières ne font pas de vous non plus des anarchistes ou des libéraux radicaux. Et si les revendications de “liberté
de circulation” ou d’ “abolition des frontières” expriment des tendances utopiques et gauchistes qui contredisent le
droit des nations à disposer d’elles-mêmes, nous refusons de vous assimiler de même aux défenseurs des
immigrés juifs de Palestine qui use de leur « liberté d’installation » pour implanter leurs colonies!
Comme vous vous opposez à notre ligne sur la question libyenne qui fixe son développement sur le mouvement
réel et son potentiel révolutionnaire, nous ne vous identifions pas pour autant avec les soutiens nationalistes et pan
arabes “fascistes” du défunt Kadhafi.
Mais nous comprenons votre mal à distinguer les étapes d’une même dynamique, et à saisir la cohérence politique
entre notre ligne anti-impérialiste et révolutionnaire socialiste qui est tout à la fois une stratégie, un ensemble
tactique et un calendrier.
Nous accusons de nombreuses divergences. Mais nous avons aussi un trésor en partage. Ce trésor, c’est nos
convictions socialistes, révolutionnaires, communistes, internationalistes, trotskystes. Autour d’un plan de défense
des intérêts du peuple travailleur, jusqu’au bout, pour satisfaire ses revendications économiques minimums, pour
engager les travailleurs et salariés à la lutte pour le pouvoir, en popularisant une série de mot d’ordre transitoires
qui préparent la constitution d’un gouvernement de transition socialiste, autour d’un plan de socialisation des
secteurs clés de l’économie et d’expropriation des grandes fortunes, de mise en place d’un contrôle impératif des
travailleurs et consommateurs associés sur la production et sur leurs délégués à la tête de l’État, pour une
révolution du prolétariat conscient et armé, allié aux différentes couches exploitées et opprimées du peuple, nous
vous proposons de faire front.
Nous pensons que des organisations qui ont ce programme en partage, qui est le programme minimum des
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révolutionnaires, doivent agir en front, doivent faire front pour mobiliser la classe ouvrière, doivent faire front pour
produire l’impact qui nous permettra d’imposer l’alternative de la Révolution socialiste aux réformistes des Poutou et
Mélenchon, aux candidats de la gauche et de la droite bourgeoise, aux différents populistes sociaux, nationalistes,
libéraux ou religieux.
Être trotskyste au XXIème siècle, c’est aussi reconnaître, car les traditions politiques du mouvement ouvrier se sont
considérablement enrichies, que le premier gouvernement révolutionnaire a peu de chance d’être représenté par un
parti unique, et la première fédération de républiques socialistes n’a aucune chance d’être une fédération dirigée
par un seul parti mondial. Les premiers pouvoirs travailleurs seront les gouvernements par lesquels des
organisations révolutionnaires différentes et associées prendront les mesures fondamentales et dans le même
temps, garantiront aux travailleurs et à leurs organes de contrôle et de gestion démocratique, le soin de trancher les
différences de tendances et de nuances dans la politique prolétarienne nationale et internationale, économique,
politique, culturelle et religieuse. A côté d’une politique de front unique traditionnelle en direction des partis ouvriers
réformistes, les révolutionnaires ont dès maintenant intérêt à anticiper, dans leur intervention de classe, la formation
du gouvernement révolutionnaire de nos organisations.
Mais si vous persévériez à confondre nos orientations avec celles du “réformisme”, du “social-patriotisme”, du
“stalinisme” et du “sous stalinisme”, ou du “national socialisme”, alors, pitié pour vous, nous vous pardonnerions
pour toutes vos offenses et nous vous laisserions à votre retraite.
Si vous êtes militants, si vous êtes intéressés à l’avancement du mouvement de la lutte des classes, si vos
principes internationalistes sont suffisamment clairs et votre esprit bien fait pour distinguer les ennemis des amis, et
donc pour ne pas craindre l’intervention en front, pour ne pas craindre l’organisation de campagnes d’agitation
communes vers un secteur ou un groupe d’entreprises déterminé, pour ne pas craindre une association solidaire au
sein du mouvement syndical, pour ne pas craindre de faire connaître avec d’autres groupes communistes une
plate-forme d’action révolutionnaire à l’occasion des prochaines élections législatives et présidentielles, alors notre
polémique n’aura pas été vaine.
Dans ce cas, nous vous proposons une réunion avec les délégués de notre Comité Central, pour continuer notre
échange, pour nous coordonner, pour agir.
Notre devoir est de combattre. Il faut vaincre.
Le Comité Central de l’ARS-COMBAT.
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