
La commande publique, levier stratégique de développement économique et social
Conseil Economique et Social 1
Préambule
La mutation économique qu’a connue le Maroc au cours des 10 dernières années est indéniable. Son
impact sur les comptes publics a été fondamental et a ouvert des marges de manœuvres budgétaires
historiques pour l’Etat.
La commande publique en a ainsi grandement bénéficié. En valeur, celle-ci a crû en moyenne annuelle
de 6% entre 2002 et 2006 puis de 30% par an entre 2007 et 2011.
La commande publique qui comprend les dépenses engagées par l’Etat, les établissements publics et
les collectivités locales représente désormais près de 24% du PIB. Il s’agit donc d’une composante
incontournable de l’activité économique. A titre d’illustration, des secteurs entiers de l’économie
comme les BTP ou l’ingénierie dépendent à plus de 75% des commandes directes ou indirectes de
l’Etat.
Compte tenu de cette importance, les pouvoirs publics ont toujours été attentifs au cadre qui régit la
commande publique avec des objectifs d’efficacité de la dépense et de gouvernance adéquate. De
nombreuses réformes ont eu lieu depuis 1917, année d’instauration du premier texte de loi régissant
les dépenses de l’Etat.
Après un pause de près de 20 ans, l’Etat a réalisé une nouvelle vague de réformes du cadre
réglementaire de la commande publique. Un nouveau décret de passation des marchés publics a ainsi
vu le jour en 1998, puis en 2007. Une troisième est en cours de réalisation et devrait déboucher au
cours de l’année 2012.
Pendant cette même période, d’autres textes ont été promulgués pour améliorer la gouvernance des
marchés publics : le Dahir de 2002 portant promulgation de la loi n° 61-99 relative à la responsabilité
des ordonnateurs, des contrôleurs et des comptables publics ; le Décret de la même année approuvant
le cahier des clauses administratives générales applicables aux marchés de services, ainsi que le
Dahir de novembre 2003 portant promulgation de la loi n° 69-00 relative au contrôle financier de l’État
sur les entreprises publiques et autres organismes.
Ces réformes qui restent incomplètes, se sont focalisés essentiellement sur la phase passation et sur
les aspects de conformité procédurale en y rajoutant le contrôle de la matérialité des dépenses, sans
pour autant atteindre les objectifs visés, de transparence et de simplification des procédures.
Ainsi, sur le terrain, une enquête réalisée auprès d’un échantillon représentatif de 400 entreprises,
révèle que seulement 10% de celles-ci participent de manière régulière aux marchés publics, 54%
jugent que les procédures correspondantes sont complexes, coûteuses et plus de 60% des entreprises
interrogées considèrent que les marchés publics ne sont pas systématiquement transparents et que
les versements illicites sont fréquents.
Les réformes cités plus haut, n’ont pas répondu aux problématiques liés aux phases amont, telles que
l’analyse de l’opportunité ; l’optimisation de l’expression des besoins en fonction de l’offre disponible
sur le marché ; la conception du dossier d’appel d’offres avec son cahier des charges et son règlement
de consultation ;… et phases avales, telles que l’exécution, la réception, l’évaluation et la mesure des
résultats et des impacts.
Dans ces conditions, les marchés publics ne peuvent prétendre profiter de manière optimale au
développement général de l’économie nationale ni de soutenir stratégiquement, l’émergence
d’entreprises performantes en particulier parmi les PME.