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Des chiffres qui en disent long
Aux USA, il était recensé 10 millions d’UIV en 1975,
et seulement 600 000 UIV en 1995, soit une réduction
de -94% [9]! Pour expliquer ce recul considérable, il
est intéressant de répertorier les indications cliniques
pour lesquelles une éventuelle substitution a pu avoir
lieu. A leur tête on retrouve la colique néphrétique,
l’hématurie et la dysurie ; nous allons essayer de com-
prendre, par un tour d’horizon des indications les plus
fréquentes, les raisons de l’abandon de l’UIV.
Un peu d'histoire[2]
La notion d'opacification des cavités urinaires voit le
jour dans les années 1920. Il s’agit d’opacifications
directes (Collargol et air en injection rétrograde).
L’opacification urinaire par voie veineuse n’est pas
encore prête (1929-30, première molécule iodée intra-
veineuse), elle est en effet indissociable de la pharma-
cologie des produits de contraste utilisés, qui à l'époque
bien plus qu’à l'heure actuelle, sont des médicaments
potentiellement dangereux, autrement dit dont les
effets indésirables sont plus importants que les béné-
fices escomptés.
Les laboratoires vont élaborer des produits de contras-
te de plus en plus performants et de moins en moins
toxiques, mais il faudra attendre encore une quarantai-
ne d'années avant que l'urographie intraveineuse ne
gagne ses lettres de noblesse. Les molécules tri-iodées
apparaissent en effet dans les années 1950-60, c’est le
début de l’uroradiologie.
En 1960, l'UIV devient l'examen-clé de la radiologie.
15 à 30 examens sont effectués par jour (mais une
semaine de délai avant le compte-rendu!). Certes, cet
examen explore les reins et les voies urinaires, mais
il fait également partie d'un complexe radiologique
systématique dans les pathologies abdominales (dou-
leurs, masses) comprenant successivement l'UIV, la
cholécystographie orale, le TOGD, le lavement bary-
t é .
Dans les années 1960 aussi, l’UIV se perfectionne et se
sophistique, notamment par l’utilisation de la néphro-
tomographie (qui, à la phase vasculaire de l’injection,
permet de faire la différence entre kyste et tumeur).
L’UIV ne se conçoit alors qu’avec une avalanche de
clichés, comprenant l’inévitable compression urétérale
(sauf colique néphrétique), l’incontournable test à l’io-
de préalable…
La notion dynamique de l'injection est une source d’in-
térêt radiologique pour la physiologie rénale, en même
temps que les descriptions sémiologiques se multi-
plient.
La pyélographie rétrograde est en recul, à l’inverse des
autres opacifications endocavitaires qui se développent
(cystographie …). Malgré les éléments apportés par la
néphrotomographie, les explorations vasculaires sont
de plus en plus indiquées du fait de la découverte de
bon nombre de masses rénales qui ne font pas leur
preuve.
Le rétropneumopéritoine est indiqué lorsqu’une masse
semble d'origine extrarénale.
Le début de la révolution technologique commence dès
1970. Les tomographies sont devenues systématiques,
comprenant même des temps vasculaires (clichés
minutés précoces) si une HTA rénovasculaire est sus-
pectée.
L’échographie fait ses débuts et apporte d’emblée des
informations que l’UIV était incapable de fournir en
totalité : taille des reins, lésions kystiques/solides, état
des cavités.
On commence à parler, sans savoir quel sera son rôle
futur à jouer, de la tomodensitométrie (TDM).
Les années 1980 sont transitoires. En TDM, émergent
les premières indications : cancer du rein (complément
à l’échographie), puis angiomyolipome, pathologie
inflammatoire et traumatique. La lymphographie est
progressivement remplacée par la TDM dans les bilans
d’extension des cancers testiculaires.
Du fait des réponses précises apportées par le couple
échographie/TDM, l’artériographie est en net recul.
La substitution des produits de contraste classiques par
des produits non ioniques, en dépit de leur surcoût,
s’effectue petit à petit; en même temps on assiste à une
véritable préoccupation scientifique sur la néphrotoxi-
cité des PDC iodés.
Ces années là voient aussi l’introduction de l’IRM, de
l’échoDoppler, des gestes interventionnels peu vulné-
rants (néphrostomie percutanée et surtout lithotripsie
+++).
L’accomplissement de la substitution se fait entre 1990
et 2000. Cette dernière décennie est l'occasion d'avan-
cées en matière de caractérisation tissulaire (imagerie
dynamique), notamment grâce à la TDM spiralée (dif-
férentes phases => uroscanner), et grâce à l’écho-
Doppler couleur.
L’Uro-IRM montre sa capacité à visualiser l'arbre uri-
naire comme l'urographie intraveineuse, mais avec
l’avantage considérable de n’avoir recours à aucun pro-
duit de contraste [23, 30].
La cystographie et l’uréthrographie ont des indications
beaucoup plus sélectives et, par conséquent, de plus en
plus limitées.
Pourquoi préférer les nouvelles techniques à l’UIV?
L’appareil urinaire est composé d’un environnement
J.P.Laissy et coll., Progrès en Urologie (2001), 11, 552-561