PRÉPARER LE BREVET 419
Les sujets peuvent être très variés. Voici un exemple accompagné de remarques et de conseils. Ce sujet
a été donné en juin 2001 dans l’académie de Guadeloupe-Guyane-Martinique.
Poulet devenait grand, il atteignait quinze ans; et l’échelle du salon marquait un mètre cin-
quante-huit. Mais il restait enfant d’esprit, ignorant, niais, étouffé entre ces deux jupes et ce vieil
homme aimable qui n’était plus du siècle.
Un soir enfin le baron parla du collège; et Jeanne aussitôt se mit à sangloter. Tante Lison
effarée se tenait dans un coin sombre.
La mère répondait : « Qu’a-t-il besoin de tant savoir? Nous en ferons un homme des champs,
un gentilhomme campagnard. Il cultivera ses terres comme font beaucoup de nobles. Il vivra et
vieillira heureux dans cette maison où nous aurons vécu avant lui, où nous mourrons. Que peut-
on demander de plus? »
Mais le baron hochait la tête. « Que répondras-tu s’il vient te dire, lorsqu’il aura vingt-cinq ans : Je
ne suis rien, je ne sais rien par ta faute, par la faute de ton égoïsme maternel? Je me sens incapable
de travailler, de devenir quelqu’un, et pourtant je n’étais pas fait pour la vie obscure, humble, et
triste à mourir, à laquelle ta tendresse imprévoyante m’a condamné. »
Elle pleurait toujours, implorant son fils. « Dis, Poulet, tu ne me reprocheras jamais de t’avoir
trop aimé, n’est-ce pas? »
Et le grand enfant surpris promettait : « Non, maman. »
«— Tu me le jures?
— Oui, maman.
— Tu veux rester ici, n’est-ce pas ?
— Oui, maman. »
Alors le baron parla ferme et haut : « Jeanne, tu n’as pas le droit de disposer de cette vie. Ce
que tu fais là est lâche et presque criminel; tu sacrifies ton enfant à ton bonheur particulier. »
Elle cacha sa figure dans ses mains, poussant des sanglots précipités, et elle balbutiait dans ses
larmes : « J’ai été si malheureuse… si malheureuse ! Maintenant que je suis tranquille avec lui, on
me l’enlève… Qu’est-ce que je deviendrai… toute seule… à présent? »
Guy de MAUPASSANT, Une vie, 1883.
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PREMIÈRE PARTIE
TEXTE
L’ÉPREUVE DE FRANÇAIS : UN EXEMPLE TRAITÉ
QUESTIONS (15 points)
L’adolescent Paul, surnommé Poulet, est élevé par sa mère, Jeanne, sa tante, et son
grand-père (le baron) dans leur château de famille à la campagne.
I. Le fils (5 points)
1. a) À quels temps sont les verbes des deux premiers paragraphes?
(0,5 point)
Dans les deux premiers paragraphes, les verbes sont à l’imparfait et au
passé simple de l’indicatif.
>Ne pas répondre pour chaque verbe mais
faire une réponse globale.
L’épreuve de français
420 PRÉPARER LE BREVET
b) Justifiez leur emploi. (0,5 point)
Le récit est au passé et ces deux temps sont des temps du passé. L’impar-
fait est employé ici pour des actions non limitées dans le temps («deve-
nait », « se tenait »…). Le passé simple est employé ici pour des actions
qui se produisent à un moment précis dans le temps («parla»,«se
mit »). Ou : l’imparfait est utilisé pour des actions de second plan, le
passé simple pour des actions de premier plan.
2.a) Quel est le rapport logique entre les deux premières phrases?
(0,5 point)
Entre les deux premières phrases, le rapport logique est l’opposition.
b) Quel terme souligne ce rapport? (0,5 point)
Ce terme est mais.
c) Que veut montrer ainsi le narrateur? Rédigez votre réponse sans uti-
liser les mots du texte. (0,5 point)
Le narrateur veut montrer que Poulet était déjà développé physiquement,
il ressemblait à un homme, en revanche, il était encore très jeune dans sa
tête. Il y a opposition entre son apparence physique et son âge mental.
3. Expliquez l’expression «étouffé entre ces deux jupes » (l. 2). (1 point)
Cette expression signifie que Poulet vivait constamment entre les deux
femmes, sa mère et sa tante, et qu’il n’avait pas assez de liberté pour se
développer. Les jupes représentent les femmes.
4. Relevez les trois reprises nominales désignant le fils. Quelle informa-
tion chacune d’entre elles apporte-t-elle sur les relations que la mère
entretient avec son fils? (1,5 point)
«son fils » (l. 14) : cette reprise indique simplement le lien de parenté
entre Poulet et Jeanne. C’est un terme neutre.
«le grand enfant » (l. 16) : cette reprise montre que la mère considère
encore Poulet comme un enfant, bien qu’il soit grand.
«ton enfant » (l. 22) : cette reprise met en valeur la relation affective
entre Jeanne et Poulet.
II. Le baron (4 points)
5. Pour quelles raisons le baron veut-il envoyer son petit-fils dans un
collège? Justifiez votre réponse en vous appuyant sur le texte. (2 points)
Le baron veut envoyer son petit-fils au collège pour qu’il puisse «devenir
quelqu’un »,pour qu’il soit instruit, sinon il sera «incapable de travailler ».
Il pense au bien de l’enfant plus qu’au bonheur de la mère : «tu sacrifies
ton enfant à ton bonheur particulier ».
6. Dans le quatrième paragraphe, comment le baron s’y prend-il pour
convaincre sa fille? (1 point)
Pour convaincre Jeanne, le baron imagine ce que Poulet pourrait dire
plus tard à sa mère : «Je ne suis rien, je ne sais rien par ta faute… » (l. 11).
Il rapporte ces paroles imaginées qui sont toutes des reproches.
7. Relevez les expressions (au moins quatre) par lesquelles il juge le
comportement maternel. (1 point)
>Ne pas justifier chaque verbe mais faire une
réponse globale.
>Ne pas confondre les connecteurs logiques
(ce sont des mots : cependant, pour, bien que,
parce que, etc.) et les liens ou rapports
logiques (ce sont des idées : la cause, la
conséquence, l’opposition, le but, etc.). Ici le
rapport logique est l’opposition, marquée par
le connecteur logique mais.
>«souligne » signifie ici marque, fait voir.
>La réponse ici doit être rédigée,
c’est-à-dire faite avec des phrases complètes.
>Ici aussi la réponse est rédigée sous forme de
phrases complètes. Ne pas faire de phrases
longues. Si vous connaissez le nom de la figure
de style ici employée, vous pouvez l’indiquer : il
s’agit d’une métonymie et même, plus précisé-
ment, d’une synecdoque (les femmes sont
représentées par un élément de leur vêtement).
>Relever consiste à simplement reprendre
des mots. On donne une explication par mot
relevé. On ne peut pas relever «Poulet » car
c’est le premier mot qui désigne le garçon
dans le texte, ce n’est pas une reprise.
On ne peut pas non plus relever «il»car ce
n’est pas une reprise nominale, mais pronomi-
nale (il est un pronom personnel).
>S’appuyer sur le texte signifie faire des cita-
tions, pour montrer que ce qu’on dit est juste.
Deux ou trois citations, bien choisies, suffi-
sent. Ne pas relever des passages entiers; on
rédige ses propres phrases dans lesquelles on
intègre des citations.
>On peut citer le texte même si cela n’est pas
expressément demandé.
PRÉPARER LE BREVET
>On peut introduire le relevé par une ou
plusieurs phrases. Une expression n’est pas
un simple mot mais un ensemble de mots.