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la lutte primale… (refrain en devenir)
HUMEUR : C’est la lutte primale… (refrain en
devenir)
jeudi 3 novembre 2016, par Pierre Titeux, chroniqueur
Vous z’avez vu l’info ?!? Selon le « Futuromètre », nouveau « baromètre citoyen » réalisé par l’institut
AQ-Rate (trouvez le jeu de mot) pour la RTBF et « Le Soir » [1], 91% des Belges francophones – ou, plus
précisément, 90,9% des 3470 personnes de 18 ans et plus ayant répondu au questionnaire – veulent «
changer de système » ! Nonante et un pour cent… Ça me laisse personnellement pantois. Pas toi ?
Oh, bien sûr, il y en aura pour m’objecter la non fiabilité des sondages en me ressortant, par exemple, la
fameuse enquête menée à la fin du siècle dernier sur les choix télévisuels des Français. ARTE y talonnait
TF1 alors que la réalité des audiences plaçait l’une largement sous les 5% et l’autre bien au-delà des 40...
Cerise sur le gâteau, à la question de savoir quelle amélioration ils souhaitaient voir apportée à leur
préférée, les amateurs auto-déclarés d’ARTE s’exprimaient majoritairement en faveur d’une diminution de
la publicité… qui était déjà bannie de la chaîne !
J’entends ces appels à la prudence et suis disposé à considérer que, selon l’expression consacrée, les
chiffres du Futuromètre ne constituent « rien d’autre qu’une photographie de l’opinion publique à un
moment donné ». Mais n’empêche : nonante et un pourcent !!! Même en tenant compte de la « marge
d’erreur de 1,60% à la hausse comme à la baisse » qui, au mieux, porterait les censeurs à 92,5%, cela
signifie que 7,5% des francophones belges – enfin, des 3740 personnes etc. etc. etc. – se satisfont du
système actuel. Et ça, c’est quand même à se les mordre. Car on se demande bien où ils se cachent, ces «
satisfaits » !
Entre ceux qui veulent plus de libéralisation de l’économie, de services publics, de sécurité, de taxation du
capital, de contraintes sociales ou environnementales... et ceux qui veulent moins de tout ça ; ceux qui
s’épuisent le moral à chercher vainement un emploi et ceux que le travail conduit au burn-, bore- ou
brown-out ; ceux qui trouvent qu’on paie trop d’impôts, que les riches sont trop riches et eux trop pauvres,
qu’on accueille trop – ou pas assez… – de réfugiés, que les politiciens sont tous des menteurs incapables
qui ne font rien que s’en mettre plein les poches, que la justice est corrompue et que, de toute façon, ce
pays est pourri, j’échoue pour ma part à les localiser. A vrai dire, les seuls qui me semblent réellement se
satisfaire « du système » sont les membres de la famille royale qui y jouissent, il faut l’admettre, d’un
statut leur garantissant une vie peinarde. Mais même en comptant très large, les de Belgique sont loin de
représenter plus de 7 francophones sur cent…
Enfin, je ne vais pas ergoter davantage sur les chiffres car l’essentiel est ailleurs.
Il est où l’essentiel, il est où ? Il est là, l’essentiel, il est là : ça veut dire quoi, « changer le système » ?
C’est une chose de comprendre, fut-ce tardivement, que des formules qui échouent depuis des décennies
ne peuvent plus être considérées comme des solutions plausibles. Ç’en est une autre de s’accorder sur ce
qui rend lesdites formules caduques et sur celles qui doivent les remplacer. L’idéal Bisounours d’un
monde dont le chômage, la pollution et la précarité seraient bannis, où nous serions tous des producteurs
respectueux et des consommateurs responsables unis par un même souci du bien commun se heurte en
effet à des réalités qui imposent de faire des choix en attendant l’hypothétique avènement de ce paradis