
richesses, il est faux de prétendre que seule la logique capitaliste prévaut. En fait plusieurs 
logiques guident l’essor du développement économique et social de nos sociétés : celle du marché 
assurément mais aussi celle de l’État et celle des entreprises collectives et de la société civile.   
 
Pour ce qui est du Québec en particulier, l’économie sociale en général, la coopération et la 
mutualité surtout, a de profondes racines sur l’ensemble du territoire. Les coopératives agricoles 
et financières de même que les mutuelles d’assurance ont déjà dans plusieurs cas plus d’un siècle 
d’histoire. Elles ont souvent joué et jouent encore un rôle central dans le développement 
économique et social du Québec. Les coopératives forestières, les coopératives de travail, les 
coopératives en milieu scolaire, les coopératives funéraires, les coopératives d’habitation et 
d’alimentation de même que les coopératives de solidarité multiservices font de même depuis 10, 
20, 30 ou 40 ans.  
 
La proposition qui inspire l’ensemble de ce texte est qu’il y a au Québec une «économie sociale 
coopérative» (à dominante d’entreprises collectives) et une «économie sociale associative» (à 
dominante d’entreprises sociales)2. De même nous affirmons qu’il y a deux familles dans cette 
économie sociale et des regroupements qui leur correspondent.    
 
Petit détour historique d’abord : l’économie sociale nous rappelle en effet en premier lieu ce 19e 
siècle, dans les pays du Nord, là où les mouvements sociaux ont cherché les voies d'une 
économie plus humaine, les voies d’une création de richesses qui ne se réduit pas à l’économie 
de marché. Des sociétés d'entraide devenues par la suite des mutuelles, des coopératives ou des 
associations ont pris forme dans la mouvance du mouvement ouvrier de l’époque (Gueslin, 
1998). Bref, il y a une économie plurielle, notion relativement récente évoquée dans certains 
travaux de l’OCDE (1996) et celle de «modèle de développement» (Bourque, 2000). Autrement 
dit des économies, certes avec marché, mais surtout des économies où l'intérêt général est plus 
fortement présent si les économies publique et coopérative y sont bien vivantes. Tel est aussi le 
sens de l'idée d'une économie où l'ensemble des entreprises subissent la sanction du marché 
(l'impératif de croissance) sans que s'éclipsent pour autant d'indispensables règles du jeu 
favorisant un développement économique au service de la société. Ce développement et cette 
démocratisation de l’économie ne sont cependant rendus possibles que par un incessant rapport 
de forces entre les différents pôles de développement que sont l’entreprise privée, l’entreprise 
publique et l’entreprise collective3. 
 
C’est ce qu’expriment à leur manière les économistes Bartoli (2003) et Petrella (2007) dans leurs 
plus récents travaux. Bartoli affirme que définir l’économie aujourd’hui n’est pas une tâche aisée 
                                                 
2 Il ne faut pas confondre «entreprise collective» et «entreprise sociale». Cette dernière évolue à l’intérieur d’un 
champ spécifique, comme c’est le cas de la plupart des OBNL qui ont des activités économiques chez nous et, à coup 
sûr, celui des coopératives sociales italiennes qui ont forgé cette notion, c’est-à-dire celui du «welfare» et de la 
mouvance engagée dans la transformation du service public de l’État-providence dans les secteurs de la santé, des 
services sociaux et de l’insertion sociale par le travail. (Defourny et Nyssens 2006). Elles sont de ce fait fortement 
dépendantes des politiques publiques.Tandis que l’entreprise collective est présente dans tous les secteurs ou 
presque, évolue surtout à partir de l’autogénération de revenus que la vente de ses produits ou services lui procure 
sur le marché (privé et/ou public) tout en disposant d’une forte culture de viabilité économique propre. Au Québec, 
c’est surtout le cas des coopératives. Voir à ce sujet mon livre (Favreau, 2008 : 81-122). 
3 Hall et Soskice (2001) parlent d’«économies de marché libérales» et d’«économies de marché coordonnées», ces 
dernières étant celles auxquelles nous faisons référence : intervention plus marquée de l’État, présence plus forte de 
la société civile (syndicats, entreprises collectives…).   
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