Groupe de Développement Social : Aurélie Monot, Fanny Morel, Anne Reubrecht, Rémi Starck, Odile Verbeken
Sous la Direction de M. Jean-Michel Wachsberger & de M. Vincent Caradec
Université de Lille 3, Master 2 Sociologie « Stratégies de Développement Social, 2012-2013
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ou moins durable, car elle va de pair avec des
marges de manœuvres, des responsabilités
importantes pour le travailleur. Mais sur le long
terme, les conditions de travail ou mutations
techniques peuvent créer une usure physique
ressentie en rapport avec l’âge et l’état de santé.
A l’usure physique s’ajoute une usure
morale, quand les conditions de travail sont
jugées stressantes, voire angoissantes et donc
difficiles à supporter pour le salarié. Cette usure
peut provenir d’une charge émotionnelle trop forte
au travail, un risque que nous retrouvons
notamment chez les personnes travaillant au
contact du public. Dans ces situations, les formes
d’organisation sont parfois caractérisées par une
faible autonomie et peu de soutien ou de
reconnaissance du travail réalisé de la part des
collègues et employeurs. De plus, 9 personnes
déclarent avoir subi un harcèlement moral, parfois
sexuel, et 10 enquêtés expriment le sentiment
d’être jugés et stigmatisés par leur âge au travail,
ce qui peut ouvrir la voie à la marginalisation de
ces salariés dans l’entreprise. Nous remarquons
également que ceux qui ont davantage
d’ancienneté perçoivent plus facilement une
dégradation de leurs conditions de travail, en
lien avec une transformation de l’organisation.
Ce sont principalement les changements de
direction, d’horaires, de cadence à tenir,
d’ambiance au travail, ou concernant l’arrivée des
nouvelles technologies, qui sont critiqués.
B) Travailler coûte que coûte : une santé
négociée
L’analyse des entretiens révèle chez
certains ouvriers et employés, un déni des risques
des conditions de travail sur la santé. Ils continuent
à travailler en repoussant leurs limites, quitte à
différer les alertes lancées par le corps usé
. Au
contraire, quand les salariés prennent conscience
de l’usure physique ou morale, commence pour
eux une démarche de reconnaissance de la
souffrance ressentie, auprès des collègues et de
l’employeur qui est peu prise en compte. De plus,
toujours en quête de guérison - ou au moins
d’atténuation de la douleur ressentie - les individus
vont se tourner vers le monde médical afin de
calmer les douleurs et continuer à travailler. Plus
la douleur s’intensifie, plus elle justifie les
parcours de soins (rendez-vous médicaux,
opérations, etc.). Ce qui peut entrainer des arrêts
maladie de courte durée comme c’est le cas pour
18 des enquêtés.
C) Une souffrance au travail parfois associée à
des évènements personnels douloureux
Les conditions de travail pouvant impacter
la santé des travailleurs doivent également être
mises en rapport avec des évènements de la vie
privée qui font sens pour les individus. En effet, la
vie privée a une influence sur le rapport au
travail, et inversement. Le parcours professionnel
en lui-même peut être influencé pour ceux qui
décident d’arrêter leur activité professionnelle pour
des raisons familiales. Cette pause dans le parcours
professionnel est suivie d’une période de recherche
d’emploi qui se révèle difficile notamment pour
celui qui doit justifier de son âge ou de son
expérience perçus comme trop coûteux, ce qui peut
Comme l’a également démontré Anne Françoise Molinié,
« Les salariés quinquagénaires, entre fragilisation et
protection », Retraite et société, 2006/3 no 49, p. 11-37.