Erdogan, en campagne pour les législatives, joue la carte de l`islam

Erdogan, en campagne pour les gislatives, joue la carte
de l'islam
AFP / armenews.com - 20/5/2015
A un mois des élections législatives en Turquie, le président islamo-
conservateur Recep Tayyip Erdogan est descendu dans l’arène politique
prêter main forte à son parti, jouant notamment la carte de l’islam.
Bien que la Constitution lui ordonne de rester neutre dans la bataille qui
se profile pour le scrutin du 7 juin, le chef de l’Etat, 61 ans, est
omniprésent dans les médias.
Il a ainsi organisé toute une série d’inaugurations à travers le pays,
transformées pour l’occasion en meetings électoraux lors desquels il a loué
les réalisations du parti au gouvernement, le Parti de la justice et du
développement (AKP, issu de la mouvance islamiste) qu’il a fondé et dirigé
jusqu’en 2014.
Celui qui est aux rênes de la Turquie depuis 2003 a d’ailleurs provoqué la
controverse en brandissant un Coran traduit en kurde, devant les masses
très conservatrices d’Anatolie, un geste inédit dans ce pays laïc toute
référence à la religion est interdite.
“Ma vie est guidée par le Livre saint. C’est ainsi que j’ai vécu, que je
vis et que je vivrai“, a lancé le président, de confession musulmane
sunnite. Une attaque claire contre le chef du principal parti d’opposition,
Kemal Kiliçdaroglu, issu de la minori alévie, une branche de l’islam
progressiste.
“On ne connait pas bien ses références par rapport au Coran“, a accusé
M. Erdogan, parlant du dirigeant du parti républicain du peuple (CHP,
centre-gauche) qui s’est, pour sa part, dit “consterné par l’exploitation
massive du Livre saint“ à des fins politiques.
Ce geste du chef de l’Etat a été dénoncé par l’ensemble de la classe
politique, majoritairement sunnite.
“Notre président est un bon musulman et il le proclame, il n’y a rien
d’anormal à ce qu’il tienne un Coran dans la main“, le défend au contraire
Ekrem Bedri, venu prendre des brochures dans un bureau électoral de l’AKP à
Ankara.
Selon les observateurs pourtant, le geste de M. Erdogan traduit une
certaine usure qui menace l’AKP, au pouvoir depuis 2002, et affaibli par le
manque de charisme de son nouveau dirigeant, le Premier ministre Ahmet
Davutoglu.
La majorité absolue loin d’être acquise -
“L’AKP perd des voix, c’est pour cette raison que le président agite le
Coran (...) pour rallier le vote des électeurs attachés à l’islam“, a
déclaré Tarhan Erdem, directeur de l’institut de sondage Konda qui prédit
41% d’intentions de vote pour l’AKP au scrutin de juin contre 47,5% à celui
de 2011.
“Erdogan, qui a un discours très populaire, est adulé par ses partisans qui
ont du mal à comprendre la rhétorique plus intellectuelle de M. Davutoglu“,
commente à l’AFP Serkan Demirtas, chef de bureau du journal Hürriyet Daily
News.
L’éventualité selon laquelle le parti pro-kurde HDP (Parti de la démocratie
des peuples) pourrait raffler des bastions de l’AKP dans le sud-est kurde
fait frémir le parti au pouvoir. “Même avec un score élevé, la majorité
absolue au Parlement n’est pas acquise pour l’AKP“, commente M. Erdem.
Une majorité dont l’homme fort de Turquie pourrait avoir besoin : il
cherche à imposer la “nécessité“ de transformer le système parlementaire
actuellement en vigueur en régime présidentiel, une manière d’accroître ses
pouvoirs de président, actuellement largement protocolaires.
“Il faut donner 400 députés au parti qui défend ce système“, a-t-il ainsi
déclaré, se posant clairement en défenseur de l’AKP.
Le parti au pouvoir, assuré de remporter le scrutin de juin, a besoin de
367 des 550 sièges au Parlement pour modifier la Loi fondamentale et à
défaut 330 voix parlementaires pour convoquer un référendum afin de
répondre aux ambitions de changement de régime du chef de l’Etat, des
objectifs qui semblent difficiles à atteindre d’après les sondages.
Selon une enquête publiée jeudi, 73% des Turcs s’opposent à l’instauration
d’un système présidentiel désavoué par l’ensemble de l’opposition qui y
voit une opportunité pour M. Erdogan, accusé de dérive autoritaire et
islamiste, d’affermir son pouvoir personnel.
Agacé de la “partialité“ de M. Erdogan, l’opposition a saisi les autorités
électorales qui ont rejeté les demandes pour le sanctionner.
“Je suis impartial“, a rétorqué l’intéressé, “même si mon coeur penche vers
un parti“.
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