THEMA
Terre promise
Qu’en est-il de l’identité juive ? Est-ce un destin, un choix ? Suffit-il d’avoir une mère
juive, de se proclamer juif, d’être converti, d’être victime d’antisémitisme ?
ARTE explore les différentes facettes de la judéité, à travers l’histoire étonnante
d’une communauté italienne devenue juive dans les années 30,
et un documentaire sur “la loi du retour”.
22.25-00.25
jeudi 3 octobre 2002
Contact presse : Grégoire Mauban / Dorothée van Beusekom / Souad Khaldi - 01 55 00 70 42 / 73 25 / 70 43
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22.25San Nicandro
Documentaire par Alexandra Pisar-Pinto et Pierre-Henry Salfati
Réalisé par Pierre-Henry Salfati
(France, 2002-1h22mn)
Coproduction : ARTE France, BBM Productions Limited, Boyard Production
L’histoire étonnante d’une communauté
italienne convertie au judaïsme par un
paysan-prophète, qui voulait faire renaître le peuple hébreu qu’il
croyait disparu.
1930. À San Nicandro, petit commune agricole de la région des
Pouilles où vivent des paysans pauvres et illettrés, Donato
Manduzio, mutilé de la guerre de 1914 qui apprit à lire et à
écrire pendant un séjour à l’hôpital, tombe sur un exemplaire de
l’Ancien Testament. Immédiatement, c’est le choc. Lui qui, sa
vie durant, a tenu tête aux prêtres et aux évangélistes
protestants, se sent en totale affinité spirituelle avec le peuple
hébreu qu’il croit anéanti depuis des siècles. Animé d’une
fulgurante passion, Manduzio redécouvre les enseignements
de la Torah qu’il communique à son voisinage, faisant des
disciples dans vingt-trois familles. Coupés du monde, ceux
qu’on appelle désormais les sabbatistes réinventent alors le
judaïsme, persuadés d’être les seuls adeptes au monde de
cette croyance millénaire… Issue elle-même de cette petite
communauté singulière, Bathshéva Manes Tritto retrouve ceux qui ont connu le “Moïse
des Pouilles”, notamment Maria Leone, gardienne de la synagogue fondée par
Manduzio ; Lucia Giordano, nièce et première disciple du prophète ; mais aussi des
descendants de convertis, dont la famille Leone et sa propre famille qui vivent
désormais en Israël.
Sur la foi d’un seul homme
Destin étonnant que celui de cette communauté qui a choisi d’être juive, sans connaître
la moindre tradition hébraïque, guidée par la seule foi d’un homme. Brocardés par les
villageois pour leur paganisme, rejetés par le rabbinat de Rome croyant à une
supercherie, les fidèles de Manduzio n’abandonnèrent jamais leur conviction. Au point
de se proclamer juifs devant des soldats allemands incrédules et d’être les premiers à
émigrer vers Israël, sans leur prophète trop vieux pour faire le voyage. Revenant sur
cette histoire fascinante à travers des images d’archives, les témoignages de fidèles
de l’époque, de l’historien Sergio Minerbi et de l’ancien secrétaire du rabbin de 1934,
ce documentaire est aussi l’occasion pour Bathshéva Manes Tritto de mieux poser la
question de son identité. Issue de cette judéité particulière, sa famille est désormais
totalement intégrée à la société israélienne. Ils sont devenus des juifs comme les
autres. Pourtant, quand ils reviennent à San Nicandro, ce sont toutes les contradictions
d’un peuple, ses multiples facettes qui resurgissent. Juif “de race”, converti, laïc ou
religieux, chacun a sa manière d’envisager sa judéité. Et, pour les rares fidèles de
Manduzio qui subsistent au village, essentiellement des femmes, être juif, c’est encore
autre chose : une conviction, un prophète et des rites qu’ils ont choisis et que jamais
un rabbin ne contrôlera.
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“Être juif, c’est appartenir
au troupeau des brebis.”
(Donato Manduzio)
23.50La loi du retour
Documentaire de Pierre-Henry Salfati
(France, 2002-33mn)
Coproduction : ARTE France, Boyard Production
Entre conviction religieuse et
vision laïque, la définition de
l’identité juive, nécessaire à
l’application de la loi du retour,
suscite toujours autant de
débat…
En 1948, au moment de la
création d’Israël, le
g o u v e rnement de Ben
Gourion est confronté à une
question cruciale : qui doit
bénéficier de la loi du retour
et de ses avantages ?
Autrement dit : qui est juif ?
Devenue un objet de
législation avec ses multiples incidences pratiques, la formulation de l’identité juive ne
va pas sans difficulté. Suffit-il d’avoir une mère juive, de se proclamer juif, d’être
converti, d’être victime d’antisémitisme ? Au moment où l’émigration massive de
Russes relance les débats, Nathan Sharansky, ministre israélien de la Construction,
Elie Barnavi, ambassadeur d’Israël en France, Claude Klein, juriste et historien, Michel
Gurfinkiel, écrivain et rédacteur en chef de Valeurs actuelles, Eli Yishai, ministre
israélien de l’Intérieur et le rabbin Haï Barkatz reviennent sur l’histoire de cette question
et apportent leur point de vue.
Une définition juridique
Selon la loi du retour,“est juif celui qui est né d’une mère juive ou qui est converti au
judaïsme et qui n’appartient pas à une autre religion”. Une définition juridique qui crée
des discordances au sein de la communauté israélienne : d’une part les orthodoxes se
méfient des conversions extraterritoriales, de l’autre les laïcs aimeraient étendre la loi
aux conjoints, enfants et petits-enfants de juifs. Une décision qui, selon les religieux,
signifierait l’anéantissement de l’identité juive. Mais, être juif, n’est-ce pas simplement
avoir une foi sincère comme la célèbre convertie Ruth la Moabite ? Ou être désigné
comme juif par les autres ? Car, si un quart de sang juif était suffisant pour aller aux
camps de la mort, pourquoi ce quart ne le serait-il plus pour vivre en Israël ? Autant de
questions qui, selon l’auteur, sont urgentes à repenser car “de la solution de ce
problème, dépend la survie d’Israël”.
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À propos de San Nicandro
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En recréant une religion à partir de rien, en l’absence de tout contexte socio-religieux,
Manduzio s’est transformé en une sorte de « Robinson Crusoé spirituel » dont l’expérience
jette une lumière nouvelle sur les ressorts profonds de l’identité religieuse.
Les responsables religieux juifs se sont méfié de Manduzio. Craignaient-ils de devoir
reconnaître que le judaïsme, à l’instar des autres religions, pouvait être un choix et non
seulement une question de filiation ? Les rabbins eux-mêmes étaient-ils devenus rationalistes
au point de ne plus croire en une histoire aux dimensions quasi bibliques ?
Rétrospectivement, la question de savoir si Manduzio était ou se prenait pour un prophète
semble superflue. On trouve son empreinte dans le fait qu’il a changé la destinée de
plusieurs générations d’individus. Au delà, il est à l’origine d’une histoire dont la portée est
universelle : les convertis de San Nicandro n’avaient pas besoin de savoir qu’un grand
nombre de gens répandus de par le monde partageaient leur religion. En nous ramenant
aux sources de la foi, leur témoignage est un message d’authenticité qui met en exergue
les fréquentes dérives actuelles des religions établies.
Le film posera forcément la question du devenir de cette communauté, vouée en Israël à
l’intégration et à San Nicandro, à une disparition probable.
Alexandra Pisar-Pinto
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Le Prophète de San Nicandro
Donato Manduzio est bien sûr la figure la plus surprenante.
Fils d’un marchand de vin, il se distingue dès son plus jeune age par son esprit rebelle et son
manque de respect envers les autorités religieuses, plus particulièrement le curé du village.
Pourtant, Manduzio excelle au catéchisme. Il est forcément peu instruit, puisqu’à cette époque,
l’Etat et l’Eglise considèrent encore l’enseignement comme un luxe superflu, voir dangereux,
pour les paysans.
En 1915, dès que l’Italie entre en guerre, Manduzio s’engage. Il rentre chez lui trois ans plus
tard, paralysé mais sachant lire et écrire.
Prédisposé à la magie et doué d’une grande perspicacité, Manduzio commence à exercer
comme guérisseur et à arbitrer les petites disputes entre les villageois de San Nicandro. Les
gens en viennent peu à peu à le considérer comme un sage…
C’est une période d’effervescence et de troubles. Les chemises noires ont conduit Mussolini au
pouvoir. Les prêcheurs évangélistes se multiplient dans les campagnes de l’Italie méridionale
où ferveur religieuse, superstition et ignorance se mêlent.
Nous disposons d’une grande quantité de textes écrits par Manduzio depuis sa première lecture
de l’Ancien Testament. Il a, quasiment jusqu'à la fin de sa vie, tenu un journal où il notait les
rêves et les révélations mystiques qui l’ont guidé dans son rôle de prophète, et l’ont rendu
suffisamment courageux pour prédire l’avenir, se déclarer juif aux autorités fascistes, et même
guérir une femme d’une tumeur en lui prescrivant un régime de mozzarella !
L’atmosphère de la région du Gargano, où un berger solitaire vient parfois troubler un paysage
désolé, a peu changé depuis l’époque où Manduzio jetait ses rêves sur le papier, et nous
pourrons partager les impressions qui devaient alors être les siennes. A San Nicandro, les
mêmes maisonnettes de torchis blanc bordent les ruelles étroites et sinueuses. La demeure de
Manduzio, qui était aussi sa « synagogue », est toujours là, dans la via dell’ Gargano. Rythmée
par les processions religieuses et les carnavals bruyants qui traversent notre film, la vie de cette
petite ville, qui échappe si totalement à l’Histoire, s’écoule uniforme et somnolente.
Dans un oratoire discret, le rite hébraïque s’y pratique encore comme Manduzio et ses fidèles
l’avaient conçu avant la guerre. Les jeunes comme leurs aînés chantent les Psaumes, qui ont
sacrifié à l’imagerie locale en pugliese.
La constance avec laquelle ces gens et leurs proches installés en Israël continuent, 50 ans plus
tard, à porter le message de Manduzio témoigne du charisme et de la force de ce paysan hors
du commun.
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