La distribution géographique des AMP
est déséquilibrée
Le déséquilibre géographique, déjà mentionné en 2008, est encore
marqué en 2012, même s’il s’atténue : 96% des AMP sont locali-
sées dans le nord du bassin (84 % hors sites Natura 2000). Mais
plusieurs pays du Sud et de l’Est (Algérie, Maroc,Tunisie, Libye,
Israël, Liban) ont de nombreux projets en cours, qui permettraient
en partie de rééquilibrer le système. Plus de la moitié des AMP de
statut national est concentrée en Italie, France et Espagne, tandis
que 67% des sites Natura 2000 en mer se trouvent en Grèce et en
Italie(2). Les AMP sont essentiellement côtières avec 86% de la sur-
face d’AMP localisée dans la zone des 12 milles nautiques (m. n.),
hors Pelagos. Cette zone, où les instruments juridiques existent,
est couverte à 8,5%, par des AMP, avec une forte contribution du
Sanctuaire Pelagos (6,1%).
La zone située au-delà des 12 m.n., qui représente 74% de la
surface de la Méditerranée, est protégée à moins de 3% dont plus
des 3/4 pour Pelagos.
Le constat
(4) L’effectivité de la gestion a été mesurée à partir de plusieurs paramètres issus des réponses
au questionnaire envoyés aux gestionnaires (réponses de 80 AMP)
Distribution des AMP de statut national par région
MONTENEGRO
1
5 413 km
FRANCE
58 1
18
0,51 km
MONACO
2
2 684 km
ESPAGNE
96
41
2 951km
ITALIE
188 23
32
1,82 km
SLOVENIE
4
2
525 km
CROATIE
10
126 km
ALBANIE
1
3 011 km
GRECE
152 3
13
2 825 km
TURQUIE
14
32 km
SYRIE
3
0,22 km
LIBAN
42
22 km
ISRAEL
810
357 km
EGYPTE
2
307 km
LIBYE
3
3
6 km
CHYPRE
71
204 km
MALTE
2 2
6
208 km
TUNISIE
3
3
33 km
ALGERIE
6
2
231 km
MAROC
2
x
x
x km
AMP
x
Nombre de sites
Natura 2000 en mer Nombre de sites
AMP en projet Nombre de sites
AMP transfrontalières
Surface couverte
LEGENDE
(1) D’après les derniers travaux de Spalding
et al.
La représentativité des habitats est
variable
L’analyse montre que l’étage infralittoral, qui porte plusieurs des
écosystèmes remarquables de Méditerranée (herbiers de phanéro-
games, maërl, faciès à vermets, …), est le mieux représenté dans
le système d’AMP (10% ou 13% avec Pelagos). Au sein de cet
étage, les habitats dont le substrat est majoritairement rocheux
sont les mieux représentés (16%).
La tendance est similaire pour l’étage circalittoral, couvert à 7%
par les AMP, où le substrat rocheux, support du coralligène, est le
mieux représenté (6,5%).
La distribution des données sur les habitats coralligènes et les
herbiers à Posidonia oceanica et à Cymodocea spp., n’est car-
tographiée de façon relativement homogène que dans le bassin
occidental de la Méditerranée, où ils sont relativement bien cou-
verts par des AMP, respectivement 12%, 50% et 8%, sur la base
des connaissances actuelles (toutes AMP sauf Pelagos). Ces habi-
tats sont les plus fréquemment mentionnés par les gestionnaires
comme présents dans leur AMP (respectivement 69%, 52% et
19% des AMP ayant répondu) ; tous les autres habitats embléma-
tiques(3) sont déclarés dans moins de 35% des AMP seulement.
Le système d’AMP n’est en revanche que très faiblement repré-
sentatif des habitats benthiques profonds (couvert en grande partie
grâce à Pelagos), Les biocénoses profondes uniques de Méditer-
ranée, tels que les suintements froids et les récifs coralliens d’eaux
froides, ne sont pas protégées.
A l’exception des canyons et des monts sous-marins (représenta-
tion de 7% et 13% respectivement), les autres gures remarquables
de mer profonde (monts, collines et bancs sous-marins) sont très
faiblement représentées.
Le rapport propose aussi une biorégionalisation du domaine épi-
pélagique sur la base des caractéristiques des masses d’eau
océaniques.
La gestion des AMP n’est pas sufsante
Certains progrès sont enregistrés depuis 2008, mais le niveau glo-
bal de gestion des AMP de Méditerranée reste toujours faible sur
plusieurs points(4) : si plus de 90% des AMP
de statut national ont un gestionnaire,
75% des sites Natura 2000 n’en ont
pas, et plus de la moitié des AMP du
panel d’enquête n’ont toujours pas
de plan de gestion. Or, un plan de
gestion dénissant des objectifs et
stratégies de conservation clairs, à
condition qu’il soit appliqué, est un
indicateur important de bonne gestion.
L’espoir d’une amélioration existe ce-
pendant, notamment dans les pays du
Sud et de l’Est, puisque 22% des AMP
ont indiqué être en train d’élaborer leur plan de gestion au moment
des enquêtes. Près des 3/4 des AMP ayant un plan de gestion l’ont
déjà évalué, et l’analyse de ces évaluations devrait déjà pouvoir
permettre de disposer d’une idée de l’efcacité de la gestion.
En revanche on note un progrès sur le plan des états de réfé-
rence écologique et des suivis réguliers des paramètres et
indicateurs de l’AMP, que 70% et 80% des AMP, respectivement,
indiquent assurer (39% en 2008).
Les ressources humaines affectées à la gestion ne sont pas
négligeables. En moyenne, 84% des AMP indiquent avoir du per-
sonnel permanent, complété le plus souvent par du personnel inté-
rimaire et saisonnier.
La surveillance, tout comme l’application des peines en cas
d’infraction, sont reconnues comme des éléments essentiels pour
l’efcacité des AMP. Dans le panel analysé, si seul un quart des
AMP a déclaré avoir du personnel assermenté, la plupart d’entre
elles s’appuient pour la surveillance sur d’autres partenaires (gardes
côte, police maritime). La réalité et l’effectivité de cette surveillance
sont difciles à évaluer. Le nombre d’heures de surveillance varie
d’une moyenne de 8,5 h/jour de surveillance dans les AMP du
Nord et de 1,5 h/jour pour les AMP des pays du Sud.
Les moyens nanciers sont essentiels à une bonne gestion. Par-
mi les AMP ayant répondu, celles du Nord-Ouest seraient à ce jour
les seules à disposer de budgets permettant d’assurer une ges-
tion à priori efcace. La part d’autonancement concerne 36% des
AMP, ce qui est encore trop peu pour assurer la pérennité d’AMP
n’ayant pas d’autres ressources, et l’engagement du secteur privé
est faible (8 AMP seulement ont signalé en bénécier).
L’étude montre donc que toutes les AMP de Méditerranée n’ont
pas les mêmes capacités ni les mêmes moyens de gestion : for-
mation, équipement, gouvernance,... La distribution géographique
de ces besoins de gestion, matériels et nanciers notamment, doit
faire l’objet d’une analyse plus ne avec les gestionnaires. L’éva-
luation des besoins en renforcement des capacités a déjà été
réalisée à l’initiative du réseau MedPAN (étude menée par le WWF
Méditerranée).
Les activités de loisirs et la pêche (artisanale et de loisirs) sont
les usages que les gestionnaires considèrent exercer le plus de
pressions sur les AMP.
NON
30% OUI
44%
EN COURS
d’élaboration
22%
Suivis réguliers
Etudes ponctuelles
Conditions
physico-chimiques
Espèces Pêche Tourisme Polluants Fonctions
écosystème
80% -
60% -
40% -
20% -
0% -
Existence d’un plan de gestion
dans les AMP du panel
Pourcentage d’AMP déclarant pratiquer des suivis réguliers et des études
ponctuelles sur les thématiques indiquées
Représentativité des sous-régions écologiques
Mer d’Alboran
1,05%
Bassin Algéro-Provençal
1,42% Mer Tyrrhénienne
1,91%
Plateau Tunisien /
Golfe de Syrte
0,13%
Mer
Adriatique
0,42%
Mer Levantine
0,21%
Mer Egée
2,35%
Mer Ionienne
0,28%
Nombre, surface et localisation des AMP existantes et en projet par pays méditerranéen
Les classes d’habitats benthiques issues du croisement de la couche bathy-
métrique et de la couche des sédiments de Méditerranée
La représentativité des sous-régions
écologiques est faible
La mer Egée est la mieux couverte à hauteur de 2,35% mais quand
on prend en compte Pelagos, c’est le bassin Algéro-Provençal et la
mer Tyrrhénienne qui sont les mieux couverts (12,55% et 12,51%
respectivement).
La représentativité des espèces est
variable
Les espèces menacées et celles d’importance pour la conservation
considérées dans le rapport ont une représentativité faible dans le
système actuel des AMP.
Parmis les mammifères marins considérés dans ce travail, seul le
rorqual com mun voit son aire de distribution couverte à plus de
10% par le système d’AMP, dont Pelagos. Les 6 autres espèces
de cétacés ont une repré sentation plus faible, mais elles sont for-
tement mobiles ; leurs zones de protec tion prioritaires ont déjà été
identiées par ACCOBAMS.
L’aire de distribution du phoque moine, classé en danger critique
d’extinction avec quelques 250-300 individus restant, est très peu
protégée (moins de 2%). Les sites connus de nidication des tor-
tues sont aujourd’hui en nombres très restreints et localisés dans
le nord-est du bassin ; 29% des sites de ponte de Caretta caretta
et 19% des sites de Chelonia mydas sont actuellement protégés
dans le système d’AMP, ce qui est très peu compte tenu du statut
très menacé de ces espèces en Méditerranée. Les taux de repré-
sentativité de l’aire de distribution des oiseaux varient de 13% à 8%
(3 espèces sont considérées dans le rapport). Chez les poissons,
l’aire de distribution potentielle des 16 espèces considérées dans
l‘étude et représentatives de différents niveaux trophiques, est cou-
verte à 6% en moyenne par le système global d’AMP.
La grande nacre, la posidonie, le grand dauphin, la tortue caouane
et le mérou, sont les espèces les plus fréquemment mentionnées
par les gestionnaires d’AMP (panel de 80 AMP). Plusieurs d’entre
eux indiquent la présence d’un nombre plutôt élevé d’espèces
réputées très rares (dattes de mer : 60% des AMP ; phoque moine:
10% ou grand requin blanc : 6%), ce qui mérite de plus amples
investigations.
La cohérence écologique reste faible à
l’échelle de la Méditerranée
Un seul coup d’œil à la carte de distribution spatiale des AMP de
Méditerranée suft à voir que le système n’est pas cohérent: les
AMP sont concentrées dans le Nord, elles sont majoritairement dis-
tribuées en zone côtière (à part Pelagos), et de grandes portions du
littoral sud et est de la Méditerranée sont dénuées d’AMP.
Dans le bassin occidental, le plus riche, ainsi qu’au Nord-Est, le
nombre d’AMP n’est pas négligeable, notamment avec le réseau
des sites Natura 2000, et l’on pourrait donc considérer que le ré-
seau dans cette partie est plutôt cohérent ; mais la plupart des sites
Natura 2000 ne sont pas encore gérés.
L’étude de proximité entre les AMP de l’ensemble du bassin (dis-
tance euclidienne) montre que 60% sont à moins de 25 km de
distance de leur voisine la plus proche. Cependant la distance n’est
pas toujours un garant de la cohérence écologique, qui dépend de
la connectivité.
L’objectif de 10% de protection des
eaux méditerranéennes est loin d’être
atteint
Ces AMP couvrent une surface totale de près de 114 600 km²,
soit environ 4,56% de la Méditerranée ; et 1,08% si l’on exclut le
Sanctuaire Pelagos pour les mammifères marins en Méditerranée
(87 500 km²).
Les 161 AMP de statut national couvrent une surface de
18 500 km² (0,73% de la Méditerranée) ; les 9 AMP de statut inter-
national représentent 88 000 km² (3,5 % de la Méditerranée, 0,02%
sans le Sanctuaire Pelagos). Les 507 sites Natura 2000 en mer
totalisent 25 200 km² (1% de la Méditerranée). Parmi ces 507 sites,
122 représentent des surfaces sans recouvrement avec d’autres
AMP et représentent 8 100 km² de protection (0,32% de la Médi-
terranée).
Depuis 2008, 23 AMP ont été créées dans 10 pays, pour une
surface supplémentaire de 6 754 km², soit une augmentation
de près de 7% de la surface en 5 ans par rapport à la surface
de protection considérée en 2008, qui couvrait alors 4% de la
Méditerranée (ou 0,04% sans Pelagos).
S’y ajoutent 4 zones de pêche restreinte (ZPR) créées par la CGPM
(17 677 km², soit 0,7% de la Méditerranée) qui portent la surface
de protection à 5,26%.
Nos connaissances augmentent et sont
bancarisées dans le nouvel outil
MAPAMED
L’inventaire des AMP méditerranéennes
a permis de recenser et de géolocaliser
677 AMP, soit environ 7% du nombre
total d’AMP dans le monde(1). Toutes
les données collectées dans le cadre de
cette étude ont été intégrées dans la base de données MAPAMED
(mapamed.org), créée à cette occasion, qui constitue une avan-
cée majeure pour l’évaluation du système méditerranéen.
Parmi ces AMP, gurent 161 AMP de statut national, 9 AMP de
statut uniquement international et 507 sites Natura 2000 en mer;
40 AMP ont un, voire plusieurs statuts internationaux, dont 32 sont
des aires spécialement protégées d’importance méditerranéenne
(ASPIM). On compte 5 réserves de biosphère et seulement 2 sites
marins inscrits au patrimoine mondial, ce qui est singulièrement
peu dans cette mer unique et riche, autant sur le plan naturel que
culturel. De plus, 55 AMP sont en projet.
Les AMP sont de tailles et
d’anciennetés diverses
La diversité de tailles de la partie marine des AMP est grande,
la plus petite couvre 0,003 km² (Parc national d’Akhziv en Israël)
et la plus grande (sans compter le sanctuaire Pelagos pour les
mammifères marins) couvre environ 4 000 km² (Parc naturel marin
du Golfe du Lion en France). Mais 66% des AMP font moins de
50 km².
Plus de la moitié (61%) des AMP ont plus de 10 ans, ce que
l’on considère comme l’âge minimum pour qu’une AMP accède
à une certaine maturité, et 35% ont même plus de 20 ans, ce
qui constitue une occasion unique d’avoir une bonne idée de
l’efcacité de leur gestion.
Distribution géographique du nombre des AMP en Méditerranée
NORD-OUEST
58%
NORD-EST
26%
SUD
16%
4.56%
avec le Santuaire Pelagos
1.08%
10%
2012 : Niveau
de protection
en Med.
Représentativité des étages benthiques - AMP tous statuts
Circalittoral
Bathyal
Abyssal
Représentativité
I
avec Pelagos
sans Pelagos
12,6%10,2%
7,2%3,9%
4,2%0,6%
2%
Protection en Méditerranée en 2012
(3) La liste de référence des types d’habitats marins a été développée par le CA/ASP et peut être
consultée à l’Annexe 2 du « Statut des Aires Marines Protégées de Méditerranée » 2012.
(2) Une analyse comparative entre nations qui favorisent soit un nombre élevé de petites AMP
soit un plus faible nombre d’AMP de grande surface devrait pouvoir renseigner sur la qualité et
l’efcacité d’un réseau, notamment en matière de représentativité et de connectivité (lorsqu’il y
a gestion effective).