Juin 2009 | Volume 54 | Numéro 2
Pratique clinique
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niveaux élevés de l'hormone lutéinisante
et de l'hormone de stimulation folliculaire,
un état appelé "hypogonadisme primaire".
Les hommes atteints de diabète de type 2
affichent pour leur part de faibles taux de
testostérone et des taux tantôt faibles, tantôt
anormalement faibles d'hormone lutéini-
sante ou d'hormone de stimulation folli-
culaire. On parle alors d'hypogonadisme
secondaire ou hypogonadotrophique.
“
Un tiers des hommes
atteints de diabète
de type 2 présentent
de faibles niveaux
de testostérone
biologiquement active.
”
Diverses études épidémiologiques menées
au cours des vingt dernières années ont
montré que les personnes atteintes de dia-
bète de type 2 présentaient un faible taux
de testostérone.
1
Ces études étaient toutefois
basées sur la testostérone totale, laquelle
peut ne pas refléter avec précision les ni-
veaux de "testostérone libre" biologique-
ment active. La testostérone d'un homme
normal est principalement liée à la globuline
spécifique (44 %) et à l'albumine (54 %),
seuls 2 % environ circulant sous forme libre.
Seule cette testostérone libre est à même de
pénétrer dans les tissus du corps et d'exercer
ses effets. La testostérone liée à l'albumine
peut se libérer dans les petits vaisseaux et
avoir un effet biologique. Par contre, la
testostérone qui reste liée à la globuline est
incapable d'exercer son effet.
Prévalence de l'hypogonadisme
La première étude à avoir mis en lumière
le taux de prévalence élevé de l'hypogona-
disme chez les personnes atteintes de dia-
bète de type 2 sur la base de la testostérone
libre a été publiée en 2004.2 Elle a établi
qu'un tiers des hommes atteints de diabète
de type 2 (âgés entre 31 et 75 ans) présen-
taient un faible niveau de testostérone libre.
Ce problème a été associé à une hormone
lutéinisante et une hormone de stimulation
folliculaire anormales, entraînant un hypogo-
nadisme hypogonadotrophique. Ainsi que
l'on s'y attendait, les niveaux de testostérone
libre et totale de ces hommes diminuaient
avec l'âge et l'augmentation de l'indice
de masse corporelle. L'hypogonadisme ne
dépendait cependant pas exclusivement
de l'obésité ; 25 % d'hommes non obèses
souffraient également d'hypogonadisme
hypogonadotrophique. La durée du diabète
et l'HbA1c n'avaient par contre aucun effet
sur les taux de testostérone. Ces décou-
vertes ont depuis lors été confirmées par
des études menées au Royaume-Uni, en
Italie, en Australie et au Brésil.
Notre groupe s'est également penché sur
la prévalence élevée de l'hypogonadisme
hypogonadotrophique chez des hommes
jeunes atteints de diabète de type 2 : la
condition a été diagnostiquée chez 58 %
des hommes âgés de 18 à 35 ans ayant
participé à cette étude.3 Tous ces hommes
atteints d'hypogonadisme étaient obèses.
La présence de l'hypogonadisme hypogo-
nadotrophique à des taux aussi élevés est
inquiétante car ces hommes sont dans leurs
principales années reproductives et risquent
de souffrir non seulement de problèmes
métaboliques liés aux faibles concentrations
de testostérone, mais également de troubles
de la spermatogenèse et d'une diminution
de leur fécondité.
Diabète de type 1
L'hypogonadisme hypogonadotrophique
ne se développe par contre pas chez les
hommes atteints de diabète de type 1,
4
ainsi que confirmé par des études menées
sur des hommes jeunes et d'âge moyen. Il
est néanmoins intéressant de noter que les
concentrations de testostérone sont égale-
ment inversement proportionnelles à l'indice
de masse corporelle chez les hommes at-
teints de diabète de type 1.
Des implications plus larges
Les problèmes de l'hypogonadisme hypogo-
nadotrophique ne se limitent pas à la fonc-
tion sexuelle et reproductive, mais pourraient
également être associés à des maladies
cardiovasculaires et à l’athérosclérose –
des dépôts gras sur la paroi intérieure des
artères, précurseurs d'une crise cardiaque.
L'inflammation, qui est le processus par
lequel le corps répond à une blessure et/ou
une infection, jouerait un rôle déterminant
dans le développement de l'athérosclérose.
Des taux élevés de protéine C réactive,
un marqueur d'inflammation, ont en effet
été associés à une augmentation du risque
de maladies coronariennes. Les taux de
protéine C réactive des hommes atteints
de diabète de type 2 souffrant d'hypogo-
nadisme hypogonadotrophique sont parmi
les plus élevés, quelle que soit la condition.
Il est apparu que ces hommes présentaient
également une anémie légère, une faible
densité osseuse (côtes et bras), une aug-
mentation de la masse graisseuse totale et
sous-cutanée, et une réduction de la masse
musculaire squelettique.5
Des mécanismes peu clairs
Les mécanismes qui sous-tendent l'hypogo-
nadisme hypogonadotrophique chez les
hommes atteints de diabète de type 2 ne
sont pas clairs. Il a notamment été suggéré
que l'augmentation excessive de la masse
graisseuse pourrait entraîner une hausse
de l'activité de l'enzyme aromatase, qui
accentuerait la conversion de testostérone en
œstrogène (la principale hormone sexuelle
féminine). L'augmentation des taux d'œstro-
gène entraînerait à son tour la suppression
de l'hormone de libération des gonado-