Les conflits sociaux

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agrégation de sciences économiques et sociales
préparations ENS 2005-2006
fiches de lecture
Les conflits sociaux
Reynaud (1997) : Les règles du jeu
Fiche de lecture réalisée par les agrégatifs de l’ENS Cachan
REYNAUD Jean-Daniel (1997), Les règles du jeu, Paris, Armand Colin
Préface de la 2ème édition : cadrage théorique
La régulation pour Reynaud n’a rien à voir avec la théorie de la régulation économique qui est une théorie structurelle
et surtout macro-sociale.
Pour R., le fait social par excellence est la formation des règles. C’est un terme moyen entre une sociologie
durkheimienne qui est basée sur l’étude des normes (sous-entendue transcendantes et intangibles) et l’individualisme
méthodologique dur qui est basé sur l’étude des choix rationnels.
R. relève que sa sociologie est critiquée car elle donnerait à l’institution un privilège sur les rapports sociaux (en gros,
opposition entre institutionnalisation des conflits et le caractère indépassable de la lutte des classes)
Après avoir défendu la vision boudonienne de la rationalité (l’acteur et tout et tout), il montre qu’elle fonde l’étude de
la régulation : « la contribution à l’existence et à la formation des règles, à la régulation, n’est pas une conséquence
secondaire de l’action sociale, elle est liée à la définition même de la rationalité. Elle ne vient pas de la soumission à
des valeurs qui seraient définies de manière exogène, mais du fait que cette action est aussi une interaction »
Définition de la régulation : « La règle est un principe organisateur [...] elle est le plus souvent un guide à l’action,
un étalon qui permet de porter un jugement, un modèle qui oriente l’action ». La régulation concerne l’effet concret
des règles formelles.
« Les règles ont des auteurs et des destinataires. Elles sont liées à un projet d’action commune » → pas de
transcendance de la règle et recoupement avec les problèmes classiques de l’action collective.
Un acteur social n’existe que dans la mesure où il est une source autonome de régulation (s’oppose à l’idée de
groupes latents liés par un intérêt)
Le paradigme qui permet de comprendre la régulation est celui de l’entreprise et non celui du marché, celui de la
négociation, du contrat et du conflit et non celui de l’agrégation des décisions individuelles.
Ex : l’analyse de l’action collective montre l’effort d’organisation nécessaire pour faire émerger une action
collective : elle offre une capacité de mobilisation des ressources, contraintes institutionnelles. MAIS elle reste
fragile à la défection, au sectarisme, à l’hérésie
Deux sources de régulation : la régulation de contrôle et la régulation autonome. Elles s’articulent soit par un partage
de terrain (l’entreprise accepte de laisser une part d’autonomie aux ouvriers de métier) soit par un conflit.
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Le conflit n’est pas l’opposé de la régulation, il est une étape dans un processus : « le conflit ouvert [...] est souvent
un progrès dans la rencontre des régulations [...] il oblige à une négociation ». Il peut déboucher sur une régulation
conjointe. En définitive, « la régulation sociale n’est pas essentiellement l’établissement ou le maintien d’un ordre,
mais l’opération à têtes multiples qui renouvelle, détruit ou crée, bref fait vivre le lien social »
Chapitre 1 : les systèmes sociaux et les règles
L’idée :on peut passer une revue les différentes combinaisons des comportements individuels. Mais, ces
combinaisons ne sont un fait social que lorsque ces combinaisons obéissent à des règles.
Qu’est-ce qu’un fait social ? Il est constitué d’un ensemble de comportements individuels ayant un caractère social
dans leurs conditions, leurs causes d’apparition, leur forme et leur résultat. Un fait est social lorsqu’il est élément
d’un ensemble social c'est-à-dire lorsque les actes individuels obéissent à des règles, au sens normatif du terme.
Deux formes de décisions :
- les décisions indépendantes
- les décisions interdépendantes
Les décisions indépendantes s’agrègent soit de façon simple (le vote), soit de façon telle que le résultat de
l’agrégation diffèrent des intentions des acteurs (effets pervers → cf. BOUDON et SCHELLING dans « La tyrannie
des petites décisions » pour la ségrégation spatiale).
Les décisions interdépendantes sont qualifiées comme telles lorsque les décisions sont prises en fonction des celles
(probables ou sûres) des autres individus :
- la distinction
- l’allongement de la durée des études pour les classes aisées (c’est le niveau relatif du diplôme qui compte)→
« l’inégalité des chances », BOUDON, 1973
- le vote utile au 2nd tour
→ Les décisions interdépendantes peuvent être formalisées dans le langage du marché (sous des conditions
restrictives certes mais qui garde un puissant pouvoir heuristique) ou de la théorie des jeux. Ces paradigmes ne
permettent pas de rendre compte des situations où les acteurs peuvent modifier les résultats de l’interaction
(l’ensemble des possibles est donné)
La fécondité des approches en termes de négociation se voit pour l’analyse du marché du travail :
- modèle du marché : le marché du travail est très imparfait : rigidité des salaires à la baisse, imperfection de
l’information…
- modèle du choix stratégique : l’interaction employeur/employé est de type « dilemme du prisonnier » : on ne peut
en sortir que par un accord implicite reposant sur une obligation mutuelle qui n’est crédible que dans un jeu répété
OU par un contrat complet (ce qui est improbable)
- modèle de la négociation : la définition de cette obligation mutuelle, hors du marché proprement dit, est le fruit
d’une négociation qui ne peut aboutir que s’il existe des définitions conventionnelles du « bon » salaire, des devoirs
professionnels
→ la négociation explique ce que le marché et la théorie des jeux laissaient exogène ou impensé. Elle complexifie la
situation en considérant que les règles elles-mêmes sont l’objet de négociation (exemple classique du salarié payé à la
pièce qui n’augmente pas trop son rendement pour ne pas inciter la direction à baisser le prix de la pièce produite). La
théorie des jeux atteint ses limites lorsqu’on aborde les conflits et les négociations concernant le maintien, la
modification, le changement ou la suppression des règles (c'est-à-dire la majeur part des conflits).
Quelques conclusions sur cette petite revue des combinaisons d’actes individuels :
- Les systèmes sociaux sont divers. R. réfute l’ambition de la tradition qui va de Durkheim à Parsons qui cherche à
définir LE système social et la tradition de Comte à Marx qui cherche à définir un procès historique universelle.
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- Les combinaisons reposent toujours sur des règles : une approche « marché & rationalité » -- même si elle
cherchent à spécifier les préférences (par la psychologie) ou à s’élargir à une forme de rationalité souple (genre
Pareto qui introduit les actions non-logiques) -- ne parviendra pas à expliquer les systèmes sociaux car :
o les intérêts ne suffisent pas à définir les interactions dans lesquelles les individus s’engagent : les conditions de
l’échange sont socialement crées ( le marché ex-nihilo ça existe pas)
o les intérêts peuvent rarement être définis indépendamment du système social : « c’est le système lui-même qui
donnera une valeur psychologique déterminée à un enjeu particulier »
- Les règles exercent une contrainte sociale mais elles ne sont pas immuables : la règle n’est pas un simple instrument
de contrôle social (aspect répression), sa transgression – la déviance – peut être une manière d’anticiper le
changement ou de l’initier. Même Durkheim prend en compte l’évolution de la règle lorsqu’il demande la formation
de corporations.
- La régulation est un enjeu social : objet de conflits entre différents groupes. Le conflit peut-être ouvert,
violent, institué, caché. Il peut porter sur l’application de la règle ou sur sa constitution même. Chez Durkheim,
la société est intégrée ; on ne négocie pas la règle sociale (surtout lorsqu’on est deux groupes antagonistes), elle
s’impose.
VARIATION 1 : l’échange social et la régulation
R. présente l’échange social par un mixte entre MAUSS et la théorie des jeux d’après Mr CORDONNIER :
Le don/contre-don est la solution coopérative du dilemme du prisonnier. On échappe au paradoxe maussien :
l’échange-don est à la fois intéressé ( la rupture du cycle des dons est trop coûteux pour les deux partenaires) et
spontané ( on ne sait pas qui doit prendre l’initiative et à quel moment intervient le contre-don). C’est quand même
pas très rationnel tout ça…
Par extension, l’échange social permet de comprendre la négociation. L’échange social n’est pas rationnel au sens
strict ; c’est le développement de l’échange qui crée la confiance. Réciproquement, la confiance n’est pas une valeur
morale (Durkheim), elle est un état fragile qui est mis à l’épreuve et toujours assumée à l’initiative des partenaires.
Bref, c’est comme la négociation : production de confiance et précarité de la relation sociale qui est de façon sousjacente conflictuelle.
Ex : la relation de sous-traitance (LORENZ, 1988) : passage d’une vérification de la conformité des produits ex post
à la conviction ex ante des qualités du producteur (je te fais confiance car j’ai éprouvé ta qualité) → l’établissement
d’une règle ne passe pas nécessairement pas le contrat ; ne pas passer par la forme juridique évite aux partenaires
l’intervention du juge dans la définition de leur relation → par exemple, dans les conflits du travail, on parle de
« contrat glissant » .
La spécificité de la rationalité version négociation (par rapport à la rationalité stratégique) :
- elle invoque des règles et veut faire reconnaître leur validité
- l’acteur cherche à former des liens et ses préférences se définissent dans cette relation
- apprentissage mutuel et place de l’imprévu, de l’évolution des règles
→ l’accord n’est pas simplement un compromis entre des stratégies, c’est la création d’une règle pour la vie en
commun MAIS cette malléabilité de la règle est aussi sa faiblesse.
Chapitre 2 : le maintien des règles
Il s’agit de répondre à une question classique en sociologie : Comment se fait-il qu’existent des groupes sociaux
relativement durables ? Comme se fait-il qu’il existe un minimum de règles communes qui fait que tout n’explose pas
malgré l’opposition des passions et des intérêts ?
Les règles effectives
Les règles sont diverses :
- sur le plan théorique : peut-on distinguer les règles formelles et explicites des règles implicites ?
- sur le plan pratique : est-ce qu’on peut imaginer une substitution totale des règles formelles aux règles informelles ?
En fait, il faut considérer le rapport entre ces deux types de règles : elles sont souvent en concurrence, en conflit, en
complémentarité.
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Il faut plus généralement distinguer différents niveaux : les règles qui encadrent la négociation et les règles produites
par la négociation. Ces dernières deviennent à un niveau inférieur, les règles qui encadrent.
Ex : dans le système de la négociation de branche : il y a les règles institutionnelles et les règles produites comme
salaire minimum, grilles de qualifications. Ces règles produites serviront ensuite de cadre à la négociation qui
s’effectue au niveau du service des ressources humaines d’une entreprise.
Mais, il est difficile de distinguer pratiquement les règles affichées des règles effectives. Chacun a son interprétation.
La sanction peut être automatique ou diffuse.
La règle en vigueur– non observable directement – est le fruit d’une négociation, souvent implicite entre les autorités
chargées du maintien de la règle affichée et le degré de la contrainte jugée acceptable par les « usagers » de la règle
→ il y a concurrence entre deux régulations.
→ les règles ne sont pas séparables de l’activité qui les crée et les maintient c'est-à-dire de l’activité de régulation.
L’inertie des règles – leur contrainte sociale – n’est pas autre chose que le caractère plus ou moins stable d’un
équilibre dans les échanges sociaux.
La sanction, l’accord et la légitimité
Analyse classique durkheimienne : on reconnaît la contrainte sociale à la réaction que provoque l’enfreinte à la règle.
Les sanctions peuvent être institutionnelles ( interventions des appareils de répression) ou affective (scandale,
réprobation,…). Tout cela est vrai mais il manque des dimensions.
Critique :
- la sanction n’est pas automatique et elle est souvent différenciée : pour que la sanction s’applique, il faut que
l’individu lésé se saisisse des règles, voire initie une action collective en invoquant une règle contre un acte qu’il juge
répréhensible ou nuisible. Même dans les cas de forte institutionnalisation de la sanction, BECKER a montré un
processus d’étiquetage (marge d’interprétation des autorités répressives) qui est guidée par des représentations
sociales du délinquant (critère d’age, de sexe, de classe sociale,…) → ce n’est pas la « société » qui sanctionne, la
sanction est inséparable d’un contrôle d’un groupe social sur un autre.
- Chez Durkheim, la sanction est un acte symbolique qui permet de réaffirmer la cohésion du groupe. Or BECKER a
montré que la déviance est un processus qui peut aboutir à une ‘carrière’ délinquante → au final, c’est l’exclusion et
non la cohésion qui l’emporte. L’extrême marginalité ou l’exclusion conduit à la création de contre-groupes →
l’excès de régulation – au sens durkheimien -- peut-être producteur de conflit.
Les règles auto-entretenues : Cette critique de Durkheim se prolonge en montrant l’existence de règles autoentretenues. Leur maintien s’explique par autre chose que la contrainte : par la pratique ou la convention. En
l’absence de tels cadres, les situations sont anomiques, faute de référence culturelle. Il y a non convergence des
attentes mutuelles sur les règles du jeu → favorise les conflits ouverts
La légitimité : Pour l’instant, on a décrit que des mécanismes de maintien de la règle. On ne peut faire l’économie du
sens, à savoir se poser le problème de la légitimité de la règle.
Un pouvoir autoritaire, basé sur la sanction comme principal moyen de contrôle social, n’a jamais été très solide. Ou,
s’il a perduré, c’est qu’il s’accompagnait d’un travail de propagande pour obtenir l’adhésion des individus au
système.
Attention : la légitimité de la règle n’est jamais intrinsèque à la règle en soi. C’est une représentation qui est
construite par ceux qui réclament le respect de la règle → elle est liée à l’exercice d’un pouvoir.
Selon la typologie de Weber, la légitimité peut-être d’origine charismatique ou légale-rationnelle c'est-à-dire reposer
sur l’adéquation des moyens aux fins affirmées et le respect de certaines procédures d’élaboration. Différentes
sources de légitimité peuvent se combiner ou entrer en concurrence ; en réalité, ce sont des acteurs divers qui, par le
jeu de l’invocation, entrent en concurrence.
Cette invocation, saisie au niveau du discours, est en relation avec un projet. Exemple : un chef d’atelier veut
introduire une innovation. Or, les ouvriers sont traversés par un ethos professionnel. Il n’accepte l’innovation que si
elle est conforme à cet ethos → le chef d’atelier invoquera la légitimité de la tradition, elle-même relative à un projet
(professionnel, d’entreprise).
Légitimité et efficacité : ces deux notions entretiennent des rapports. La légitimité se renforce si les décisions prises
sont efficaces ( la 4ème République perd sa légitimité suite à une mauvaise gestion de la guerre d’Algérie).
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L’ordre social
Il y a un jeu de stabilité/instabilité dans les systèmes de rôles (qui est un système auto-entretenu). Instabilité parce
qu’ils résument l’agrégation et l’interdépendance des décisions individuelles autour d’un enjeu de pouvoir social.
Stabilité – attestée empiriquement – car les systèmes différenciés abritent des institutions spécialisées dans le
contrôle, l’élaboration et la modification des règles.
La régulation comme fonction différenciée : Justice et police sont des institutions qui appliquent, interprètent,
infléchissent les règles. Cela a une incidence sur la nature de la négociation portant sur les règles.
1) stabilité par l’appareil : Confier la tache de faire respecter la règle à un corps spécialisé, c’est durcir la règle en la
rendant moins susceptible d’être re-négociée. La délégation à un tiers la défense de la règle rend l’engagement des
partenaires plus précis et plus solide. C’est aussi renforcer la stabilité de la règle en renforçant la cohésion de
l’ensemble dont elle fait partie. Ex : le refus de négocier pour la libération d’otages est une règle qui exclue la
possibilité de trouver une solution économiquement avantageuse pour les deux parties mais renforce le droit en tant
que corpus de règles efficaces.
2) stabilité par la cohérence interne du système : C’est favoriser l’émergence de systèmes de règles rationalisés (le
juge invoque des principes de droit) qui ont un puissant effet stabilisateur des règles.
Contrôles croisés :
1) Stabilité par les contrôles extérieurs : le premier d’entre eux est le contrôle de la hiérarchie. Mais, il doit
rencontrer le contrôle autonome partiel des subordonnés. D’autres contrôles dits fonctionnels s’ajoutent (dans le cas
d’un atelier, le contrôle du bureau d’étude, de la commission pour la sécurité, du service après-vente….) existent →
pression multiforme de contrôles croisés.
2) Ordre/désordre : les contrôles croisés rendent localement les résultats de la régulation imprévisible (désordre) mais
comportent un effet stabilisateur comme la limitation de la contagion des perturbations locales (ordre).
La récession dans une branche ne provoquent pas la baisse des salaires car la branche n’est pas soumise
exclusivement à la régulation marchande ; son autonomie et sa résistance tient à la multiplicité des régulations (droit
du travail, conventions de branche, culture d’entreprise,…)
Le jeu entre les systèmes :
Le contrôle n’est pas un mécanisme automatique :
- Les règles sont invoquées selon les circonstances. Ex : dans les conflits du travail en France, la négociation peut se
déplacer du niveau de l’atelier au niveau de l’établissement. On invoque l’arbitrage par le haut. Le changement de
niveau est un changement de régulation.
- les groupes de contrôle « dormants » peuvent être mobilisés. Ex : mobilisation de l’association des parents d’élèves
ou du conseil d’administration pour arbitrer un conflit entre profs
Le contrôle et la concurrence des règles :
Les règles sont en concurrence et elles interagissent les unes sur les autres.
Effet pervers caractéristique : le durcissement de la règle ou sa formalisation peut renforcer les règles clandestines.
C’est un effet de blocage.
Ex : les travaux « au noir » fonctionnent car il y a toujours menace que l’une des parties rende publique la transaction
→ c’est la loi (les risques liées à la sanction) qui permet l’efficacité du contrat clandestin. Ou encore : le coût de la
procédure juridique incite les individus à s’arranger. Parfois, la loi incite volontairement de tels arrangements
(divorce, héritage,.. )
Conclusion : ce sont les stratégies des acteurs qui expliquent la stabilité des règles. Mais il faut voir le point
d’équilibre comme soutenu par des dispositifs institutionnels et néanmoins toujours re-négociable.
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Chapitre 3 : la régulation et l’acteur collectif
1. Les conditions de l’action collective
Thèse d’Olson : l’engagement individuel dans une action collective poursuivant un bien collectif est un choix sousoptimal car même si je ne m’engage pas, je profite des résultats de l’action et en cas d’échec de l’action collective, je
n’ai rien dépensé.
Conditions de réussite de l’action collective selon Olson :
- taille restreinte du groupe qui rend les décisions interdépendantes
- poids très inégal des membres du groupe latent. Ex : le groupe des agriculteurs parmi lesquels les grands céréaliers
ont intérêt aux travaux de drainage → ils supporteront l’essentiel de l’effort matériel de l’action collective
Un autre type de condition favorisant l’action collective sont les passions (colère, indignation, solidarité
professionnelle, morale) MAIS base peu solide pour une action collective.
De ces conditions, on déduit deux stratégies pour la réussite d’une action collective :
- lier la production de biens collectifs avec celle de bien non collectifs (conseils prud’homaux, poste de permanent
dans un parti)
- user de la contrainte pour supprimer l’aporie des choix rationnels : lock-out, adhésion obligatoire au syndicat
majoritaire aux EU,…
OLSON est-il un utilitariste ? Non, car il permet de poser des problèmes valables pour toute action collective.
D’un point de vue pratique, il rend compte de certains phénomènes comme :
- le développement des prestations de services individualisés aux adhérents (associations de consommateurs)
- le problème de la taille critique d’un groupe : loi d’airain de l’oligarchie de MICHELS1 avec la différenciation entre
militant de base et bureau des délégués ; entre activistes permanents et soutien ponctuel par le vote de la base
D’un point de vue théorique, il est un quasi anti-utilitariste car il dit que la production de biens collectifs ne peut se
réaliser sans un certaine contrainte sociale, l’agrégation des calculs rationnels ne parvient pas à l’expliquer →
« l’action collective a pour condition la régulation commune ».
Conséquences : comment passer d’un groupe latent à un groupe actif ?
- le groupe latent doit inventer des règles d’action. Il doit s’appuyer sur des ressources communautaires : association
religieuse, coopération de production. Pas d’émergence ex-nihilo.
- Les règles sont inventées dans un projet qui définit aussi les intérêts collectifs à défendre. En d’autres termes, la
formulation des intérêts collectifs dépend de l’orientation de l’action : la lutte contre la discrimination au travail entre
hommes et femmes est construite comme telle car elle vise la modification du droit du travail → les intérêts se
définissent dans un processus et ne sont pas donnés a priori.
2. La création de la règle et la constitution de l’acteur collectif
L’exemple de Michel LIU (1981) sur la microculture d’atelier d’une équipe d’ouvrières spécialisées : accueil glaciale
des « nouvelles » pour leur signifier la réalité des rapports de travail, très durs, et avec peu de coopération. Il n’est pas
permis de « fayoter » auprès de la maîtrise pour avoir des faveurs individuelles. La fin de cette règle est la production.
Microculture qui fonde le groupe.
A partir de cet exemple particulier, on peut faire varier certaines variables :
- autonomie du groupe dans la définition des règles / autorité supérieure
- fins
- taille du groupe
1
Robert MICHELS, Political Parties. A Sociological Study of the Oligarchical Tendencies of Modern Democracy,
1962
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- élaboration spontanée / procédures formalisées
Typologie des règles en fonction de leur objet :
- règles d’efficacité : technique de production
- règles de coopération ou d’autorité : règle d’échange d’information, d’examen d’un problème. Elles sont validées
par la rencontre d’attentes mutuelles.
- Règles qui portent sur la hiérarchie, la division du travail : différenciation des rôles. Elles fournissent la base des
appareils différenciés de contrôle.
Typologie des projets :
- les projets dont on peut calculer les résultats (entreprise)
- les autres (association religieuse)
Typologie selon l’autonomie :
- règles sanctionnées directement par les intéressées (la coutume)
- règles sanctionnées par une autorité extérieure : l’institutionnalisation des règles accroît leur précision, leur
cohérence et les mécanismes de sanction
Ce qui ne varie pas : les règles sont toujours instrumentales (elles correspondent à une fin) ; leur champ de validité
définit aussi un groupe, elles correspondent à la position d’un acteur collectif dans un ensemble plus vaste (idée de
rapport social)
3. La régulation et la communauté
Les communautés pertinentes de l’action (SEGRESTIN) : il existe une réalité sous-jacente à l’organisation, c’est la
communauté. Adhérer à l’organisation c’est aussi l’acceptation d’une règle commune (ex : la solidarité ouvrière). Elle
est source de légitimité pour l’organisation, fonde son droit à représenter les intérêts d’un groupe d’intérêts.
Il peut y avoir un décalage entre communauté et organisation (cas de grève spontanée de la base non contrôlée par le
syndicat)
Réciproquement, une communauté se renforce, se délimite plus précisément suite aux résultats de l’organisation : la
constitution d’un marché interne dans une entreprise suite à la participation étroite du syndicat à la régulation des
règles concernant le recrutement, les qualifications, l’avancement nourrit une communauté de salariés qui prennent
conscience de leur différence avec le monde extérieur.
Il ne faut pas tomber dans la vision « mythique » de la communauté autour du thème de la tradition, de l’égalité et de
l’homogénéité des membres : elle est instable ( cf. la constitution des religions sur de multiples affiliations et
fidélités) ; elle est complexe (hétérogénéité des statuts ouvriers depuis ceux de métiers jusqu'aux manœuvres au 19ème
siècle), elle est traversée par des conflits (homme/femme à l’intérieur la communauté ouvrière).
Pour toutes ces raisons, l’adhésion à une communauté n’est pas entièrement naturelle : elle est une alliance, une
coalition entre différents groupes, chacun déjà lié par une solidarité élémentaire, ou une coalition d’individus autour
d’un groupe dominant. Dans ce dernier cas, le groupe dominant peut être leader de l’orientation de l’action collective
(les ouvriers de métier dans le mouvement ouvrier).
A ce point, l’auteur critique la distinction de TONNIES puis WEBER entre communauté et société. Certes, se
découvrir membre d’une classe est différent que d’adhérer à un parti. Mais dans les deux cas, on accepte des règles
communes. Cette adhésion est « rationnelle » (elle lie de manière cohérente les fins et les moyens) et affective. C’est
la communauté sociale ( et non de sang) qui crée l’obligation et en fait la valeur affective. Ce n’est pas l’objectif
économique qui fait la rationalité mais l’orientation de l’action collective vers une fin. Tout acteur collectif se nourrit
d’un ferment « rationnel » et d’un ferment affectif. Il faut les deux pour expliquer l’action collective.
Conclusion
L’analyse de la régulation et de la constitution de l’acteur collectif ne peut-être considérer comme un simple retour à
Durkheim :
- Le groupe social ne se définit pas par « l’être ensemble » mais par une finalité, une intention appelée projet. Une
communauté n’est pas faite de voisins mais d’associés dans une entreprise sociale. La contrainte sociale est
particulière, relative à un projet.
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- La réalité première est l’acteur collectif et non la société. Le point de départ de l’analyse n’est pas la société mais la
pluralité des acteurs collectifs.
- La difficulté tient à l’existence d’une pluralité de régulations dont il faut spécifier les rapports :
accommodation/conflit ; négociation/arbitrage ; accord/domination
Chapitre 4 : le concours et la concurrence des régulations
Conception pluraliste des sources de la régulation qui conduit à se demander comment ces différentes sources se
rencontrent et comment leurs régulations se combinent.
1. Les conflits de territoire
Les conflits de territoire sont fréquents : géographiques (une jurande est une juridiction sur une ville ou une région),
corporatifs (demarcation disputes entre corps professionnels), politiques (dispute d’une base entre plusieurs syndicats
ou partis), institutionnels (querelles entre Ministères pour obtenir une compétence dans un domaine) → mise en
oeuvre de stratégie des conquêtes de territoires
L’envers de la pièce : la défense des frontières. L’issue des conflits peut être un partage de régulation jsq’à une totale
délégation (par exemple, des corps de métier relativement autonomes par rapport à la direction, ou encore les
médecins spécialistes chargés de la gestion de leur service hospitalier). Une forme extrême d’autonomisation,
importante en France = les corps (Pont-et-Chaussées…).
Tous ces phénomènes font partie d’un mouvement de compartimentation, repéré par DARHENDORF (1972). Ils sont
un facteur de stabilité des sociétés industrielles qui n’ont pas explosé comme Marx le prédisait car les conflits ont été
circonscrits à l’intérieur de territoires relativement étanches. Les travailleurs ne sont qu’un groupe de pression parmi
d’autres.
Remarque : voir critique de REYNAUD par SEGRESTIN sur ce point dans l’article sur les conflits du travail,
RFS,1980
3. L’autonomie et le contrôle dans l’organisation
La tradition sociologique a d’abord opposé le formel à l’informel. Les conclusions de ROETHLISBERGER et
DICKSON (1939) affirment que la logique du formel est celle de l’efficacité économique et gestionnaire, celle de
l’informel est celle des sentiments (amitié, solidarité,…). Le formel relève de la fiction, l’informelle de la pratique
réelle.
3 critiques :
- la logique des sentiments n’est pas indépendante de la logique économique : la camaraderie a toujours des fins
productives (affectation tournante sur les fronts de taille ou choix mutuel des équipiers chez les mineurs)
- toutes deux réelles, elles se construisent en opposition l’une de l’autre : par le freinage, les ouvriers cherchent à se
protéger de l’emprise de la direction, par le salaire au rendement, la direction cherche à maîtriser la capacité de
production des ouvriers → le vrai enjeu est le contrôle et l’autonomie
- contrôle et autonomie sont des stratégies entre niveaux hiérarchiques mais aussi entre services (le service du
personnel ≠ contremaîtres, commerciaux ≠ machinistes)
La distinction entre le formel et l’informel dessine une chose importante : la double source de la régulation. Mais le
travail réel, c’est un compromis entre le travail prescrit et la mise en oeuvre d’une autonomie par les exécutants. Ex :
les clavistes de presse restent en dessous des normes de production fixées mais elle achètent cette autonomie en
maintenant une cadence élevée pour les périodes de travail hors rendement → la cadence réelle est entre la norme et
l’autonomie.
Cela n’est-il pas le signe d’un besoin de démocratie dans les organisations, de participation des exécutants aux
décisions en vertu de leur connaissance fine du procès de production ?
Succès des cercles de qualité qui a inspiré l’initiative politique de la CFDT → loi du 4 août 1982 donnant un droit
d’expression directe et collective aux salariés.
C’est un échec car la loi oublie que le pouvoir de l’exécutant est inséparable du caractère caché de la régulation
autonome qu’il détient. Refus des ouvriers de livrer à l’adversaire un gisement inexploité de productivité. Parfois la
compartimentation est mieux que la négociation. (on pourrait dire « le conflit latent » est mieux que sa résolution
dans une négociation).Réciproquement, les cercles de qualité ont marché car ils étaient finalisés vers la production.
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Est-ce que l’opposition entre autonomie et contrôle se résout quand une régulation conjointe (style négociations
collectives de branche)?
Non car elle ne concerne pas l’organisation concrète du travail, elle est faite à un niveau centralisé qui ne tient pas
compte des conditions spécifiques de chaque entreprise, qu’il est difficile d’instituer d’en haut l’autonomie (les
prud’hommes se calquent de plus en plus sur les « voies de fait » car les tribunaux classiques ont le dernier mot à
l’appel).
4. Les relations de travail : négociation et conflit
La négociation n’épuise pas le conflit. Importance de la négociation comme mode de régulation du conflit.
Le marché du travail est un marché imparfait avant même l’intervention d’organisations de représentants (asymétrie
d’information, situation d’exploitation du salarié malgré le contrat, existence d’une norme sociale du « bon travail »
et du juste salaire) → la régulation institutionnelle s’impose ; elle est le résultat endogène des relations de travail
elles-mêmes. Les syndicats et les associations d’employeurs ne sont pas des groupes de pression comme les autres →
la régulation conjointe est ici une délégation des pouvoirs publics (le produit de la négociation s’applique à tous les
salariés même les non syndiqués).
Cela n’empêche pas le recours à la force. La grève n’est plus une violence puisqu’elle est légalisée mais elle s’inscrit
dans un rapport de force. Pour cette raison, elle a eu du mal à être acceptée par les juristes (comment peut-on accorder
à une partie le droit de rompre le contrat unilatéralement ?). Ils ont poussé à lui imposer des limites, comme en
Allemagne où elle est le dernier recours en cas d’échec de la négociation. Il est cependant artificiel de l’opposer à la
négociation car cette épreuve de force est aussi un moyen de légitimer l’accord final grâce à l’exhibition des rapports
de force.
Elle est aussi une mise à l’épreuve de la réalité sociale d’un acteur collectif. La réussite de la mobilisation est un but
en soi, l’affirmation d’une identité collective. Cette autorégulation atteint parfois une légitimité plus importante que la
voie législative (la loi de 1968 créant la section syndicale et la loi de 1971 réformant la négociation collective ont été
votées par une Assemblée Nationale quasi unanime, parce qu’elles étaient le résultat d’une négociation préalable à
trois).
Niveaux et formes de négociation : les différents niveaux de négociations ne forment pas un système cohérent et très
rationnel. Il existe un ordre juridique qui donne la priorité aux accords plus généraux sur les accords d’entreprise sauf
si ces derniers sont plus avantageux pour les salariés. En réalité, le niveau de l’entreprise peut prendre une place
prédominante (plan social, plan d’adaptation) .
La principale raison du relatif bordel est que chaque niveau -- branche ou entreprise -- engage des acteurs collectifs
différents (→ le conflit est différent à chaque niveau). Les relations du travail = bon exemple de légalisation du
conflit et d’une organisation de la négociation. Les mythologies néo-corporatistes ont tendance à surestimer sa
cohérence et son efficacité ; en réalité aucun acteur ne maîtrise sa complexité → le concours et la concurrence des
régulations ressemble à un équilibre écologique et non à une architecture juridique ou mathématique.
Chapitre 5 : La régulation globale et le système social : classe, statut
et accès au pouvoir
1. Régulation spécifique et régulation globale
Il y a une difficulté à déterminer les caractéristiques d’une régulation globale. D’abord, parce qu’aucune
régulation spécifique n’a de délimitations a priori : toute source forte de régulation et donc de valeur sociale se répand
de manière diffuse et sur un territoire déterminé (le religieux donne source au pouvoir politique dans les Etats
islamistes, les syndicats révolutionnaires du 19ème siècle voulaient un changement de société,…). Réciproquement, la
compartimentation des régulations n’est jamais totalement atteinte (on prète serment sur la bible dans les tribunaux
aux EU). On peut, avec Weber, reprendre trois sources de régulation globale :
- le statut : groupes réels classés selon une hiérarchie d’honneur social et définis par un style de vie
- la classe définie par les chances d’accès à des biens et services sur un marché (on est loin de l’analyse marxiste)
- le parti : une association reposant sur l’adhésion volontaire des individus et dont l’objet est d’influencer ou de
conquérir le pouvoir politique.
2. Le statut et l’honneur de social
Après avoir souligné l’interdépendance entre ces trois sources de régulation et le jeu de permanence et de
transformation qu’a subi le rôle du statut dans les sociétés modernes industrialisées (pluralité des excellences,
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classement flou, honneur effacé par la recherche de la notoriété dans une société de médias de masse, rôle de
l’éducation dans la reproduction sociale donnant des résultats plus aléatoires), Reynaud veut quand même maintenir
la pertinence de la distinction entre statut et classe : « le capital culturel est bien un élément de capital. La
transmission du style de vie par la famille, l’héritage culturel, a bien une valeur sur le marché du travail. Mais les
règles de vie ne se réduisent pas à un capital au sens économique strict. Elles ont aussi un intérêt et une valeur pour
elles-mêmes. L’honneur social n’est pas seulement un avantage sur le marché. La distinction n’est pas seulement
l’instrument du succès ».
3. Classes et marchés
R. critique la théorie de la reproduction élargie de Marx (dynamique du capitalisme déterministe) ainsi que sa
définition de la classe comme groupe social en conflit avec un autre (« toute lutte sociale n’est pas une lutte de
classe »). Marx a repéré la difficulté de l’action collective (passage de la classe en soi à la classe pour soi) mais il la
résout superficiellement : « Entre un ensemble de position de classe et une lutte des classe, il n’y a donc pas
simplement la différence entre une potentialité et sa réalisation [...]Il y a plutôt la différence entre une potentialité
diffuse et mal définie et l’organisation d’une communauté, dans sa singularité historique [...] ». Ainsi, l’action de
classe participe à la détermination de la position de classe.
L’élaboration des rapports de classe est un processus historique et contingent, une histoire de délimitation du
territoire pertinent de l’action collective.
- Leur diversité : la lutte entre bourgeois et prolétaires n’est pas la seule ; même sur le marché du travail lui-même :
création d’une nouvelle position de classe tenue par l’intelligentsia (WEBER, 1921) aujourd’hui cadres ou
professionals + mouvement paysans qui a réussi à contrôler étroitement le marché des produits agricoles (PAC).
- La nature des marchés changent les formes de l’action collective : les moyens d’actions (les syndicats anglais
adoptent la voie réformiste car étaient plus forts et expérimentés que les syndicats français grâce à une révolution
industrielle précoce), les formes d’organisation syndicale (syndicat de métier, d’entreprise → différentes
revendications en terme de grille de qualification), la nature des alliances (en particulier avec les partis politiques),
des coalitions à l’intérieur de l’organisation syndicale (poids des fonctionnaires en France,…)
La France : une société sans classe ? :
- critique de la théorie de la polarisation marxiste : les paysans se sont autonomisés, professionnalisés et non rejoint
le prolétariat. Le prolétariat a accentué sa différenciation entre ouvriers et déshérités (fins de droit, nouveaux
immigrés = quart monde) dépendant de l’assistance publique ou privée → on assiste à une compartimentation et une
multiplication des associations et des institutions spécialisés → la thèse de DAHRENDORF se confirme : le système
de relations professionnelles est une système partiellement autonome, multiplication des centres locaux de régulation
- l’emprise des rapports de classe diminue : importance des revenus de transferts, développement des marchés
internes d’entreprise. Le recours au langage de classe perdure essentiellement car il permet de réaliser une solidarité
d’action entre les différentes branches du monde syndical
Ces considérations permettent de faire la critique également de Touraine qui maintient l’existence d’un conflit
central, celui autour des valeurs. Sa centralité est à la mesure de son enjeu : dans des sociétés de plus en plus
programmées, le choix des valeurs directrices de la société est un enjeu important. R. plaide pour une démarche plus
inductive : « la thèse que nous défendons [...] repose bien aussi sur un postulat : ce qui donne sens à une action
collective est une action collective elle-même »
4. Les partis et l’accès au pouvoir politique
Les formes d’accès au pouvoir : du parti à statut au groupe de pression clandestin ou visible de l’opinion (les clubs
politiques au tournant des 60’s). Le premier cherche à exercer le pouvoir, le second à l’influencer. Le premier
correspond à une démocratie de délibération entre partis dans une démocratie parlementaire ; le second à une
démocratie d’accès : concurrence entre minorités pour influencer le pouvoir politique. Bien sur, il y a des passages
d’une forme à l’autre (le mouvement poujadiste à présenter des candidats et le parti communiste, en renoncant à
l’exercice du pouvoir en 1981 se rapprocherait d’un groupe de pression)
La nécessité d’obtenir des adhésions est une des logiques puissantes du système qui conduit à la formation de
coalitions (→ hétérogénéité des programmes, juxtaposition d’intérêts). Le parti conservateur ne peut pas se contenter
des votes des anciens élèves d’Eton ou de Harrow.
Distinction entre base et appareil : processus de professionnalisation, fossé qui se creuse entre ceux qui profite de la
production de biens collectifs par le parti et ceux de biens individuels (prestige, poste,…) → l’appareil est d’autant
plus fort que l’orientation du parti découle moins directement d’une régulation communautaire.
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De la polyarchie à la pléistocratie = la tendance du système de représentation des intérêts en France :
- évolution des partis vers la coalition
- augmentation du nombres des groupes de pression et d’une capacité à créer des groupes actifs, une culture et une
communauté correspondante : ce sont les « groupes improbables » de SEGRESTIN : groupes de médecins,
d’homosexuels, associations de mères célibataires = communautés qui sont crées avec leur culture propre et leur
régulation + action politique (vise à changer les lois sur l’avortement, …) + symptomatique d’une société tolérante,
relâchement des contraintes morales
- multiplication des sources de pouvoir politique. Mais on n’est plus dans une polyarchie classique car il y a
congestion de pouvoirs et encombrement de la décision (ex : la paralysie de l’organisation universitaires qui
piétinent) ( il a raison Reynaud, avec une bonne dictature, c’est bien plus rapide,…)
→ Il n’y a pas de système social global.
Chapitre 6 : L’Etat : une régulation bureaucratique ?
Question : Est-ce que l’Etat est une régulation de contrôle suffisamment globale pour qu’on puisse se dispenser des
autres ?
1. Etat moderne, Etat bureaucratique
L’Etat moderne est une construction historique en plusieurs étapes (construction de la nation, impersonnalité du
pouvoir et régulation globale des aspects économiques et sociaux de la société)
Cependant, l’Etat-providence se décompose en une série de politique, les « appareils d’Etat » ne forment pas un
ensemble homogène. Cela dit, y a-t-il une convergence vers un « type-idéal » de la bureaucratisation au sens de
Weber ?
Rappel sur Weber :
- l’organisation bureaucratique est formée sur des règles applicables au citoyen de façon impersonnelle et sur une
hiérarchie recrutée par concours et axée sur le besoin et la création de compétences (professionnalisation)
- les règles, comme l’organisation de l’Etat, sont hiérarchisées des plus générales aux plus particulières. Cependant,
elles ne forment pas une pyramide parfaite : les lois sur les syndicats ne sont pas le produit du Ministère du Travail
mais de la délibération avec les organisations professionnelles,…Le législateur n’est pas en haut d’une bureaucratie
compétente.
2. Usage social du droit
Question : l’effet de la règle juridique dans les rapports sociaux et réciproquement (un peu)
Les limites du droit sont une faille qui laisse une part à la régulation autonome. L’effectivité de la règle est limitée par
le contexte dans lequel elle s’applique ; ce n’est pas seulement un « défaut » du droit, cette limitation peut-être
recherchée par l’Etat lui-même (ex : on ferme les yeux sur le travail clandestin et les conditions de travail dans les
emplois agricoles saisonniers). De plus, la concurrence des principes juridiques rend peu prévisible l’efficacité d’un
règle donnée : l’interdiction du travail de nuit pour les femmes permet-elle de les protéger ou de les discriminer ? En
fait, la règle de droit, bien qu’elle soit une régulation de contrôle, n’a de sens que rapportée à une action collective
(du domaine de la régulation autonome). Elle en tire sa diversité et parfois son incohérence.
Approche bottom-top : Il y a une part d’instrumentalisation dans l’usage du droit : ce dernier est au service d’une
politique, d’une action collective qui exige d’être opérationalisable à travers une formalisation juridique. Ex : la loi de
1986 corrige la loi sur l’expression des salariés de 1982, avalise, grâce au vague des modalités d’exercice de
l’expression, le mouvement vers le management participatif OU la réforme des préretraites marque le passage d’une
politique de protection des salariés en fin de carrière à une politique de lutte contre le chômage grâce à une inflexion
des règles.
Approche top-bottom : la règle de droit est dans un rapport d’échange, de conflit, de négociation des règles indigènes.
Le recours au tribunal est relativement rare à cause du coût des procédures ; les compromis informels sont nombreux
(mais plus instables). Mais, la seule possibilité de recourir à l’action en justice exerce une menace suffisamment
puissante pour ne pas rendre la règle de fait excessive → la règle de fait est toujours imprégnée d’un esprit juridique,
d’une prise en compte de l’équité (à défaut de légalité).
Réciproquement, la règle de droit évolue : l’occupation des locaux était illicite car était une enfreinte à la propriété
puis devenue une enfreinte à la liberté de travail, l’expulsion fut liée à l’obligation de négocier → renforcement de
l’efficacité de l’occupation.
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Le législateur modifie les rapport de force dans les conflits sociaux. Les lois de 1983 ont rendu obligatoire la
négociation avec toutes les centrales syndicales représentatives (irréfragabilité) ; ce qui a mis fin à la pratique des
employeurs consistant à négocier avec les syndicats-maison pour faire passer leur politique.
Bouclage de la boucle : les projets de loi sont produits par le législateur sous l’influence des groupes de pression les
plus concernés par l’application de la loi. La production d’une loi est un processus de formalisation de ces demandes
sociales à l’issue duquel le contenu de la décision est un compromis complexe.
3. Les limites de la régulation centralisée
Après avoir souligné le recul de la contrainte physique et morale de l’Etat sur la société et le développement de la
« réglementation », en prenant l’exemple du cercle vicieux de contentieux et de la juridicisation de la société, l’auteur
revient sur le concept de cercle vicieux bureaucratique de Crozier. Il s’agit d’un mouvement de centralisation de la
décision, une réaction du centre pour resserrer l’écart croissant entre la décision et l’application de la règle ; cette
réaction accentue paradoxalement l’écart → cercle vicieux.
Au contraire chez Weber, la centralisation, la dépendance croissante de l’individu et la perte d’emprise des politiques
étaient la conséquence du développement de la machine, c'est-à-dire de son efficacité. La régulation de contrôle
centralisée et rationalisée était le secret de cette efficacité.
Pour Crozier, pas d’adéquation entre la régulation de contrôle et la régulation autonome → la rationalité est plurielle
(à la différence de Weber). De plus, il n’y a pas de raison de lier régulation et hiérarchie, l’idéal-type wébérien n’est
qu’un cas particulier. Il garde une pertinence plus universelle quand on le considère comme un mouvement, comme
une reprise en main visant à réduire l’autonomie des exécutants en réduisant la quantité d’information pertinente dont
ils disposent (ou qu’ils créent). Le cercle vicieux est producteur d’anomie (conséquences destructrices sur les
objectifs et sur les règles de l’organisation)
4. L’Etat et la société
Rapports entre la société et l’Etat, en particulier les « castes » de fonctionnaires formant une communauté solide et
faisant en même temps la réputation de l’administration française (sens des responsabilités, compétence, absence de
corruption…)
La délégation : la délégation de la prise de décision aux partenaires sociaux est, en théorie, une réalité dans le système
de relations professionnelles. Cependant, forte intrusion des pouvoirs publics. Ex : les politiques salariales des EU et
de la France dans les 60’s qui contredit ou du moins pèse fortement sur la liberté de fixation des salaires. Néanmoins,
même si les règles du jeu sont dans les mains du législateur, les décisions sont souvent préparées et proposées par les
intéressés. La grève qui est un conflit juridiquement qualifiée de « privé » n’empêche pas l’ingérence des pouvoirs
publics : le gouvernement a réglé le conflit à Renault avec les OS en 1984.
La tutelle : un ministère de tutelle est plus qu’une instance veillant à la bonne application de la réglementation de la
branche. Il a double fonction :
- Fonction d’information (recueil et diffusion). Une utilisation stratégique de l’information (filtres) existe du coté du
ministère comme des entreprises
- Une fonction de représentation des intérêts de la branche dans le système politique allant jsq’à cautionner des
pratiques « délinquantes » dans la branche (les conditions de travail chez les routiers)
Toute politique a besoin d’interlocuteurs pour analyser les besoins, entendre les exigences, discuter les solutions. Le
choix de la politique va de pair avec celui des interlocuteurs : une politique des pensions de retraites se tournera vers
les mutuelles et les organisations professionnelles ≠ une politique du troisième âge vers les acteurs locaux, les
associations, les services de santé… En général, les hauts fonctionnaires, quand ils le peuvent, se tournent vers des
interlocuteurs de leur ‘communauté’ (les « fonctionnaires » patronaux plutôt que les responsables syndicaux).
Tous ces rapports entre Etat et société ne doivent pas cacher que le « dialogue social » est conflictuel, qu’il ne faut le
confondre avec une transmission d’ordre par une série de relais.
5. Autonomie des systèmes locaux
Local s’entend d’abord au sens géographique. La régulation spécifique de bassin d’emploi en témoigne : négociations
tripartites entre patronat local, syndicats, municipalités ; création d’un marché du travail local ; le poids des réseaux
locaux (de recrutement, d’écoulement du produit, d’information technologique, familiaux et religieux)
Conflits et transaction locale : le poids du local se manifeste dans la gestion de certains conflits : ex de l’entreprise
MONTEDISON à Saint-Nabord (cf. fiche SEGRESTIN sur les communautés pertinentes)
Local s’entend aussi comme le niveau du « bas » de la pyramide hiérarchique administrative. Cette pyramide est en
grande partie fictive puisqu’elle coexiste avec une importante autonomie locale. Les directeurs de laboratoire décrits
par Crozier s’apparentent davantage à des petits entrepreneurs en difficulté avec leur tutelle bureaucratique, utilisant
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par ailleurs à leur profit une partie de l’arbitraire qu’elle détient. (Cf aussi THOENIG et DUPUY dans
« l’administration en miettes »)
Conclusion sur l’Etat : L’usage social du droit, son effectivité même montre les limites de la puissance régulatrice de
l’Etat. La centralisation est aussi un cercle vicieux et elle a souvent pour résultat de paralyser et d’engendrer
l’anomie. La délégation donne et retient, la tutelle est une complicité, les politiques publiques appuient ou rencontrent
des interlocuteurs inattendus, la rationalisation des choix budgétaires ne peut dispenser de rechercher une évaluation
directe par le public. Les communautés locales ne sont pas des échelons hiérarchiques inférieurs.
Chapitre 7 : l’engagement social
Le reflux des grandes idéologies, l’affaiblissement des contrôles centraux, l’accroissement de l’autonomie des
individus et des groupes ne laissent-ils de place que pour des décisions individuelles ? Non car il s’agit de nouvelles
formes d’action collective, qui comme les anciennes, comportent un engagement moral ?
1. Les idéologies du salut social
Il y a bien une fin des grands systèmes explicatifs des sociétés et de leur pouvoir à susciter de larges mouvements
sociaux. Ces systèmes se nourrissaient de dialectique historique faisant figure de transcendance en marche. De
Durkheim à Marx, la transcendance est toujours sous une forme ou une autre : transcendance de l’ordre social ou
transcendance du changement social (radical). Malgré ce reflux, l’action collective existe toujours et elle manifeste, à
un niveau plus local, ce qu’il y a de sacré dans la vie sociale (au sens de Durkheim)
2. Quelle action collective ?
Le recul des idéologies de contrôle peut créer de vastes zones d’anomie mais aussi un attrait croissant pour les petites
entreprises politiques et sociales plus modestes. Trois exemple d’engagement social qui se distingue de l’engagement
classique militant, de conviction :
- des militants heureux : certains des mécanismes principaux de fabrication de la solidarité syndicale étaient les
mécanismes de masse : la grève générale, le refus des différenciations de salaires qui réduirait la possibilité de
négocier collectivement les salaires. A cette solidarité mécanique, se développe une solidarité organique : la
consultation prend souvent la forme d’un débat entre syndicat et représentants patronaux sur un ensemble différencié
d’opportunités, par exemple pour la formation. Cette solidarité est plus restreinte, sensible surtout au niveau de
l’entreprise (pas au niveau de la classe)
- les entrepreneurs moraux : le but visé par l’action collective n’est pas nécessairement le bouleversement des règles
du jeu, elle peut être une action de production et de diffusion de valeurs. Par exemple, les mouvements féministes,
parallèlement à leur combat pour leurs droits, appellent à la vigilance dans les situations de domination quotidiennes.
- Un travail à soi : l’appropriation de son travail est une forme d’engagement social ; au niveau de l’entreprise, il peut
exister un rôle de création sociale du management (sans tomber dans l’idéologie de la culture d’entreprise), un rôle de
mobilisation des salariés qui s’apparentent au travail des entrepreneurs moraux dans les associations.
Chapitre 8 : l’anomie
1. Le normal et la pathologie
L’anomie n’est pas une pathologie, c’est un affaiblissent des règles due à la concurrence d’autres sources de
régulation qu’on retrouve localement dans tout système social. La dérégulation est plus ou moins profonde et les
situations les plus graves sont à la fois les plus intéressantes car ils grossissent des mécanismes normaux comme
l’usage de la contrainte, l’affirmation de l’autonomie de certains acteurs, la centralisation ou la décentralisation des
décisions.
2. L’anomie et les anomies
Anomie et fatalisme : dans le Suicide, Durkheim passe rapidement sur le suicide fataliste qui résulte d’un excès de
règles. Selon Besnard, cela correspond à une incertitude dans la théorie de Durkheim et sa conception de l’anomie.
Durkheim avait l’intuition mais n’a pas abouti à une conception de l’anomie comme « juste milieu » : la règle est
salvatrice non parce qu’elle est contraignante mais par que sa contrainte est acceptée et légitime.
Régulation et intégration : l’anomie couvre toute forme de relâchement des liens sociaux. Besnard sépare dans la
pensée de Durkheim l’intégration (domaine des sentiments, de la contiguïté) et la régulation (contrainte qui pèse sur
des décisions de l’individu et du domaine des représentations). Or, cette théorie est contestable car Durkheim sépare
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les règles des interactions sociales où elles se forment. Cela conduit Durkheim à ne s’intéresser qu’à la position de
l’individu par rapport au système (égoïsme par rapport à fusion, position d’incertitude,…) et non à l’état du système
lui-même.
Le vague des passions et l’incertitude du contrat : Selon Durkheim, la règle met un terme au vague et à l’infini des
passions. Selon Reynaud, la vertu apaisante de la règle ne vient pas de la contrainte mais de la possibilité de « sortir
d’une négociation infinie et de la conclure ; elle arbitre un débat entre des prétentions opposées. Elle permet la
conclusion d’un contrat ». En l’absence de règles, c’est le retour de la guerre de tous contre tous.
Finalement pour Reynaud, il n’y a pas d’anomie chronique, propre à tout le système social (il n’y a même pas de
système social global). Le risque est de rendre la notion d’anomie à la fois vague dans sa définition et trop
particulière dans ses applications.
Du bon usage de l’anomie : il faut distinguer les anomies graves des déficits courants. Les anomies les plus
intéressantes sont cumulatives (cercle ou cercle vicieux). La conclusion de ce processus peut être l’implosion ou la
maintien du système sur un régime faible.
Exemples de processus anomiques :
Le départ de l’agent : dans un aéroport, il y a une queue de clients et une queue de taxi surveillée par un agent. Si cet
agent part, la règle de la queue est abandonnée. La fragilité de la règle, sa dépendance à l’égard d’un organe de
contrôle, vient de son caractère contraignant, mais c’est une contrainte légitime car elle est liée à la nature du bien
collectif que la règle procure. Cependant, le contrôle n’est qu’un élément de la régulation (il y a aussi l’obéissance, la
légitimité de la règle) ; l’ébranlement du contrôle peut rejaillir sur les autres éléments de la régulation : les individus
enfreignent rationnellement la règle quand le processus resquilleur est enclenché → les individus ne croient plus en
la règle = perte de légitimité → mesures exceptionnelles de rétablissement de l’ordre = PROCESSUS ANOMIQUE
Un autre type de processus consiste à attaquer la légitimité d’une règle en l’enfreignant mais en lui opposant un autre
→ NEGOCIATION PUIS ACCORD (ex : la tolérance puis la reconnaissance du droit à occuper les locaux pendant une
grève)
La faillite de l’entreprise : l’échec économique d’une entreprise, en dégradant les salaires et la représentation que les
salariés ont de l’entreprise peut conduire à une perte de légitimité de la régulation qui fonde les contrats. En général,
la sanction n’est pas si mécanique car le succès ou l’échec d’une entreprise, même économique, n’est pas facile à
discerner.
L’incertitude des fins et la pléistocratie : crise des fins (par ex : remise en cause de l’objectif unique de plein emploi
et croissance car producteur d’inflation) → multiplication des acteurs réclamant une légitimité et des fins
contradictoires ( l’Université est un droit (généralisation de l’enseignement) et en même temps, elle est sensée
produire des étudiants diplômés et des professionnels (qualification)). EN l’absence d’une clarification des objectifs,
on augmente les chances du recours à l’arbitraire et on abaisse la légitimité des règles. Cela a pour conséquence
l’inefficacité et l’incohérence des processus de décisions que les économistes appellent le modèle de la boite à ordure
(garbage-can model, MARCH et OLSEN, 1972).
Ex : le projet de loi naît dans un cabinet ou un groupe d’expert, passe par les autres ministères, débattu au parlement,
soumis à des décrets d’application… A chaque étape, il est possible de vider le texte de son sens par quelques
amendements ou de rajouter des couches qui font perdre au projet sa cohérence.
Le cercle vicieux autoritaire : cas des syndicats polonais. Le système d’inspiration soviétique visait à refouler la
régulation autonome → efficacité économique moindre et « démoralisation » d’une part importante des salariés
(corrélation du coup d’Etat après Solidarité et la remontée des taux de suicides dans les classes ouvrières). Cela a
conduit à la formation d’une contre-régulation et au mouvement Solidarité.
3. L’envers de la régulation
Rapports de pouvoir et rapports de régulation : il n’y a pas d’équilibre « naturel », que l’on retrouverait une fois
écartée la règle « artificielle ». Derrière la régulation (ou le pouvoir), il n’y a pas un nouvel équilibre tout prêt à se
manifester, soit un équilibre des rapports de force ou soit celui des relations de marché. En dernière analyse, les
rapports sociaux sont des rapports de pouvoir mais au sens large, incluant la légitimité. Ce sont des rapports de
régulation.
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Chapitre 9 : Une science des règles est-elle possible ?
Je ne fiche pas ce dernier chapitre qui est trop épistémologique. Notons simplement que pour Reynaud, les sciences
sociales ne sont pas des sciences comme les autres : elles sont des sciences d’aide à la décision, des sciences qui ne
prédisent rien car elles reconnaissent l’autonomie des acteurs. Le sociologue est donc conseiller (éclairé, bien sûr) du
prince
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