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traditionnel de façon trop rigide, mais nous adapter d’une manière authentique , trouver une
voie médiane.
(…)
Au Tibet, il y a 1200 ans, à l’époque de la traduction des enseignements du bouddhisme
indien, des maîtres indiens et des traducteurs tibétains étaient là pour instiguer l’intégration
complète des enseignements dans un contexte tibétain, et pour trouver le juste équilibre
avec la psyché tibétaine. Je me demande parfois si nous avons, aujourd’hui, ces mêmes
qualités qu’eux, hier !
Le titre même « traducteur » (lotsawa) avait alors une signification bien plus profonde que de
nos jours. C’était un terme de grand respect qui impliquait une compréhension profonde.
Voilà ce dont nous avons aussi besoin aujourd’hui : des érudits authentiques, qui aient le
discernement, en faisant la traduction, de créer la forme appropriée sans jamais perdre
l’essence.
Supposons, par exemple, que nous mettions le doigt sur des aspects des enseignements qui
nous dérangent et dont nous présumions qu’ils font partie de l’attirail culturel. Comment être
sûrs que nous ne faisons pas une énorme erreur, alors qu’en fait, ils font peut-être partie
intégrante de l’enseignement ? Nous parlons de l’attirail culturel qui vient de l’Orient, mais
lorsque nous abordons le bouddhadharma, nous apportons bien entendu avec nous les
idées préconçues de l’Occident, qui sont peut-être encore plus difficiles à identifier ou à
dissoudre.
Il y a des aspects de la tradition qui sont liés à la géographie, à l’époque et à la culture, et
qu’ils changent quand les conditions sont différentes ; mais il y a de nombreux autres
aspects qui sont une manifestation compatissante et habile de la sagesse, et qui s’appuient
sur une vérité inhérente.
J’ai observé une chose : quand, par l’étude, la pratique et l’intégration, les étudiants du
dharma arrivent à une compréhension réelle et complète, ils deviennent alors un réceptacle
pour le dharma, et ils commencent à avoir la « sagesse du discernement ». Je prie pour que,
lorsque des adaptations sont faites, elles soient appropriées. Ainsi, une présentation
essentielle ou une explication simple des enseignements ne doit pas s’avérer, dans l’avenir,
avoir limité la compréhension ou entravé la plénitude du dharma. La sagesse, la vue
pénétrante, l’expérience, la réalisation— tout cela est nécessaire— et particulièrement les
moyens habiles.
En tout cas, le défi de notre époque est de naviguer entre les critères de la tradition et ce qui
est perçu comme les exigences d’une nouvelle situation. A chaque fois que j’envisage
d’introduire une modification importante, je consulte toujours mes maîtres, pour être sûr de
ne pas tomber dans le piège qui consisterait à simplement apposer « mon » sceau sur
l’enseignement.
Deuxième partie
A mon avis, dans les années à venir, les questions primordiales seront : le caractère complet
de l’entraînement, l’authenticité du dharma à la fois dans l’enseignement et la pratique, et le
soutien du sangha
2
. D’une certaine façon, ils évoquent, respectivement, les principes du
Bouddha, du Dharma et du Sangha.
2
Sangha est un mot dans Pali ou Sanskrit qui peut être traduit en tant que « association » ou
« assemblée ». Il se rapport à des groupes bouddhistes ou Jain. Traditionnellement, dans le
bouddhisme, le sangha a presque toujours une de deux significations : le plus généralement, le
sangha signifie le sangha monastique des moines ou des nonnes bouddhistes ordonnés. Dans un
sens plus strict, le sangha peut signifier l'ensemble de tous les êtres possédant un certain degré élevé
de réalisation, désigné sous le nom de l'arya-sangha ou du sangha noble.