OLYMPIADES 2004 DE LA CHIMIE
EN CHAMPAGNE- ARDENNE
CONFERENCE
La pratique cosmétique (du grec kosmetikos : relatif à la parure)
est l'acte d'embellir, d'entretenir et aussi de protéger. Notre époque est très sensible
aux messages de l'apparence : mode vestimentaire
et publicité, presse, cinéma … exigent des images irréprochables et la cosmétologie
est incontournable. Les produits cosmétiques véhiculent émotions et sensualité. Les
anciennes recettes cosmétiques (fards, poudres à bases de fleurs, tiges, racines …) se
sont transmises aux cours des siècles et au début du vingtième siècle apparaissent des
parfums, rouge à lèvres, brillantine … nouveaux. Les sciences chimiques et
biochimiques permettent la mise au point de nouveaux produits et les produits
cosmétiques sont maintenant des produits de grande consommation qui, des plus
simples aux plus compliqués, font référence à l'embellissement.
Nous allons nous intéresser à la chevelure qui joue un rôle essentiel dans la beauté
et la séduction. LA CHEVELURE
O toison, moutonnant jusque sur l’encolure !
O boucles! O parfum chargé de nonchaloir!
Extase! Pour peupler ce soir l'alcôve obscure
Des souvenirs dormant dans cette chevelure,
Je la veux agiter dans l'air comme un mouchoir !
Ch. Baudelaire, Les Fleurs du Mal, 1861
Préliminaire : liaisons
Nous allons rappeler, la nature des principales liaisons rencontrées en chimie :
- Liaisons entre atomes : liaisons fortes.
- covalente : mise en commun d'un ou plusieurs doublet d'électrons, ce(s)
doublet(s) assurent la liaison entre les atomes.
Lorsque les atomes liés ont des électronégativités différentes, le(s) doublet(s) de liaison
est déporté vers l'atome le plus électronégatif : la liaison est polarisée et notée avec les
symboles δ+ et δ-.
- ioniques : entre un ion positif noté + et un ion négatif noté - et on rappelle
que deux charges de signes opposées s'attirent.
- Liaisons entre molécules : en général beaucoup moins fortes. Ce sont ces liaisons qui
expliquent la cohésion des liquides et de certains solides.
- liaison dipole-dipole entre une charge δ+ ou + et une charge δ- ou -
Un cas particulier de cette liaison est la liaison hydrogène entre Hδ+ et souvent O δ-
- liaison non dipole – non dipole (pas dexplication simple !)
On remarque sur les fig (1), (3) et (4) des liaisons covalentes, des liaisons covalentes
polarisées et des liaisons intermoléculaires.
I - le cheveu : constitution et propriétés
Le cheveu est constitué à 95% de kératine, le reste étant essentiellement des graisses. Il
y aussi un peu de colorants.
A) la kératine :
C'est une protéine constituée d'un enchaînement d'acides aminés liés entre eux par une
liaison peptidique (fonction amide).
fig (1) : ex d'acides aminés (leucine, cystéine, acide aspartique), faire remarquer les
fonctions acide et amine. Signaler qu'il peut y avoir plusieurs fonctions acide ou plusieurs
fonctions amine.
fig (2) : la liaison peptidique permettant l'enchaînement des acides aminés
Remarque : à un pH allant de 6 à 8 les groupements acide libres R- COOH sont sous
forme R-COO- et les groupements amine R-NH2 sont sous forme R-NH3+.
Dans la kératine il y a environ 15% de cystéine, acide aminé soufré (important comme on
le verra par la suite)
La molécule a une forme hélicoïdale le plus souvent, cette forme est due à la présence de
liaisons hydrogène : C=Oδ- - - - Hδ+ - N .
fig (3) : forme hélicoïdale
La kératine peut présenter des zones non hélicoïdales (kératine étirée) mais c'est moins
fréquent
Dans le cheveu on a :
- des protofibrilles : quelques brins de kératine en hélices, les hélices étant liées les unes
aux autres et torsadées (comme une corde). .
- des ensembles de protofibrilles agglomérées et torsadées formant des micofibrilles
"parallèlles".
fig (4) : les liaisons liant les hélices entre elles ou les protofibrilles entre elles sont
de différentes natures.
- ces microfibrilles sont enserrées dans une enveloppe externe, formée d'écailles de
kératine, cette kératine est très rigide car les molécules sont tenues entre elles par des
ponts disulfure très solides.
B) propriétés
La chevelure comporte 120 000 à 170 000 cheveux de environ 80 µm de diamètre
- grande résistance mécanique : un cheveu supporte une masse de 5 à 10 g.
- cheveu un peu élastique : les molécules de kératine sont un peu étirables car les
molécules peuvent glisser un peu les unes sur les autres et la forme de départ est reprise
quand la tension cesse.
- cheveu hygroscopique : peut absorber jusqu'à 30% de sa masse d'eau. Les molécules
d'eau s'insèrent entre les molécules de kératine comme le montre la fig (5), et une partie
des liaisons est coupée. L'évaporation de cette eau à chaud provoque la formation de
liaisons un peu différentes de celles qui étaient au départ : c'est le "brushing".
- le cheveu peut aussi absorber des molécules non polaires comme les graisses qui se
lient aux parties non polaires de la kératine (chaînes hydrocarbonées)
II - les shampooings : Ce mot vient de lhindi : champoo : qui veut dire masser.
A) fonctions :
- nettoyer les cheveux des salissures et graisses
- faciliter le démêlage et le coiffage
- donner du volume et de l'éclat et bien sur il ne doit présenter aucune toxicité.
La chevelure représente 4 à 8 m2 à nettoyer.
B) nettoyage : action dun tensioactif
Les molécules de graisses dont la fig (6) nous montre deux exemples sont des
molécules non polaires qui n'ont donc aucune affinité pour l'eau (molécule polaire) donc
qui ne sont pas solubles, donc pas entraînées par l'eau.
1) tensioactif :
Un tensioactif est formé de molécules amphiphiles : molécule avec une extrémité
polaire et l'autre extrémité non polaire. L'extrémité polaire est hydrophile (se lie avec l'eau)
l'extrémité non polaire est hydrophobe et lipophile (se lie avec les molécules non polaires
comme les graisses).
Ex : fig (7) voir les tensioactifs dits anioniques, cationiques, non ioniques et repérer à
chaque fois l'extrémité polaire et l'extrémité non polaire.
Pourquoi ce nom ? Un tensioactif change la tension superficielle de leau ; la
tension superficielle est la force nécessaire pour augmenter la surface d'une goutte d'eau.
Les molécules d'eau se lient entre elles et n'ont aucune affinité pour l'air formé de
molécules non polaires comme O2 ou N2, elles s'associent de façon à rendre l'interface
eau/air le plus petit possible.
Quand on ajoute un tensioactif dans l'eau, les molécules de tensioactif se rangent à
l'interface eau/air comme l'indique la fig (8) et cet interface peut être alors beaucoup plus
grand : on forme de la mousse (bulles d'air entourées d'un film d'eau). La tension
superficielle de l'eau est totalement changée d'ou le nom !
2) le nettoyage : imaginons un amas de molécules de graisses non polaires. On agite (on
frotte) avec de l'eau contenant un tensioactif et il se forme des agrégats comme celui de
la fig (9), ces agrégats sont solubles dans l'eau et entraînés par l'eau (Faire remarquer
les liaisons non dipole - non dipole à l'intérieur et les liaisons électrostatiques avec l'eau et
les extrémités polaires externes)
C) autres additifs :
On ajoute des additifs pour diverses fonctions :
- des polymères filmogènes comme des silicones fig (10) qui vont gainer le cheveu , le
rendre brillant, bien séparer les cheveux (volume) .Des liaisons électrostatiques tiennent
ce polymère sur le cheveu.
- un antipelliculaire : molécule qui s'attaque à une levure (Pityrosporum) responsable
d'une importante desquamation.
- des parfums.
III - changement de forme : la permanente
La permanente va permettre de changer la forme du cheveu et cette nouvelle forme
dure ! (Nous avons déjà évoqué le "brushing").
A) principe :
On casse des ponts disulfure (liaisons assez solides), on donne une nouvelle forme
au cheveu puis on reforme d'autres ponts disulfure.
La fig (11) schématise ces opérations.
B) le réducteur :
Le réducteur utilisé pour casser les ponts disulfure présents dans les cheveux au
départ est l'acide thioglycolique : la réaction est donnée fig (12). On opère en milieu
basique (en présence d'un excès dammoniac NH3, d'hydrogénocarbonate HCO3 et
d'éthanolamine : NH2CH2CH2OH).
Il est à noter qu'en présence d'un excès d'ammoniac l'acide thioglycolique est présent
sous forme de thioglycolate d'ammonium fig (12).
C) loxydant :
Lorsqu'on a cassé les ponts disulfure, mis les cheveux dans une nouvelle forme, on
reforme des ponts disulfure avec un oxydant : le peroxyde d'hydrogène (eau oxygénée)
fig (13)
IV - la couleur :
Egyptiens, grecs, romains, chinois, hindous ont utilisé des substances végétales
et des sels métalliques pour obtenir des couleurs de cheveux plus nuancées : teintures à
base de dérivés de plomb (acétate de plomb), décoctions d'écorce de noix L'usage du
henné est très ancien associé, éventuellement, à de l'indigo. Le henné est un arbuste de
pays chauds, les feuilles sont séchées et broyées finement et on fait un cataplasme avec
de l'eau chaude au moment de l'emploi.
A) couleur et colorants :
Substance colorée : lorsqu'on envoie de la lumière blanche sur une substance,
certaines radiations sont absorbées et d'autres sont renvoyées. On voit la couleur
complémentaire de la radiation absorbée (si l'absorption a lieu en UV on voit du blanc).
Pourquoi certaines radiations sont elles absorbées?
Parce qu'elles provoquent des changements dans l'énergie de certains électrons des
molécules de la substance
Fig (14) : longueur d'onde et couleur et couleur complémentaire
En chimie organique la coloration est souvent observée lorsqu'il y a des doubles
liaisons conjuguées (système = -- = -- =) et des groupements dits chromophores (-NH2
-OH -SO3H).
Un colorant est une substance colorée qui se fixe par des liaisons sur un support
B) mélanines
Les cheveux sont naturellement colorés par des mélanines : molécules complexes
dont on donne une idée fig (15) remarquer la présence de doubles liaisons conjuguées et
de groupements chromophores
Les mélanines sont coupées en molécules plus petites peu ou pas colorées par
l'action de l'eau oxygénée assez concentrée, la lumière du soleil peut aussi altérer les
mélanines : les cheveux se décolorent alors.
C) coloration temporaire :
Le colorant se fixe sur le cheveu en surface et s'élimine progressivement
fig (16) quelques colorants : extrait du henné ( rouge ), extrait de camomille (jaune) et
colorant artificiel. Remarquer la présence de doubles liaisons conjuguées et de
groupements chromophores.
Ces colorants se fixent sur la kératine en surface par des liaisons hydrogène comme le
schématise la fig (17).
D) coloration permanente :
Une méthode très astucieuse permet de fabriquer un colorant dans le cheveu.
1) principe : on met en présence des molécules (assez petites) de base et de coupleur et
on ajoute un oxydant. Ces molécules entrent dans le cheveu et réagissent alors pour
donner des molécules de colorant.
2) bases et coupleurs : fig (18) les bases sont des molécules oxydables.
3) réaction : ex fig (19) : l'oxydant utilisé est le peroxyde d'hydrogène.
Le mécanisme complet de la réaction n'est pas toujours bien connu. On peut aussi faire
des mélanges de bases et coupleurs pour obtenir plusieurs colorants : de nombreux
essais ont été nécessaires pour arriver à une bonne formulation et le savoir faire du
professionnel est indispensable
La cosmétologie a pris le visage d'une science exacte, c'est une activité consciente
et raisonnée appuyée sur des scientifiques performants, une grande rigueur, un sens
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