III. remarques relatives À certaines dispositions du pacte

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I. REMARQUES GÉNÉRALES
MISE EN APPLICATION DES ENGAGEMENTS INTERNATIONAUX
EN MATIÈRE DE DROITS DE LA PERSONNE
Le Canada fait preuve, depuis longtemps, d’une attitude inadéquate face à la mise en application de
ses obligations internationales en matière de droits humains, ce qui a grandement freiné sa
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capacité d’appliquer les recommandations antérieures de ce Comité. Cette lacune est exacerbée
par le fait
que
le gouvernement central délègue son autorité constitutionnelle à deux niveaux de
Index:
AMR
/2016
gouvernement
— national
Original
Language:
English et provincial ou territorial — ce qui signifie que la responsabilité d’agir
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suite à tout
engagement
recommandation
spécifiques de l’ONU en matière de droits humains
peut relever d’un ou des deux niveaux de gouvernement. Un système intégré capable de réunir ces
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internationaux de ce pays en matière
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que ce soit, àdes
desengagements
fins
de
campagne
ou d’enseignement,
mais
de sensibilisation,
droits humainsdeest
nécessaire.
Il doit aussi être
fondé sur un véritable engagement de toute sa
pas à des fins commerciales. Les titulaires des droits
population, dont les groupes vulnérables, les peuples autochtones et les membres de la société
d’auteur demandent à être informés de toute utilisation de
civile.
Il ne s’est
aucunel’impact.
rencontre
des reproduction
ministres responsables des droits de la personne depuis
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afin tenu
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Toute
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CANADA
RÉSUMÉ ET
RECOMMANDATIONS
publications, ou traduction, ou adaptation nécessitent
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exiger le paiement d’un droit.
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La position qui est souvent prise par le Gouvernement, à l’effet que les droits économiques, sociaux
L’ACCÈS À LA JUSTICE
SOUMIS AU COMITÉ DE
et culturels sont différents de par leur nature même et qu’ils ne sont pas sujets au même degré
L’ONU SUR LES DROITS
d’application judiciaire que les droits civils et politiques, mine les engagements pris par le Canada
dans le cadre du Pacte et, dans les faits, nie tout accès à la justice pour les victimes de violences. Il
ÉCONOMIQUES, SOCIAUX
en résulte que les efforts faits par des groupes de personnes désavantagées pour invoquer les droits
humains internationaux, tels que le droit à un revenu
décent
ou à l’accès aux soins de santé, comme
ET
CULTURELS
base d’interprétation de la Charte et d’autres lois canadiennes, ont rencontré une forte opposition
de la part des avocats du Gouvernement. En dépit des demandes de ce Comité pour que les
gouvernements fédéral, provinciaux et territoriaux incorporent les droits du Pacte à la législation
IÈME économiques, sociaux et culturels n’ont
domestique canadienne, les victimes de violation des
57droits
SESSION, LE 22 FÉVRIER 2016
toujours pas de véritable recours. L’incapacité démontrée par le Canada d’entamer des
consultations en vue de la ratification du Protocole facultatif se rapportant au Pacte international
relatif aux droits économiques, sociaux et culturels illustre les réticences du Gouvernement face au
statut et
à l’importance
de ces droits
la scène internationale.
Amnistie
internationale
est un sur
mouvement
mondial de plus de
8 millions de sympathisants, membres et militants dans plus
de 150 pays et territoires qui font campagne pour mettre fin à
de graves violations des droits humains.
Notre objectif est que chaque personne puisse jouir de tous
les droits enchâssés dans la Déclaration universelle des
droits de l’homme et les autres normes internationales en
matière de droits de la personne.
Nous sommes indépendants de tout gouvernement, de toute
idéologie politique, de tout intérêt économique ou de toute
religion, et nous sommes financés principalement par les
contributions de nos membres et par des dons du public.
CANADA 2
Résumé du document soumis au CDESC de l’ONU - 2016
II. REMARQUES RELATIVES AUX
DISPOSITIONS GÉNÉRALES DU
PACTE
COMMERCE ET RESPONSABILITÉ SOCIALE DES ENTREPRISES
(ART. 1, 7, 11, 12)
Les entreprises minières canadiennes dominent l’industrie au niveau mondial et ont maintenant des
opérations partout dans le monde; elles n’hésitent pas être sur la ligne de front de conflits armés,
de graves violations de droits humains et de cas de pauvreté extrême. De manière générale, les
juges ont soit statué que les causes soumises par les victimes de violations de droits humains
perpétrées par les entreprises devraient être entendues dans le pays où la mine est située plutôt
qu’au Canada, ou ils ont rejeté d’emblée de telles poursuites pour d’autres motifs. Les mécanismes
de griefs extrajudiciaires tels que le Point de contact national du Canada pour l’Organisation de
coopération et de développement économique se sont montrés inefficaces. L’absence de normes
en matière de droits humains pour les entreprises canadiennes est exacerbée par une incapacité
d’ancrer les politiques commerciales canadiennes dans un solide cadre de droits humains. Le
Canada continue à rechercher des ententes bilatérales et multilatérales de libre échange sans
spécifiquement prendre en compte ou respecter l’intégration de ses engagements en matière de
droits humains.
MAXIMUM DE RESSOURCES DSPONIBLES (ART. 2)
De nouvelles mesures d’austérité introduites par la province de Québec et dont la mise en œuvre
est prévue en 2015-2016, ont restreint l’accès aux services publics essentiels et ont eu un impact sur
les droits économiques et sociaux dans cette province. Amnistie internationale est particulièrement
préoccupée par la volonté du gouvernement du Québec de poursuivre ses coupures dans les
dépenses publiques pour les secteurs de la santé, de l’éducation et pour d’autres services, ce qui
affectera de manière disproportionnée les groupes les plus défavorisés et marginalisés de la société
québécoise. Le gouvernement du Québec n’a pas respecté les engagements qu’il avait pris de tenir
compte de l’impact des coupures envisagées sur les groupes vulnérables. Amnistie internationale
constate également que l’impact négatif de ces mesures d’austérité est cumulatif et que des
violations des droits économiques, sociaux et culturels se produisent avec le temps. Les personnes
qui sont déjà confrontées à une discrimination systémique sont également celles qui subissent les
pires conséquences de ces mesures d’austérité; on parle des enfants, des personnes handicapées et
des personnes à faible revenu.
DROITS TERRITORIAUX DES AUTOCHTONES (ART. 1, 6, 11, 12, 15)
Le Canada n’a pas procuré de mécanisme efficace de réparation suite aux violations des droits
miniers et territoriaux des peuples autochtones ou n’a pas fait en sorte que ces derniers puissent
contrôler et profiter des territoires et des ressources qui sont essentiels à leur bien-être économique
et à leur identité culturelle. Ce manquement au respect et au maintien des droits territoriaux des
peuples autochtones peut grandement nuire à leur capacité de jouir du droit à un niveau de vie
décent, à la plus haute norme de santé atteignable, à une participation à la vie culturelle de leur
communauté, et à gagner leur vie par la poursuite d’occupations traditionnelles telles que la chasse,
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CANADA
Résumé du document soumis au CDESC de l’ONU 2016
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la trappe et la pêche. Les Premières nations, les Inuits et les Métis subissent également une
pression croissante à cause des grands projets d’exploitation des ressources et du développement
des infrastructures qui lui est associé sur ou à proximité de leurs territoires ancestraux. Les
arguments du Gouvernement à l’effet que ces projets vont créer de nouveaux emplois ne tiennent
pas compte de leur impact potentiel sur les occupations traditionnelles des peuples autochtones,
qui représentent encore une source importante de nourriture et de revenu pour des personnes qui,
autrement, vivent en marge de l’économie canadienne.
L’ÉDUCATION DES ENFANTS AUTOCHTONES (ART. 2, 13, 14)
Les écoles situées dans les réserves des Première nations souffrent d’un sous-financement
significatif de la part du gouvernement fédéral, si on compare avec le financement provincial que
reçoivent les écoles situées dans des communautés à prédominance non autochtone. Le Centre
canadien de politiques alternatives a évalué à plus 3 G$ le manque de financement accumulé entre
1996 et 2014. Le financement inadéquat et inéquitable des écoles des Premières nations constitue
l’une des causes directes du taux de réussite scolaire moindre et a privé les étudiants des Premières
nations de la formation en compétences langagières et culturelles requises pour réparer les torts
causés par des politiques coloniales et des programmes comme le système des pensionnats.
III. REMARQUES RELATIVES À
CERTAINES DISPOSITIONS DU
PACTE
PROTECTIONS INADÉQUATES POUR LES TRAVAILLEURS
DOMESTIQUES MIGRANTS (ART. 7)
Les travailleurs migrants sont souvent amenés au Canada d’une façon qui les expose à l’exploitation
et à une variété de violations de droits humains; ils rencontrent également des obstacles pour
accéder au système de justice et obtenir une véritable réparation. À leur arrivée, ces travailleurs
n’osent pas faire valoir leurs droits, car ils craignent que cela puisse leur faire perdre leur emploi. Les
travailleurs migrants embauchés comme aides familiaux résidants sont particulièrement exposés
aux abus, car la plupart sont des femmes. Aucune juridiction canadienne n’a adopté de lois visant
spécifiquement à les protéger de l’exploitation. Les migrants qui travaillent comme aides
domestiques viennent au Canada avec un permis de travail qui ne leur permet de travailler que pour
l’employeur identifié sur le document. Travailler pour quelqu’un d’autre est considéré comme illégal
et pourrait entrainer leur déportation. Il en résulte que les travailleurs migrants ne peuvent changer
d’emploi sans risquer de perdre leurs revenus et il arrive qu’ils conservent des emplois dans lesquels
on abuse d’eux, croyant qu’ils n’ont pas d’autre choix. Les abus peuvent être physiques, verbaux,
psychologiques, sociaux ou financiers. Des modifications au Programme d’aides familiaux résidants
(PAFR) introduites en 2014, n’ont pas fondamentalement modifié les dispositions problématiques
qui exposent les migrants travailleurs domestiques à l’exploitation et aux abus.
LE REFUS D’AIDE SOCIALE (ART. 2, 9, 11)
En avril 2014, un député membre du Gouvernement a présenté le projet de Loi C-585, Une Loi
modifiant la Loi sur les arrangements fiscaux entre le gouvernement fédéral et les provinces (période de
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résidence), qui autorise les provinces à réduire l’accès à l’aide sociale pour les demandeurs d’asile et
les autres personnes n’ayant pas de statut permanent au Canada, en imposant une exigence de
résidence minimum dans la province avant de permettre à ces personnes de faire une demande de
prestations. Le 23 octobre 2014, les mêmes dispositions ont été incorporées au projet de Loi C-43,
un projet de loi budgétaire omnibus du Gouvernement qui a reçu la sanction royale et qui est
devenu loi du 16 décembre 2014. Cette nouvelle loi a été largement décriée par des groupes de
réfugiés et de droits humains partout au Canada, car elle permet aux provinces de refuser toute
aide sociale à certaines des personnes les plus vulnérables.
LA VIOLENCE ENVERS LES FEMMES ET LES FILLES
AUTOCHTONES (ART. 2, 10, 12)
Les femmes et les filles autochtones au Canada sont davantage exposées à la violence, incluant le
meurtre, que d’autres femmes et filles dans ce pays. Ce risque prend racine dans la marginalisation
sociale et économique à laquelle sont soumises les femmes et les filles autochtones dans la société
canadienne. Il n’existe pas encore de statistiques sur le nombre de morts suspectes de femmes et
de filles autochtones, ni de rapport en cours sur les femmes et les filles autochtones disparues. Il n’y
a pas non plus de procédures à l’échelle nationale et très peu de formation pour faire en sorte que
les services de police puissent enregistrer l’identité autochtone des victimes de crimes. Des experts,
des agences de l’ONU ainsi que des organisations de femmes autochtones dans tout le pays ont
insisté à maintes reprises sur la nécessité d’une réplique à la violence faite aux femmes et aux filles
autochtones, qui soit entière, coordonnée, financée adéquatement, et qui soit à la hauteur de
l’importance et de la gravité de cette violence. Des consultations sont en cours en vue de la tenue
d’une enquête publique sur les femmes autochtones disparues et assassinées, dont le lancement
est prévu plus tard cette année.
LA VIOLENCE FAITE AUX FEMMES (ART. 2, 10, 12)
Il y a eu peu ou pas de progrès dans la réduction de la violence faite aux femmes et aux filles au
Canada. Un rapport récent fait état d’une augmentation de 2,4 % chez les adultes, des taux de
violence physique et sexuelle envers les femmes, alors que peu de ces crimes sont signalés à la
police. L’étude a montré que « bon an mal an, plus de 8 256 femmes et enfants se réfugient dans un
abri ou une maison de transition ». Au cours d’importants forums de l’ONU sur la violence faite aux
femmes, le Canada a également souvent sapé les efforts de protection des droits sexuels et
reproductifs dans d’autres pays.
LA DISCRIMINATION ENVERS LES ENFANTS DES PREMIÈRES
NATIONS (ART. 2, 9, 10)
Le gouvernement fédéral a la responsabilité de financer les services sur les réserves des Premières
nations et au Yukon; ces services, dans le cas d’autres communautés, seraient en général financés
par les gouvernements provinciaux et territoriaux. Le financement, par le gouvernement fédéral,
des services aux enfants et aux familles dans les réserves des Premières nations et au Yukon est
cependant d’au moins 22 % inférieur, par enfant, à que ce qui est alloué par les gouvernements
provinciaux aux services de protection de l’enfance dans d’autres communautés à prédominance
non autochtone. Ceci en dépit des plus grands besoins et des coûts plus élevés pour la prestation de
services dans des petites communautés isolées des Premières nations. Ce continuel sousfinancement a restreint les services disponibles pour les enfants et la famille dans plusieurs
communautés des Premières nations, à un point tel que le retrait des enfants de leur famille — une
mesure de dernier recours — a trop souvent été la seule option disponible lorsque les familles sont
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incapables de fournir des soins adéquats. Une décision du Tribunal canadien des droits de la
personne, rendue en janvier 2016, a demandé au Canada de régler ce problème de sousfinancement discriminatoire.
LA SÉCURITÉ ALIMENTAIRE (ART. 2, 11)
En 2012, Olivier De Schutter, le rapporteur spécial de l’ONU sur le droit à l’alimentation, a exprimé
de sérieuses inquiétudes au sujet de l'étendue et de la gravité de la faim et de l’insécurité
alimentaire au Canada. En réaction à cela, des représentants du gouvernement précédent ont émis,
dans un esprit de dérision, des critiques très acerbes à la Chambre des communes et dans les
médias, sur la pertinence d’enquêter sur des questions relatives au droit à la nourriture dans un pays
riche comme le Canada, plutôt que de se concentrer sur les pays en voie de développement. Cette
absence d’attention portée aux conclusions du rapporteur spécial par le précédent gouvernement,
se situe exactement dans la lignée du manque de progrès réalisés en vue de régler le problème
d’insécurité alimentaire dans ce pays. En dépit de la richesse et de l’abondance des ressources du
pays, un ménage canadien sur huit a de la difficulté à se nourrir; près de 375 000 personnes, en
Ontario seulement, ont recours aux banques alimentaires à tous les mois; enfin, un pourcentage
effarant (62 %) des enfants vivant dans le nord du pays (le Yukon, les Territoires du Nord-Ouest et
le Nunavut) vivent dans l’insécurité alimentaire. Un rapport publié en octobre 2015, indique que
l’insécurité alimentaire a « augmenté de manière significative » dans des villes importantes comme
Halifax, Montréal et Calgary.
L’ABSENCE D’UNE STRATÉGIE NATIONALE POUR LE LOGEMENT
(ART. 11)
En 2006, ce Comité a recommandé que le Canada « s’attaque au problème des sans-abri et de la
qualité du logement, car ce problème constitue une urgence nationale ». Il a mis l’accent sur la
responsabilité des cours de justice, de tenir compte des engagements du Canada en matière de
droits humains dans leur interprétation de la Charte canadienne des droits, et il a exhorté le
Gouvernement d’élaborer et de mettre en place une stratégie de réduction du nombre des sansabri. Des gouvernements successifs ont refusé avec ténacité d’adopter une stratégie du logement
basée sur les droits de la personne. En février 2013, le précédent gouvernement s’est opposé à un
projet de loi d’initiative parlementaire et l’a défait; ce projet de loi demandait au ministre
responsable de la Société canadienne d’hypothèque et de logement « d’établir une stratégie
nationale du logement destinée à respecter, protéger, promouvoir et atteindre le droit à un
logement convenable tel que garanti par les traités de droits humains ratifiés par le Canada ». Le
nouveau gouvernement promettait, dans son programme, de développer une stratégie nationale
du logement.
UNE ÉDUCATION INCLUSIVE POUR LES ENFANTS HANDICAPÉS
(ART. 2, 13, 14)
Il n’existe aucune législation fédérale canadienne protégeant le droit des enfants handicapés à une
éducation inclusive, parce que l’éducation est une juridiction des provinces et des territoires. Bien
que chaque province et territoire possède une forme de politique d’éducation inclusive, ces
politiques varient beaucoup dans leur façon de définir l’inclusion et comment elles l’appliquent
concrètement. Cette disparité des politiques et des pratiques, et le fait que plusieurs écoles ne
respectent pas les normes internationales, contribuent à diminuer les perspectives d’avenir en
éducation et en emploi des enfants handicapés et, dans certains cas, peuvent mener à de l’abus.
Une enquête de 2013, en Colombie-Britannique, a révélé que le recours à des moyens de contention
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et de réclusion dans les écoles, est répandu; on y rapporte que des enfants handicapés, lorsqu’ils
étaient jugés dissipés, étaient retenus dans des espaces restreints — comme des placards et des
cages d’escalier — pour des périodes pouvant aller jusqu’à trois heures. De plus, l’évaluation des
élèves en classe était réalisée sur une base normative par rapport à la majorité, ce qui va à
l’encontre d’une éducation inclusive.
IV. REMARQUES
SUPPLÉMENTAIRES
L’ACCÈS À L’EAU (ART. 2, 11, 12)
On estime que 20 000 personnes des Premières Nations vivant sur des réserves partout au Canada
n’ont pas accès à de l’eau courante ou à un service d’égout. Bon an mal an, plus d’une centaine des
communautés disposant d’eau courante sont sous le coup d’un avis d’ébullition ou de nonconsommation, à cause de défectuosités de leur système de traitement d’eau. En 2006, un panel
d’experts nommés par le gouvernement fédéral a conclu que les problèmes relatifs à l’eau potable
dans les communautés des Premières Nations résultaient principalement d’un sous-financement de
la part du gouvernement fédéral. Le panel a exhorté le gouvernement à fournir les ressources
nécessaires « afin que l’eau potable et les rejets d’égouts chez les Premières Nations soient de
qualité au moins égale que celle des communautés similaires et que les systèmes soient opérés et
maintenus convenablement ». Plutôt que d’agir, suite aux préoccupations du panel, le Canada a
adopté une nouvelle législation en 2013, accordant au gouvernement fédéral le pouvoir unilatéral
de ne pas tenir compte des droits constitutionnels acquis par les peuples autochtones — dont le
droit à l’autonomie gouvernementale établi dans des traités et autres ententes — dans le but de
règlementer les systèmes d’eau des Premières Nations.
DISCRIMINATION SUR LA BASE DE L’IDENTITÉ SEXUELLE (ART. 2)
Les personnes transgenres risquent davantage d’être assassinées et agressées; elles sont aussi plus
exposées à d’autres crimes haineux ou à des violations de droits humains. Elles font également face
à une discrimination généralisée pour ce qui est de l’emploi, du logement et d’autres droits
essentiels. L’impact est dévastateur. On retrouve chez ces personnes, les niveaux les plus élevés de
dépression et de suicide de tous les groupes de la société. Une réforme de la loi est l’une des
mesures nécessaires pour une meilleure protection des droits des personnes transgenres. Il y a eu,
au cours de la dernière décennie, quatre tentatives, via un projet de loi à initiative parlementaire,
pour renforcer la protection légale des personnes transgenres. La dernière en date, le projet de Loi
C-279, a été acceptée par la Chambre des communes, mais a été bloquée au Sénat suite à une
opposition de la part d’un certain nombre de sénateurs nommés par le précédent gouvernement.
Le projet de Loi n’a pas pu être accepté avant la fin de la dernière session du Parlement, en juin
2015. Cette loi aurait ajouté l’identité sexuelle aux motifs de discrimination prohibés par la Loi
canadienne sur les droits de la personne, tout comme aux dispositions relatives aux crimes haineux
du code criminel. Le Gouvernement s’est engagé à proposer une nouvelle législation.
LA SANTÉ DES RÉFUGIÉS ET DES MIGRANTS (ART. 2, 12)
En 2012, le précédent gouvernement a effectué des coupures considérables dans les programmes
de financement des soins de santé pour les demandeurs d’asile et les réfugiés. Ces coupures ont
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créé un nouveau système de santé à plusieurs vitesses pour les personnes ayant besoin de
protection au Canada. Les demandeurs d’asile n’ont plus accès à des médicaments qui souvent
peuvent leur sauver la vie, tels que l’insuline, par exemple, pour le traitement du diabète juvénile. La
protection pour les soins de santé a été réduite aux soins « urgents ou essentiels » et ne s’applique
plus aux traitements considérés comme étant de nature préventive. En décembre 2015, le nouveau
gouvernement a déclaré qu’il annulerait les coupures dans le programme. Cependant, le Canada
refuse toujours de fournir des soins aux migrants sans papiers. Le Comité des droits de l’homme de
l’ONU, lors de son examen du Canada en août 2015, a demandé au Canada de faire en sorte que
tous les demandeurs d’asile et les migrants en situation irrégulière puissent bénéficier des soins de
santé essentiels peu importe leur statut.
EMPRISONNEMENT EN CELLULE D’ISOLEMENT
L’emprisonnement en isolement est une pratique courante au Canada comme « moyen courant
pour contrôler les populations carcérales et maintenir la sécurité dans les institutions». Bon an mal
an, environ 850 des 14 700 détenus dans les pénitenciers fédéraux sont en isolement. Il se peut
même que cette proportion soit plus élevée dans les prisons provinciales. Selon les données du
Service correctionnel du Canada, la durée moyenne des séjours en isolement entre 2006 et 2011
était de 40 jours, et 13 % des détenus y demeuraient plus de 4 mois. Au mois d’août 2015, le Comité
des droits de l’homme de l’ONU a demandé au Canada de « ne véritablement recourir à l’utilisation
de l’isolement à des fins administratives ou disciplinaires qu’en dernier recours et pour le moins
longtemps possible, et d’éviter ce mode de détention pour les détenus souffrant de graves troubles
mentaux ».
LA DESTRUCTION ENVIRONNEMENTALE À GRASSY NARROWS
(ART. 1, 11, 12, 15)
Les rivières et les lacs qui sont d’une importance vitale pour la culture et l’économie des Premières
nations du nord-ouest de l’Ontario ont été sérieusement contaminés par un moulin de pâtes et
papier qui a déversé approximativement neuf tonnes métriques de mercure dans les rivières au
cours des années 60. Malgré de graves problèmes de santé, découverts au début chez des pêcheurs
des Premières nations ainsi que chez des guides et leurs familles, les gouvernements fédéral et
provinciaux n’ont jamais admis officiellement qu’un empoisonnement au mercure s’était produit ou
qu’il y ait eu un impact direct grave sur la santé et le bien-être des communautés. L’aide fournie par
les gouvernements fédéral et provincial s’est avérée insuffisante pour garantir une compensation
ou un traitement adéquat pour les victimes d’empoisonnement au mercure ou pour véritablement
réduire les risques reliés à une exposition continue.
L’ABANDON DE LA COMMUNAUTÉ DE SHOAL LAKE NO 40 (ART.
2, 6, 11, 12, 13)
Il y a cent ans, la communauté de Shoal Lake no 40 était relocalisée dans le cadre du
développement du système d’approvisionnement en eau de la ville de Winnipeg. En raison de ce
projet, les terres ont été inondées et la communauté a été isolée de la terre ferme. Les eaux pures
de Shoal Lake ont été détournées pour approvisionner les résidents de Winnipeg, alors que la
communauté de Shoal Lake no 40 a été privée d’eau potable. Ses résidents vivent depuis presque
vingt ans sous le coup d’un avis d’ébullition de l’eau. La communauté est coupée de plusieurs
besoins vitaux, qu’il s’agisse d’emploi, de magasins d’alimentation ou des soins de santé sur la terre
ferme.
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V. RECOMMANDATIONS
Voici les recommandations qu’Amnistie internationale adresse au gouvernement du Canada :
MISE EN APPLICATION DES ENGAGEMENTS PRIS EN MATIÈRE
DE DROITS HUMAINS
Convoquer périodiquement des rencontres des ministres responsables des droits de la
personne aux niveaux fédéral, provincial et territorial, et entreprendre un processus de révision et
de réforme des lois, des politiques et des institutions qui garantisse une mise en application
efficace, transparente et politiquement responsable des obligations internationales du Canada en
matière de droits humains;

Reconnaître l’aspect indivisible des droits de la personne et se conformer à ses obligations
internationales en matière de droits économiques, sociaux et culturels dans l’interprétation et
l’application de la Charte des droits et libertés;

Cesser de faire valoir devant les tribunaux que les droits économiques, sociaux et culturels sont
incompatibles avec l’application des lois, et s’engager à réviser la législation en matière de droits
humains et autres pour faire en sorte que les droits associés au Pacte soient sujet à des réparations
pertinentes et accessibles dans toutes les juridictions;

Ratifier le Protocole facultatif se rapportant au Pacte international relatif aux droits
économiques, sociaux et culturels.

LES PEUPLES AUTOCHTONES
Faire en sorte que les positions adoptées par le Gouvernement lors de négociations ou de
litiges relatifs à des conflits territoriaux autochtones soient en accord avec l’obligation de respecter,
protéger et appliquer les droits des peuples autochtones dans le cadre du droit canadien et
international;

Reconnaître le droit à un consentement éclairé, libre et préalable (CELP) pour les peuples
autochtones, et introduire cette notion de CELP dans l’ensemble de la législation, des politiques et
des pratiques relatives à l’industrie minière, au pays comme à l’étranger;

Rejeter ou résilier les projets impliquant la possibilité de nuire de manière significative aux
droits des peuples autochtones dans les dossiers où ce consentement n’a pas été accordé;

Prendre des mesures immédiates pour éradiquer les inégalités dans le financement de
l’éducation des enfants et des jeunes sur les réserves des Premières nations, et faire en sorte que les
niveaux de financement tiennent compte de la culture et des situations particulières des enfants
des Premières nations;

Collaborer avec les Premières nations en vue de favoriser des systèmes d’éducation sur les
réserves, qui soient dans le meilleur intérêt de l’enfant, qui protègent et réhabilitent les langues et
les cultures autochtones, et qui respectent les droits accordés par traité ainsi que le droit inhérent à
l’autonomie gouvernementale et à l’autodétermination;

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Travailler avec les Premières nations à combler le sous-financement des services aux enfants et
aux familles, procurer un niveau de financement qui tienne compte des besoins et de la situation
des communautés des Premières nations, et assurer un accès équitable à des programmes adaptés
à la culture et des services d’aide au sein des familles et des communautés;

Faire en sorte que les traités et les droits autochtones pour la récolte d’aliments sauvages
soient reconnus et protégés, et que la sécurité alimentaire des peuples autochtones soit prioritaire
lors de la prise de décisions pour le développement;

Collaborer avec les Premières nations pour s’assurer que leurs communautés ont accès à de
l’eau potable et à des services d’égout convenables, ce qui inclut un financement adéquat et
soutenu pour ces services;

Amender la Loi sur la salubrité de l’eau potable des Premières nations pour garantir le respect du
droit à l’autonomie gouvernementale des Premières nations pour la gestion de leurs systèmes
d’eau; assurer la réalisation opportune de son engagement de soutenir la construction d’une route
quatre saisons menant à la Première nation Shoal Lake no 40; mettre en œuvre, en collaboration
avec cette Première nation, toute les mesures nécessaires pour assurer un transport sécuritaire,
tout au long de l’année, à partir ou en direction de la communauté, et fournir à Shoal Lake no 40 un
accès à une eau de consommation propre et sécuritaire;

Garantir une compensation et un traitement adéquats pour les victimes d’empoisonnement au
mercure de Grassy Narrows et des Premières nations voisines; prendre des mesures pour réduire de
manière efficace les risques associés à une exposition continuelle au mercure, et travailler avec la
communauté à la réalisation d’une étude de santé visant à identifier ses besoins;

S’abstenir de donner des permis d’exploitation forestière sur le territoire traditionnel de Grassy
Narrows sans le consentement éclairé, libre et préalable de cette Première nation;

Interrompre la construction du barrage du Site C et s’engager à garantir que le projet ne
reprendra pas tant et aussi longtemps que les peuples autochtones n’auront pas donné un
consentement éclairé, libre et préalable.

L’ÉGALITÉ DES SEXES
Élaborer un plan d’action national complet pour combattre la violence faite aux femmes et aux
filles dans ce pays;

Faire en sorte que l’enquête publique indépendante sur les femmes et les filles disparues et
assassinées examine les questions de diligence raisonnable, de discrimination systémique et
d’accès à la justice pour toutes les juridictions au Canada, et qu’elle conduise à l’adoption d’un plan
d’action complet pour agir sur les facteurs sociaux et économiques qui placent les femmes et les
filles autochtones dans une position de risque; s’assurer d’un comportement approprié et impartial
de la part des policiers et du système de justice;

Prendre des dispositions immédiates pour enfin mettre en application les recommandations
des agences de l’ONU qui sont responsables des droits humains et d’autres dossiers, afin de lutter
contre les violations des droits de la personne — tant celles qui sont urgentes que celles qui
sévissent depuis longtemps — relatives à la violence et à la discrimination envers les femmes et les

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filles autochtones, incluant un financement accru pour les maisons d’hébergement pour femmes et
une aide aux communautés autochtones;
Accroître et augmenter la collecte de données sur les incidents de violence contre les femmes
et les filles au Canada;

Faire en sorte que toutes les provinces enquêtent sur les conséquences, du point de vue de
l’égalité des sexes, des politiques de financement élaborées dans les budgets annuels; qu’elles
enquêtent également sur l’étendue de l’impact disproportionné que les politiques d’austérité ont
sur les femmes; procéder à des révisions là où cet effet contribue à perpétuer une discrimination
systématique envers les femmes;

Amender la position du Canada en matière de politique étrangère de façon à ce qu’elle
soutienne les normes en matière de droits sexuels et reproductifs, et que le pays finance des
services d’avortement sécuritaire aux victimes survivantes de violences sexuelles, dans le cadre de
son aide au développement outremer;

Adopter une législation qui ajoute l’identité et l’expression sexuelles à la liste des motifs de
discrimination de la Loi canadienne sur les droits de la personne et des dispositions du Code criminel
en matière de crimes haineux.

LES MIGRANTS ET LES RÉFUGIÉS
Respecter l’engagement de rétablir le Programme fédéral de santé intérimaire pour les
demandeurs d’asile et les réfugiés au Canada;

Garantir un accès égal aux soins de santé essentiels pour toutes les personnes au Canada,
incluant les migrants en situation irrégulière, sans égard à leur statut d’immigrant;

Permettre aux migrants qui sont travailleurs domestiques de changer librement d’employeur
en offrant des permis de travail ouverts, améliorant ainsi les conditions de vie et de travail, et les
rendant moins vulnérables aux abus;

Procurer un cheminement assuré vers la résidence permanente, comprenant des
prolongements raisonnables des visas temporaires, pour les migrants qui sont des travailleurs
domestiques;

Faire en sorte que les migrants qui sont des travailleurs domestiques et qui souffrent de
violations de droits humains, aient un véritable accès à la justice, dont l’aide juridique.

LES PERSONNES HANDICAPÉES
Faire en sorte que les politiques d’éducation dans toutes les provinces interdisent le recours à
la contention, à la réclusion et aux interventions punitives;

Accorder la priorité aux évaluations inclusives qui tiennent compte des différents besoins de
l’ensemble des étudiants, dont les étudiants handicapés;


Fournir aux professeurs l’expertise et les ressources suffisantes pour permettre aux enfants
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handicapés et à leurs familles de bénéficier d’une aide adéquate autant à l’intérieur qu’à l’extérieur
de la classe.
DROITS HUMAINS ET COMMERCE
Adopter des lois garantissant l’accès aux tribunaux du pays aux victimes de violations des
droits humains résultant d’opérations outremer de sociétés minières canadiennes;

Créer un poste de médiateur pour le secteur de l’extraction, qui aura un pouvoir d’enquête
indépendante, suite aux plaintes de violations des droits humains, et un pouvoir de
recommandation;

Mettre en place des réformes, des politiques et une législation afin que les entreprises
domiciliées ou ayant leur siège social au Canada prêtent une attention particulière aux droits
humains dans toutes leurs opérations à l’échelle mondiale;

Mettre en place une politique garantissant que toutes les transactions commerciales — avant
d’être conclues et à des intervalles réguliers par la suite — soient assujetties à des évaluations
d’impact sur les droits humains, qui soient complètes et indépendantes.

LES DÉTENUS
Mettre fin à cette pratique canadienne d’emprisonnement en cellule d’isolement; ne l’utiliser
qu’en dernier recours et pour des périodes les plus courtes possibles; interdire son utilisation pour
les enfants et les personnes souffrant de maladie mentale; enfin, garantir une possibilité de révision
judiciaire.

REVENUS SUFFISANTS
Réaliser ses engagements d’élaborer une stratégie nationale du logement destinée au respect,
à la protection, à la promotion et à la réalisation du droit à un logement convenable, et accorder la
priorité à la crise du logement;

Mettre en place, à l’échelle nationale, une stratégie alimentaire complète fondée sur les droits
humains, après consultation avec la société civile, pour lutter contre l’insécurité alimentaire; cette
stratégie garantirait la priorité aux groupes qui sont victimes de discrimination et les protègerait
des obstacles qui bloquent leur accès à la nourriture;

Abroger le projet de Loi C-43 et faire en sorte que toutes les personnes recherchant la
protection du Canada, reçoivent des prestations de sécurité sociales adéquates;

Promouvoir une pratique par laquelle tous les gouvernements du Canada — fédéral,
provinciaux et territoriaux — évaluent les coupures budgétaires afin de s’assurer de se conformer au
Pacte;

Faire en sorte que le gouvernement du Québec examine l’impact disproportionné de ses
mesures d’austérité sur les groupes défavorisés et marginalisés, qu’il révise son budget 2015-2016
en conséquence pour s’assurer que de tels groupes aient la priorité et qu’ils soient protégés contre
toutes mesures rétrogrades, et qu’il n’y ait aucune discrimination systématique dans les secteurs de
l’accès à l’éducation, de la santé et des autres services publiques, partout dans la province.
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